Comment les jeunes vivent la garde alternée ?

garde

Communiqué de presse - Recherche UCLouvain

En bref :

  • L’UCLouvain a interrogé 21 jeunes de 10 à 16 ans sur leur vécu de la garde alternée : comment perçoivent-ils et s’approprient-ils leur organisation familiale ?
  • La spécificité de cette étude UCLouvain ? Elle dévoile le quotidien de la vie en garde alternée du point de vue de l’enfant, une première.
  • Quels enseignements ? Les jeunes trouvent une forme de stabilité pour se sentir chez eux dans l’ensemble formé par leurs deux domiciles parentaux. Ils·elles font preuve d’une grande capacité d’adaptation pour faire face et gérer les difficultés quotidiennes.

Infos : https://mobilekids.eu/

Contact(s) presse :      
Prof. Laura Merla, sociologue de la famille à l’UCLouvain, gsm sur demande, laura.merla@uclouvain.be
Dr Bérengère Nobels, sociologue de la famille à l’UCLouvain, gsm sur demande, berengere.nobels@uclouvain.be

En 2020, un couple de parents séparés sur trois optait pour la garde alternée ou hébergement égalitaire. Ce mode de garde est celui qui doit être examiné en priorité par les tribunaux de la famille dès qu’un des parents en fait la demande.

Mais comment les enfants de ces familles s’approprient ce mode de vie en alternance ? C’est ce qu’étudie une équipe de chercheuses de l’UCLouvain, dans le cadre du projet « MobileKids », qui décortique le fonctionnement des familles séparées. L’objectif est de comprendre comment les jeunes se construisent un ‘chez-soi’ entre plusieurs foyers. Particularité de l’étude : elle est basée sur le témoignage de 21 jeunes âgés de 10 à 16 ans. C’est la première fois en Fédération Wallonie-Bruxelles qu’une étude est basée sur le témoignage d’enfants, et non de parents.

Différents constats ont pu être tirés de ces entretiens.

  • Si le principe de la garde alternée est largement accepté par les juges de la famille, le modèle de famille nucléaire reste considéré comme offrant le meilleur environnement pour l’enfant.
  • La définition de l’équité est subjective. Un hébergement jugé “équitable” par les enfants ne compte pas forcément le même nombre de jours chez chaque parent.
  • Les jeunes développent un sentiment d’appartenance à différents lieux et diverses configurations familiales. Ils·elles conçoivent chaque habitation comme des îles en relation au sein d’un archipel.
  • Les parents établissent des frontières plus ou moins étanches avec le domicile de leur ex-partenaire. Cela va de « l’île forteresse », limitant au maximum les contacts pendant les jours d’absence, à « l’île ouverte » entre lesquelles tout peut circuler librement. Entre ces positions extrêmes, on retrouve des îles aux frontières plus ou moins souples, qui offrent aux jeunes une marge de négociation. Les enfants composent avec ces limites et les contournent parfois.
  • Il existe une charge mentale liée à la logistique. Certains emportent “toutes” leurs affaires en une seule fois, d’autres les rapatrient au compte-goutte, ou n’emmènent qu’un petit sac, voire “rien du tout” afin de réduire cette charge. Les objets, tant statiques que mobiles, permettent aux jeunes de se créer des repères et une stabilité dans la mobilité.
  • Se sentir chez soi dépend moins de l’aspect physique du lieu (avoir une grande chambre personnelle) que de l’ambiance familiale qui y règne et de la possibilité de se faire son petit cocon, en aménageant les pièces et/ou en se créant des bulles virtuelles d’intimité.

Quels enseignements tirer de cette étude ?

  • Capacité d’adaptation : confrontés à des changements, les jeunes sont capables de s’accommoder et de s’approprier un nouveau mode de vie en développant des pratiques particulières.
  • Les objets qui les entourent permettent aux jeunes de se créer des identités, des habitudes, des routines et des repères. Partir de leurs pratiques et expériences quotidiennes permet de comprendre le ressenti des jeunes.
  • Récolter la parole des jeunes en dehors des épisodes de crise familiale permet d’éclairer sur leurs vécus et offre des outils pour aider ceux·celles qui traversent une période difficile.

La recherche MobileKids a été financée par une bourse européenne ERC. Elle donnera lieu à trois production afin de toucher un public plus large : une exposition (« Deux maisons, un chez-soi », au Delta à Namur du 15/11/2022 au 17/12/2022 et du 04/05/2023 au 08/06/2023 au Forum des Halles de LLN), un livre «( Deux maisons, un chez-soi ? Expériences de vie de jeunes en hébergement égalitaire, paru chez Academia L’Harmattan) et une BD « Sac’Ado », à paraître chez Kennes Editions en septembre 2023.

Publié le 16 novembre 2022