Nisha Limaye, prix Lambertine Lacroix pour ses travaux sur les malformations veineuses

Ce sont ses travaux sur la voie de signalisation impliquée dans 80% des cas de malformations veineuses qui ont valu ce prix à Nisha Limaye. Des recherches qui ouvrent de nouvelles pistes thérapeutiques.

Tous les 4 ans, le prix Lambertine Lacroix récompense un chercheur particulièrement méritant pour un travail de recherche translationnelle sur les affections cardio-vasculaires. En 2016, c’est Nisha Limaye, chercheuse qualifiée FNRS qui voit ses travaux récompensés. En effet, ceux-ci ont permis de mieux comprendre les causes des malformations veineuses et de proposer une piste thérapeutique différente de la prise en charge classique pour des cas particulièrement invalidants.

Quand les veines se développent de manière anormale

C’est au sein de l’équipe du Pr Miikka Vikkula, de l’Institut De Duve (UCL) que Nisha Limaye a commencé à s’intéresser aux malformations veineuses. « Il s’agit de veines qui se développent anormalement, elles sont entre autre plus larges et ne sont pas rondes. Cela se répercute sur le fonctionnement des organes dans lesquels elles apparaissent. Par ailleurs, elles s’accompagnent de douleurs, de saignements et de problèmes de coagulation. C’est donc une maladie très invalidante », explique la chercheuse qui s’est plus précisément intéressée à la forme non-héréditaire de la maladie.

L’un des responsables : le gène TEK

En analysant les tissus atteints, prélevés chez les patients, le groupe a constaté que dans certains cas, les malformations veineuses trouvaient leur origine dans les cellules endothéliales, qui sont à la base de la formation des vaisseaux sanguins. « Le gène TEK était muté chez 60% des patients atteints, or ce gène code la protéine TIE2, que l’on retrouve dans les cellules endothéliales. » Forte de ce constat, la chercheuse a tenté de comprendre comment cette mutation pouvait induire une malformation. « Chez les personnes porteuses de cette mutation, la voie de signalisation TIE2-PI3K-AKT est constamment activée. Ceci a pour conséquence un défaut de communication entre les cellules impliquées dans la formation des veines. Résultat : la formation de vaisseaux anormaux », poursuit-elle.

La rapamycine, une piste thérapeutique sérieuse

Une fois ce mécanisme élucidé, l’équipe s’est intéressée avec succès à la rapamycine, un immunosuppresseur utilisé dans le traitement de certains cancers. « Cette molécule est capable d’inhiber la voie cellulaire PI3K-AKT. En d’autres termes, elle permet de bloquer l’action du gène TEK muté et d’enrayer la progression des malformations. Elle ne permet pas leur disparition mais les empêchent d’évoluer – tant chez la souris que chez l’Homme - et réduit considérablement les symptômes. Chez les 6 patients traités lors de la première phase de test menée par les Professeurs Laurence Boon et Emmanuel Seront des Cliniques St Luc, la douleur et les saignements ont significativement diminué, la coagulation sanguine s’est améliorée et les patients indiquaient avoir une meilleure mobilité. » L’avantage de la rapamycine ? Cette molécule, étant déjà utilisée dans le traitement du cancer, a passé avec succès les tests de toxicité. Les chercheurs peuvent donc réaliser des essais cliniques se concentrant sur son efficacité.

Une option thérapeutique pour tous les patients ?

« Si les études cliniques confirment nos résultats, le premier choix en cas de malformations veineuses restera la chirurgie, car la rapamycine est un traitement chronique et est donc plutôt indiqué lorsque la chirurgie n’a pas fonctionné. Pour éviter les récidives, il faut enlever la totalité de la malformation, ce qui n’est pas toujours possible et c’est précisément dans ce type de cas que la rapamycine intervient. Enfin, ce qui est encore plus encourageant, c’est que nous avons récemment identifié un autre gène muté dans 20% des malformations veineuses : PIK3CA. Les mutations identifiées dans ce gène activent la même voie cellulaire, ce qui signifie que son inhibition serait efficace dans une grande majorité des malformations veineuses », conclut la Nisha Limaye

                                                                     Nisha Limaye

Elise Dubuisson

 

Coup d'oeil sur la bio de Nisha Limaye

1995    Bachelière en arts (Psychologie, littérature anglaise & journalisme, Mount Carmel College, Bangalore University, India)

1998    Bachelière en sciences (Psychologie, University of Texas at Arlington, Arlington, Texas, USA)

2005    Ph.D en immunologie (University of Texas Southwestern Medical Center, Dallas, Texas, USA)

2010    Chercheur qualifié, F.N.R.S.

Publié le 22 mars 2017