Familles séparées ? Hébergement alterné, présence du père et rôle des réseaux sociaux

L’UCLouvain a interrogé 1 600 jeunes sur leur vie de famille. Parmi eux, 500 jeunes dont les parents sont divorcés ou séparés. L’objectif ? Mieux comprendre comment ils perçoivent et s’approprient leur organisation familiale. La spécificité de cette étude UCLouvain ? Les scientifiques se sont basés sur le point de vue (ressenti) de l’enfant. Une première ! Les modes d'hébergement privilégiés ? 4 enfants /10 restent en hébergement exclusif chez la mère ; 3 enfants /10 sont en hébergement alterné. Les pères sont plus présents. Un constat ? Les RS aident ces jeunes à garder le contact avec leurs parents.

Laura Merla, sociologue de la famille à l’UCLouvain, et son équipe décortiquent depuis 2 ans le fonctionnement des familles séparées. L’objectif ? Analyser la composition, les interactions et les évolutions au sein du noyau familial. Et, au passage, déconstruire quelques clichés. L’intérêt ? Donner un aperçu objectif de la famille contemporaine, esquisse qui peut, notamment, avoir un impact lors du choix de l'hébergement des enfants, dans le cadre d’une séparation par ex.

La spécificité de cette étude UCLouvain ? Les scientifiques se sont basés sur les témoignages et ressentis des jeunes, une première (les études se basent en général sur les témoignages des parents, pas des enfants). Au total, 1 600 jeunes entre 12 et 18 ans (dont 500 vivent dans une famille divorcée ou séparée) en Fédération Wallonie-Bruxelles ont été interrogé·es par les chercheur·euses UCLouvain. Avec comme question centrale : comment navigue-t-on entre divers lieux de résidence, des cultures familiales et des règles de vie qui peuvent être différentes chez la mère et chez le père ? Et, plus globalement : qu’est-ce que ces jeunes nous disent des familles contemporaines ?

Les chiffres. L’enquête rapporte qu’il y a 1/3 de familles séparées en Belgique. Avec quels types d'hébergement ?

  • 4 enfants sur 10 sont en hébergement exclusif chez la mère
  • 3 enfants sur 10 sont en hébergement alterné
  • 2 enfants sur 10 sont hébergés principalement chez la mère
  • 1 enfant sur 10 est en hébergement exclusif chez le père
  • + de 50 % des jeunes en hébergement exclusif ou principale vivent dans un foyer monoparental (c’est à dire où le parent gardien – souvent la mère – vit seul·e avec ses enfants).

Il y a 10 ans, c’était l'hébergement exclusif chez la mère qui primait, et l'hébergement exclusif chez le père était rarissime. Quant à l'hébergement alterné, il s’implantait doucement.

Les constats des chercheur·euses UCLouvain ? En ce qui concerne la famille du 21e siècle :

  • On oublie l’image type de la famille dite « classique », soit le père, la mère et les deux enfants. Aujourd’hui, la notion de famille est multiple : parents ensemble, séparés, hébergement exclusif, alterné, homo ou mono-parentale – il n’y a plus de norme unique ;
  • On voit émerger une famille davantage relationnelle et démocratique : les parents qui vivent ensemble ou mettent en place un hébergement alterné dirigent la famille, ensemble. Exemple ? Les parents sont soit tous les deux contrôlants, soit ils ne le sont pas, et ce, qu’il s’agisse d’une famille nucléaire (parents ensemble) ou d’un hébergement alterné : ils continuent à coopérer.

Les constats liés aux familles séparées ?

  • La place du père est plus importante qu’avant, même si la mère garde un rôle prépondérant. L’image du « papa Walibi/copain », qui n’aurait ses enfants que le week-end et pendant les vacances scolaires et ne ferait que des choses amusantes par opposition à la mère « contrôlante », n’est plus d’actualité. Au contraire : les jeunes disent que les pères séparés prennent plus de responsabilités ;
  • Les nouvelles technologies sont indispensables pour maintenir la coprésence :
    • Facebook est utilisé par 68 % des jeunes, pour garder le contact avec leurs parents
    • Les RS aident les jeunes à entretenir une continuité des liens avec leurs parents (autrement dit, les jeunes communiquent avec papa quand ils sont chez maman, et inversement)
  • Les familles monoparentales post-divorce sont particulièrement fragiles : elles rencontrent plus de difficultés financières, et les tensions entre les ex-partenaires y sont particulièrement fortes

Et les enfants dans tout ça ?

  • 8 jeunes sur 10 se disent satisfait·es de leur situation familiale. Et pour cause : 1 jeune sur 2 a été consulté·e au préalable à propos du mode d'hébergement ;
  • Dans la relation parents/enfants (toujours dans le cadre d’une séparation), les filles se sentent plus proches de leur mère, tandis que les garçons construisent le même type de relation avec chacun de leur parent ;
  • On se dispute dans toutes les configurations, y compris dans les familles nucléaires (classiques) : 7 jeunes sur 10 estiment que leurs parents se disputent moyennement à beaucoup. La séparation atténue les conflits entre parents, mais ne les fait pas disparaître.

Cette enquête, intitulée Louvain Adolescents Survey (LAdS) a été réalisée dans le contexte plus large d’une recherche UCLouvain, intitulée MobileKids, et financée par une bourse européenne (ERC).

Infos : https://uclouvain.be/fr/chercher/cirfase/leuven-louvain-adolescents-survey.html et https://mobilekids.eu/

Publié le 21 novembre 2019