1. Axes de recherche
Les historien.nes du LaRHis cultivent le goût du récit complexe des phénomènes historiques, saisissant les changements et les continuités, ainsi que leurs superpositions. Leurs recherches s’articulent autour de quatre axes thématiques et un axe transversal.
Axe 1. Histoire connectée - Réseaux, transferts & connaissances
Physica, secunda pars : cosmographia, motu, aere, experimenta physices, 1761. © Archives de l’UCL, BE/UCL/ARCV/Coll. Cours ms/CI 210 – fol113
Histoire des sciences, historiographie, histoire des cultures graphiques et des pratiques de communication écrite, histoire des religions, histoire politique, histoire économique et sociale, histoire de la colonisation : ces différents champs historiographiques sont envisagés au LaRHis sous l’angle des transferts de connaissances et de pratiques, notamment par la mise en réseaux d’individus dans des contextes multiples. La perspective privilégiée est plurielle, soucieuse de la réciprocité des échanges, de la déconstruction des rapports hiérarchisés et de l’analyse des perceptions et réceptions de part et d’autre, ces dernières contribuant à la construction des identités (personnelle, sociale, professionnelle, religieuse, nationale, graphique, etc.).
Mots-clés : Sciences – Transferts – Communication – Réseaux (formels et informels de pouvoir et de connaissance) – Identités – Rencontres – Confrontations – Connaissances – Représentations – Réciprocité – Interculturalité
Axe 2. Histoire du genre - Dynamique, institutions & croyances
La perspective du genre est constitutive pour les recherches historiques. En interrogeant les normes et les modèles, les croyances et les pratiques dans le temps et dans l’espace, l’histoire se pose la question des interactions entre des acteurs porteurs d’une identité sexuée. Potentiellement dynamique, cette identité façonne et est façonnée par l’exercice des pouvoirs formels et informels à la base des relations entre les sexes : autorités politiques, juridiques, religieuses, intellectuelles. Les recherches en cours traitent essentiellement de l’articulation entre les discours sur le devoir-être ou le pouvoir-être des femmes et des hommes en société, et l’hétérogénéité des pratiques. Une attention particulière est accordée aux marginalités, révélatrices tout autant d’un devoir-être transgressé que de la capacité d’action (agency) des individus ou des groupes.
Mots clés : Impacts sociaux et culturels – normes et modèles - identités et marginalités – Familles – Représentations – Contrôle social – Corps – Sexualités
Axe 3. Histoire du politique - Pouvoirs, conflits & régulations
L’histoire est tout autant faite de continuités qu’elle est émaillée de conflits : guerres, troubles politiques, sociaux ou religieux, transgression des normes, concurrence des représentations ou des mémoires individuelles et collectives. L’étude de ces moments de ruptures et de conflits permet non seulement d’en révéler les ressorts et les dynamiques, mais également d’interroger la capacité et les dispositifs mis en œuvre par un individu, un groupe ou une société pour les surmonter : diplomatie, régulation sociale, dynamiques mémorielles, stratégies de résilience, rites et croyances (religieuses).
Mots clés : Guerre – Justice – Religion – Résilience – Mémoire – Identités – Normes – Représentations
Axe 4. Histoire de la construction européenne et des relations contemporaines de la Belgique et de l'Europe avec les autres régions du monde (→ CEHEC)
L’histoire de la construction européenne et des relations contemporaines de la Belgique et de l’Europe avec les autres régions du monde se décline sous une multitude d’axes thématiques (politiques, économiques, sociaux et culturels), et s’analyse au travers d’une pluralité d’échelles, démarrant avec l’étude du rôle joué par les acteurs individuels, jusqu’à celle des réseaux, contacts et échanges entre pays, voire aires culturelles et transcontinentales plus larges. On peut dès lors parler d’histoire connectée : attentive à la circulation d’idées au départ et autour du continent européen, elle s’interroge aussi sur ses spécificités (communauté de valeurs, de référents idéologiques, artistiques, spatiaux et architecturaux) et la manière dont elles influencent tant l’intégration politique et économique de l’Europe, que ses relations avec l’étranger.
Mots clés : Echanges, transferts et réseaux européens et transcontinentaux (Afrique, Asie) – Intégration – Idées et Valeurs – Dynamiques économiques et sociales – Culture et Architecture
Axe transversal : méthodes, fonctions sociales de l'histoire, épistémologie
Au-delà de leurs thèmes et objets d’étude, les historiens du LaRHis entretiennent un questionnement épistémologique autour des fondements de leur discipline, et notamment :
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des sources et de leurs usages, tels que les conditionnent les périodes et thématiques étudiées ;
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de la fonction sociale de l’histoire (enseignement, communication, histoire publique) et des historiens face aux enjeux, questions et demandes socialement vives ;
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des méthodologies de l’histoire et de l’archivistique.
Mots-clés : sources, archivistique, enseignement, communication, histoire publique, enjeux, méthodologie, fonction sociale
2. Projets de recherche en cours
Effacer les traces, trouver les traces. Les tentatives d'effacement des traces physiques ab ovo lors des génocides et crimes de masse au XXe siècle. Les cas de la Shoah et du massacre de Srebrenica
Frédéric Crahay - Promoteur : Emmanuel Debruyne
Le projet de recherche part de l’étude de deux tentatives d’effacement de traces de crime de masse perpétrées au XXe siècle : l’Aktion 1005 (1942-1945) des nazis et les ré-enterrements de corps dans des fosses secondaires et tertiaires en Bosnie (1er août – 1er novembre 1995) par l’armée serbe de Bosnie. Pour cela, des études de cas sont effectuées pour la Shoah, ainsi que pour Srebrenica. Il s’agit des centres d’extermination de Chełmno nad Nerem / Kulmhof et de Sobibór pour l’Aktion 1005 et Srebrenica et ses environs pour la seconde.
Plusieurs questionnements se démarquent en particulier :
Comment l’archéologie a-t-elle été utilisée dans différents cas contre le négationnisme in ovo ? L’archéologie liée à la Shoah a-t-elle influencé l’archéologie liée à la Bosnie (et vice versa) ?
Comment l’État nazi et l’armée de la République serbe de Bosnie ont-ils procédé à l’effacement des traces de leurs crimes ?
Dans quelle mesure l’entité criminelle a-t-elle réussi l’effacement de son crime ?
Comment les États actuels et les communautés gèrent-ils cette mémoire, en particulier avec les dépouilles des personnes assassinées, ainsi que leurs avoirs ?
La recherche se fera par une approche comparative et inclut une recherche dans les archives (rapports de juges d’instruction), une recherche sur les terrains des excavations (conservation des artéfacts) et inclut une conception d’une base de données originale (interviews).
Un laboratoire politique et institutionnel : les communautés urbaines entre Seine et Meuse, 1050-1250
Thierry Frippiat - Promoteurs : Paul Bertrand (UCLouvain) et Jean-François Nieus (UNamur)
Dans l'Europe urbaine du Moyen Âge central, l'espace compris entre Seine et Meuse se distingue précocement comme un foyer d'innovation politique et institutionnelle. Il voit tout particulièrement l’émergence de la commune urbaine, dont les historiens situent les premières attestations dans les années 1070. L’expression de « mouvement communal » désigne d’ordinaire ce phénomène s’étendant sur tout le XIIe siècle. Elle a vu le jour dans les années 1820, en même temps que l’érudition libérale s’emparait de cette problématique et imprégnait ainsi les premières pages d’une longue tradition historiographique. Labouré en tous sens par plusieurs générations d’historiens, le champ des « études communales » s’est néanmoins mué en friche depuis le milieu du siècle dernier. La dissonance des thèses proposées et certaines incohérences persistantes ont une part certaine dans la frilosité nourrie à l’égard de cette problématique, depuis les travaux d’A. Vermeesch (1966). Notre projet de recherche entend répondre à la nécessité criante d’un réexamen approfondi du dossier. Ce dernier s’impose d’autant plus que le dynamisme politique des villes, identifié comme une caractéristique majeure du « second âge féodal », reste paradoxalement le parent pauvre de la recherche récente autour du Moyen Âge central. En s’appuyant sur une relecture minutieuse et critique des sources, il s’agit de renouveler notre compréhension du phénomène communal, tel qu’il se déploie entre le domaine capétien et la Flandre.
Les relations diplomatiques entre la Belgique et la Chine entre 1949 et 1971 et comment celles-ci se sont articulées autour de la construction européenne
Claudia Julien - Promoteur : Vincent Dujardin
Cette recherche s’intéresse aux relations sino-belges et a pour objectif de mettre à jour les relations diplomatiques formelles et informelles existant entre la Belgique et la Chine entre 1949 et 1971, période correspondant à l’absence de reconnaissance par la Belgique de la République populaire de Chine.
Cette recherche met, entre autres, à contribution les archives du ministère belge des Affaires étrangères, les archives d’organisations internationales telles que l’ONU, la presse chinoise et les archives de mouvements belges défendant la reconnaissance par la Belgique du régime communiste chinois. Ces archives serviront à étudier les enjeux et les motivations des relations sino-belges à cette époque ainsi que la perception de la Chine par la Belgique. La politique étrangère belge officielle sera également confrontée à la réalité des échanges sino-belges ayant court afin de mesurer quels impacts ceux-ci ont eu sur le discours officiel et sur le processus d’intégration européenne.
L’accent sera notamment mis sur comment les relations sino-belges entre 1949 et 1971 s’inscrivent dans le contexte plus large du projet de construction européenne et celui des institutions internationales telles que l’ONU et l’OTAN.
Le clergé autochtone et la décolonisation du Congo, du Ruanda et de l'Urundi comme enjeux des relations entre la Belgique et le Saint-Siège (1939-1962). Enquêtes sur le vécu des prêtres indigènes dans l'Afrique coloniale belge
Élisabeth Bruyère - Promotrice : Anne-Sophie Gijs
Notre projet étudie l'africanisation du clergé au Congo belge et au Ruanda-Urundi depuis la fondation de la Délégation apostolique de Léopoldville (1930) jusqu'aux l'indépendances (1960-1962) au travers de l'étude des trajectoires sociales et interactions personnelles des premiers abbés natifs de ces régions et des dynamiques institutionnelles dont ceux-ci sont l'objet. Étudiant les relations juridiques, diplomatiques et politiques entre la Belgique et le Saint-Siège mises en lumière par les fonds d'archives vaticans, mais aussi les archives coloniales, missionnaires et diplomatiques en Belgique, en Italie et en Afrique centrale, cette recherche ambitionne plus généralement de développer l'historiographie consacrée aux rapports de l'Église catholique avec l'État colonial belge et d'envisager le clergé autochtone et la décolonisation du Congo, du Rwanda et du Burundi comme enjeux des relations entre la Belgique et le Siège apostolique.
Quand les grands-parents racontent... L'évolution des souvenirs (post)coloniaux dans les familles d'ascendance congolaise en Belgique (1950-2022)
Marta Bernardino - Promotrice : Anne-Sophie Gijs
Cette recherche doctorale vise d’une part à étudier les mémoires des doyens belgo-congolais relatives à la période 1950-1965 et d’autre part à retracer l’évolution de la transmission des souvenirs et à analyser leurs résonances sur la construction identitaire de leurs descendants en Belgique aujourd’hui. Elle répond, par ailleurs, à l’urgence de sauvegarder ces mémoires. Elle s’articulera en deux phases. La première consiste à interroger par questionnaire 100 familles dont les aînés belgo-congolais ont des souvenirs de cette période, ainsi que leurs descendants. La seconde consiste à interviewer de manière plus approfondie 10 familles (sélectionnées parmi les 100 déjà interrogées), à raison d’un membre par génération. Cette recherche contribuera donc à renforcer la visibilité des voix belgo- congolaises, à décoder les liens entre enjeux mémoriels et identitaires, et fait le pari d’une co-construction d’un savoir historique partagé.
Les finalités des enseignants en histoire dans l'enseignement secondaire belge francophone
Mathieu Godefroid - Promoteur : Mathieu Bouhon
Notre projet de recherche s’intéresse aux finalités que les enseignants poursuivent en classe d’histoire dans l’enseignement secondaire belge francophone dans un contexte d’effacement du modèle culturel de l’École moderne. Cet objectif se décline en deux questions précises : Quelles sont les conceptions des enseignants à propos des finalités du cours d’histoire? Quels objectifs poursuivent-ils réellement dans le cours de l’action en classe d’histoire?
Pour répondre à ces questions, le projet propose de questionner les conceptions des enseignants par le biais d’un questionnaire et par l’intermédiaire d’entretiens.
BELTRANS Traductions littéraires intra-belges depuis 1970 : l'histoire en traduction (2021-2025)
Clara Folie - Promoteurs : Emmanue Debruyne et Stéphanie Vanasten (INCAL-ECR)
Cette recherche s’inscrit au sein du projet collectif Traductions littéraires intra-belges depuis 1970 (BELTRANS, UCL-KUL-KBR), qui a pour objet d’étudier l’histoire inédite des flux de traductions en Belgique entre le français et le néerlandais pour la période 1970-2020.
À partir d’une base de données, notre objectif est d’étudier les flux de traductions d’une perspective historique sur différentes thématiques dans des ouvrages belges, dont les Première et Deuxième guerres mondiales, et les questions relatives au passé colonial de la Belgique au Congo, Rwanda et Burundi, ses suites et conséquences. Cela tout d’abord au sein du corpus de la non-fiction et de l’histoire scientifique, mais aussi plus généralement la production livresque à caractère historique, dans les genres littéraires de la bande dessinée, de la littérature de jeunesse, des fictions.
Nous étudions ce qui est traduit, à propos de thématiques historiques, quand et pourquoi. Cela pour permettre une étude des enjeux, asymétries, décalages, incompréhensions et dispersions dans le traitement mémoriel de ces événements et l’impact identitaire entre les deux communautés linguistiques. Comment ces traductions sont-elles encadrées, reçues et participent ainsi ou non à un traitement commun, une construction identitaire ou une fragmentation de la mémoire belge ; mais aussi à des échanges, transferts, une perception et connaissance mutuelle entre les deux communautés linguistiques . Nous nous penchons également sur les acteurs, réseaux, stratégies et politiques de traduction en Belgique à la lumière des enjeux culturels, économiques, identitaires, politiques, le tout en contextualisant ces flux dans une période de fédéralisation croissante de la Belgique.
Patrimoine, identité locale et réseaux savants. Alexandre Wiltheim et l'antiquarisme dans le duché de Luxembourg au 17e siècle
Olivier Latteur - Promotrice : Françoise Van Haeperen
Ce projet de recherche postdoctoral (novembre 2021-septembre 2023) s’inscrit dans la continuité de ma thèse qui portait sur la perception des vestiges antiques dans l’espace des Pays-Bas méridionaux (Belgique, Luxembourg et nord de la France actuels) à l’époque moderne (1565-1794). Le séjour postdoctoral réalisé à l’Université du Luxembourg (15 septembre – 15 décembre 2022), au sein de l’Institute of History – IHIST (sous la supervision des Prof. Andrea Binsfeld et Monique Weis), en constitue le point d’orgue. Ce projet vise principalement à approfondir mes recherches sur l’un des auteurs que j’ai le plus exploités dans le cadre de mes recherches : l’érudit luxembourgeois Alexandre Wiltheim (1604-1684). Les écrits de Wiltheim, qui décrivent le passé antique du Luxembourg et ses différents vestiges, constituent un témoignage de premier ordre tant sur l’occupation romaine de la région que sur la vie et les réseaux intellectuels au 17e siècle ainsi que sur les enjeux identitaires à cette époque et dans cet espace. Plus largement, il me permet de mener à bien des investigations complémentaires dans les archives et bibliothèques (en particulier les Archives nationales de Luxembourg et la Bibliothèque nationale du Luxembourg), en vue de la publication de ma thèse et du développement de futurs projets de recherche. Il comprend en outre de nombreuses communications scientifiques destinées à des publics divers (colloques scientifiques, conférences grand public, cours universitaires…).
Les voix de la guerre : requêtes, complaintes et conflits militaires à la fin du Moyen Âge (Angleterre, France et principautés bourguignonnes, 1415-1485)
Quentin Verreycken - Promoteur : Xavier Rousseaux
Dans quelle mesure les guerres et leurs ravages modifient-ils les relations entre monarque et sujets à la fin du Moyen Âge ? Le dialogue politique est-il rompu ou au contraire renforcé ? Face à la propagande royale ou princière, comment les sujets expriment-ils leurs opinions et cherchent-ils à tirer leur épingle du jeu ? Ce projet propose une étude comparative des requêtes et de la littérature de complainte relatives à la guerre en Angleterre, en France et dans l’espace bourguignon (anciens Pays-Bas, Bourgogne et Franche-Comté) entre 1415 et 1485. Les requêtes soumises aux souverains et les complaintes (poèmes, pamphlets et chansons politiques) circulant parmi la population sont des sources privilégiées pour étudier les « voix » de ceux faisant l’expérience de la guerre et cherchant en retour à exprimer une demande ou un grief. Elles constituent deux formes de communication politique complémentaires utilisées en période de guerre afin d’interpeller le monarque ou l’opinion. Parfois subversives ou contestataires, requêtes et complaintes en appellent néanmoins fréquemment à la bénévolence du prince et participent donc à l’affirmation de sa souveraineté. Ce projet vise ainsi à étudier les différentes réponses des sujets face aux troubles causés par la guerre dans trois espaces politiques. La recherche analysera les usages et la circulation des requêtes et complaintes, comment elles permettent de négocier avec le souverain et dans quelle mesure elles parviennent à mobiliser l’opinion afin de manifester une contestation. Ce faisant, ce projet apportera une meilleure compréhension quant à l’impact de la guerre sur la communication politique à la fin du Moyen Âge.
Représentations sociales et pratiques déclarées des enseignants d'histoire à Bukavu : quelle place pour la question environnementale en classe d'histoire ?
Christian Chiza - Promoteur : Mathieur Bouhon
Le projet de recherche mené porte sur l’introduction de la question environnementale comme objet d’enseignement en classe d’histoire au Congo. Un tel projet s’inscrit dans un contexte fait d’opportunités, mais aussi d’obstacles. Le chercheur s’interroge sur les conceptions de l’enseignement de l’histoire et de l’environnement des enseignants d’histoire de Bukavu.
Le journal ecclésiastique du Joseph Dinouart (1760-1786). Une étude sur les pratiques et les expressions de la culture confessionnelle catholiqu en France à la fin du XVIIIe siècle
Théo Burnel - Promoteur : Jean-Pascal Gay
L’étude est composée de quatre séquences. La première retrace l’« aventure » du Journal ecclésiastique, de la publication à son acquisition. Elle est une histoire du livre. Ensuite, les acteurs de l’imprimé périodique sont étudiés et présentés, aussi bien les auteurs que les lecteurs. Elle est une histoire sociale. La troisième partie est une histoire de la fabrique du savoir théologique, étudiée par la dialectique constante entre les différents acteurs du journal. La thèse se termine par la qualification de la culture confessionnelle étudiée (son gallicanisme, sa théologie, sa disciplinarisation, etc).
La pratique des rouleaux mortuaires. Une écriture collective de la mémoire (VIIIe s. - première moitié du VIIIe s.)
Eléonore Venturelli - Promoteur : Paul Bertrand (UCLouvain) et promotrice : Cécie Treffort (Université de Poitiers)
Objets d’histoire complexes, les rouleaux mortuaires sont des documents commémoratifs itinérants élaborés, entre autres, pour célébrer la mémoire de défunts particuliers et pour susciter l’intercession de la communauté de prière qu’ils construisent.
La thèse cherche à comprendre la construction de la pratique des « rouleaux des morts » entre le VIIIe s. et la première moitié du XIIIe s. Son deuxième objectif principal est de saisir le processus de construction matérielle, intellectuelle et littéraire d’un rouleau des morts.
Vivre la violence en temps de guerre confessionnelle : genre et religion dans une armée catholique. L'armée des Flandres (1568-1648)/Facing violence in a confessional War. Gender and Religion in a Catholic Army. The Army of Flanders (1568-1648)
Silvia Mostaccio - Financement : FNRS, CDR, 20121-2022
Ce projet a pour cadre l’armée des Flandres, active le long du Camino Español reliant l’Italie aux Flandres, et tout particulièrement ses militaires et civils espagnols et italiens, issus de milieux catholiques confessionnellement homogènes qui ont été actifs aux extrémités du Camino (Italie du Nord et Flandres). Les guerres de Quatre-Vingts Ans et de Trente Ans (1568-1648) créèrent un état de conflit permanent, avec des conséquences majeures pour des générations entières. Le projet porte sur les hommes et les femmes qui partagèrent à différents titres la vie de l’armée des Flandres, en mettant au centre du questionnement deux systèmes de pouvoir: la religion et le genre. En prenant en compte le caractère socialement hétérogène d’une armée, ainsi que la dimension relationnelle de toute étude genrée (notamment les relations des couples et le rôle des femmes dans les familles transfrontalières), il s’agit de vérifier comment genre et religion ont interagi, en façonnant les rapports de sexe, le jeu des masculinités et des féminités, les systèmes symboliques et les pratiques religieuses qui permirent de dire la violence, de la justifier et/ou d’y survivre. La dimension religieuse est envisagée ici comme un espace de construction de soi et de relation au monde en temps de guerre. La mixité sociale d’une armée permet de sortir de la seule histoire des élites. Ainsi l’étude des dévotions liminales pratiquées autour de l’armée des Flandres entend élargir la perspective au-delà des dévotions imposées par les spécialistes du sacré (notamment les aumôniers) et par les autorités militaires et politiques, en analysant la capacité d’action des groupes subalternes à travers leur créativité dévotionnelle, face à la mort et à la violence de la guerre.
Silvia Mostaccio est historienne et chercheuse résidente auprès de l’École française de Rome (septembre-décembre 2020). Son projet en cours est consacré à Vivre la violence en temps de guerre. Genre, religion et résilience dans l’Europe espagnole à la première modernité.
« Spécialiste en histoire culturelle à l’articulation entre obéissance religieuse et exercice du pouvoir à l’époque moderne -Compagnie de Jésus et congrégations religieuses féminines-, depuis quelques années mes intérêts se concentrent autour de religion, genre, guerre et violence. Je vise une armée catholique bien spécifique, l’armée des Flandres, active le long du Camino Español reliant l’Italie aux Flandres (1568-1648). A l’époque l’état de guerre est permanent et la séparation entre armée et civils est très floue : on loge chez les habitants et les soldats se déplacent souvent avec (leurs) femmes et (leurs) enfants. A la mixité des genres s’ajoute évidemment la mixité sociale, dont la hiérarchie militaire est un reflet. L’armée des Flandres est donc un objet d’enquête efficace pour le dépassement de binarisations simplistes -homme/femme; soldat/civil-. Elle permet d’étudier différentes catégories dans les rapports entre eux/elles et face au sacré: du général, au soldat, à l’aumônier militaire; de la femme suiveuse, à la prostituée, à la religieuse, à l’aristocrate qui gère les affaires de famille en l’absence du mari. Cette entreprise guerrière eut des conséquences majeures au niveau des individus et des collectivités, des couples et des familles et la composante religieuse y fut essentielle: non seulement pour légitimer l’action militaire, mais aussi pour le travail d’acculturation confessionnelle via les missionnaires à l’armée, et encore pour la nécessité de donner du sens à la violence subie ou infligée -à cet égard l’étude des dévotions liminales des groupes subalternes est très porteur-. Cette recherche se situe donc au croisement entre représentations, croyances et pratiques pour étudier les rapports religieux de genre: une histoire inclusive d’hommes et de femmes entre guerre et religion »
Silvia Mostaccio est professeure associée d’histoire moderne à l’UCLouvain (BE). Active dans les instituts de recherche IACCHOS et RSCS, elle est membre des centres LaRHis et Gemca, ainsi que du GREG (groupe de recherche en études de genre).
Mots clé : genre et religion ; violence et religion ; genre et guerre ; catholicisme aux temps modernes ; ordres religieux ; jésuites ; armée des Flandres ; histoire culturelle, religion et sphère publique.
This project deals with the Army of Flanders, active along the Camino Español linking Italy to Flanders, and in particular with its Spanish and Italian military and civilians coming from confessionally homogenous Catholic backgrounds, who were active at the extremities of the Camino (Northern Italy and Flanders). The Eighty Years' and Thirty Years' Wars (1568-1648) created a state of permanent conflict, with major consequences for entire generations. The project focuses on the men and women who shared the life of the army of Flanders in various roles, placing two systems of power at the centre of the questioning: religion and gender. The project takes into account the socially heterogeneous nature of an army, as well as the relational dimension of any gendered investigation (especially the relationships of couples and the role of women in cross-border families).
The aim is to verify how gender and religion interacted, shaping gender relationships, the interplay of masculinities and femininities, the symbolic systems and religious practices that made it possible to express, justify and/or survive violence. The religious dimension is considered here as a space for self-construction and relationship to the world in wartime. The social diversity of an army allows us to get beyond the history of the elites. Thus the investigation of the liminal devotions practiced around the army of Flanders intends to broaden the perspective beyond the devotions imposed by the sacred specialists (notably the chaplains) and by the military and political authorities, by analyzing the agency of the subaltern groups through their devotional creativity, in the face of the death and the violence of war.
Le Québec à travers l'animal. Organisation urbaine et rapports des colons à l'environnement faunique (1608-1844)
William Riguelle - Promoteur et promotrice : Silvia Mostaccio (UCLouvain) et Donald Fyson (Université Laval)
À une époque où la question du rapport de l’être humain au monde animal est au cœur des préoccupations et où éclot une réflexion d’ordre philosophique sur l’homme, son identité et sa place au sein de l’environnement, cette recherche propose de mettre notre actualité en perspective et d’interroger les relations anthropozoologiques dans le passé. Il sera plus spécifiquement question du milieu urbain canadien, un espace où l’animal est omniprésent, façonnant le paysage et participant à la vie économique, sociale et politique de l’agglomération. La période traitée s’échelonne du début du XVIIe siècle aux années 1840, permettant ainsi d’offrir une étude inédite sur le plan historiographique. L’objectif est double et vise les acteurs du passé et leur environnement. D’un côté, il s’agit d’étudier l’homme au regard de ses interactions avec l’animal dans un contexte colonial où s’affrontent deux visions de la nature, celle des autochtones et celle des colons européens. De l’autre, il est question de la construction et de la gestion de la ville, auxquelles sont intégrés les animaux qui y vivent et circulent. Cette double approche permettra d’enrichir les connaissances du milieu urbain canadien d’Ancien Régime, ainsi que de percevoir les stratégies et les attitudes des Européens dans un contexte environnemental et culturel bien différent du leur.
Quebec through the Animal: Urban Organization and Settlers’ Relationships to the Wildlife Environment (1608-1844)
At a time when the question of the relationship between human beings and animals is at the heart of concerns and when a philosophical reflection on Man, our identity and our place within the environment is emerging, this research offers an overview of our current situation and questions the anthropozoological relationships in former times. More specifically, it will focus on the Canadian urban environment, an area where animals have always been omnipresent, have shaped the landscape and have participated in the economic, social and political life.The period covered ranges from the early 17th century to the 1840s, thereby providing an unprecedented study from an historiographical point of view.The objective is twofold: the actors of the past and their environment. First, the study will concentrate on the interactions between men and animals, in a colonial context with two conflicting visions of nature, that of the natives opposed to that of the European settlers. Then, the focus will be laid on the construction and management of the city, in which the animals that live and move around there take part. This two-pronged approach will enrich our knowledge of the Canadian urban environment in the Ancien Régime and provide insights into the Europeans’ strategies and attitudes within an environmental and cultural context that was very different from their own.
Être bons parents. Les transformations des rôles parentaux et de la régularisation de leur exercice (Belgique, 1945-2015)
Margaux Roberti-Lintermans - Projet ARC BPArent - Promotrice : Aurore François
Intégrée dans le projet interdisciplinaire BParent. Parental burnout and its consequences for children : Towards an integrated and multilevel approach (Promoteurs : I. Roskam (coord.), I. Aujoulat, A. François, M. Mikolajczak, A. Heeren - ARC Grant) finançant 5 thèses autour de la problématique du burn out parental, la thèse a pour objet d'étude les transformations des rôles parentaux et la régulation de leur exercice sur la période de 1945 à 2015 en Belgique. Durant cette période, la famille est identifiée comme le noyau essentiel pour le bien-être et le développement de l'enfant, par sa fonction affective, mise en évidence par de nouveaux savoirs psy. La définition progressive et évolutive des rôles parentaux, au coeur de la thèse, s'inscrit dans deux changements sociétaux majeurs. D'une part, la transition d'un État de providence vers un État social actif encourageant un modèle d'efficacité et de performance basé sur une responsabilisation individuelle, et d'autre part, la redéfinition des familles dans un contexte de promotion de l'égalité femme-homme, passant notamment par une baisse de la natalité et de la nuptialité, une hausse des divorces et une multiplication des modalités du "faire famille".
En partant de l'étude du champ scientifique (productions scientifiques sur la parentalité), des discours sociaux normatifs (presse féminine, campagnes de prévention,...) et des politiques de soutien et de contrôle des familles (archives institutionnelles, rapports de terrain de travailleurs sociaux, cas judiciaires), la thèse entend donc étudier cette articulation entre d'une part, le développement et les mutations du modèle du "bon parent" - notamment en termes de multiplication et de complexification des exigences qu'il pose - et d'autre part, l'évolution à la fois des familles et du contexte sociétal dans lequel elles prennent place.
"C'est une femme qui tient beaucoup de l'homme, car elle pourvoit aux choses de la guerre et elle en raisonne" : Marie de Hongrie au regard de son rôle militaire
Jules Dejonckheere - Promoteur : Gilles Lecuppre
Personnalité incontournable de la première moitié du XVIe siècle, Marie de Hongrie, veuve de Louis II Jagellon et sœur de Charles Quint, est reine consort de Hongrie et de Bohême de 1522 à 1526, puis gouvernante des Pays-Bas espagnols au nom de son frère de 1531 à 1555. Au cours de ses vingt-quatre années de régence, Marie de Hongrie passe la moitié de celles-ci en guerre contre le royaume de France. Face à l’omniprésence des conflits, la régente prend la décision de s’engager personnellement (spécificité) dans la gestion courante de prérogatives alors traditionnellement réservées aux hommes : les affaires militaires. À titre d’exemples, elle s’implique dans l’organisation des fortifications et gère les finances afin de maintenir l’effort de guerre.
C’est cette relation à première vue antinomique au XVIe siècle entre femmes et guerre qui retiendra notre attention. Il s’agira d’une part de saisir l’implication militaire de Marie de Hongrie sur le plan technique, administratif et diplomatique et d'autre part, de revenir sur la communication politique qu’elle met en place à cet égard. Ainsi, sur base d’un corpus de sources variées (correspondance de la régente et d’ambassadeurs, récits de voyage, traités militaires, représentations iconographiques, inventaire de sa bibliothèque, etc.) notre thèse essayera de comprendre la personnalité de Marie de Hongrie et les rouages de sa régence au regard d’une analyse à la confluence du genre, de la guerre, du pouvoir et de la communication.
1Relation de l’ambassadeur vénitien Bernardo Navagaro à propos de Marie de Hongrie en 1546.
The evolution of the Belgian collective memories related to former collaborators and colonists (1944/1960-2020)
Louise Ballière - Promotrice : Anne-Sophie Gijs
In this research project, we aim to conduct analyses of the official and family narratives of two controversial episodes in the Belgian national past: the repression of collaboration after WWII and the return of Belgian colonists to Belgium in 1960 (after the independence of Congo). As we will demonstrate, these events have led to divergent memories. The project has two major objectives. First, it will explore the inescapable tension between public and private practices of remembrance, and between official and underground memories. Second, it will examine the transmission of memories across three generations. This innovative multilayered analysis will be possible thanks to the interdisciplinary dimension of the research team (political sciences, history and psychology). The project will determine and articulate the role of three main variables in the construction of these controversial pasts and their consequences for individuals and groups: (1) the degree of stigma (contextual variable), (2) the linguistic community (French speakers vs Dutch speakers), and (3) the generational dimension (G1: one of the children of the collaborator/colonist, G2: one of their grandchildren, G3: one of their great-grandchildren). From a methodological perspective, we will combine three main approaches: discourse analysis of a corpus of official speeches; interviews with families affected by the repression of collaborators or the return of colonists (across three generations); and experimental studies. Each of these methods will be conducted by two researchers from different disciplines working in tandem.
Dissidence et Migrations dans la Méditerranée. Anarchistes et émigration italienne vers le Sud et l'Est de la Méditerranée. Perspectives locales et globales (1850-1914)
Costantino Paonessa - Financement : FNRS - Promotrice : Silvia Mostaccio
À une époque où l'Europe s'inquiète de la pression migratoire et de la diffusion du djihadisme depuis le Sud/Est de la Méditerranée vers le Nord. La recherche de Costantino Paonessa analyserala trajectoire inverse qu'a pris un autre phénomène de migration/militarisme. L'étude décrira la diffusion du mouvement anarchiste dans les pays du Sud et l'Est de la Méditerranée (Tunisie, Egypte, villes portuaires de l'Empire ottoman) en ant que phénomène lié aux flux migratoires italiens dans la région, depuis la seconde moitié du XIXe siècle jusqu'au premier conflit mondial.
Les objectifs sont multiples :
Reconstruction historique de la présence anarchiste et des trajectoires militantes et intellectuelles des différents groupes locaux agissants dans des réseaux internationaux
Reconstruction de toute une partie de l'histoire de l'émigration italienne avec une attention renouvelée portée sur la classe ouvrière et sur les classes subalternes.
L'analyse du militarisme anarchiste italien en tant que mouvement transnational, agissant dans un contexte colonial (rapports intercommunautaires, eurocentrisme, racisme)
Bilan du militantisme anarchiste dans les pays étudiés
Remise en cause de certains paradigmes historiographiques (modernisme, réformiste)
Exprimer ses appartenances multiples : le cas des Thraces établis par l'Empire romain
Tiffany Bellon - Bourse de doctorant FSR - Promotrice : Françoise Van Haeperen
Les appartenances multiples des Thraces établis dans l'Empire romain, hors de leur région d'origine, constituent l'objet de la recherche. Les marques d'appartenances, que révèlent les sources épigraphiques, seront analysées au niveau des relations sociales, de l'onomastique, des pratiques culturelles, de l'origine géographique. Il s'agira d'établir dans quelle mesure les Thraces se réfèrent à leur culture d'origine ou à leur société d'acceuil et de comprendre comment ils négocient leurs différentes appartenances, qu'ils agissent seuls ou collectivement. On s'interrogera ainsi sur les stratégies d'adaptation, qu'ils mettent en oeuvre, dans les situations interculturelles qu'ils vivent à Rome, en Italie et dans les provinces.
Le pouvoir des fleurs. Les usages politiques de la symbolique végétale dans l'Occident lati Chern, du XIIe au XVIe siècle
Catherine Garcia Garcia - Promoteurs : Gilles Lecuppre (UCLouvain) et Franck Collard (Université Paris-Nanterre)
Pour cette étude de sémiologie politique, l’objectif est de prendre la mesure du pouvoir symbolique des fleurs dans les mentalités de l’Occident médiéval, puis de déterminer comment ce thème symbolique a été mis au service des ambitions sociales et politiques des individus, des lignages et des communautés. Dans le corpus principal d’images et de descriptions d’armoiries et de devises (armoriaux, sceaux, chroniques), seront recherchés des symboles et emblèmes végétaux utilisés dans le dialogue entre gouvernants et gouvernés. Dans un corpus d’encyclopédies, on recherchera le sens que les contemporains donnaient aux fleurs. L’ambition d’ensemble est d’établir ce que ces données rassemblées peuvent apprendre sur la symbolique florale et la place des fleurs dans la vie matérielle et dans les sensibilités, ainsi que sur l’idéologie et les pratiques du pouvoir.
Madame Chaumont, femme d'affaires et Mississipienne namuroise. Mobilité sociale, réseaux d'affaires et stratégie familiale à l'aube des Lumières
Vincent Goffinet - Promotrice : Silvia Mostaccio
Jouant des opportunités d’affaires offertes au début du XVIIIe siècle par la guerre, les changements de régimes et les frontières mouvantes entre le royaume de France et les Pays-Bas méridionaux, une marchande de Namur, Marie-Catherine Baré, (1673-1762), épouse en 1694 du médecin Chaumont et mère prolifique, s’enrichit dans le financement hors de France des achats de vivres et de fourrage à destination de l’armée française des Flandres, à la fin de la guerre de Succession d’Espagne.
Banquière, elle multiplia sa fortune à Paris sous la Régence en investissant ses gains dans la compagnie des Indes et le système des finances de l’écossais John Law dont elle semble avoir été proche. Réalisant ses bénéfices avant l’éclatement de la bulle, elle investit ceux-ci dans des immeubles de prestige et de grands domaines en France et en Louisiane où elle participa à la tentative de la France d’établir une colonie de peuplement, y envoyant engagés et esclaves. Lourdement taxée comme spéculatrice lors de l’écroulement du Système, elle consacra les restes substantiels de sa fortune à l’établissement de sa descendance dans les hautes sphères de la société française et aux œuvres de bienfaisance jusqu’à sa mort à Paris à un âge avancé.
En suivant les étapes de ce parcours féminin, une attention particulière sera prêtée à la manière dont la femme mariée réussit à se ménager un espace d’autonomie pour ses affaires dans le cadre relativement étroit que lui imposent les coutumes et les pratiques tant aux Pays-Bas qu’en France. Il étudiera en particulier la place de la femme dans les milieux marchands et financiers puis dans la noblesse en France, son mode de fonctionnement au sein du couple, les relations avec sa descendance et sa parenté, ses réseaux et ses stratégies tant matrimoniales que patrimoniales.
Des princes cruels ? La place de la brutalité dans les modes de gouvernement à la fin du Moyen-Âge (France - Pays-Bas - Angleterre)
Marie-Hélène Méresse - Directeur : Gilles Lecuppre (UCLouvain) et co-directrice : Élodie Lecuppre-Desjardin (Lille)
À la fin du Moyen Âge, aux XIVe et XVe siècles, les modes de gouvernement évoluent : pour certains historiens et dans certains espaces (France et Angleterre), l’État dit « moderne » se met en place. Là, un pouvoir souverain centralisé se développe, incarné par la figure du prince et reposant en partie sur l’élaboration d’une obéissance sacralisée, du vassal au souverain. Ce dernier, corps physique et corps politique, représente l’autorité. Par sa puissance et sa majesté, il instaure, exprime et donne à voir le pouvoir qui doit être respecté et obéi. Cette société ainsi structurée et cette époque sont aussi celles d’une quête d'ordre public et de paix, pour laquelle, à l'intérieur du cadre social et politique et de ses hiérarchies, le recours à la violence est un moyen possible. Certes, de nombreux travaux ont été réalisés sur la place de la violence dans la société médiévale, qui voient en elle une composante de l’ordre social, servant au maintien de l’honneur et de la renommée, essentiels dans une société de l’apparence ; dans cette lecture, la société accepte alors la violence réparatrice, positive, celle qui rétablit l'ordre. Mais la violence prend une autre dimension lorsqu’elle émane de la personne du prince, et surtout lorsqu’elle sort des cadres où elle est communément admise. Les récits attachés aux princes de la fin du Moyen Âge témoignent d’actes violents qui ne se conforment pas à ces règles. Au-delà de la violence, c'est alors la cruauté de ces hommes éminents qui est dénoncée. Ponctuels ou inscrits dans la loi, ces actes sont à replacer dans le contexte d'un mouvement de plus grande ampleur. Participent-ils formellement à la construction de la souveraineté et, à plus long terme, à la marche de celle-ci vers l'absolutisme ? Peut-on dans ce cas considérer que l'instrumentalisation de la peur, induite par celle de la cruauté, participe à un nouveau mode de gouvernement en servant d'appui à la raison d'État ? C’est l’un des questionnements majeurs vers lesquels tendra cette étude, à travers les exemples des royaumes de France, d’Angleterre et des Pays-Bas, dispersés puis unifiés sous l’égide des ducs de Bourgogne.
L'Union internationale des villes dans les relations internationales (1913-1950)
Mathilde Collin - Promoteur : Vincent Dujardin
L’Union internationale des villes a été créée à Gand en 1913 et a établi son siège à Bruxelles jusqu’en 1951. Au-delà des objectifs d’échange d’informations administratives et techniques à propos de la gestion des villes, l’organisation, qui a bénéficié de plusieurs formes de soutien de la part de l’État belge, a eu des objectifs politiques sur la scène internationale.
L’objectif de la thèse est d’écrire cette histoire afin de comprendre les mécanismes et stratégies internes et externes par lesquels l’Union est parvenue à se frayer un chemin dans un système diplomatique mondial en pleine évolution.
Un accent sera mis sur l’étude des discours et des actes de l’organisation, en me focalisant sur ses objectifs politiques et les lieux qu’elle a investis. Par « lieu », j’entends aussi bien les lieux physiques comme ses locaux et les lieux de réunions que les instances de décision, les institutions et organisations qu’elle fréquente, les espaces géographiques au sein desquels elle fédère et influence, ou encore les espaces sociaux qu’elle sollicite.
Frédéric Crahay - Promoteur : Emmanuel Debruyne Effacer les traces, retrouver les traces. Les tentatives d'effacement de traces physiques ab ovo lors des génocides et crimes de masse au XXe siècle. Les cas de la Shoah et du massacre de Srebrenica
Le projet de recherche part de l’étude de deux tentatives d’effacement de traces de crime de masse perpétrées au XXe siècle : l’Aktion 1005 (1942-1945) des nazis et les ré-enterrements de corps dans des fosses secondaires ettertiaires en Bosnie (1er août – 1er novembre 1995) par l’armée serbe de Bosnie. Pour cela, des études de cas sont effectuées pour la Shoah, ainsi que pour Srebrenica. Il s’agit des centres d’extermination de Chełmno nad Nerem / Kulmhof et de Sobibór pour l’Aktion 1005 et Srebrenica et ses environs pour la seconde.
Plusieurs questionnements se démarquent en particulier :
• Comment l’archéologie a-t-elle été utilisée dans différents cas contre le négationnisme in ovo? L’archéologie liée à la Shoah a-t-elle influencé l’archéologie liée à la Bosnie (et vice versa)?
• Comment l’État nazi et l’armée de la République serbe de Bosnie ont-ils procédé à l’effacement des traces de leurs crimes?
• Dans quelle mesure l’entité criminelle a-t-elle réussi l’effacement de son crime?
• Comment les États actuels et les communautés gèrent-ils cette mémoire, en particulier avec les dépouilles des personnes assassinées, ainsi que leurs avoirs?
La recherche se fera par une approche comparative et inclut une recherche dans les archives (rapports de juges d’instruction), une recherche sur les terrains des excavations (conservation des artéfacts) et inclut une conception d’une base de données originale (interviews).
L'état belge face au risque ferroviaire. Analyse des politiques de sécurisation du rail de 1835-1926
Camille Berny - Promotrice : Aurore François
Ce travail de recherche doctorale s’insère dans l’histoire du risque, et plus particulièrement l’histoire du risque ferroviaire dans la société belge du XIXe siècle et début XXe siècle, avant la nationalisation des lignes de chemin de fer et la création de la Société Nationale des Chemins de fer (1835-1926), au prisme des dispositifs de sécurisation du rail belge et des catastrophes ferroviaires qui ont émaillé la première phase de l’histoire des chemins de fer belges. Le risque ferroviaire y est étudié dans sa globalité et la société y est reflétée dans sa temporalité, dans ses peurs, dans ses normes, dans la façon dont elle réagit. De même, par l’analyse des politiques publiques de sécurisation du rail, cette recherche tente d’y voir une évolution, en regard des outils et facettes du risque proposés par les sciences sociales, appliqués à la démarche historienne. Les Rapports du Ministère des Chemins de fer, postes et télégraphes, mais aussi les dossiers judiciaires, corpus médiatiques, enquêtes et débats parlementaires constituent autant de sources pour étudier le risque ferroviaire et son éventuel (non-)impact sur la gestion du rail permettant de saisir dans toute sa complexité la manière dont il questionnent le rapport à la technologie et à la sécurité.
Le Japon et l'Union européenne, 1985-2000. Entre dissensions économiques et rapprochement politique
Sophie Kaisin - Promoteur : Vincent Dujardin
L’accord de libre-échange entre le Japon et l’Union européenne constitue actuellement l’un des plus grands accords commerciaux au monde. Pourtant, les deux partenaires ont longtemps entretenu des rapports complexes, marqués par des tensions commerciales. Ce projet de thèse cherche à comprendre de quelle manière ils sont parvenus à dépasser leurs dissensions économiques pour initier un rapprochement politique qui donnera lieu à un véritable partenariat, proclamé lors d’un sommet bilatéral en 2000.
L’histoire internationale révèle l’importance des connexions ; cette recherche tente de déceler l’impact des liens politiques, réseaux économiques, échanges culturels, coopérations scientifiques ou contacts personnels sur les relations. L’action de personnalités tel le Premier ministre japonais Yasuhiro Nakasone ou le président de la Commission européenne Jacques Delors, à partir de 1985, a sans doute contribué au rapprochement des deux acteurs. De même, le contexte historique de la fin de la Guerre froide et l’accélération de la globalisation ont certainement joué un rôle majeur. Il faut aussi tenir compte de l’évolution de la politique américaine, la CEE/UE et le Japon entretenant des liens étroits avec les États-Unis. Par ailleurs, il s’agit d’envisager les freins au développement de la coopération, qu’ils soient liés à des intérêts économiques, politiques ou stratégiques, ou à des différences culturelles qui ont pu nuire à la compréhension mutuelle.
Il semble pertinent aujourd’hui d’entreprendre une recherche historique en profitant de l’ouverture des archives des institutions européennes, qui pourront être complétées par des entretiens avec d’anciens fonctionnaires européens et par le dépouillement des archives diplomatiques de l’un ou l’autre pays membres, la France par exemple. Enfin, afin de tenter d’appréhender le point de vue japonais, des documents diplomatiques, articles de presse, travaux scientifiques ou mémoires d’hommes politiques japonais, traduits en anglais, seront aussi mobilisés.
L'intégration des soldats originaires de Germanie dans l'armée romaine impériale
David Colling - Promotrice : Françoise Van Haeperen
L'objet de la thèse porte sur l'analyse des simples soldats originaires des provinces de Germanie, qui ont évolué dans les rangs de l'armée romaine impériale, ce qui constitue une démarche tout à fait originale. En effet, les historiens se sont intéressés depuis toujours à retracer l'histoire des grands généraux, des commandants et autres officiers, en retraçant l'impact qu'ils ont pu avoir sur l'institution militaire. Durant ce temps, les simples soldats étaient généralement relégués au second plan, bien que les sources ne manquent pas pour tenter une approche.
L'étude est essentiellement basée sur des sources de type épigraphique, telles que les inscriptions funéraires, religieuses, commémoratives ou administratives. Il s'agit d'analyser la carrière des militaires, leurs fonctions exercées au sein de l'armée, leurs dévotions religieuses, leurs lieux d'affectations, le rapport qu'ils entretenaient avec leur famille, leurs compagnons d'armes ou même avec la mort. L'étude porte non seulement sur les militaires germains, mais aussi sur les corps de troupes constitués dans ces provinces.
En analysant la place des simples soldats dans l'armée, c'est l'armée en tant que facteur d'intégration des provinciaux dans l'Empire qui est analysée. À travers les documents qu'ils nous ont transmis, les militaires ont laissé autant de traces d'expressions de leur origo - et ici, en l'occurence, leurs origines germaniques - que de traces de leur parfaite intégration dans la communis patria. Ces indices peuvent aussi bien résider dans l'onomastique que dans les pratiques religieuses. Il s'agit donc véritablement d'une étude sur la romanisation, vue par le prisme de l'institution militaire, à partir d'un cadre géographique précis : les provinces germaniques.
Les dieux, les réseaux et les hiérarchies divines dans les mines et les carrières de l'Empire romain
Federica Gatto - Promotrice : Françoise Van Haeperen
L’enquête intitulée « Les dieux des mines et des carrières à l’époque romaine », menée dans le cadre du projet « Roman Gods’ Networks » (PDR_FNRS T023419F, dirigé par Fr. Van Haeperen et Y. Berthelet - ULiège), est consacrée aux divinités honorées dans les contextes particuliers que sont les mines et les carrières de l’Empire romain. Ces sites à vocation professionnelle nous ont livré de nombreuses inscriptions, témoignant des dévotions des individus et communautés qui y œuvraient. Outre les zones d’extraction et de transformation des matières premières, ces contextes accueillent des lieux dédiés aux pratiques cultuelles. De manière plus ou moins systématique dans la topographie des gisements – et parfois faisant référence à un sanctuaire – des agents cultuels aux profils variés honorent différents dieux en leur offrant des dédicaces et en s’acquittant de vœux formulés. L’emplacement des mines et des carrières, endroits éloignés de la cité et, étant donné leur nature, partiellement indépendants des dynamiques socio-culturelles civiques, représentent des endroits privilégiés pour l’étude des pratiques religieuses. Dans un premier temps, notre intérêt se porte sur l’étude du profil personnel et professionnel des acteurs, en soulignant la nature des divinités qu’ils choisissent d’honorer. Une fois ces connaissances acquises et organisées, nous essayons de relier la tâche (quand celle-ci est spécifiée) ou une étape de la chaine opératoire avec la sphère d’influence du dieu ou de la déesse invoqués. Une telle systématisation nécessite une connaissance approfondie du fonctionnement de la « work chain », c’est-à-dire de la séquence constituée par des actions formalisées et répétées qui assurent le fonctionnement d’un site. Au terme d’une première année de recherche, nous pouvons désormais supposer l’existence de « panthéons miniers ». Par cette formule, nous entendons un groupe de divinités, attestées dans des carrières ou des mines, qui exercent leur propre puissance sur la mise en œuvre d’une compétence professionnelle déterminée (administrative ou pratique) ou sur la réussite de certains travaux ordinairement effectuées dans ce genre de contextes. Cela pourrait expliquer l’attestation répétée d’une série de divinités liées aux propriétés de la matière exploitée (par exemple l’or ou l’argent) et aux techniques utilisées pour son raffinage. La récurrence de certaines « séries divines » dans les gisements qui partagent la même vocation mais appartiennent à des cadres spatio-temporels indépendants, ferait donc penser à un lien consolidé et reconnu entre la sphère de compétence des dieux honorés et la chaine opératoire des metalla et lapicidinae.
Le rôle attribué à chaque individu – et les exigences pratiques occasionnées par chaque tâche, pourraient-ils être à la base du choix de l’une ou de l’autre divinité ? Le dévot intercepte-il le dieu pendant qu’il exerce sa fonction dans la chaine opératoire ?
Si les processus de formation supposés pour le « panthéon minier » s’avèrent réalistes et qu’on remarque des dynamiques constitutives similaires en différents contextes exploités à l'époque impériale, pourrait-on appliquer la même méthode d'investigation à l'échelle impériale et parler d’un réseau de « panthéons miniers » ?
L'analyse de plusieurs études de cas nous permettra de répondre à certaines de ces questions et de situer les résultats obtenus sur échelle régionale dans le contexte impérial plus large.
Jeanne de Brabant (1322-1406), son principat et ses duchés, une princesse pour une période ou une région négligée par l'Histoire ?
Camille Rutsaert - Promoteurs : Gilles Lecuppre (UCLouvain) et Éric Bousmar (Saint-Louis)
Jeanne de Brabant ayant vécu entre 1322 et 1406, et dirigé les duchés de Brabant et de Limbourg entre 1355 et 1406, son histoire coïncide avec celle de ces deux provinces sur plus de cinquante ans. Pourant, une bonne partie de cette histoire reste inexplorée et méconnue. Quelques contributions éparses n'ont pas permis de faire toute la lumière sur l'action et la personnalité de cette princesse.
La vie de Jeanne, ses relations et son entourage, son rôle politique et social, ses mariages et ses périodes de veuvage sont autant de sujets qui sont encore à explorer aujourd'hui. Notre recherche veut éclarier ce personnage qui tient un rôle central dans l'histoire du duché de Brabant et qui est le point pivot entre le pouvoir de la lignée des ducs de Brabant et celui des ducs Valois de Bourgogne. Quels rôles cette princesse tint-elle en politique ? Comment interagit-elle avec ses sujets, dont les villes ? Et avec les autres princes et seigneurs des Pays-Bas ? Comment vécut-elle ses deux unions, et surtout la longue période de son second veuvage ? De qui Jeann était-elle entourée et quels loisirs avait-elle ? Allait-elle souvent à la chasse , avait-elle une belle bibliothèque ? Cette duchesse fut-elle une grande mécène ?
La dernière duchesse de Brabant eut une longue vie, certainement pleine d'évènements qu'il est, aujourd'hui, de notre ressort de découvrir et d'expliquer. Les propos des sources narratives, les actes et les sceaux, et les diverses autres sources de la pratique et vestiges archéologiques sont autant d'accès qui permettent de mener cette recherche, et peut-être, de le lever le voile sur l'histoire d'une famme, d'un principat et d'une société.
Ce projet a abordé pour la première fois ensemble trois des plus grandes controverses au sein du monde catholique dans la première moitié du XVIIIe siècle : la querelle des « rites chinois », celle des « rites malabares » et le débat autour de la communicatio in sacris dans l’Empire ottoman et en Perse. Ces problèmes n’ont pas seulement déchiré les ordres missionnaires qui travaillaient en Orient, mais ils ont eu également un fort impact dans les polémiques européennes de l’époque. Jusqu’à présent la relation entre la question des rites confucéens pratiqués par les néophytes chinois, celle des éléments hindous dans la vie religieuse des chrétiens de la côte sud-orientale de l'Inde et le problème de la participation commune ou indifférenciée aux sacrements entre catholiques et orthodoxes au Moyen Orient n’a pas été étudiée en profondeur ou avec une approche vraiment comparative. Pourtant, ces trois questions ont été examinées et définies dans le même lieu (Rome), au même moment (les premières décennies du XVIIIe siècle) et par les mêmes hommes : les « consulteurs » du Saint- Office. Qui étaient-ils ? Quelle était leur formation ? Sur la base de quels arguments ont-ils résolu les doutes soumis par les religieux sur le terrain, en jugeant licites ou illicites certaines pratiques ? La réponse à ces questions peut aider à reconstruire les articulations problématiques par lesquelles le sommet de l'Eglise romaine a essayé de réglementer les efforts de construire un catholicisme « différent » et « adapté » aux territoires de mission. Déplacer l’attention du rôle des missionnaires vers celui des docteurs et bureaucrates romains permet d’éclaircir le processus de décision de l'Église catholique et son fonctionnement effectif, conduisant à une compréhension vraiment « connectée » des controverses soulevées par l’expansion du catholicisme à l’échelle mondiale.
En plus de ce projet, le chercheur a poursuivi également de façon parallèle une recherche plus spécifique sur le contrôle confessionnel exercé par le Saint-Office sur les chrétiens orientaux. Dans le même fonds d’archives qui conserve les votes des consulteurs, il a en effet découvert les registres des professions de foi des Grecs, Arméniens, Melkites, etc. arrivés à Rome entre 1650-1800. À partir de cette source extraordinaire, qui note également leurs données biographiques et leurs souscriptions personnelles, il a voulu construire une base de données prosopographique. Cela a permis d’un côté de comprendre les logiques religieuses et non économiques de cette mobilité méditerranéenne et, de l’autre, de mieux saisir les modalités de contrôle social et confessionnel mises alors en place par les autorités ecclésiastiques et étatiques européennes.
Olivier Latteur a reçu le prix Robert Beaujean de la Fondation Roi Baudoin
La période moderne se caractérise par la redécouverte de l’Antiquité classique et par le développement d’un sentiment d’admiration à l’égard de cette période : les vestiges monumentaux remontant à cette époque ont alors suscité un intérêt certain au sein des milieux érudits et des populations locales. Cette recherche doctorale entend aborder la question de la réception et de la « survivance » des vestiges antiques situés dans les Pays-Bas méridionaux et la principauté de Liège. Profitant des apports récents de l’historiographie anglaise et française en matière de réception des monuments antiques, elle ambitionne d’apporter un éclairage novateur sur l’impact de ces vestiges aussi bien dans l’espace que dans les imaginaires collectifs. Deux principaux axes de recherche ont été envisagés : le premier portait sur l’impact paysager de ces vestiges et sur leur réutilisation à des fins utilitaires ; le second abordait la question de leur étude et de leur interprétation ainsi que leurs liens avec la construction des identités locales et régionales.
La qualité de l’alimentation est une préoccupation majeure de notre société et sa supervision est devenue une responsabilité gouvernementale élémentaire. Cette situation est héritière d’évolutions qui se sont opérées au XIXe siècle.
L’objectif de cette thèse était de comprendre ce qui a déterminé les gouvernants et plus particulièrement l’État belge, à apporter des réponses à certains problèmes générateurs d’insécurité alimentaire qui se sont posés entre 1830 et 1900. Par quel(s) processus un problème est-il pris en charge par le développement de politiques publiques ? De quelle manière les limites de l’action publique se (re)définissent-elles ? Quels sont les facteurs influençant les modalités de l’intervention ?
Le renouvellement de l’action publique est appréhendé comme résultant de la mobilisation d’acteurs divers, mus par des intérêts multiples qu’il convient de saisir dans toute leur complexité. Une attention soutenue est également apportée à la temporalité de l’action. Les périodes de crises – économiques, sociales, sanitaires – qui jalonnent la période envisagée correspondent à des moments de cristallisation des tensions, ce qui en fait des instants privilégiés de prise de décision.
Il s'agissait donc d’étudier les dynamiques sous-tendant la construction des normes, mais également leur traduction institutionnelle. La transformation de certaines questions en domaines d’action et la mise en place de nouveaux instruments de gouvernance sont examinées comme le reflet des mutations du rôle de l’État.
Cette thèse proposait de se pencher sur les discours et les pratiques des hommes à l’égard des animaux en milieu urbain dans les Pays-Bas méridionaux et la principauté de Liège aux XVIIe et XVIIIe siècles. L’animal fournit de précieux renseignements sur l’être humain et son rapport à la nature en même temps qu’il constitue un excellent indicateur pour éclairer la gestion publique de l’espace urbain. Cette recherche ne s’inscrit donc pas dans le « tournant animaliste » s’attachant à écrire l’histoire de l’animal du point de vue animal : la visée est anthropologique, se limitant aux représentations, aux décisions et aux faits humains, et non éthologique. Au cœur de l’analyse se situent l’homme et la ville, que nous abordons par le prisme du monde animal, qui cohabite avec celui des humains dans une grande proximité au sein du milieu urbain de l’Ancien Régime – par le biais notamment des transports, du divertissement ou encore de la compagnie. Champs d’investigation en pleine expansion dans les sciences humaines et sociales depuis la décennie 1980, l’étude des relations anthropzoologiques nécessite le recours à des sources diverses. Celles utilisées sont dès lors variées – règlements de police, enquêtes, journaux, littératures scientifiques, archives de certains métiers, etc. – et intègrent tout un volet iconographique composé pour l’essentiel de portraits et de vues de ville.
Dans quelle mesure les guerres et leurs ravages modifient-ils les relations entre monarque et sujets à la fin du Moyen Âge ? Le dialogue politique est-il rompu ou au contraire renforcé ? Face à la propagande royale ou princière, comment les sujets expriment-ils leurs opinions et cherchent-ils à tirer leur épingle du jeu ? Ce projet proposait une étude comparative des requêtes et de la littérature de complainte relatives à la guerre en Angleterre, en France et dans l’espace bourguignon (anciens Pays-Bas, Bourgogne et Franche-Comté) entre 1415 et 1485. Les requêtes soumises aux souverains et les complaintes (poèmes, pamphlets et chansons politiques) circulant parmi la population sont des sources privilégiées pour étudier les « voix » de ceux faisant l’expérience de la guerre et cherchant en retour à exprimer une demande ou un grief. Elles constituent deux formes de communication politique complémentaires utilisées en période de guerre afin d’interpeller le monarque ou l’opinion. Parfois subversives ou contestataires, requêtes et complaintes en appellent néanmoins fréquemment à la bénévolence du prince et participent donc à l’affirmation de sa souveraineté. Ce projet visait ainsi à étudier les différentes réponses des sujets face aux troubles causés par la guerre dans trois espaces politiques. La recherche a analysé les usages et la circulation des requêtes et complaintes, comment elles permettent de négocier avec le souverain et dans quelle mesure elles parviennent à mobiliser l’opinion afin de manifester une contestation. Ce faisant, ce projet a apporté une meilleure compréhension quant à l’impact de la guerre sur la communication politique à la fin du Moyen Âge.
Entre 1914 et 1918, la Belgique et dix départements du nord de la France connaissent l’occupation allemande. Les armées impériales qui y ont installé leurs quartiers tout comme les administrations civilo militaires d’occupation sont désormais directement en contact avec les populations civiles. Pour protéger les dignitaires et le secret militaires, trois forces de police sont établies : la Geheime Feldpolizei auprès de chaque armée, la Zentralpolizeistelle dans le Gouvernement général et la Feldpolizei des Marinekorps dans la zone gérée par la Marine. Plusieurs centaines de policiers allemands, professionnels ou néophytes, y sont intégrés, auxquels sont par ailleurs attachés des agents recrutés parmi les communautés locales. Chargées d’abord de contre‐espionnage, ces polices voient leur champ de compétence considérablement augmenter au cours du conflit, alors qu’elles manquent systématiquement de moyens matériels et humains pour répondre aux menaces qu’elles perçoivent partout. La crainte que développe l’occupant à l’égard des occupés conduit les polices secrètes à devenir de réelles actrices de l’occupation et à intervenir dans des situations sans lien direct avec la protection de l'armée. À travers l’étude de leurs structures, leurs activités et des acteurs qui les composent, il s’agissait de comprendre comment ces polices participent à des logiques d’occupation, variant à la fois dans le temps et dans l’espace, mises en place par un occupant qui cherche d’abord à soutenir l’effort de guerre de l’empire.
Dans la France du début du XIXe siècle, Marie Madeleine de Bengy de Bonnault d’Houët (1781-1858) fonde les fidèles compagnes de Jésus, afin d'« être jésuite ». Que signifiait l'utilisation du modèle jésuite comme instrument d'action ? Quelles sont les constructions identitaires, tant masculines que féminines, qui émergent de cette initiative ? En partant d'une approche au croisement entre genre et religion, basée sur des sources écrites produites par des femmes et des hommes, ainsi que des sources institutionnelles, il s'agissait de faire l'histoire du rapport entre les sexes au niveau individuel, à partir de la fondatrice et des jésuites de son entourage, et au niveau collectif, à partir de l'enjeu d'institutionnalisation de la congrégation nouvellement créée, face à la Compagnie de Jésus et aux Congrégations de la curie romaine. Devant cette proposition de vie religieuse féminine, la réponse de l'Église est plurielle, se traduisant par des conflits comme des collaborations, indépendamment de ses niveaux hiérarchiques et géographiques.
Deux fondements de la légitimation ont guidé cette recherche : celui du parcours d'une femme et de ses conditions d'accès à l'autorité dans un dispositif masculin, mais également celui d'une femme en marge de l'Église devenue candidate à la sainteté. Le corpus hagiographique, composé de multiples formes de récits et des positiones, oscille entre plusieurs représentations genrées de Madame d'Houët, pour finalement valider une féminité qui échappe à ce qui est perçu comme les limites de son sexe tout en se conformant à l'idéal de la fondatrice.
La quantité de documents électroniques produits par les organisations est aujourd'hui telle que l'on assiste à de nombreuses pertes d'information, y compris du fait d'un mécanisme de dilution : l'information est conservée, mais au sein d'une masse de documents si vaste qu'elle ne peut être retrouvée. Le procès-verbal de réunion est à cet égard particulièrement exemplaire : document engageant les parties prenantes, il constitue à la fois un outil de communication et un référentiel en matière décisionnelle. Le développement d'outils d'indexation de l'information contenue dans ce type de document constitue par conséquent un enjeu majeur pour les sciences documentaires.
Le recours aux métadonnées descriptives est désormais une piste privilégiée pour répondre à cet objectif. Toutefois le travail d'encodage de ces métadonnées, par les producteurs eux-mêmes ou par des documentalistes, est bien souvent négligé faute de temps, mais aussi parce que le personnel administratif a le sentiment, en encodant ces mots-clés descripteurs, de reproduire sur les métadonnées des opérations déjà réalisées via l'encodage des données elles-mêmes.
Ce projet, qui a associé archivistique et traitement automatique du langage, avait pour objectif le développement d’une solution d’extraction textuelle automatique afin d’une part d’enrichir les différents documents d’un ensemble rigoureux de métadonnées et d’autre part d’assurer un accès intelligent à l’information qu’ils contiennent – de manière à faciliter le suivi des dossiers.
Démarches et livrables :
- Campagne d’interviews réalisée au sein d’entités UCLouvain, qui ont permis de cartographier la diversité des pratiques et procédures entourant la rédaction, la description et la mise en accès des procès-verbaux de réunions produits au sein de leur administration.
- Analyse des besoins des différentes entités servant de base à la rédaction d’une liste de métadonnées, notamment en termes de critères de recherche d’information. Une liste de demandes types nécessitant des recherches dans les PV par le personnel administratif a été dressée.
- Schéma d’extraction mis en œuvre, consistant en une liste de métadonnées établie, en se basant sur des normes et standards internationaux : Dublin Core, MODS et PREMIS.
- Développement d’un extracteur sur base du schéma d’extraction, permettant d’identifier et de structurer les informations essentielles d’un PV : les requêtes formulées, les questions posées, les réponses éventuelles, les décisions prises et les interventions rapportées.
- Interface de démonstration, développée afin de faciliter le travail d’évaluation de l’outil. L’outil atteint aujourd’hui une précision de 98,5% et une couverture (ou rappel) de 68%. L’évaluation permet d’identifier un certain nombre de structures qui devront être implémentées afin d’augmenter la couverture du système.
Le projet s’intéressait à la problématique du retour du religieux dans l’Égypte contemporaine en contexte urbain depuis les années 1970. L’étude a consisté en une comparaison entre les attitudes des chrétiens et des musulmans dans deux espaces contrastés du Caire : un quartier de classe moyenne (Shubra) et un quartier informel (Manshiyyat Naser). Les dynamiques propres à chaque communauté seront mises en évidence ainsi que les interactions entre les fidèles des deux religions. Le but de l’enquête est de décentrer le regard – le plus souvent focalisé sur l’islam – pour dégager les facteurs communs ou divergents (sociaux, économiques, religieux ou politiques) qui permettent d’expliquer la forte communautarisation qu’a connu l’Égypte durant les 40 dernières années. Pour y arriver, j'ai procédé à une enquête de terrain auprès de groupes mixtes chrétiens/musulmans (des associations, des écoles ou des partis politiques par exemple), mais aussi dans des milieux regroupant les membres d’une même communauté comme des familles ou des associations pieuses. J'ai abordé ainsi les dynamiques interconfessionnelles dans le contexte postrévolutionnaire et les stratégies de tension ou de cohabitation mises en œuvre par les coptes et les musulmans. Le volet historique du projet a visé, quant à lui, à retracer la dynamique constitutive du lien social et religieux. L’histoire des acteurs et associations suivis dans le cadre de l’étude de terrain a été ainsi retracée minutieusement, notamment au travers de récits de vie. J'ai été également attentif à retracer la perception de ces deux quartiers qui ont été évoqués dans de nombreux articles de presse, dans des films documentaires ou de fictions et même dans des romans. Cette démarche s'est inscrit dans une perspective d’histoire régressive, recourant à la fois aux documents écrits et aux témoignages oraux.
Bien que la Première Guerre mondiale fût un conflit global, peu de choses sont connues sur ses répercussions dans les différents niveaux de la société en dehors du contexte européen. Alors que les historiens soulignent de manière répétée le besoin d'examen des histoires transnationales et des connexions entre les analyses européennes et non-européennes de la Grande Guerre, les recherches actuelles continuent à se focaliser sur le théâtre européen ainsi que sur les acteurs historiques « majeurs » du « front ouest ». Les histoires de la jeunesse et des autres membres de la société civile restent largement « à la périphérie » du corpus de la littérature sur la Première Guerre mondiale. Afin de s'attaquer à ces lacunes, ce projet a utilisé deux mouvements de jeunesse globaux – le Scoutisme et le Guidisme – comme outil analytique pour examiner, dans un cadre de travail transnational, les répercussions et les héritages laissés par la Grande Guerre sur l'enfance et la jeunesse. La méthodologie de cette étude s'appuyait sur quatre thèmes distincts, néanmoins reliés : (1) la notion de guerre apprise au travers de jeux et d'activités dans ces mouvements ; (2) le rôle des scouts et des guides dans la commémoration de la guerre ; (3) l'impact de cette mémoire culturelle de la guerre répandue par ces deux mouvements dans l'entre-deux-guerres ; (4) les appropriations politiques des scouts et des guides comme ambassadeurs de la paix dans l'après-guerre. En se basant sur l'analyse de récits oraux et d'archives laissés de côté par les historiens, ce projet avait pour ambition de combler les vides dans les études de l'histoire de la jeunesse, des études de genre, de l'histoire impériale ainsi que des études transnationales sur la Première Guerre mondiale. Ce faisant, nous avons cherché à ouvrir de nouvelles voies de recherche historique transnationale et globale sur l'enfance et l'adolescence et a contribué à une meilleure compréhension de la « globalité » de la Première Guerre mondiale.
Profitant des derniers développements de l’historiographie dans les « security studies », cette recherche avait pour objet l’étude des questions de sécurité nationale en Belgique entre 1839 et 1870. Loin de se limiter aux aspects politiques et militaires de la question, elle a abordé toutes les menaces auxquelles l'État doit faire face, prenant dès lors en compte l'importance des facteurs culturels, linguistiques, religieux et moraux. La place des concepts de « sécurité », de « peur » et de « menace » est ici centrale, et a fait l'objet d'une attention toute particulière. La problématique de cette thèse s’articulait autour d’une série de questions : de quelle manière le sentiment d'insécurité se manifeste ? Comment et par qui il est relayé au sein du pays ? Quels sont les éléments considérés comme dangereux pour la sécurité de la Belgique, et comment ont été perçues ces différentes menaces par l'opinion publique et par les autorités politiques ? Quelles ont été, enfin, les politiques élaborées et mises en place pour y répondre ?
L'Europe se positionne aujourd'hui clairement comme un acteur des politiques urbaines, bien qu'elle n'en ait formellement pas la compétence. La recherche visait à identifier et comprendre les mécanismes qui, depuis le début de la construction européenne, sont à l'oeuvre au sein des institutions européennes pour tenter d'influencer la fabrique des villes : quels en sont les acteurs-clés ? Quelles ont été les dynamiques à l'oeuvre ? Quels objectifs ont été poursuivis ? Avec quels résultats ? Comment les différentes compétences de la CEE, puis de l’UE, ont-elles influencé l'aménagement urbain, intentionnellement ou non ? Retracer le parcours de l'émergence de cette thématique a permis, dans un deuxième temps, d'analyser la manière dont l'Europe est parvenue, et dans quelle mesure, elle a pris sa place parmi les acteurs urbains, bousculant la tension historique entre villes et états dans l'exercice du pouvoir territorial.
L'objet de la thèse doctorale consistait à étudier de manière interdisciplinaire les métamorphoses de la politique industrielle européenne entre 1974 et 2002 en étudiant le cas de la sidérurgie, ainsi que d’analyser ses effets sur la structure de branche durant cette période. C’est-à-dire entre le début de la crise de la sidérurgie européenne et l’année durant laquelle fut créé le champion européen Arcelor, après la fusion le 18 février 2002 d’Acelaria, Arbed et Usinor, et l’expiration du traité CECA, initiant une nouvelle ère pour la sidérurgie européenne. Dans cette étude, une attention particulière à l’analyse du rôle des réseaux économiques et sociaux sur les transformations de la politique sidérurgique européenne et le changement de structure de la branche.
Bien que le scoutisme soit une plateforme importante façonnant des idées sociétales sur les identités et rôles du genre, peu de choses sont connues sur la manière dont ce mouvement se développa dans les colonies et comment son succès survécut au colonialisme. En effet, pourquoi et comment le scoutisme, un instrument colonial conçu pour préparer les enfants européens à leur futur rôle dans l'empire, devint si populaire chez les enfants indigènes ? Pourquoi les états post-coloniaux, malgré leur hostilité à l'encontre des influences coloniales, se ré-approprièrent-ils le scoutisme ? Quels étaient leurs buts ? Cette thèse avait pour ambition de répondre à ces questions. Située au croisement de l'histoire de l'enfance et du genre, de la politique et de l'interaction Occident-Orient, cette thèse s'est attaqué aux paradoxes liés au scoutisme en Malaisie britannique ainsi qu'aux nombreuses questions qui en découlent. En s'appuyant sur de nombreuses archives en grande partie inexplorées, ce travail a abordé l'influence du scoutisme sur les interactions Occident-Orient et l'histoire de son utilisation pour la gestion du genre et de la sexualité en adoptant une perspective à la fois comparative, trans-coloniale et trans-nationale.
La période 1885-1962 a vu de nombreux Belges et autres Européens, docteurs en droit ou non, partir pour l’État indépendant du Congo, le Congo belge ou le Ruanda-Urundi afin d’y exercer des fonctions dans la magistrature. Malgré l’important rôle social qu’ils ont joué dans ces territoires africains sous tutelle de la Belgique, l’étude de ce personnel qui compose l’appareil judiciaire reste peu abordée dans l’historiographie belge. Le projet « Belgafrican Magistrates Social Networks » se proposait d’ouvrir de nouvelles perspectives pour l’histoire de la magistrature coloniale belge.
S’inscrivant directement dans la continuité du projet FRFC-Belgafrima consacré à la « prosopographie des magistrats coloniaux belges (1885-1962) », il visait à étudier, sous l’angle de l’analyse des réseaux et groupes sociaux, le profil collectif de la magistrature de l’État indépendant du Congo (EIC), de la Belgique et du Ruanda-Urundi de 1885, date de la fondation de l’EIC, à 1962, marquée par la fin du régime mandataire au Ruanda-Urundi. La notion de « magistrature » envisagée comprend tant le personnel habilité à rendre la justice (juges, procureurs, administrateurs territoriaux) que les structures institutionnelles (cours et tribunaux) sur lesquelles s’articule l’exercice de la justice. À partir de cette définition large de la magistrature, le projet entendait mettre en évidence les liens existant entre la magistrature coloniale et l’administration territoriale dans la mise en œuvre du système judiciaire, ainsi que les réseaux qui se développent par l’activité quotidienne de ces magistrats.
L’objectif principal du projet était donc de dépasser la constitution d’un répertoire biographique ou d’un dictionnaire et de proposer une véritable prosopographie des magistrats « belgafricains », en y incluant une dimension réticulaire et une approche trajectorielle. La méthodologie envisagée pour ce faire, l’analyse des réseaux sociaux (SNA), repose sur l’exploitation de l’application informatique « prosopographie et répertoire des magistrats belges, 1795-1960 » accessible à travers le portail just-his.be. Elle permet entre autre de générer une cartographie des individus et des liens qu’ils tissent entre eux. Ces liens étant à la fois caractérisés par leur nature (familiale, amicale, professionnelle, etc.) et inscrits dans le temps. L’outil prosopographique a continué à être développé tout au long du projet. Cette approche réticulaire a été couplée avec une analyse des trajectoires selon la méthode de l’appariement optimal « Optimal Matching Analysis », afin de dégager des logiques de carrière en fonction de critère multiples.
En parallèle de ce travail de cartographie, un indispensable travail de contextualisation a été également mené afin de comprendre le rôle, la pensée et l’héritage de ces différents magistrats. Partant d’une approche culturelle et sociale, le projet entendait en effet étudier le processus de formation d’une magistrature coloniale, à travers notamment le cas d’Antoine Sohier. Ayant commencé sa carrière de magistrat au Congo belge et ayant poursuivi celle-ci à son retour en Belgique, l’étude de son profil est en effet particulièrement intéressant car il permet de saisir ce qui a pu se jouer à la fin des années 1950 et au début des années 1960 avec le rapatriement du cadre suite aux indépendances.
Malgré l’important rôle social qu’il a joué dans les territoires africains sous tutelle de la Belgique entre 1885 et 1962, le personnel qui compose l’appareil judiciaire reste peu abordé par l’historiographie belge. Ce projet visait à étudier, sous l’angle de l’analyse des réseaux et groupes sociaux, le profil collectif de la magistrature au Congo belge et au Ruanda-Urundi entre les années 1920, notamment marquées par la « seconde reprise » et la volonté de la Belgique de faire progresser la colonie, et 1962, date de la fin du régime mandataire au Ruanda-Urundi. S’appuyant sur différentes sources (législatives, normatives, dossiers de carrière des magistrats,…), la thèse entendait principalement dégager le profil sociologique et les logiques de carrière de ces magistrats, notamment par l’étude de leurs trajectoires. Il s’agissait également de mettre en évidence les liens existant entre la magistrature coloniale et l’administration territoriale dans la mise en œuvre du système judiciaire.
Que la ville moderne ait fourmillé d’animaux est une certitude : hommes et « bestiaux » s’y côtoient dans une promiscuité toute particulière, faisant émerger le problème de leur cohabitation. C’est sur cette relation homme-animal que l’on s'est penché dans le cadre de cette thèse, ainsi que sur les conséquences et les motivations d’une telle proximité. Mobilisant des sources écrites et iconographiques, la recherche se focalisait sur la place et le rôle de la « bête » en ville, dans sa relation avec l’environnement urbain et les hommes qui y vivent : cet élément constitue une perspective enrichissante pour éclairer le rapport de l’homme à la nature. À la tête des deux grandes entités présentes aux temps modernes sur le territoire de l’actuelle Belgique, Bruxelles et Liège sont les deux centres urbains sur lesquels il a été décidé de se focaliser. Le choix d’une chronologie de longue durée – XVIIe-XVIIIe siècles – s’explique notamment par la volonté d’étudier les transformations des usages et des perceptions de l’animal au cours des siècles : ces transformations sont révélatrices de changements sociaux de plus grande ampleur.
Le projet consistait dans l’étude de deux congrégations féminines d’inspiration jésuite, fondées dans la France révolutionnaire et postrévolutionnaire, respectivement en 1791 et en 1820. Il s'est inscrit au croisement de l’histoire culturelle et de l’histoire du genre, et s'est donné pour ambition de comprendre les raisons et le contexte de l’appropriation du modèle ignacien (faible en 1791 du fait de la suppression des jésuites, fort en 1820 grâce à la restauration de l’ordre) par des femmes répondant de manière active (via l’éducation des filles, la formation des maîtresses d’école, la direction spirituelle) aux besoins nouveaux d’une société en profonde mutation. Au centre du projet se trouvait l’histoire du rapport entre les sexes tant au niveau individuel (fondatrice/inspirateur (ex)jésuite) que collectif (congrégations féminines/Compagnie de Jésus), dans ses enjeux institutionnels et culturels.
L’objectif de cette recherche était d’analyser ce que furent les rapports entre le monde catholique belge et le Vietnam dans son histoire récente (1945-1995). Si la Belgique entretient d’excellentes relations politiques et commerciales avec le Vietnam depuis maintenant 40 ans, quelles furent plus spécifiquement les relations entre les catholiques belges et un pays où le catholicisme peut être traditionnellement perçu comme un contre-pouvoir ? La thèse a tenté de comprendre ces relations sur base des différentes composantes qui caractérisent le monde catholique belge. La composante religieuse bien sûr mais aussi associative, politique, universitaire ou syndicale. L’histoire récente du Vietnam est jalonnée d’événements qui eurent pour incidence d’entraîner des prises de positions peut-être différentes au sein même ou entre ces composantes. Quelles furent-elles ? Et à quels moments en particulier ?
Quel est l’impact de l’intégration européenne sur les sociétés nationales ? C’est à cette question, large, que cette thèse a ambitionné de donner une partie de réponse en se concentrant sur une catégorie spécifique d’acteurs à un moment donné : les syndicats belges et allemands entre 1972 (Sommet de Paris) et 1985 (entrée en fonction de la Commission Delors). Après un travail théorique autour du concept d’européanisation, les développements empiriques s'est agencés autour de trois axes : 1) la perception syndicale de l’Europe, 2) leur action au niveau européen et 3) leur utilisation de l’Europe à des fins nationales. Transnationale, cette étude s’ancre également dans l’interdisciplinarité, entre histoire, science politique et droit.
À l’intersection entre politique intérieure et politique extérieure, notre projet nous a emmené vers l’histoire administrative. Le ministère des Affaires étrangères est un acteur ; il a été aussi un très intéressant objet d’études. Notre intérêt portait plus spécifiquement sur la manière dont il change entre 1944 et 1989. La période est marquée par d’importantes évolutions. Celles-ci concernent autant la scène internationale (progrès du multilatéralisme, construction européenne, décolonisation…), que la scène intérieure (revendications linguistiques, réformes de l’Etat, politisation croissante de l’administration…). De même, nous ne pouvions négliger ni les évolutions technologiques (développement des moyens de communication, apparition de l’informatique…), ni les grandes mutations sociétales (démocratisation, évolution des rapports hommes-femmes…). Nous entendions étudier la manière dont le département est impacté par ces évolutions. Parvient-il à s’y adapter ? Ou tente-t-il d’y résister ? En mettant en lumière les facteurs et les acteurs de changement, nous avons dessiner la difficile transformation d’une administration séculaire confrontée à un monde où le changement s’accélère.