C.J., Grande Chambre, 6 novembre 2012, K. contre Bundesasylamt (C-245/11)

Louvain-La-Neuve

La clause humanitaire du Règlement Dublin impose aux États de « laisser ensemble » les personnes en « dépendance » familiale avérée, un nouveau critère de détermination ?

La C.J. rappelle l’obligation pour les États de « laisser ensemble » les membres d’une même famille ou autres parents, au titre de la clause humanitaire du Règlement Dublin (R.D.), s’ils se trouvent en situation de dépendance sans égard ni au statut de la personne dépendante ni au lieu où se déroule la vie familiale. Il en résulte que l’État membre de l’UE où se déroule cette vie familiale devient responsable de la demande d’asile.

2e demande d’asile – Transfert Dublin (Pologne) – clause humanitaire – prise en compte de la dépendance avérée d’une belle-fille vis-à-vis du demandeur d’asile – responsabilité de l’État où se déroule la vie familiale

A. L’arrêt

Madame K., de nationalité russe, est en cours de procédure d’asile en Pologne. Elle rejoint son fils majeur, sa belle-fille et leurs trois enfants mineurs, qui bénéficient du statut de réfugié en Autriche. Elle y introduit une seconde demande d’asile et fait valoir l’état de dépendance de sa belle-fille à son égard « en raison de la présence d’un nouveau-né ainsi que de la maladie grave et du handicap sérieux dont elle souffre à la suite d’un événement traumatique grave survenu dans un pays tiers ». Elle garde celui-ci secret par peur de représailles « en raison de traditions culturelles visant à rétablir l’honneur de la famille ».

Les autorités autrichiennes font une demande de reprise en charge à la Pologne en application des critères du Règlement Dublin II (R.D.). La Pologne répond favorablement sans aborder la question de la clause humanitaire qui a pour vocation de permettre aux États de déroger aux critères de détermination de responsabilité des demandes d’asile lorsque des membres d’une même famille ou d’autres parents seraient à charge « pour raisons humanitaires » (art. 15, § 1, R.D.) ou en dépendance « du fait d’une grossesse, d’une maladie grave, d’un handicap grave ou de la vieillesse » (art. 15, § 2, R.D.)[1].

La juridiction autrichienne, saisie d’un recours contre le transfert vers la Pologne, sursoit à statuer pour poser deux questions préjudicielles à la C.J.U.E. D’une part, elle interroge la C.J. sur l’application de cette clause en l’espèce, demandant si l’Autriche devient obligatoirement responsable de la demande d’asile de Mme K., dès lors que la situation de dépendance de sa belle-fille à son égard est avérée et ce, même si l’État responsable selon les critères n’en a pas fait la demande (Pologne). D’autre part, en cas de rejet de la première question, elle l’interroge sur une application clause de souveraineté (art. 3, § 2, RD)[2].

La Cour fait une distinction préalable entre les deux paragraphes de l’article 15 (pt 27) : le § 1er est une disposition facultative qui accorde un large pouvoir d’appréciation aux États pour décider d’un « rapprochement familial » pour des raisons humanitaires ; le § 2 « restreint » ce pouvoir, car « lorsque les conditions énoncées […] sont remplies, les États membres ‘laissent normalement ensemble’ le demandeur d’asile et un autre membre de sa famille » eu égard à leur dépendance. En l’espèce, son interprétation concerne le § 2 de l’article 15 R.D.

Ensuite, la Cour se prête à une interprétation des situations de dépendances prévues au § 2 de l’article 15 R.D. (pts 28 à 37) :

- cette disposition vise les situations dans lesquelles les États « rapprochent » mais aussi « laissent ensemble » le demandeur et un autre membre de sa famille, même sur le territoire d’un autre État que l’État responsable (en l’espèce, la Pologne) ; cette interprétation est « la plus apte à assurer l’effet utile » de la clause humanitaire (pt 31).

- elle vise les situations de dépendance du demandeur d’asile à l’égard d’un membre de sa famille, mais aussi l’inverse (comme en l’espèce), compte tenu des « termes généraux » choisis par le législateur de l’U.E. et de l’article 11 du Règlement d’application n°1560/2003[3] ; cette interprétation est conforme à l’objectif de la clause humanitaire[4] et n’est pas infirmée par les termes du § 1er de l’article 15 R.D.[5] (pt 34).

La Cour interprète aussi la notion de « membre de la famille » au sens du § 2 de l’article 15 R.D. (pts 38 à 43) :

- elle vise un « autre membre de sa famille » qu’il s’agit d’interpréter dans un sens plus large (englobant la belle-fille ou les petits-enfants, en l’espèce) que la notion retenue à l’article 2, i), du R.D. qui ne couvre que la famille nucléaire stricto sensu ; cette interprétation est conforme à l’objectif assigné au R.D. de préserver l’unité familiale (cons. 6) et à la finalité humanitaire de la clause (pts 40 et 41)[6].

- elle exige de s’assurer que les liens familiaux ont existé dans le pays d’origine, mais aussi que le besoin de dépendance et la capacité d’apporter une aide sont effectifs ; cette interprétation découle également de l’article 11, § 4, du Règlement d’application n° 1560.

En outre, la Cour aborde la marge d’appréciation des États face à une situation prévue au § 2 de l’article 15 R.D. (pts 44 à 48) :

- elle suppose une première obligation pour l’État, confronté à une situation de dépendance avérée (pts 33 à 43), de « normalement » laisser ensemble ces personnes ; cette interprétation implique que seule une « situation particulière » (non invoquée en l’espèce) justifie une dérogation à « cette obligation » (pt 46).

- elle pose comme seconde obligation pour l’État, confronté à pareille situation sur son territoire, la prise en charge la demande d’asile ; cette interprétation est faite à la lumière de « l'objectif de célérité dans le traitement des demandes d'asile » (cons. 4).

Enfin, aucune requête de l’État responsable n’est nécessaire pour déclencher le § 2 de l’article 15 R.D. (pts 49 à 52) :

- « aucune mention d’une ‘demande’ émanant d’un autre État » n’est faite contrairement au § 1er et une telle exigence serait purement formelle, prolongeant inutilement la procédure de détermination ; cette interprétation est faite à la lumière de l’objectif de célérité assigné au R.D.

Le § 2 de la clause humanitaire doit ainsi être interprété en ce sens que l’État qui constate une situation avérée de dépendance entre un demandeur d’asile soumis à une procédure Dublin et un ou plusieurs membres d’une même famille, dans les conditions rappelées supra, doit les « laisser » ensemble et prendre en charge la demande d’asile, même sans requête de l’État préalablement responsable. Il devient responsable de cette demande et en informe cet État (pts 44 à 52).

B. L’éclairage

Après l’arrêt N.S. et l’interprétation de la clause de souveraineté, la C.J. se penche sur la seconde clause dérogatoire du R.D. : la clause humanitaire (article 15 R.D.). L’interprétation de la Cour dans cet arrêt ne suit pas les conclusions de l’avocat général[7], Madame V. Trstenjak, qui proposait de rejeter l’application du § 2 de l’article 15 R.D. L’avocat général justifiait ce rejet en raison d’une dépendance du membre de la famille à l’égard du demandeur et non l’inverse (§§ 32 à 55), tout en reconnaissant une possible application du § 1er « dans des circonstances exceptionnelles » (§§ 56 à 82). Au passage, l’avocat général proposait de transposer à la clause humanitaire l’affirmation de la Cour dans l’arrêt N.S., selon laquelle la décision prise sur le fondement de la clause de souveraineté « relève de la mise en œuvre du droit de l’Union (…) de sorte que (…) les États membres doivent respecter les règles énoncées dans la Charte des droits fondamentaux » (§ 64 conclusions précitées).

- Un contexte où la marge d’appréciation des États est a priori « étendue »

Sans reprendre cette formulation, la Cour donne priorité à une protection effective des droits fondamentaux des demandeurs d’asile placés sous procédure Dublin, comme elle l’a fait dans l’arrêt N.S. vis-à-vis de la clause de souveraineté. Elle précise la marge d’appréciation des États dans l’utilisation de cette clause dérogatoire du R.D., donnant une lecture protectrice de la vie familiale et des questions humanitaires. Jusque-là, les États membres n’ont que très peu utilisé cette clause humanitaire[8], se trouvant assez libres dans leur appréciation des motifs la justifiant ou des critères familiaux[9].

La Cour rappelle le caractère facultatif du paragraphe 1er de l’article 15 R.D. (rapprochement familial), mais précise immédiatement que la marge d’appréciation des États est plus « restreinte » dans le cadre du § 2 (dépendance familiale). L’avocat général partageait cette distinction (§§ 47 et 48). La Cour ne se situe que sur le terrain du § 2, qu’elle applique à l’espèce. Elle donne une approche souple des notions centrales à savoir la « dépendance » et les « membres d’une même famille, ainsi que d’autres parents à charge pour raisons humanitaires fondées ». Rapproché à l’arrêt N.S., il permet d’encadrer la marge de manœuvre des États confrontés à des situations humanitaires ou de violations des droits fondamentaux engendrés par l’application du R.D.

- Une interprétation large de la notion de « membres de la famille » au sens de la clause

La Cour juge que la formule « un autre membre de sa famille » (art. 15, § 2, R.D.) va au-delà de la notion plus restreinte de l’article 2 R.D. (famille nucléaire). Elle s’appuie sur les objectifs assignés à la clause humanitaire (faciliter le rapprochement familial) et au R.D. (préserver l’unité familiale).

Cette interprétation peut ouvrir des perspectives en pratique. En effet, les instances nationales devront prendre en compte une situation de dépendance humanitaire invoquée avec un membre de la famille « élargie » avant de prendre une décision de transfert Dublin. À l’heure actuelle, l’Office des étrangers en Belgique -suivi par le Conseil du contentieux des étrangers- répond défavorablement à l’invocation de la clause humanitaire pour dépendance d’un membre de la famille « élargie » ou exige la démonstration d’une dépendance matérielle (financière) et préexistante dans le pays d’origine[10].

Cet arrêt fait écho aux appels et critiques sur une prise en compte trop limitée du droit au respect de la vie familiale dans le R.D.[11]. « (Des) considérations politiques ont marqué le texte du Règlement, prenant la forme de restrictions très fortes au champ d’application des critères familiaux[12] ». Il fait aussi écho aux négociations entreprises depuis des années, et en cours, pour modifier ce R.D. (voir infra).

- Une approche souple des situations de « dépendance » au sens de la clause

La Cour rappelle qu’une situation de dépendance familiale s’impose aux États, peu importe de qui provient l’aide ou du lieu où se trouvent les intéressés. Les États, ainsi que l’avocat général, avaient argué de la rédaction du § 1er pour conclure que l’aide ne pouvait provenir que du membre de la famille à l’égard du demandeur d’asile, au sens du § 2. La Cour affirme que les « termes généraux » du § 2 traduisent la volonté du législateur de l’U.E. de ne pas figer ce lien dans un sens unique (pt 33). Elle donne aussi priorité à l’objectif de célérité dans le traitement de la demande d’asile plutôt qu’aux aspects procéduraux (pts 49 à 52).

Après avoir écarté les arguments des États, elle pose les conditions d’une situation de « dépendance familiale » au sens du § 2 de l’article 15 R.D. (pts 33 à 43). Les requérants doivent démontrer une dépendance avérée, soit des liens familiaux préexistants au pays, un réel besoin d’aide et une capacité effective d’assistance. Dès lors que ces éléments sont rapportés, les États se trouvent dans l’obligation de traiter la demande d’asile, ne pouvant y déroger qu’en cas de « situation exceptionnelle ».

- De la faculté à l’obligation pour l’État de tenir compte de certains motifs humanitaires

Les autorités compétentes ne peuvent pas ignorer l’existence d’une telle « situation particulière » et doivent « laisser » ensemble dans l’État membre où ils se trouvent les membres d’une même « famille ». Seule une dérogation fondée sur une « situation exceptionnelle » pourrait être invoquée (pt 46). Les États doivent en tirer les conséquences attendues : principalement prendre en charge la demande d’asile dont il est question.

On peut se demander si la Cour aurait la même interprétation des obligations incombant aux États dans le champ du § 1er du même article en cas de « rapprochement familial » (voir notamment le pt 52). Elle avait souligné que la marge de manœuvre des États y était plus étendue et ils seraient peut-être moins contraints par le « rapprochement familial » au sens du § 1er (les États « peuvent »…). Toutefois, le § 2 comporte également une possibilité de « rapprochement » en cas de dépendance (voir les cas énoncés). En outre, il semble que certains enseignements dépassent le seul champ du § 2 de la clause : la notion de « membre de la famille » plus large que l’article 2 du R.D., la mise en œuvre du droit de l’U.E. lorsqu’une clause dérogatoire est en question, la logique de protection effective lorsqu’une situation humanitaire est avérée par-delà les critères du R.D., les objectifs rappelés de célérité du traitement de la demande et de respect de l’unité familiale, la responsabilité qui incombe à l’État où se déroule la vie familiale en question...Enfin, il n’y a aucune raison de penser que la C.J. n’irait pas dans le même sens que celui de ses derniers arrêts « Dublin » (N.S., Cimade et K.) où elle vise la protection effective des droits fondamentaux des demandeurs d’asile placés sous procédure Dublin. Même dans l’expression de leur marge d’appréciation, les États doivent respecter les droits fondamentaux de l’U.E.

- La Cour de Justice devance le législateur de l’U.E. en matière de transferts Dublin

Cette interprétation de la Cour devance le législateur de l’U.E.[13]. Dans ses arrêts « Dublin » précédents, la C.J. avait déjà éclairé des points primordiaux avant l’adoption des nouveaux textes en cours de négociation (N.S. : suspension du transfert en cas de risque de violation des droits fondamentaux ; CIMADE et GISTI : aide matérielle au demandeur d’asile placé sous Dublin jusqu’au transfert effectif). Dans l’arrêt K., la Cour se prononce dans le sens d’une plus grande protection des liens familiaux, même « élargis », venant combler certaines lacunes du R.D.[14]. Elle semble poser le cadre d’un nouveau critère de détermination qui pourrait primer les autres, puisqu’une situation de « dépendance familiale » avérée ne peut plus être « ignorée » par l’État où se déroule la vie familiale. La Cour donne aussi un signal fort aux États dans cette dernière phase de négociations. Le dernier texte modifié comporte une définition de « membre de la famille » élargie pour les mineurs, une définition des « relatives[15] » et prévoit des cas de « dépendance » à l’article 16A sous l’intitulé « clause discrétionnaire ». Il s’agira d’observer si seul l’intitulé de la nouvelle clause demeure discrétionnaire. Son contenu doit être rapproché de l’interprétation donnée par la Cour dans l’arrêt K.[16] qui encadre déjà largement la marge de discrétion des États[17].

E.N.

C. Pour en savoir plus

  • Derniers textes de refonte du Règlement « Dublin »
  • Arrêts des cours européennes cités en matière de transfert Dublin

 - C.J., 27 septembre 2012, CIMADE et GISTI c. Min. de l’Intérieur, aff. C-179/101 non encore publié au Rec.

 - C.J., 21 décembre 2011, N.S. c. Secretary of State for the Home Department, aff. C-411/10, non encore publié au Rec.

 - Cour eur D.H., 21 janvier 2011, M.S.S./Belgique et Grèce, req.n°30696/09.

  • Jurisprudence Dublin en droit belge et en droits européens

Pour citer cette note : L. Leboeuf et E. Néraudau, La réception du droit européen de l’asile en droit belge : le Règlement Dublin et la Directive Qualification, sous la direction de S. Saroléa, Étude FER, CeDIE (UCL), Louvain-la-Neuve, 2012.


[1] L’article 15 R.D. prévoit que : « 1. Tout État membre peut, même s'il n'est pas responsable en application des critères définis par le présent règlement, rapprocher des membres d'une même famille, ainsi que d'autres parents à charge pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels. Dans ce cas, cet État membre examine, à la demande d'un autre État membre, la demande d'asile de la personne concernée. Les personnes concernées doivent y consentir. 2. Lorsque la personne concernée est dépendante de l’assistance de l’autre du fait d’une grossesse ou d’un enfant nouveau-né, d’une maladie grave, d’un handicap grave ou de la vieillesse, les États membres laissent normalement ensemble ou rapprochent le demandeur d’asile et un autre membre de sa famille présent sur le territoire de l’un des États membres, à condition que les liens familiaux aient existé dans le pays d’origine ».

[2] La Cour ne répond pas à la seconde question, compte tenu de celle apportée à la première (§ 55). Elle concernait l’application de la clause de souveraineté pour risque de violation des articles 3 ou 8 de la CEDH et des articles 4 et 7 de la Charte des droits fondamentaux. Les notions de « traitement inhumain » ou de « famille » s’appliqueraient-ils dans un sens plus large que celui retenu par la Cour eur. D.H. ? La C.J. ne se prononce pas expressément, mais donne une approche large de la notion de membre de la famille et exige des États qu’ils évitent un transfert en cas de dépendance humanitaire. D’après l’avocat général : « il n’y a pas lieu d’appliquer les notions de ‘traitement inhumain’ au sens de l’article 3 de la CEDH et de ‘famille’ au sens de l’article 8 de la CEDH dans un sens différent de celui retenu par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme » (Conclusions de l’avocat général, Madame V. Trstenjak, présentées le 27 juin 2012 dans l’affaire C-245/11). Étant à précise que l’arrêt N.S. est intervenu depuis lors sur la mise en œuvre de la clause de souveraineté.

[3] La Cour rappelle que l’article 11 du Règlement d’application 1560/2003 prévoit que les situations de dépendance visées par le § 2 de l’article 15 R.D. le sont « aussi bien lorsque le demandeur d'asile est dépendant de l'assistance du membre de sa famille présent dans un État membre que dans le cas où le membre de la famille présent dans un État membre est dépendant de l'assistance du demandeur d'asile ».

[4] « [L]’objectif de l’article 15 [R.D.] qui vise, ainsi que l’énonce le considérant 7 de celui-ci, à permettre aux États membres de rapprocher "des membres d’une même famille" lorsque cela est rendu nécessaire pour des raisons humanitaires » (§ 36) (nous soulignons).

[5] La Cour expose que cette interprétation n’est pas infirmée par le § 1er de l’article 15 R.D. qui n’institue pas de lien entre « personne concernée » et demandeur d’asile (§ 34).

[6] La Cour signale aussi que certaines versions linguistiques « emploient des termes autres et plus larges que ceux de l’article 2, i), R.D. » (pt 39).

[7] Conclusions de l’avocat général, Madame V. Trstenjak, précitées.

[8] « La clause humanitaire est rarement mise en œuvre en raison, notamment, des difficultés qu’éprouvent les États membres à trouver un accord sur son application (SEC(2007)22 ; HCR 2006:34-35 ; CERE 2006:160-161) ». F. MAIANI, « Distribution des demandeurs de protection internationale et des personnes protégées (Chapitre 1) », in P. DE BRUYCKER et al., La mise en place d’un Système européen commun d’asile, étude pour le Parlement européen, PE 425.622, 2010, p. 139 (nous soulignons).

[9] « Comme le prouvent les statistiques, les critères familiaux ne jouent qu’un rôle marginal en pratique : selon les données d’EUROSTAT, en 2008 seulement 3,2 % des demandes de prise en charge émises par les États membres étaient fondées sur les critères familiaux. Cela n’est guère surprenant. Comme il a déjà été remarqué, les critères familiaux sont définis très étroitement. […] Mais en dehors de ces aspects, les chiffres donnés plus haut reflètent la tendance des États membres à appliquer strictement les critères familiaux, voire d’une manière indûment restrictive », F. MAIANI, « Distribution des demandeurs de protection internationale et des personnes protégées (Chapitre 1) », in Etude précitée pour le Parlement européen, p. 138.

[10] Voyez un arrêt n° 71119 du 30 novembre 2011, où le C.C.E. affirme que « la protection offerte par l’article 8 de la CEDH ne vise que la famille comprise dans un sens restreint, comparable à la définition donnée par l’article 2 du Règlement 343/2003, et ne s’étend qu’exceptionnellement au-delà » (nous soulignons). Voyez également un arrêt du C.C.E. (n°65233 du 29 juillet 2011 (rejet)), où le C.C.E. (chambre francophone) reproche à la partie requérante de nationalité angolaise, qui est majeure, de ne pas rapporter pas la preuve qu’elle se trouverait dans un lien de dépendance financière vis-à-vis de ses parents qui résident en Angleterre.

[11] « [L]es critères de Dublin fondés sur les liens familiaux des demandeurs d’asile sont définis de manière stricte et strictement appliqués. Ils ne parviennent pas à assurer le respect du droit au respect de la vie familiale. Les clauses de souveraineté et humanitaire, qui pourraient en principe corriger ce défaut, ne sont pas appliquées systématiquement à cet effet. Il en résulte que le système de Dublin a un impact négatif sur l’unité familiale, causant la détresse des personnes concernées et entraînant des risques de violations des droits fondamentaux », F.MAIANI, « Distribution des demandeurs de protection internationale et des personnes protégées (Chapitre 1) », in Étude précitée pour le Parlement européen, p. 135.

[12] « Dans l’économie du Règlement de Dublin, […] protéger l’unité familiale n’est toutefois pas un objectif absolu (voir, là encore, le considérant 6 R.D.). Bien au contraire, lors de l’adoption Règlement, plusieurs considérations ont été mises en avant à l’encontre d’une reconnaissance large des liens familiaux comme un critère pour accorder la responsabilité à un État », F.MAIANI, « Distribution des demandeurs de protection internationale et des personnes protégées (Chapitre 1) », in Étude précitée pour le Parlement européen, p. 135.

[13] Voyez l’article 16A de la proposition modifiée de refonte du R.D. sur les personnes dépendantes. Sa rédaction est à rapprocher de la présente espèce : une approche souple de la notion de dépendance et large de la notion de « membre de la famille », Document du Conseil de l’U.E., 13 novembre 2012, n° 15957/12.

[14] « Autrement dit, il y a des lacunes considérables dans la protection de l’unité familiale accordée par les critères de Dublin. […] C’est le cas, par définition, dans toutes les situations impliquant des liens familiaux élargis. », F. Maiani, « Distribution des demandeurs de protection internationale et des personnes protégées (Chapitre 1) », in Étude précitée pour le Parlement européen, p. 137.

[15] Voyez l’article 2, a), de la proposition de modification du R.D. : « ‘relative’ means, the following persons who are present in the territory of the Member States: – the adult aunt/uncle of the applicant the grandparent of the applicant ».

[16] Étant à préciser que l’article 16A du nouveau texte ajoute une condition de « résidence légale » pour le membre de la famille qui n’est pas demandeur d’asile.

[17]Le considérant 13 du nouveau texte précité préfigure également cette tendance « In order to ensure full respect for the principle of family unity and of the best interests of the child, the existence of a relationship of dependency between an applicant and his/her relation on account of the applicant’s pregnancy or maternity, state of health or old age, should become binding responsibility criterion. When the applicant is an unaccompanied minor, the presence of a family member or relative on the territory of another Member State who can take care of him/her should also become binding responsibility criterion. » (nous soulignons).

Publié le 23 juin 2017