Philippe Baret

  Docteur en agronomie, professeur à l’UCL où il enseigne la génétique et l’agroécologie.

Que représentent pour vous les utopies du temps présent ?

L’idée d’utopie représente avant tout une motivation. Le temps présent demande des changements. Le monde est en évolution et surtout en quête de nouveaux modèles. C’est inspirant de retrouver un texte ancien, celui de Thomas More qui rêvait d’un autre monde. Nous avons besoin de trouver de nouveaux récits. En tant qu’universitaire, il est parfois difficile de proposer des utopies. Les attentes de la société sont souvent très pragmatiques surtout dans le domaine des sciences exactes. Et pourtant, ce sont souvent ces nouveaux horizons qui peuvent donner du sens au travail des universitaires et plus largement de l’université. Le plus important à mon sens est de répondre aux bonnes questions.

 
Est-ce le rôle d’une université de ranimer ce besoin d’utopies ?

La fantaisie ne fait effectivement pas partie de l’agenda des sciences exactes. Mais si derrière ce terme, se cache la capacité d’imagination et de changement, alors nous en avons vraiment besoin. Ce dont nous avons besoin également en sciences exactes, est une reconnexion avec la réalité, pas avec une réalité très technicienne mais avec la diversité des possibles. Une de mes convictions est de dire que l’utopie ou les utopies existent déjà. Certaines personnes les expérimentent, mais souvent ils restent invisibles pour l’universitaire. Notre mission serait ainsi d’identifier dans la diversité de l’existant ce qui est possible en termes d’utopie.

 
En quoi ce thème concerne-t-il les étudiants?

Les étudiants naviguent entre deux attitudes, ils sont en recherche d’un autre monde mais ne croient pas qu’ils vont le trouver dans le cadre universitaire. J’espère que cette Année Louvain des utopies pour le temps présent va les surprendre en leur montrant que l’université est sur la même longueur d’ondes qu’eux, en quête de nouveaux projets pour la société. Finalement, avec ce thème on répond à l’attente des étudiants d’une manière originale, en les surprenant. Il y a un côté joyeux à l’esprit d’utopies : cette idée d’enlever la poussière et de rouvrir les horizons.

 
Quelle est votre utopie pour le temps présent ?

Celle qui me fait vivre actuellement est d’essayer de faire comprendre et de légitimer la place des petites agricultures paysannes du sud, qui à mes yeux constituent l’avenir du modèle agricole mondial. Les systèmes paysans à petite échelle recèlent de ressources extraordinaires. A nous de leur donner une juste place. Une belle utopie pour certains, mais je reste convaincu que c’est l’avenir de notre société.