Gilles Denis, diplômé de la Faculté des sciences, est actuellement au Groenland pour une expédition d’ampleur qui cumule challenge sportif et scientifique. Nathan Goffart, sportif de haut niveau, l’accompagne dans son périple. Plusieurs scientifiques de l’UCLouvain suivent cette expédition.
Le voyage hors du commun de Gilles Denis et Nathan Goffart a commencé en avril et se clôturera en septembre. Les deux amis réalisent un triathlon comprenant 450 kilomètres de ski sur 36 jours, 1.000 kilomètres en kayak en 2 mois et 1 kilomètre d’ascension verticale dans un temps qu’ils définiront. Durant leur expédition, ils prennent des mesures topographiques, récoltent des échantillons de neige, mesurent la densité et la profondeur de la neige, et collectent des eaux chargées de poudre de roche.
Gilles Denis est à l’initiative de ce voyage. « Depuis toujours, j’aspire à vivre des aventures dans de grands espaces blancs, au bénéfice de la science. J’ai suivi des études de physique à l’UCLouvain, spécialisation terre et climat. Mon ancien promoteur, Nicolas Bergeot, chargé de cours invité à la Faculté des sciences 1, m’a beaucoup marqué car il s’est rendu à la Station princesse Elisabeth en Antarctique. En été 2016, j’ai découvert le Groenland et tous mes rêves ont ressurgi. Le projet est né là. Deux ans plus tard, j’ai rencontré Nathan, athlète de haut niveau. »
Collaborations scientifiques
Une fois le parcours sportif imaginé, Gilles et Nicolas montent plusieurs collaborations scientifiques avec des universités et des centres de recherche. Ainsi, Nicolas Bergeot propose-t-il d’équiper les explorateurs d’un récepteur GNSS (Global Navigation Satellite System, comme le GPS et Galileo) de haute précision pour mesurer l'élévation de la calotte polaire. Il souhaite en effet calibrer les modèles basés sur des données satellitaires : avoir des relevés de terrain pour les comparer avec les informations venues de l’espace. C’est la première fois que des mesures in situ ont lieu au Groenland.
Son collègue Bruno Bertrand, chargé de cours invité à la Faculté des bioingénieurs 2, crée un système autonome pour alimenter le récepteur GNSS ainsi que le matériel personnel et les systèmes de survie. Un vrai défi car le matériel scientifique doit résister à des températures négatives en dessous de 30 degrés, dans des tempêtes et des jours blancs. De son côté, Sophie Opfergelt, chargée de cours à la Faculté des bioingénieurs 3, souhaite profiter de l’expédition pour analyser les eaux des rivières afin de mieux comprendre les conséquences de la fonte des glaces (voir encadré).
Mais la collaboration ne s’arrête pas là. Bruno Bertrand et Sophie Opfergelt rapportent cette expédition dans leur cours. Bruno Bertrand se rend en auditoire avec le matériel qu’utilisent les explorateurs et fait le lien avec son cours consacré aux panneaux photovoltaïques. Sophie Opfergelt présente le projet en première année de bachelier. Elle expose la dimension sportive, le côté explorateur et la conscientisation de l’importance de ce continent pour comprendre les glaciers.
Vulgarisation
Gilles Denis a souhaité aussi impliquer les médias pour diffuser les découvertes scientifiques. Vulgariser la science et le climat, est pour lui l’un de ses grands enjeux de son expédition. « Grâce à mes études, j’ai côtoyé des scientifiques et appris leur langage. Je suis en quelque sorte un interprète entre le grand public et les chercheuses et chercheurs. » Il prévoit de réaliser un documentaire à son retour.4
Actuellement, Gilles et Nathan naviguent en kayak en autonomie totale. Au terme de leur parcours en mer, ils devront escalader les fjords du Cap Farewell. Ils reviendront en Belgique dans le courant du mois de septembre. En attendant, il est possible de les suivre sur Instagram, Facebook, LinkedIn et via leur site internet.5
Gilles Denis : « Psychologiquement, la traversée polaire en ski est un grand challenge ! Il faut imaginer un immense plateau blanc sans relief à 2.000-2.500 mètres d’altitude. Durant les 36 jours de marche, on voit juste un cercle blanc sans aucune distraction pour l’œil. On a l’impression d’être dans un nuage de brouillard. Regarder l’horizon donne le vertige car il n’y a aucun repère. C’est un grand moment d’introspection, une expérience difficile à vivre. On revient la tête bouillante d’idées et de rêves. » |
Sophie Opfergelt souhaite collecter des eaux de rivière lors de l’expédition en kayak. Cette eau est chargée d’une poudre de roche libérée par la fonte des glaciers. Plusieurs questions se posent : « Quels sont les éléments nutritifs dans ces poussières ? Ces éléments sont-ils libérés dans la rivière ? Sont-ils disponibles pour les algues ? » Ces poussières sont aussi transportées par le vent sur la calotte polaire : les nutriments autoalimentent l’effet de fonte de glace car ils entretiennent un développement d’algues sur la calotte polaire. Ces petites taches noires au milieu d’un environnement blanc accélèrent le processus de dégel. |
1. Nicolas Bergeot est chef de travaux à l’Observatoire royal de Belgique et chargé de cours invité dans la faculté des sciences, Ecole de physique, à l’UCLouvain Louvain-la-Neuve.
2. Bruno Bertrand, chef de travaux à l’Observatoire royal de Belgique et chargé de cours invité dans la faculté des bioingénieurs à l’UCLouvain Louvain-la-Neuve.
3. Sophie Opfergelt, chercheuse qualifiée FNRS au Earth and Life Institute et chargée de cours à la faculté des bioingénieurs à l’UCLouvain Louvain-la-Neuve.
4. Documentaire co-produit par la RTBF et Sioux Production.
5. https://www.nanokexpedition.be/