Des dents pour soigner la moelle épinière

Bruxelles Woluwe

Utiliser les cellules souches dentaires pour soigner les lésions de la moëlle épinière : c’est le pari que s’est lancé la professeure Anne des Rieux, chercheuse au Louvain Drug Research Institute (LDRI) de l’UCLouvain. Cette semaine, elle présente les avancées des recherches de son groupe au « Bioregate Forum » en France, un forum qui rassemble des acteurs-clefs de la médecine régénératrice.

« La moëlle épinière n’est pas beaucoup plus solide qu’une tomate, raconte Anne des Rieux. Même avec la colonne vertébrale pour la protéger, c’est une zone extrêmement fragile… »

Cette chercheuse du groupe Advanced Drug Delivery and Biomaterials (ADDB) du LDRI travaille sur le potentiel des cellules souches d’origine dentaire pour la réparation du système nerveux central. Les résultats obtenus au sein de son laboratoire sur la réparation de la moëlle épinière sont prometteurs.

La lésion de la moëlle épinière est une pathologie précise. Elle survient suite à un traumatisme, un accident de sport ou de voiture par exemple. La moëlle épinière, ce tube qui relie notre cerveau au reste du corps, permet à l’information de circuler. Lorsqu’elle a reçu un coup, elle se régénère difficilement. Certaines cellules nerveuses, comme les neurones, meurent suite au choc et ne font plus leur travail, c’est-à-dire de transmettre l’information entre les différentes parties du corps. Ceci explique que certains accidentés ne sentent plus leurs pieds ou leurs jambes.

Malheureusement, bien après que le traumatisme initial ait eu lieu, l’étendue de la lésion s’aggrave et les conséquences physiologiques sont importantes. Soigner cette lésion reste encore un besoin médical non atteint : « On ne sait pas comment en inverser les effets, explique la chercheuse. En général le traitement consiste en une intervention chirurgicale, l’administration d’anti-inflammatoires et une longue revalidation. Mais il n’existe pas vraiment à l’heure actuelle de traitement curatif.»

Un petit bourgeon dental

C’est sa rencontre avec le professeur Julian Leprince, un collègue dentiste dont les recherches se focalisent sur la régénération de la pulpe dentaire, qui l’a faite s’intéresser à ces cellules d’origine un peu particulière. « Lorsque les dents sont encore jeunes, comme les dents de sagesse, elles ressemblent un peu à une petite perle, explique Anne des Rieux. Au niveau de la future racine, un petit bourgeon est présent : c’est la papille apicale. Rempli de cellules, ce petit tissu va donner naissance aux racines dentaires. »

Ce tissu est une « niche » de cellules souches mésenchymateuses, qui peuvent donner différents types de cellules comme des cellules osseuses, de la graisse ou du cartilage. « L’avantage de ces cellules, c’est d’abord qu’elles sont faciles d’accès, explique la chercheuse. Ensuite, leurs propriétés régénératrices influencent positivement la réparation de la moëlle épinière : c’est ce que nous avons découvert lors de la thèse du docteur Pauline De Berdt. »

Après avoir implanté une papille apicale au sien d’une lésion de la moelle épinière, les fonctions locomotrices s’amélioraient en laboratoire. Un travail qui a pu être réalisé grâce à de nombreuses collaborations et le soutien financier du FNRS, de l’UCLouvain et de la Fondation internationale pour la recherche en paraplégie (IRP). La prochaine étape : comprendre ce qui, dans la structure de la papille, permet d’avoir cet effet régénérateur. »

Marie Dumas

https://uclouvain.be/fr/sciencetoday/actualites/des-dents-pour-soigner-la-moelle-epiniere.html

 

Published on December 14, 2018