La Page d’Après

Une nouvelle librairie indépendante à LLN

Beaucoup de néolouvanistes l’attendaient avec impatience depuis la fermeture du Furet du Nord : une nouvelle librairie vient d’ouvrir à Louvain-la-Neuve. Elle occupera une surface commerciale au rez-de-chaussée des Halles universitaires. Nous avons rencontré, quelques jours avant l’ouverture, les nouveaux libraires Floriane Vreuls et Pierre-Yves Millet.

Propos recueillis par Frédéric Blondeau

Comment vous sentez-vous à quelques jours de l’ouverture ?

FV Complètement speedée avec une adrénaline du feu de Dieu ! (Rires)

PYM Oui, nous sommes à la fois très excités et enthousiastes, mais aussi un peu tendus. Venant tous les deux de la fonction publique, nous devons apprendre en un temps record à la fois comment créer et gérer une société commerciale, et comment développer une librairie indépendante. Paradoxalement, alors qu’on est au pied de la montagne, on a un peu le vertige. Mais on ne doit pas trop y penser et avancer étape par étape.

FV Avec une longue liste de cases à remplir qui concernent aussi bien l’aménagement de la librairie que les commandes de livres. Nous devons rencontrer nos confrères libraires et les représentants des maisons d’édition, comprendre les mécanismes à l’œuvre, découvrir les métiers du livre, nous inscrire dans différents réseaux,… C’est passionnant.

Qu’est-ce qui vous a conduit à ce changement radical de carrière et à embrasser un tout nouveau métier ?

FV Pour moi, c’est un second parcours de vie qui commence. Institutrice primaire de formation initiale pourvue d’un Master en Sciences de l’éducation (UCLouvain), je pense avoir fait un peu le tour dans l’enseignement et j’ai envie de découvrir autre chose. Bien sûr, j’ai toujours été passionnée par les livres, mais ça ne suffit pas pour être libraire. Cette aventure répond à un besoin personnel de trouver un nouveau souffle et de donner une nouvelle direction à ma vie professionnelle.

PYM En ce qui me concerne, je suis journa- liste depuis 21 ans à la RTBF. Diplômé en Langues et Littérature romanes puis en communication de l’UCLouvain, je me suis lancé avec bonheur dans le journalisme, tout en me disant que je reviendrais un jour à mes premières amours : le monde du livre et de la littérature. Un monde que je n’ai jamais vraiment quitté. Basé à la rédaction de Namur, j’ai passé beaucoup de temps dans une librairie voisine où travaillait une amie qui m’a progressivement transmis son goût du métier de libraire. Sans le savoir, elle a planté en moi des petites graines. De là à vouloir ouvrir une librairie, c’est difficile à imaginer dans le chef de quelqu’un qui n’est pas du tout du métier. Finalement une opportunité s’est présentée, grâce d’une part à l’UCLouvain qui voulait absolument retrouver une librairie indépendante à Louvain-la-Neuve et grâce d’autre part à ces connaissances que nous avions dans le monde de la librairie qui nous ont encouragés à nous lancer.

Vous êtes amis depuis une dizaine d’années. Vous vous connaissez bien. Avez-vous les mêmes goûts en littérature ?

FV Nous sommes sur des registres complé- mentaires et c’est très riche. Moi, je suis plutôt axée « littérature jeunesse » ainsi que tout ce qui concerne la psychologie, la pédagogie, le développement personnel et la littérature générale.

PYM Quant à moi, en plus de la littérature générale, j’apprécie les livres politiques ou historiques, reliés à l’actualité, qui apportent un éclairage sur le monde et la société dans laquelle on vit et qui permettent de se projeter. Dès lors cela peut donner un premier aperçu de ce que les lecteur·rices trouveront principalement dans notre librairie : des livres de littérature dite générale, de littérature jeunesse et de sciences humaines. Après, nous allons nous adapter à la demande du public.

Quelle sera la couleur de votre librairie, sa spécificité ?

FV Ce qu’on souhaite proposer, c’est d’abord une atmosphère, une ambiance, un accueil. Tout le monde aura accès à tous les livres. On pourra les regarder, les manipuler, on pourra s’asseoir pour les parcourir. Ce sera un endroit où il fera bon se poser, comme une halte.

PYM L’abc de la librairie pour nous, c’est l’accueil, la bienveillance et le conseil. Moi j’aime bien la librairie comme un lieu de flânerie et de sérénité. Un lieu calme et paisible. Qu’on ait envie de prendre le temps, de rester, de regarder les tables, de feuilleter les livres. La librairie c’est d’abord un accueil humain, un sourire, un contact. De la bienveillance aussi, parce qu’il en faut pour être dans l’écoute de nos lectrices et lecteurs et de leurs goûts. Des collègues libraires nous disent que, régulièrement, des client·es leur disent : « Je cherche un bon livre. » Mais qu’est-ce qu’un bon livre pour elle ou lui. Ça peut varier d’un·e lecteur·rice à l’autre. Il faut donc d’abord l’écouter pour savoir ce dont il ou elle a envie, pour connaître ses goûts de lecture. Quand on a écouté, on peut éventuellement donner un conseil, partager ce qu’on a aimé, et proposer un livre qui pourrait peut-être rencontrer ses attentes. C’est cela qu’on a envie de donner comme coloration et qu’on ne trouvera pas forcément ailleurs.

FV Bien sûr nous allons aussi mettre en avant nos coups de cœur littéraires. Nous lisons beaucoup, mais nous avons aussi de fidèles lecteurs et lectrices qui vont nous accompagner dans cette démarche afin de pouvoir conseiller au mieux les personnes qui viendront, qu’elles cherchent un bon roman, un livre pour enfants ou un ouvrage plus spécifique.

Vous êtes conscients qu’il y a une attente forte de la communauté universitaire et des habitant·es de LLN ?

FV Oui, mais c’est une pression très positive. Je pense que les gens sont bien au courant qu’on débute, qu’on vient avec notre naïveté et surtout notre envie de bien faire. Et comme on ne s’invente pas libraire du jour au lendemain, on va bénéficier de l’aide de deux libraires expérimentés qui feront partie de l’équipe.

PYM Pour nos débuts, nous demandons un peu de bienveillance, mais aussi du feed-back constructif qui pourra nous permettre de mieux cibler nos publics et de répondre à leurs attentes. Je précise que nous ne sommes pas une librairie universitaire. Nous sommes la librairie indépendante de LLN qui s’adresse à tous les publics. De ce fait, nous n’aurons sans doute jamais des ouvrages universitaires hyper spécialisés, mais nous pourrons bien sûr les commander.

Imaginez-vous organiser à termes des rencontres littéraires, accueillir des auteur·rices ?

FV Bien sûr ! On a déjà eu l’occasion de nous entretenir avec plusieurs auteurs et autrices et même de fixer des rendez-vous. On se donne quatre mois pour découvrir notre nouveau métier et être à l’aise avec tous ses rouages avant d’organiser de premières rencontres littéraires, à partir de janvier 2024.

PYM Par ailleurs, développer des collabora- tions et des synergies avec tous les acteurs culturels de LLN est pour nous une évidence. Nous sommes en contact avec le Vilar et UCLouvain Culture. Nous commen- çons à démarcher les Facultés. Et donc, s’il y a un message à faire passer auprès de la communauté universitaire, c’est : « Nous sommes à votre écoute. Si vous avez des envies de collaborations, d’inviter des auteur·rices que vous travaillez dans les cours, en littérature par exemple, nous pouvons organiser ces rencontres dans la librairie. » Et en plus de faire venir des auteur·rices dans la librairie, nous allons accueillir des ateliers d’écriture. Notre espace est très modulable en fonction des rencontres et de l’actualité.

Vous avez choisi d’appeler votre librairie La Page d’Après. Pourquoi ce nom ?

FV Il nous correspond bien, nous qui ouvrons une toute nouvelle page de notre vie professionnelle. C’est la page après Le Furet du Nord et Agora. C’est la page qu’on veut découvrir quand on lit un roman. Et c’est la page tournée vers l’avenir.

Copyright : Frédéric Blondeau

Publié le 03 octobre 2023