Les recherches portent sur les sources des obligations, avec une attention particulière accordée à la théorie générale des contrats, qui est complétée par l’étude des contrats spéciaux, tels que la vente, les contrats de services ou les baux.
Le régime général des obligations, avec des questions aussi diverses que les modalités des obligations, les causes d’extinction des obligations ou leur cession, constitue le deuxième grand champ de recherche.
L’étude de ces thèmes ne se confine pas au droit positif belge. Elle s’appuie aussi sur le droit comparé et sur les instruments internationaux.
Le patrimoine est tout à la fois le siège de la fortune et la mesure du crédit ; il recèle une dynamique interne qui en fait le support et le moteur de l’activité économique de son titulaire.
Les biens et les sûretés sont les subdivisions traditionnelles du droit civil qui, respectivement, s’attachent à l’examen de ces deux facettes du patrimoine.
Le constat est que, compte tenu des besoins pressants de l’activité économique, ces branches du droit connaissent toutes deux, depuis quelques temps, des développements importants qui, tantôt, peuvent prendre la forme d’une revitalisation d’institutions anciennes (pensons à l’emphytéose ou à la superficie), tantôt, peuvent prendre la forme de législations nouvelles (pensons à la loi sur les sûretés financières).
Dans ce contexte, une étude systématique du patrimoine, de ses composantes, des charges qui le grèvent éventuellement, des règles qui le gouvernent, et des conflits entre son titulaire et les tiers est certainement utile.
Le champ d’investigation est large et les angles d’attaque variés. Chacune des études, qu’elle soit d’ampleur, et prenne la forme d’une monographie par exemple, ou qu’elle soit plus réduite, et prenne la forme d’un article ou d’une contribution à un ouvrage collectif, peut en effet comporter des aspects de droit comparé, se profiler dans une perspective d’harmonisation du droit privé européen ou explorer les accointances avec les autres branches du droit privé (et en tout premier lieu le droit des obligations et des contrats).
Quant aux thèmes de recherche porteurs, ils sont nombreux et variés. On peut citer, entre autres, l’étude des composantes du patrimoine (notamment la nécessaire adaptation du droit classique des biens à l’immatériel ; le recours vivace aux droits réels démembrés ou encore les potentialités de la propriété à titre de garantie) ; l’étude des charges qui peuvent grever ce patrimoine ( la définition même de ce qu’est une sûreté ; l’anarchie de la prolifération des sûretés réelles, notamment les privilèges, l’européanisation du régime hypothécaire) ; l’étude de la gestion et de l’administration du patrimoine (la gestion du patrimoine d’une personne incapable, mineure ou majeure ; les règles particulières de gestion du patrimoine familial ou encore le rôle du juge en tant que garant de la protection de certains intérêts patrimoniaux) ainsi que l’étude de la transmission du patrimoine et de la planification successorale (les limites que sont la réserve héréditaire et le régime primaire, à la disposition du patrimoine familial ; le droit des libéralités et les techniques de programmation successorale).
Le besoin exprimé par les victimes en vue d’une indemnisation accélérée des dommages subis joint à la dimension collective de certains accidents ou catastrophes montrent les limites du régime de responsabilité civile classique fondé sur la faute. Conscient de ces limites, le législateur a soustrait certains domaines d’activités importants à l’application des règles du Code civil, pour lui substituer des régimes d’indemnisation réputés plus efficaces, fondés sur la seule survenance d’un accident (accidents du travail, accidents de la circulation, accidents de la consommation, bientôt les accidents médicaux). Ces systèmes d’indemnisation nécessairement plus coûteux ne peuvent toutefois survivre qu’avec le soutien de l’assurance, voire des pouvoirs publics. Ils méritent à ce titre une attention particulière. Ce thème peut être abordé sous des angles variés.
Economie du droit : Ces régimes d’indemnisation sont-ils, comme on le dit souvent, économiquement efficaces et financièrement supportables pour la collectivité ? La catastrophe de Ghislenghien tend à démontrer que le droit de l’indemnisation est encore loin de répondre aux attentes légitimes des victimes. A quelles conditions et selon quelles modalités pourrait-on rendre plus efficace le règlement des dommages catastrophiques.
Théorie du droit : Ces systèmes organisés par des lois particulières ont-ils des traits communs ? Est-il correct de les ranger sous un même paradigme alors même qu’ils ont des caractéristiques propres qui pourraient les rendre irréductibles les uns aux autres. Sont-ils voués à rester exceptionnels et dérogatoires ou peuvent-ils s’étendre à tous les accidents corporels en sorte qu’ils annonceraient une révolution profonde du droit de la responsabilité ?
Droit comparé : La tendance ainsi décrite peut-elle être constatée dans des droits étrangers ? Ceux-ci connaissent-ils des systèmes éventuellement plus aboutis ?
Assurances : Quel rôle l’assurance, conçue comme un mécanisme de mutualisation des risques, est-elle appelée à jouer dans ces systèmes ?
a) L’organisation judiciaire, la compétence, la procédure, les voies de recours et le droit de l’exécution constituent les parties essentielles de la matière du droit judiciaire privé.
Chacune de ces parties donne et peut donner lieu à recherche tant dans ses aspects techniques qu’à propos des principes fondamentaux de justice et de démocratie véhiculés.
Ainsi, l’organisation judiciaire, au-delà de l’étude de l’organisation des cours et tribunaux et du statut de tous ceux qui contribuent à l’œuvre de justice, est guidée par des principes, notamment ceux de collégialité et de responsabilité, qui sont le reflet de l’évolution de la société et des attentes que met le justiciable dans la justice. On peut, à cet égard, épingler la responsabilité objective de l’Etat en cas de fonctionnement défectueux des organes de justice.
La compétence matérielle et territoriale des juridictions est fixée par des règles dont la nature (d’ordre public, impératives ou supplétives) est parfois incertaine et, en tout cas, présente des différences avec les mêmes notions de droit civil. En découlent des controverses quant à l’étendue du champ des clauses attributives de compétence. Le règlement des incidents de compétence, matière technique s’il en est, traduit aussi le souci du législateur d’accorder plus ou moins d’importance aux « pré-procès » sur la compétence.
La matière de la procédure est peut-être celle qui, ces dernières années, a connu la plus grande évolution, tant au plan de la technique que des principes. Les principes directeurs classiques du procès (principe dispositif et principe du contradictoire) ont évolué et changé. D’autres principes (loyauté procédurale et célérité) sont apparus. L’équilibre entre toutes ces exigences est difficile à atteindre et les règles techniques adoptées récemment, par le législateur, en sont le meilleur témoignage.
Les voies de recours, et particulièrement l’appel, font l’objet de réflexions nouvelles. Longtemps considéré comme une voie d’achèvement du litige, l’appel pourrait redevenir, sous l’influence d’une certaine doctrine, une voie de réformation du premier jugement. L’enjeu au niveau des principes est considérable : il s’agit de l’étendue du droit au double degré de juridiction.
Le droit de l’exécution, enfin, longtemps considéré comme un droit purement technique et pour cette raison largement délaissé, connaît une véritable résurrection. L’idée selon laquelle une décision de justice non exécutée est non seulement une décision sans effet pour la partie mais discrédite toute l’œuvre de justice, fait son chemin et, dès lors, entraîne un regain d’intérêt pour les procédures d’exécution.
b) Il s’agit là du droit judiciaire « commun » auquel il convient de joindre l’étude de procédures particulières relevant du droit judiciaire notarial. L’apposition et la levée des scellés, l’inventaire, les ventes publiques d’immeubles ou encore les liquidations et partages sont autant de procédures faisant apparaître des questions spécifiques en matière de rôle du juge et de statut des mandataires de justice.
L’inflation de ce droit judiciaire « particulier » ne s’arrête pas aux procédures notariales. On assiste à la multiplication de procédures et de règles spéciales, dédiées à des contentieux spécifiques. Songeons au règlement collectif de dettes, aux différentes procédures en cas de conflit conjugal ou familial ou encore à la myriade d’actions en cessation. Cette atomisation de la procédure civile ne va pas sans poser la question de sa cohérence.
c) L’étude du droit judiciaire ne se conçoit plus sans celle des modes alternatifs de règlement des différends. L’heure est à la négociation des parties et à l’intervention minimale du juge. Transaction, tierce décision obligatoire, conciliation, médiation et droit collaboratif font l’objet de toutes les attentions. Au-delà des problèmes spécifiques et de l’organisation technique de ces procédures, se pose, avec acuité, la question de la réception des accords et de leur valeur, ainsi que de l'applicabilité des principes directeurs du procès aux voies alternatives. Par conséquent, le juge est appelé à intervenir a posteriori dans le cadre d’une mission qui reste encore largement à définir.
L’arbitrage doit aussi entrer dans le champ des investigations, à un double point de vue. Il s’agit non seulement d’étudier ce mode juridictionnel de règlement des conflits dans ses aspects spécifiques (statut et rôle de l’arbitre, nature et autorité des sentences arbitrales) mais encore de cerner au mieux les aspects d’interpénétration entre la procédure d’arbitrage et le pouvoir judiciaire (intervention du juge judiciaire avant et au cours de la procédure d’arbitrage ou encore rôle du juge judiciaire dans les procédures d’exequatur et d’annulation des sentences arbitrales)
La mobilité des biens, des services, des capitaux, des personnes, des familles engendre la multiplication des litiges transfrontaliers. Des règles adaptées à ces situations, forcément plus difficiles, devaient s’élaborer. Elles forment le droit judiciaire international. De nombreuses conventions multi ou bilatérales se nouent çà et là, au gré – et dans la limite… - de l’intensité de la coopération entre les Etats.
Sur ce terrain, l’Union européenne fait figure d’exemple, tant le stade d’intégration déjà atteint est remarquable.
Toute la construction du droit judiciaire européen est marquée par la coexistence et la superposition de deux tendances distinctes, mais censées converger – la première plus rapidement que la seconde – vers une intégration accrue des systèmes et règles de procédure civile : d’une part l’émergence d’un véritable droit judiciaire européen, porteur de règles communes et uniformes de procédure; d’autre part, en guise de substitut palliatif - et le cas échéant transitoire - à la première tendance, l’essor d’un droit processuel commun s’attachant, faute d’unifier les textes et les pratiques locaux, à en harmoniser les grands principes directeurs sur fond de « droits humains procéduraux » dégagés par la jurisprudence de la Cour européenne.
Ces deux tendances (qui, signe supplémentaire des synergies entretenues par les disciplines fédérées par le Centre de droit privé, connaissent leurs exacts pendants en droit civil) marquent, dans des proportions variables, tous les instruments dont l’Europe judiciaire s’est récemment dotée : du règlement des multiples conflits de juridictions à la circulation simplifiée des actes de procédure et des titres exécutoires ; d’une assistance judiciaire coopérative à la collecte et la production des preuves ; de l’uniformisation des petits procès aux règles de liquidation des entreprises en difficulté : la justice européenne est à l’œuvre.
« Les règles du droit civil, » pour citer les célèbres paroles d’Henri de Page, « remontent bien plus haut que 1789. Elles ont été faites par l’histoire, par les usages, par les mœurs, par la sagesse et l’expérience accumulés au cours de nombreux siècles. Elles remontent au droit romain, au moyen âge ». Suivant les observations pertinentes de De Page, ce grand protagoniste du droit privé belge du siècle dernier, les historiens du droit du Centre de Droit Privé s’intéressent aux continuités et discontinuités du droit privé des Romains jusqu’aujourd’hui pour mieux situer et comprendre les enjeux actuels et futurs du droit. Alors que l’histoire du droit des obligations, et notamment des obligations contractuelles, est un sujet de prédilection, des études sur l’histoire du droit des personnes, des biens et des modes judiciaires et extrajudiciaires des règlement des conflits viennent compléter nos activités. Compte tenu de l’impact du droit privé romain sur l’élaboration du droit des affaires, du droit international ou encore du droit public, les frontières historiques mouvantes entre ces branches du droit nous intéressent également au plus haut point.
Une attention tout particulière est attachée au rôle du droit romain comme élément structurant dans le développement du droit privé. Socle de la formation des juristes depuis la fondation de l’université de Bologne en 1088, les textes du Corpus iuris civilis de l’empereur Justinien ont façonné de manière durable le vocabulaire et la grammaire du droit privé dans les traditions juridiques européennes. Il s’agit d’un patrimoine exceptionnel qui a influencé les structures de la pensée juridique en Europe et au-delà. L’une des questions qui intéresse particulièrement les chercheurs en histoire du droit est précisément de savoir comment des contextes différents ont généré des interprétations différentes des textes juridiques romains. En ce sens, l’évolution du droit privé ne peut être comprise que dans son interaction avec les valeurs constitutionnelles d’une société donnée. Compte tenu de l’impact structurant du christianisme sur les normes et institutions en Europe pendant plus d’un millénaire et demi, nos recherches cherchent à rendre compte des transformations du droit privé romain sous l’effet des canonistes et théologiens.
Afin de dépasser les frontières tant géographiques que mentales, la recherche en histoire du droit privé à Louvain-la-Neuve se veut ouverte aux méthodes et aux connaissances développées par d’autres sciences humaines et sociales. A titre d’exemple, les méthodes de la linguistique computationnelle sont appliquées à des textes juridiques médiévaux afin de mieux cerner l’évolution de la représentation des femmes à cette époque. Une recherche historique dans les archives du Conseil Privé, l’une des institutions judiciaires majeures d’Ancien Régime, est entreprise dans le but de mieux comprendre l’évolution du mécanisme des délais de grâce accordé aux débiteurs de bonne foi. Enfin, nous nous intéressons de près à l’apport des canonistes et théologiens de l’époque moderne au développement d’une architecture juridique pour faire face aux nouveaux défis sociétaux tel que l’essor d’un marché global ou encore la limitation d’un pouvoir monarchique absolu à l’aube des temps modernes.