« L’édition est une mise au monde »

Les Presses universitaires de Louvain, un outil de notoriété scientifique et culturelle de l’UCLouvain

Vingt ans d’existence et près de mille deux cents titres au compteur : les Presses universitaires de Louvain vont plutôt bien. Ce modèle de production et de diffusion conçu au tournant du siècle dernier, avec une belle longueur d’avance, voulait croire à la complémentarité du papier et du numérique, du commercial et de l’institutionnel, de la vente en ligne et en librairie, etc. Et ce dans plusieurs langues et dans toutes les disciplines ! Mais il n’y a pas que des ouvrages scientifiques aux « PUL », loin de là...

« Il faut remettre l’église au milieu du village : la première de toutes les valorisations de la recherche, c’est la publication, quelle que soit sa forme, quelle que soit sa diffusion », expose d’emblée Bérengère Deprez, qui mène les PUL depuis le début de l’aventure. « Avant même le dépôt d’un brevet, la création d’une spin-off, un Prix Nobel ou la moindre expertise dans les médias ! Au fond, la publication est au scientifique ce que l’exposition ou la performance sont à l’artiste : ce moment où on éprouve le besoin intellectuel, émotionnel et social de publier, c’est-à-dire de rendre public, de partager. Certes, la publication prend aujourd’hui des formes si diverses, et parfois si procédurales, qu’elle peut sembler désincarnée, voire purement utilitaire ou même mercantile dans certains cas, mais il ne faut pas s’y tromper : même lorsqu’on publie son centième article avec vingt-cinq autres auteurs sur le site web d’une revue, on expose son travail aux yeux de ses pairs, on se dévoile, on se rend vulnérable ».

Le projet des PUL s’est établi dès le début sur la certitude que « la matière première, c’est la matière grise » et que c’est donc l’auteur – au sens fort du terme – ou le directeur de collection qui peut et doit prendre l’initiative, et qui garde jusqu’au bout la maîtrise du projet de publication. Chaque livre est unique. Et s’il peut sembler complètement dépassé dans certaines disciplines des sciences exactes ou appliquées, où c’est désormais la publication d’articles en ligne qui est la règle, le livre reste un outil de première importance dans le débat scientifique. Internet et l’open access, par exemple, ont révolutionné la diffusion des connaissances de manière aussi impressionnante que l’invention de l’imprimerie mais ils sont à considérer comme des outils et non des fins en soi. La fin en soi, c’est le partage et la confrontation des travaux scientifiques par l’édition. Dans ce sens, on peut dire que « l’édition est une mise au monde ». En cela, l’édition scientifique ne se distingue pas de l’édition utilitaire (un bon guide ornitho, par exemple) ni même de l’édition littéraire ! Et c’est le public, c’est-à-dire le destinataire de la publication, qui est juge...

« Les PUL sont une entité informelle de l’AREC (Administration des relations extérieures et de la communication), c’està-dire qu’elles ne sont rattachées ni aux bibliothèques, ni à l’Administration de la recherche, ni à un institut en particulier. On pourrait s’en étonner, mais à la réflexion, c’est très bien ainsi. Cela a deux avantages : le projet des PUL n’est pas cantonné à l’édition de livres ni au domaine scientifique au sens strict ; mais surtout, il relève de l’UCLouvain et non d’un secteur particulier, et il est donc à considérer comme un outil de notoriété générale de l’institution. Ce rattachement « central » permet aux PUL, enseigne éditoriale de l’UCLouvain dans son ensemble, de publier également des ouvrages de notoriété tels que le livre-anniversaire à paraître pour les six cents ans de l’Université, ou de collaborer avec des entités elles aussi plus transversales, au premier rang desquelles le Musée L et, bien entendu, UCLouvain Culture ».

Les PUL comptent d’ailleurs une collection qui publie la plupart des ouvrages édités par le Musée L, dont son guide du visiteur. Mais elles ont également édité les petits volumes en trois langues intitulés L’Art dans la ville, une série qui couvre l’art urbain à Ottignies-Louvain-laNeuve et à Woluwe-SaintLambert, à chaque fois en collaboration étroite avec l’administration communale concernée. Ces ouvrages sont autant de guides pratiques qui emmènent le visiteur à pied ou à vélo parmi les œuvres dont fourmillent nos sites bruxellois et néo-louvaniste. Parmi les collaborations plus ponctuelles, on peut citer À table, citoyens !, un ouvrage consacré à la résidence d’artiste de Françoise Schein et à son impressionnant atelier de création et de production d’assiettes sur le thème des droits humains (cette collection d’un genre très particulier est d’ailleurs exposée bien en vue au... restaurant de l’Université, la Louvain House). Accueilli par le professeur Jean Leclercq (ISP) dans sa collection « Empreintes philosophiques », l’ouvrage constitue une autre trace durable de la résidence de Françoise Schein. Une démarche similaire, hors collection cette fois, a abouti à la coédition avec les étudiant·es concerné·es du petit livre Urgence poétique, comme trace de la résidence d’artiste de Laurence Vielle. Les PUL éditent également la Revue internationale Henry Bauchau dont Myriam Watthee-Delmotte vient de passer le flambeau au professeur Anne Reverseau, ainsi que la revue Mnemosyne, consacrée au patrimoine autobiographique au sens large, dirigée par Beatrice Barbalato, émérite de l’UCLouvain. Depuis quelques années, la Revue générale, la plus ancienne revue belge puisqu’elle remonte à 1865, a rejoint l’enseigne des PUL sous la houlette de son rédacteur en chef Frédéric Saenen et de ses directeurs, les professeurs Vincent Dujardin et Francis Delpérée. Et Bérengère Deprez ne désespère pas de créer un jour une vraie collection littéraire, deux volumes ayant paru jusqu’ici sur cette lancée, l’un consacré à Norge, l’autre à Saint-Exupéry.

Bérengère Deprez : bio express

Licenciée en philologie romane (UCLouvain, 1986) et en communication (UCLouvain, 1991) ; Docteure en philosophie et lettres (UCLouvain, 2002) ; Post-Doctoral Fulbright Fellow (Harvard University, 2007). Essayiste (Du nageur à la vague. Marguerite Yourcenar et les États-Unis, Racine, 2012), romancière (Kilomètre 7, Luce Wilquin, 2006) et nouvelliste (Derrière moi, Luce Wilquin, 2012). Cofondatrice des Éditions Quadrature (2005).

« Cordouan », une collection-phare

Depuis longtemps, les PUL recevaient des projets d’édition qui n’étaient pas strictement des résultats scientifiques mais se situaient pour autant dans le monde académique, tout en étant susceptibles de s’adresser à un public plus large. En 2014, le pas fut franchi avec la création de la collection « Cordouan », ainsi appelée en référence au célèbre phare français, qui compte aujourd’hui 16 titres dans les domaines les plus variés. Le lecteur idéal de ces ouvrages est cet « honnête homme » – ou honnête femme, d’ailleurs – cher à Montaigne, et qui a la tête bien faite, donc bien pleine, et vice-versa. C’est-à-dire le grand public qui aime lire et se cultiver, ce qui restreint évidemment la notion de grand public. La marque de fabrique de la collection est l’association d’un texte de qualité universitaire avec une abondante illustration. Parmi les titres, il faut mentionner Chemins d’Utopie (2015), ouvrage collectif édité par quasi toutes les composantes de la communauté universitaire sous la direction de Philippe Van Parijs pour commémorer le cinq centième anniversaire de la parution de l’Utopie de Thomas More, dans la perspective d’éclairer notre actualité et notre devenir par ce texte fondateur pluriséculaire. Mais aussi Actualité de l’humanisme (2018, existe en anglais), sous la direction du professeur Marco Cavalieri, qui propose, outre une conférence de Nuccio Ordine, docteur honoris causa de l’UCLouvain, une traduction à nouveaux frais de la bulle de fondation de l’Université de Louvain en 1425, montrant que les buts poursuivis alors sont les mêmes qu’aujourd’hui et n’ont rien perdu de leur pertinence : enseignement, recherche et service à la société ; ainsi qu’une galerie de portraits de grands humanistes de l’UCLouvain. Plus « grand public », Le Petit Bois de Lauzelle illustré, une visite guidée sur les pas de celui qui en fut le garde-forestier, Jean-Claude Mangeot (parution appuyée par une exposition virtuelle réalisée par UCLouvain Culture). Ou encore The Bukavu Series (2018, existe en français), instantané éditorial d’un blog très vivant de chercheur·ses du Sud qui s’interrogent avec leurs collègues du Nord sur la décolonisation de la recherche !

Publier aux PUL

Un projet d’édition aux Presses universitaires de Louvain émane en général de l’auteur ou du directeur de collection (il en existe une quarantaine, très actives). Ce « responsable de projet » prend et garde l’initiative de la publication. Les PUL font office de « guichet unique » pour les divers aspects qui peuvent entrer en ligne dans l’édition  : de la révision du manuscrit à sa mise en page, de la composition de la couverture à la publication en ligne, de l’attribution des ISBN au dépôt légal, etc.

 

« Cours universitaires » du syllabus au manuel de référence

Parmi les collections créées aux PUL, « Cours universitaires », en coédition avec la DUC (Diffusion universitaire CIACO), propose aux enseignants-chercheurs de passer du syllabus à la vitesse supérieure, en transformant leurs notes et supports de cours en un véritable essai. Le livre pourra alors être proposé (à un prix accessible) non seulement aux étudiant·es du cours concerné mais aussi aux autres universités en Belgique et dans le monde, ajoutant au « service » éditorial dans une discipline donnée une perspective de notoriété pour l’institution.

 

Vers le site des PUL

Publié le 15 février 2022