Tout l’art des rituels

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La première chose qui marque, lorsque l’on pénètre dans la nouvelle exposition temporaire du Musée L, c’est l’odeur de l’encens, inhabituel en ces lieux. Et puis, une musique : des chants tibétains, répétitifs. Engageants aussi. Une mise en scène qui attise d’emblée la curiosité, et qui nous plonge dans l’art des rituels.

La lumière est tamisée, l’ambiance cosy, comme dans une bulle, hors du temps, à la découverte d’autres cultures et traditions. Et l’on plonge directement dans la contemplation de 5 œuvres majestueuses dont un masque africain et une statuette Vajradhara aux nombreux bras. Pas de texte, juste une invitation à observer. Pour en savoir plus, il faut contourner la vitrine, se diriger côté verso. L’idée est de se laisser captiver par l’esthétique avant d’appréhender le contexte.

Via « Art et Rite », le musée de l’UCLouvain pose la question des liens entre des gestes et des objets qui s’inscrivent dans le cadre de rituels et leur devenir en tant qu’œuvre d’art. A quel moment s’effectue le basculement ? L’expo attire aussi l’attention sur les multiples vies d’une œuvre : d’éphémère, elle peut se pérenniser grâce au support qui la capture ou aux souvenirs qu’elle suscite ; l’œuvre prend vie lors de sa fabrication, se transforme via les gestes qui la manipulent, lors du rituel et évolue encore lorsqu’elle se retrouve sous cloche, au musée.

C’est aussi une invitation à nous interroger sur les rituels et les objets qui les définissent : sont-ils simples objets d’admiration ? Quelle est la place de la fabrication, dans la construction du rite ? Quid des rituels non-pérennes (mandalas par ex.) : disparaissent-ils dès la fin du rite ? Quel impact revêt la manipulation d’un objet : est-ce cet acte du mouvement qui donne son essence au rite, à la performance ? Quelle importance prend la taille de l’objet rituel : lui donne-t-elle plus d’importance ou est-ce sa fonction qui est davantage marquante ? Quelle est la force de la beauté de l’objet : est-elle indispensable pour procurer émotions et/ou attentions ?

Les deux co-commissaires de l’exposition, Anne-Marie Vuillemenot, anthropologue à l’UCLouvain et Caroline Heering, historienne de l’art à l’UCLouvain ont privilégié une approche pluridisciplinaire pour appréhender les rituels, par le biais de l’histoire, la littérature, les sciences des religions, l’anthropologie et l’histoire de l’art.

Pour enrichir cette exposition, le Musée L a puisé quelques perles dans ses réserves. Et en a emprunté d’autres au MAS d’Anvers, au Musée royal de l’Afrique centrale de Tervuren ou aux Musées royaux d’Art et d’Histoire. Autant d’objets de cultures, d’époques et de matériaux divers qui dialoguent entre eux, comme un fil rouge avec les collections permanentes du Musée : « le défi est de parvenir à transformer le regard du·de la visiteur·euse et de l’emmener dans une redécouverte du Musée, de lui permettre d’appréhender les objets, autrement » s’enthousiasme Anne-Marie Vuillemenot, co-commissaire de l’exposition et anthropologue à l’UCLouvain.

Outre les objets et vitrines, le·la visiteur·euse peut aller plus loin, grâce à des QR code permettant de visionner certains rites, en images. La scénographie a également été pensée pour les familles, avec des pictos spécifiques pour les enfants et un guide dédié. Une playlist permet aussi de prolonger sa visite, en se plongeant dans l’univers des diverses cultures appréhendées. Au programme également, une journée d’étude grand public, un concert, des visites guidées sur mesure et une nocturne, le tout, sur réservation uniquement.

Infos : https://www.museel.be/fr/exposition/art-rite

Publié le 26 avril 2021