Les gestes barrières, grands perdants du déconfinement

non respect règles

Selon une étude UCLouvain, depuis le déconfinement partiel, le 8 mai dernier, les Belges francophones respectent moins les gestes barrières qu’il y a quelques mois. Les femmes sont celles qui sont les plus rigoureuses dans l’application des règles ; contrairement aux jeunes et aux personnes disposant d’un niveau d’éducation plus élevé, qui ont tendance à négliger le suivi des règles (distance physique et sociale). L’impact sur la pandémie ? Selon Niko Speybroeck, épidémiologiste à l’UCLouvain, « si le nombre de contacts augmente, c’est sûr, la circulation du virus va elle aussi augmenter ».

L’UCLouvain mène une étude, en plusieurs phases, sur le respect des gestes barrières, afin de pouvoir comparer les comportements de la population sur une large période, en incluant les différentes étapes du déconfinement. La première récolte s’est déroulée du 1er au 11 avril, la 2e récolte du 22 au 30 avril et la 3e récolte du 13 au 18 mai 2021. Les résultats concernent l’évolution des comportements entre ces trois temps. Il s’agit d’un échantillon longitudinal de 844 Belges francophones (63 % de femmes, moyenne d’âge 50 ans, niveau d’éducation relativement élevé).

L’intérêt de cette analyse ? La forte évolution de la situation sanitaire : on a assisté, en Belgique, à une diminution des contaminations durant cette période (de 3 437 contaminations moyennes par jour et 3 167 patients dans les hôpitaux à 2 428 contaminations et 1 857 hospitalisations en fin d’étude (13-18 mai)). En parallèle, la vaccination a fait un bond en avant durant cette période, avec mi-mai (3e phase de l’étude) 36% de la population ayant reçu une dose de vaccin et 13% ayant reçu deux doses. Enfin, durant cette 2e phase, on a assisté à une relaxation importante des mesures, telle que la réouverture des terrasses le 08 mai.

Les scientifiques UCLouvain ont donc cherché à connaître l’évolution de l’application des gestes barrières (port du masque, distance physique et sociale et lavage/désinfection des mains), dans des contextes différents, en lien avec le déconfinement partiel, sachant que, pour casser les chaînes de transmission du virus il faudrait qu’au moins 70% de la population soit complètement vaccinée. Résultats ?

  • De manière générale, le respect des règles diminue à travers le temps, en particulier en ce qui concerne la distanciation physique et la limitation des contacts sociaux. Ce qui témoigne probablement d’un besoin naturel de contacts réels :
  • Les femmes sont plus rigoureuses dans l’application des règles que les hommes interrogés ;
  • Les jeunes (18-35 ans) et les personnes disposant d’un niveau d’éducation plus élevé négligent davantage le suivi des règles (distance physique et sociale) par rapport aux autres groupes ;
  • Plus les gens ont conscience des risques et conséquences d’être infecté, ou sont inquiets de tomber malade, plus ils appliquent les règles ;
  • Une confiance très faible dans les expert·es et les médias est lié à un suivi nettement plus faible des comportements sanitaires ;
  • L’influence de l’entourage a un impact direct sur le suivi des règles : moins cette influence est forte et moins les règles sont respectées ;

Face à ces résultats, qu’en est-il de l’évolution de la pandémie en Belgique ? Quels sont les risques éventuels ? Selon Niko Speybroeck, épidémiologiste à l’UCLouvain, « si le nombre de contacts augmente, c’est sûr, la circulation du virus va elle aussi augmenter. » Pour rappel, la circulation du virus est influencée par 3 paramètres : le nombre de contacts ; les risques de transmission par contact (risques diminués grâce aux gestes barrières) ; l’immunité de la population.

Même si on a pu couper le lien entre la circulation du virus et les hospitalisations, il ne faut pas sous-estimer les risques. Si l’adhésion de la population diminue, le virus pourra à nouveau augmenter et avoir plusieurs conséquences :

  • Une hausse éventuelle des hospitalisations des jeunes, non encore vaccinés actuellement
  • Une augmentation des cas de covid longue durée, que l’on observe chez de plus en plus de jeunes infectés
  • Des risques d’apparition de nouveaux variants, qui pourraient déclencher une 3e vague si l’immunité collective (70 % de personnes vaccinées) n’est pas atteinte : « seule cette immunité permettra de stabiliser la situation »

Bref, selon Niko Speybroeck, « il est essentiel de continuer à être vigilant, si nous voulons pouvoir viser un déconfinement total, sans gestes barrières, d’ici la fin de l’année 2021. »

Publié le 04 juin 2021