Catastrophes : bientôt des robots pour sauver les humains ?

Imaginez une zone sinistrée après un tremblement de terre ou un accident nucléaire : impossible d’y envoyer des sauveteurs sans mettre leur vie en danger… À l’UCL, Nicolas Van der Noot, tente de mettre au point des robots capables d’assurer cette mission à leur place.

Si dans les films de science fiction, les robots sont capables de se déplacer comme les êtres humains, c’est loin d’être le cas dans les laboratoires spécialisés en robotique ! « La plupart du temps, ces robots sont joués par des humains emmitouflés dans une combinaison riche en capteurs et leur apparence de robot est ensuite réalisée en images de synthèse », explique Nicolas Van der Noot, doctorant F.R.S-FNRS au Centre de recherche en Energie et Mécatronique de l’UCL et au Laboratoire de  Biorobotique  de l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL). « Les robots industriels qui existent actuellement ne sont pas capables de se déplacer comme nous. Ils peuvent au mieux marcher avec les genoux pliés, ce qui n’est ni suffisamment robuste, ni suffisamment efficace d’un point de vue énergétique. »

Par ailleurs, ces robots ne sont pas vraiment aptes à sortir du laboratoire : ils ne peuvent avancer que sur un sol bien plat sans embûches. Et ils échouent généralement lorsqu’on leur demande de marcher sur un sol rocailleux. « Mettre au point des robots adoptant notre démarche est l’un des grands défis de cette époque. »

Prendre la place des hommes face au danger

En effet, disposer de robots ayant les mêmes facultés de déplacement que nous pourrait éviter aux hommes chargés de nous défendre de prendre trop de risques. Dans le cas de la catastrophe de Fukushima, par exemple, il a été prouvé que si quelqu’un avait pu aller fermer quelques vannes à l’intérieur de la centrale, l’explosion du réacteur aurait pu être évitée et avec elle la dissémination dans l’atmosphère d’une grande quantité de vapeurs radioactives. « Sauf que personne n’aurait pu aller fermer ces vannes sans se mettre en danger, le site affichant un taux de radioactivité trop élevé. Seul un robot aurait pu s’en charger », poursuit Nicolas Van der Noot. Et c’est là que le chercheur intervient en essayant de mettre au point un robot capable de telles prouesses.

S’inspirer de la marche humaine

Pour ce faire, il a choisi une démarche originale s’inspirant d’une part de la robotique industrielle classique et d’autre part des expériences de modélisation de la marche de l’homme. « Marcher nous semble très facile mais cette faculté résulte de millions d’années d’évolution dont nous ne connaissons pas à ce jour toutes les étapes. Pour nous inspirer de la marche humaine nous devons donc nous baser sur des hypothèses que l’on teste ensuite. » Concrètement, les recherches du doctorant se déroulent en deux temps : d’abord, implémenter les propriétés musculaires caractéristiques de l’homme aux robots et ensuite apprendre à les contrôler.

marche humaine sur terrain difficile

Implémenter et contrôler des muscles virtuels

Pour que les robots se dotent de propriétés musculaires, pas question de leur greffer du muscle ! « Il s’agit en réalité de muscles virtuels qui existent uniquement grâce à des algorithmes qui tournent au sein de l’ordinateur de bord du robot. Ordinateur qui est en quelque sorte le cerveau des robots. Ensuite, le mouvement de ces muscles virtuels peut être mimé à l’aide de 23 petits moteurs présents dans sa structure. » Sauf que pour les contrôler de manière à leur faire faire ce que l’on veut, il faut savoir les stimuler de manière optimale.

« C’est la deuxième partie de mon travail ! Il est nécessaire de trouver quelles stimulations permettent, par exemple, au robot de marcher en appliquant une bonne force sous son pied ou de se déplacer en fonction de l’inclinaison de son dos. Pour ce faire, je me base sur des simulations informatiques afin de tester différentes combinaisons de stimulations. Celles-ci permettent petit à petit de déterminer les combinaisons qui offrent la meilleure marche et d’ensuite les affiner afin d’arriver à un déplacement idéal alliant mouvements optimaux et consommation d’énergie adéquate. » Un peu comme un enfant qui apprend à marcher fait naturellement : d’abord il chute dès qu’il se lève, puis il fait quelques pas et ensuite un peu plus, etc. Petit à petit, son cerveau corrige ses erreurs et acquiert les bons mécanismes.

COMAN, le petit robot

Lorsque Nicolas Van der Noot obtient des résultats qu’il juge intéressants, il les teste en conditions réelles grâce au robot COMAN acquis par l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne. « Ce robot humanoïde a la taille d’un enfant de 5 ans et dispose de tout l’arsenal nécessaire pour que je teste mes algorithmes de marche », s’enthousiasme le chercheur. Et ça fonctionne plutôt bien : dernièrement, il a réussi à lui faire faire 50 pas sur un tapis roulant en lui tenant les mains pour qu’il ne tombe pas. « C’est déjà un grand pas ! Bien entendu, il faut rester réaliste, cette science n’en n’est qu’à ses débuts, il est donc encore trop tôt pour imaginer COMAN sur une zone sinistrée mais ça évolue », conclut-il.

Elise Dubuisson

CV express de Nicolas Van der Noot

2013                                    Master en science de l’ingénieur (UCL)
Depuis 2013                       Aspirant F.R.S-FNRS en co-tutelle au Center for Research in Mechatronics (UCL) et au Biorobotics Laboratory (EPFL)
Juillet 2014 – juin 2015     Séjour doctoral à l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne
Depuis mai 2016               Séjour doctoral à l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne

Publié le 21 avril 2016