L’histoire de la phénoménologie à travers ses conflits

Louvain-La-Neuve

« Πόλεµος πάντων µὲν πατήρ ἐστι… »
L’histoire de la phénoménologie à travers ses conflits

Colloque pour le cinquantième anniversaire de la fondation du Centre d’études phénoménologiques
Institut supérieur de philosophie Université catholique de Louvain (UCLouvain)
18-20 octobre 2023

 

Argumentaire & Appel à contributions

       Il y a assurément plusieurs manières de faire et d’écrire l’histoire de la phénoménologie. L’on peut par exemple s’intéresser à ses sources et ses rapports complexes et parfois ambigus aux traditions aristotélicienne, cartésienne et kantienne, pour ne citer que les plus importantes. L’on peut également, de façon tout aussi classique, suivre ses grandes et moins grandes figures et reconstruire ses développements foisonnants de façon strictement chronologique et linéaire (ce fut le parti de Herbert Spiegelberg dans les deux célèbres volumes constituant The Phenomenological Movement). L’on peut encore se pencher sur le destin des grands concepts thématiques et opératoires de la pensée phénoménologique : l’intentionnalité, la donation, le sens, le monde de la vie, l’intersubjectivité, le Dasein, la temporalité, l’inapparent, le néant, la perception, la chair et tant d’autres. L’on peut enfin, comme c’est souvent le cas, croiser ces approches, et c’est d’un tel croisement précisément que peut en naître une autre qui, tout en s’inscrivant dans leur sillage, multiplie les recoupements et conduit à lever des excédents de sens à la lumière desquels il devient possible de relire toute la chaîne de la phénoménologie et de voir ainsi d’un œil neuf chacun de ses maillons dans son rapport à un ou plusieurs autres.

     Nous faisons ici référence à la relecture de l’histoire de la phénoménologie à travers ses conflits, ses polémiques, ses confrontations, ses explications (Auseinandersetzungen) bien souvent internes, mais dont les causes directes ou indirectes proviennent parfois de son « dehors ». Malgré les apparences, ce type d’histoire, par les objets qu’il se donne, ne se laisse pas réduire à une histoire événementielle, car l’accentuation des tensions révèle bien souvent le caractère indissociable de l’accidentel et de l’essentiel. L’histoire de la phénoménologie à travers ses conflits veut donc prendre au sérieux et même radicaliser la célèbre formule de Ricoeur selon laquelle « la phénoménologie au sens large est la somme de l’œuvre husserlienne et des hérésies issues de Husserl », en montrant que le déplacement, l’opposition, la contradiction, le désaccord, la contestation, etc. furent et restent des ressorts déterminants du « penser phénoménologique » et de son renouvellement incessant, autrement dit de la vie passée, présente et future de la discipline.

Cette manière de faire et d’écrire l’histoire de la phénoménologie nous semble résonner avec nombre de travaux de Jacques Taminiaux, fondateur de notre Centre d’études phénoménologiques (membre associé au réseau des Archives Husserl) ; centre dont nous célébrerons en 2023 le cinquantième anniversaire. C’est aussi en pensant à lui, disparu en 2019, que nous plaçons cette rencontre sous l’égide d’un fragment bien connu d’Héraclite, un présocratique dont il appréciait l’esprit.

Cette rencontre est l’occasion d’un appel à contributions à destination des chercheurs confirmés comme des plus jeunes chercheurs (les doctorants et post-doctorants sont particulièrement encouragés à nous envoyer leurs propositions).

Parmi les sujets possibles d’exposés, de façon non exhaustive :

- Husserl contre le naturalisme, le psychologisme, l’anthropologisme, l’historicisme ;
- Le refus du tournant vers l’idéalisme transcendantal chez les disciples de la première génération ;
- La critique husserlienne de l’« ontologisme » de certains disciples (Scheler, Heidegger, etc.) ;
- La critique husserlienne de Heidegger et la critique heideggérienne de Husserl ;
- Les contre-interprétations de l’attitude naturelle chez les successeurs de Husserl (Heidegger, Schütz, Patocka, etc.) ;
- Les compréhensions et usages divergents de la réduction ;
- La méthode heideggérienne de la destruction ;
- La lecture sartrienne de Heidegger et la mise au point de ce dernier ;
- Les désaccords philosophiques entre Sartre et Merleau-Ponty ;
- Les critiques levinassienne, henryenne, marionienne, etc. de Husserl et de Heidegger ;
- Phénoménologie et anthropologie philosophique : ruptures et continuités ;
- La greffe herméneutique comme approfondissement critique de la phénoménologie ;
- Le tournant « théologique » de la phénoménologie française : dénonciation et répliques ;
- La dimension polémique des projets de cosmologie phénoménologique ;
- Phénoménologies et/vs. réalismes ;
- Phénoménologie et/vs. sciences humaines et sociales ;
- Phénoménologie et/vs. marxismes
- Pour ou contre la naturalisation de la phénoménologie ;
- Les tensions entre phénoménologie et philosophie analytique au cours du siècle dernier.

Les exposés dureront environ 30 minutes (suivies de 10-15 de discussion) et pourront se faire en français, en allemand ou anglais.

Le CEP dispose d’un petit budget pour aider aux frais de transports de quelques un.e.s des jeunes chercheur.e.s dont les propositions auront été acceptées. Il pourra aider les autres à trouver un hébergement sur place et offrira les repas du soir et du midi. Le Centre pourra également rédiger et envoyer des lettres d’acceptation pour faciliter les demandes de financement auprès des Ecoles doctorales, départements, centres et instituts de recherche et autres organisations pouvant aider à la prise en charge de leurs frais.

Si la situation sanitaire le permet, le colloque se déroulera en présentiel. Des interventions en ligne sont envisageables selon les circonstances.

Date-limite pour l’envoi des propositions à sylvain.camilleri@uclouvain.be : 1er mars 2023. Les notifications d’acceptation ou de refus seront envoyées dans le mois qui suit.

Publié le 22 novembre 2022