Séminaire mensuel

CEHEC

Quatre séminaires GEOM pontueront, dans le cadre du module "Identités européennes et mondes contemporains" de l'école doctorale Histoire - Histoire de l'Art du FRS-FNRS, l'année académique 2010-1011. Ces séminaires auront lieu le jeudi en parallèle à ceux du CEHEC qui se tiennent le mardi. Ils permetteront d'entendre l'exposé d'un jeune chercheur ou d'un expert confirmé et d'en débattre.

Les séances ont lieu à 17h30 au local C228 (Collège Érasme, Place Blaise Pascal n° 1 à Louvain-la-Neuve).

Quadrimestre 2

Jeudi 17 février 2011 - Jean-Paul Sanderson: "La population congolaise pendant la colonisation. Essai de démographie coloniale".

nombreux comparativement aux travaux sur d’autres thèmes de l’histoire africaine ou aux travaux sur la démographie africaine contemporaine : en cause, principalement, l’absence ou la rareté des sources de données. Pourtant l’enjeu n’est pas neutre. La démographie permet notamment d’aborder l’histoire coloniale sous l’angle de ses conséquences pour les populations colonisées. Un aspect d’autant plus important que les premières étapes de la colonisation sont extrêmement violentes.

Dans la littérature récente, le sujet fait encore débat et des chiffres sont parfois avancés sans véritable justification. Ainsi, certains auteurs affirment que la population congolaise aurait diminué de moitié de 1885 à 1920, passant de 20-25 millions en 1885 à 10 millions en 1920. L'objectif principal de cette recherche était de procéder à une reconstitution de l’évolution de la population du Congo sous le régime colonial depuis 1885 jusqu’en 1955. Une première exploitation des données a été menée afin de reconstituer les niveaux de mortalité ; enfin, à partir de ces éléments, un ensemble d’hypothèse ont été formulées en vue de la réalisation d’une rétro-projection qui a permis d’esquisser l’évolution de la population congolaise de 1955 à 1885. Le résultat de ce travail est moins de proposer un résultat définitif que de tenter d'identifier les passés possibles ou impossibles. Dans ce contexte, les scénarios les plus sévères se révèlent irréalistes.

Jean-Paul Sanderson est chercheur en démographie au Centre de recherche en démographie et sociétés de l’UCL. Docteur en démographie et licencié en histoire, il a enseigné à l’Institut de formation et de recherche en démographie (IFORD) à l’Université de Yaoundé II au Cameroun et au Centre de formation et de recherche en population (CEFORP) à l’Université d’abomey-Cavali au Bénin. Ses thèmes de recherche sont : démographie historique (congolaise et belge), démographie et inégalités, migrations internes, démographie locale.

Jeudi 31 mars 2011 - Anne Cornet et Florence Gillet: "Analyse critique de la photographie à travers les images du Congo entre 1955 et 1965".

A une époque où l’image est devenue omniprésente, où tout est désormais filmé et diffusé par tous et partout dans le monde, il est important de se rappeler que la photographie influence considérablement notre lecture du réel. Elle le représente et le reconstruit en fonction de la sensibilité et des objectifs du photographe, ainsi qu’en fonction du contexte sociopolitique et culturel dans lequel elle s’inscrit.

En 1960, le Congo met fin à plus d’un demi-siècle de domination coloniale. Aujourd’hui encore, dans l’ancienne métropole comme dans l’ex-colonie, des représentations subsistent sur la colonie et le jeune Etat indépendant qui lui a succédé. Parmi les nombreux outils utilisés par la machine de propagande coloniale, la photographie a fortement contribué à modeler la mémoire collective. Alors que durant le régime colonial, la propagande vise à démontrer la normalité de la domination occidentale, proposant une image idéalisée du Congo, dès le lendemain de l’indépendance, la presse internationale devient la principale fenêtre qui s’ouvre sur la réalité congolaise, proposant des clichés accrocheurs, chargés de drame et d’émotion. De ce contraste fondamental émerge une représentation du Congo qui marque les imaginaires jusqu’à nos jours : celui d’un pays bien tenu, harmonieux, Eldorado aux couleurs de paradis, qui bascule du jour au lendemain dans le désordre, la violence et la survie.

L’approche historienne de la photographie permet de décrypter les divers facteurs d’influence et d’objectiver, autant que possible, la lecture des images. En effet, de la même manière que le monde ne correspond pas toujours à l’image photographiée, de nombreux filtres interviennent entre la réalité, nos perceptions et les images que nous fabriquons. Ce séminaire propose d’aborder l’analyse iconographique à travers la production photographique du Congo entre 1955 et 1965. Nous verrons comment une approche critique des images permet d’envisager les archives photographiques avec un œil nouveau, entraînant par la même occasion un questionnement sur notre façon d’envisager le passé.

Anne Cornet est docteur en histoire de l’Université catholique de Louvain, lauréate de l’Académie royale des Sciences d’Outre-mer et chercheuse spécialisée en histoire coloniale au Centre d’études et de documentation guerre et sociétés contemporaines (Ceges).

Florence Gillet est licenciée en histoire de l’Université libre de Bruxelles. Elle gère le secteur « Images et sons » du Ceges, après avoir travaillé sur le cinéaste André Cauvin et sur la mémoire sociale des anciens coloniaux.

Elles viennent toutes les deux de publier l’ouvrage suivant : Congo-Belgique, 1955-1965. Entre propagande et réalité, Bruxelles, La Renaissance du Livre/CEGES, 2010,156 p.

Quadrimestre 1

Jeudi 28 octobre 2010 – Robert Bodson et Prof. Patricia Van Schuylenbergh : « Réalités Congolaises, une étude de cas sur le film colonial comme source pour l'historien ».

Réalités Congolaises est un court-métrage (28 min) dont les prises de vues ont été filmées lors du périple congolais de R. Bodson en 1953-1954. Le but du réalisateur est de répondre aux questions qu’il a rencontrées lors de ses conférences et de « faire connaître le Congo réel ». Témoignage personnel mais également révélateur de l’esprit d’une époque, il expose une certaine vision de la colonisation belge.

Proposé mais refusé par le Centre d’information du Congo, le documentaire est monté par R. Bodson lui-même. Visionné par le ministre des Colonies Buisseret ensuite par le roi Beaudouin grâce à Léopold III, Réalités congolaises est recommandé par le souverain et le film est finalement racheté par le Centre d’information du Congo. Édité dans cinq langues (français, néerlandais, allemand, anglais et espagnol), des exemplaires sont envoyés à l’ONU et aux ambassades. L’association « Mémoires du Congo » le réédite sous le format d’un dvd plurilingue en 2005.

Robert Bodson est gradué en sciences commerciales Il a travaillé pour une entreprise commerciale au Congo avant de poursuivre ses études en marketing à l’Université de New York. Il entreprend ensuite un cycle de conférences sur le Congo à travers les Etats-Unis et remet un rapport aux autorités belges. Celles-ci le chargent d’une tournée au Congo pour informer les gouverneurs de province et le public sur l’opinion à l’étranger de la politique coloniale belge. Il poursuit sa carrière dans le monde des affaires. Il occupe notamment les postes de vice-président marketing de Tupperware Europe, d’administrateur délégué de Vlaamse Tapijt weverij et directeur aux relations extérieures d’European business innovations centers network. Cinéaste amateur, il a réalisé trois films : Réalités Congolaises, Industrie belge du lin et Productions des couvercles Tupperware.

Patricia van Schuylenbergh est docteur en histoire et porteuse d’un DES de l’Institut d’Études des Pays en Développement. Chef de travaux à la section Histoire de la période coloniale du Musée royal de l’Afrique centrale à Tervuren et professeur d’histoire de l’Afrique sub-saharienne à l’UCL, elle combine recherche scientifique, valorisation scientifique des collections audiovisuelles et d’archives et expertise dans le domaine public (expositions, formations pédagogiques, encadrement de stagiaires, appui aux visiteurs). Dans le domaine de l’histoire coloniale, ses thèmes de recherche portent en particulier sur l’histoire environnementale en Afrique centrale (protection de la nature, exploitation des ressources naturelles), l’histoire des sciences naturelles, des représentations visuelles et audiovisuelles, du cinéma colonial ainsi que sur la mémoire sociale des anciens coloniaux. Elle a participé à la production du coffret dvd Belgisch Congo Belge, fruit d’un partenariat entre le MRAC et la Cinémathèque et a dirigé l’ouvrage Patrimoine d’Afrique centrale. Archives Films (Congo, Rwanda, Burundi, 1912-1960), édité en 2010 par le MRAC.

Jeudi 2 décembre 2010 - Gauthier de Villers: «Le CRISP, Benoît Verhaegen et l'Histoire du Temps présent au Congo-Kinshasa».

Nombreuses publications aujourd’hui, dont les auteurs sont plus souvent des politologues ou sociologues que des historiens, sur des événements ou séquences d’événements récents au Congo-Kinshasa, qui s’inscrivent donc dans le champ de l’écriture de l’histoire du temps présent. C’est le secteur africain du CRISP qui a initié cette discipline au Congo dans la période de l’indépendance. On analysera sa démarche et ses contributions, en s’attardant spécialement sur l’apport de Benoît Verhaegen qui, dans le cadre du CRISP, a développé une approche conceptuelle et méthodologique spécifique, à laquelle il a donné le nom d’« histoire immédiate ». On évoquera enfin l’héritage documentaire laissé par le secteur africain du CRISP et Benoît Verhaegen.

Gauthier de Villers est docteur en droit (ancien régime) et docteur en sociologie de l’Université catholique de Louvain.. Il est également collaborateur scientifique du Musée royal de l’Afrique centrale (MRAC) à Tervuren. Il était, avant son accession à la retraite, chef de la section d’Histoire du Temps présent du MRAC, et chargé de cours à l’UCL. Auparavant :il était directeur de l’Institut africain et du Centre d’études et de documentation africaines (CEDAF).

Principaux champs de recherche et de publication :

1. Histoire et sociologie politiques : de l’Algérie à l’époque du président Boumediene ; du Congo/Zaïre à partir surtout de l’ouverture de la « transition » en 1990.

2. Évolution des relations entre la Belgique et le Congo.

3. Processus d’« informalisation » de l’État et de la société au Congo et en Afrique.

Principaux ouvrages :

L’Etat démiurge. Le cas algérien, Paris, L’Harmattan, 1987.

De Mobutu à Mobutu. Trente ans de relations Belgique-Zaïre, Bruxelles, De Boeck Université, coll. Pol-His, 1995.

(sous la direction de) Phénomènes informels et dynamiques culturelles au Zaïre et en Afrique, Bruxelles – Institut africain/CEDAF, Paris – L’Harmattan, « Cahiers africains », n° 19-20, 1996.

République démocratique du Congo. De la guerre aux élections. L’ascension de Joseph Kabila et la naissance de la Troisième République (janvier 2001-août 2008), Tervuren – MRAC, Paris – L’Harmattan, « Cahiers africains », n°75, 2009. (Quatrième ouvrage de la série des « Cahiers africains » portant sur les évolutions politiques du Congo/Zaïre depuis 1990 ; les ouvrages précédents ont été rédigés par G. de Villers avec la collaboration d’autres chercheurs).