Nanosciences : des limitations technologiques inspirantes

« Les limitations technologiques à l’échelle nanométrique : source d’inspiration et d’innovation », tel est le titre du Cours Conférence que donnera le Professeur Jean-Pierre Raskin (EPL/ICTEAM) ce 21 novembre au Collège Belgique.

Ces cours-conférences donnés par des chercheurs confirmés visent à présenter des sujets originaux mais accessibles à des scientifiques de divers domaines et aux curieux de sciences. Le thème choisi par Jean-Pierre Raskin découle de son expérience face à des limitations technologiques qui ont mené finalement à des résultats qualifiés d’originaux par la communauté scientifique. Alors que le Professeur et son équipe travaillaient à la réalisation de matériaux « purs », sans défauts, pour les besoins de la microélectronique, ils ont eu une idée « décalée ». « Lorsqu’on regarde un circuit électronique, il y a certains endroits où le transport électronique doit être optimal et d’autres où malheureusement une partie de l’énergie électrique va se perdre dans le support », explique Jean-Pierre Raskin. « Nous avons pris le parti de mettre pleins de défauts dans le matériau support qui est une tranche en silicium pour éviter cette perte d’énergie. Et cela a marché ! ». Ainsi pour avoir un circuit électronique le plus efficace possible, il faut introduire de la pureté dans certaines parties du circuit et du chaos dans d’autres…Des résultats surprenants ! En accentuant les défauts des matériaux de la tranche où ils observaient des pertes d’énergie électrique, les chercheurs ont réussi à réduire ces pertes. Ils ont donc fait d’une faiblesse une force, d’une limitation une innovation.

Cette découverte a rapidement été appliquée dans la microélectronique des smartphones où on retrouve désormais plein de défauts à la surface de la tranche de silicium qui les compose. « Cela permet d’avoir des circuits électroniques qui fonctionnent à haute fréquence avec moins de problèmes de pertes, donc de meilleure qualité ». Pas étonnant que ces résultats aient séduit un gros industriel américain qui demande depuis à ses fournisseurs d’introduire ces défauts dans les tranches de silicium à partir desquelles ils fabriquent l’ensemble de leurs circuits électroniques haute fréquence. Aujourd’hui la nouvelle tranche de silicium est commercialisée par une société française appelée SOITEC et toutes les grandes entreprises de la microélectronique utilisent cette dernière. 100% des smartphones produits aujourd’hui utilisent cette découverte UCL.

Ce type d’approche, où un problème identifié est transformé en une solution pour résoudre une autre problématique, Jean-Pierre Raskin tente de l’appliquer dans son quotidien de chercheur. Comme par exemple lorsqu’il s’est penché sur les capteurs environnementaux qui équipent nos objets connectés. Ces structures électromécaniques sont comparables à des interrupteurs sur la tranche de silicium et composés de plusieurs couches très minces de matériaux. « Lorsqu’il y a des contraintes internes, cela pose un réel problème » explique le scientifique. Cherchant comment exploiter ces contraintes internes de manière constructive, les chercheurs de son équipe, en collaboration avec le Prof. Thomas Pardoen de l’UCL, en ont fait une technique permettant de tester les propriétés des matériaux à l’échelle nanométrique. « Dans notre domaine scientifique, on se demandait comment manipuler et tester les propriétés mécaniques des matériaux à l’échelle nanoscopique. Nous avons trouvé une partie de réponse : pour tester les propriétés mécaniques d’un matériau, il « suffit » de connecter celui-ci à un autre matériau dans lequel il y a des contraintes internes de traction et de graver la couche de matériau en dessous afin de libérer les contraintes et donc de réaliser un test de traction sur le matériau à tester », indique Jean-Pierre Raskin. Et voilà donc une manière utile d’exploiter les contraintes internes qui posent tant de problèmes lorsqu’elles s’invitent au sein de nos capteurs.

« Le message à retenir de ces deux success stories est qu’il y a toujours une manière de voir les choses et de réfléchir qui permet de sortir le nez du guidon et de transformer des contraintes en opportunités », souligne Jean-Pierre Raskin.

Le cours-conférence de Jean-Pierre Raskin sera dispensé le mardi 21 novembre 2017, au Palais provincial de Namur (2, Place Saint-Aubain - 5000 NAMUR), de 17 à 19 heures. Accès gratuit. Inscription préalable sur le site internet www.academieroyale.be . Après la création d'un compte personnel (cliquer sur « créer un compte », en bas à gauche de la page d'accueil), l'inscription se fait sur la page de la leçon (bouton «inscription»).   

Plus d'informations et inscription sur :
http://www.academieroyale.be/fr/detail-con/dates/les-limitations-technologiques-a-lechelle-nanometriquenbsp-sources-dinspiration-et-dinnovation-21-11-2017-17-00/  

Publié le 14 novembre 2017