Au total, depuis 1999, plus de 40 Chaires ont vu le jour à l'UCLouvain.
Les Chaires sont des plateformes qui permettent l’organisation d’activités académiques et/ou
scientifiques multiples :
- engagement d’un académique prometteur (Chaire académique)
- renforcement d’une équipe de recherche dans une discipline précise (Chaire de recherche)
- promotion de cette discipline au travers de colloques scientifiques et conférences publiques
- en présence de « grands formats » internationaux
- en collaboration avec d’autres départements (interdisciplinarité) et des universités internationales
- ouvertes aux spécialistes, professeurs, chercheurs, étudiants et grand public
L'Institut RSCS bénéficie des recherches menées dans plusieurs chaires actuellement, soutenues par la Fondation Sedes Sapientiae, ou par la Fondation Louvain, chaque projet étant porté par un important mécénat spécifique.
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La Chaire Droit & Religions
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La Chaire en éthique des soins de santé
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La Chaire en sciences islamiques
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Le projet Art et Théologies
Et on trouve traces ici des travaux collectifs menés antérieurement et dont l'Institut entend souligner l'apport :
La Chaire Tolérance
Les jeunes ont-ils un problème avec la tolérance aujourd’hui ?
De la guerre des styles aux dialogues des raisons
Mieux saisir les enjeux au coeur des tensions pour pouvoir mieux réagir demain
La première étape (2015-2020) de ce projet (financée par le mécénat De Mere et portée par les professeurs Régis Burnet, Louis-Léon Christians et Brigitte Maréchal), constitue un des axes de l’Institut RSCS autour des porteurs du projet et des doctorants en sociologie, droit et histoire. Ce projet s'inscrit dans une perspective longue de déploiement et de financement de la recherche sur ces thématiques entre théologie et sciences humaines.
Dans la majorité des pays européens, la cohabitation des religions dans la cité est réglée par un système politique qui connaît certes des nuances, mais fonctionne à peu près de manière semblable sur un point : l’État se dit neutre par rapport à la religion, c’est-à-dire qu’il affirme ne pas s’ingèrer pas dans l’organisation interne du culte; il en garantit le libre exercice et la pratique religieuse. Historiquement, ce cadre juridique général a non seulement permis une coexistence pacifique des religions, mais, grâce à la promotion d’un principe d’égalité et à la protection des libertés (notamment religieuses) individuelles et collectives qui sont ainsi assurées par l’État, les convictions religieuses apparaissent même s’y être largement épanouies.
Toutefois avec le pluralisme socio-culturel croissant de nos sociétés, lié aux migrations, mais aussi aux divers processus de globalisation, non seulement de nombreuses questions émergent quant aux modalités concrètes de mise en œuvre de ce cadre juridique, mais le "vivre ensemble" apparaît aussi de plus en plus un défi majeur à relever. Faut-il confondre dans un même et unique rapport les normes, les valeurs et les styles de vie ? Comment articuler le respect des droits et l'estime sociale ? Comment dépasser le sophisme apparent de certains distinguos entre le "privé" et le "public" ?
En Belgique, une recherche menée par le CISMOC pour la Fondation Roi Baudouin en 2006 montrait déjà combien et comment les relations entre musulmans et non-musulmans sont marquées par des malaises réciproques, notamment parce que chacun a l’impression que l’autre constitue un obstacle à la possibilité de vraiment devenir soi-même. Et en 2013, une enquête importante réalisée par la même équipe à Bruxelles dans des lieux dits de socialisation obligatoire (écoles, entreprises, hôpitaux) ainsi que dans des clubs de sport et des maisons de jeunes, a mis en exergue les mêmes constats tout en observant combien le fossé semble encore se creuser entre les populations, car de fortes tensions apparaissent dans les relations, qui semblent désormais renforcées par le poids des imaginaires.
Les discours publics sont ainsi marqués par des attitudes polémiques où se confrontent des slogans stériles tels que ceux évoquant « l’échec de l’intégration » ou encore « la montée de l’islamophobie » dans la société belge. Et ces accusations réciproques qui rejettent toutes les responsabilités des malaises sur l’autre conduisent à des vies parallèles, sur fond de conflits géopolitiques constamment actualisés au niveau international qui alimentent tous les fantasmes, la cohésion sociale apparaît de moins en moins aller d’emblée de soi. Les évènements parisiens dans la Rédaction de Charlie Hebdo confortent encore plus ce climat pesant et paraissent polariser encore un peu plus les positions des uns et des autres.
Par-delà toutes les mesures qui sont progressivement adoptées et qui se rapportent notamment à la prévention du radicalisme, un thème nous apparaît donc dorénavant crucial à revisiter : celui de la "tolérance". Certes ce concept a pu être décrié, au titre du mépris implicite dont il serait porteur. Il n'est de fait qu'une première porte dans un long chemin menant au respect mutuel. Les jeunes eux-aussi apparaissent très critiques de ce thème voire le dénigrent. Tout comme d’autres thèmes tels ceux de la « démocratie » ou de la « neutralité », celui de la « tolérance » apparaît pour eux comme un fourre-tout trompeur du lexique médiatique.
Tolérance : un vocable médiatique
Le point de départ pragmatique du projet, tient à l'observation que c'est bien ce concept de tolérance qui se trouve régulièrement mobilisé, notamment par les politiques ou aussi par les principaux représentants religieux, ou polémiqué par "les jeunes". Le projet entend ensuite montrer le déficit de ce type de tensions, dès lors que celles-ci reposent sur des slogans très peu instruits des aspects historiques et contemporains, bref sur des considérations rarement conceptualisées comme en atteste un lexique de la tolérance régulièrement mobilisé avec des connotations éclatées, voire antagoniques.
Tolérance : d'une boîte noire
à un alphabet intersubjectif de l'estime réciproque
Plus précisément encore, la perception de la tolérance demeure fréquemment chez les jeunes une "boite noire" que le projet entend contribuer à ouvrir, non pas de façon unilatérale, mais bien de façon discursive et intersubjective. Comment une mobilisation des discours et des savoirs propres aux traditions invoquées peut-elle contribuer à coconstruire un alphabet commun du respect des droit et de l'estime des modes de vie, entendu comme outils de leurs adaptations progressivement réfléchies. Ce projet entend ainsi analyser les conditions nouvelles d’un dialogue des raisons, que les jeunes puissent s’approprier, ouvert plutôt que relégué ou ignoré. Le projet adopte une approche interdisciplinaire triangulaire et comparée entre christianisme, islam et sécularité, pour penser les tensions et leurs origines voire aussi les dispositifs futurs d’une cohésion sociale respectueuse de chacun.
Tolérance, pudeur et prosélytisme chez les jeunes
Afin de s’axer sur des interrogations concrètes, cette chaire de recherche entend tester ces hypothèses sur deux « questions sensibles », que l'on entend par ailleurs associer : les thématiques de la pudeur et les thématiques du prosélytisme, entre "bon aloi" et "mauvais aloi", tant dans les mouvements de jeunes, qu'en milieux hospitaliers, en entreprise ou à l'école.
Workshops et "jeudis de l'(in)tolérance"
Ce projet, porté par les professeurs Régis Burnet, Louis-Léon Christians et Brigitte Maréchal, constitue un des axes fédérateurs pour l’Institut RSCS autour des porteurs du projet et des doctorants en sociologie, droit et histoire. Il s’inscrit dans une perspective longue de déploiement et de financement de la recherche sur ces thématiques entre théologie et sciences humaines.
Au delà de plusieurs workshops marquant des étapes fortes du projet, des manifestations de moindre ampleur auront lieu mensuellement, animées par les doctorants. Il s’agira des « Jeudis de l’(in)tolérance », qui ont donné la possibilité à de jeunes chercheurs de communiquer leurs travaux lors de courtes communications suivies d’un débat.
2018-2019
4 octobre
Science et foi : quelle tolérance ? - Pr. Bernard Feltz (UCLouvain – ISP & IONS)
8 novembre
La pudeur religieuse au risque de la mixité sociale - Léopold Vanbellingen (UCLouvain – RSCS)
6 décembre
Tolérance et pudeur : quels rôles dans la reproduction sociale ? - Christine Godesar (UCLouvain – CISMOC)
7 février 2019
Le scoutisme catholique est-il prosélyte ? - Charles Melebeck (UCL – RSCS & ARCA)
7 mars
L’(in)tolérance chez les Pères de l’Eglise - Philippe Henne (Université catholique de Lille)
4 avril
Tolérance, rationalité et croyances religieuses - Alejandro Perez (UCLouvain – RSCS)
2 mai
Pudeur et identité catholique dans la JOC française - Anthony Favier (Université Lumière Lyon 2)
2017-2018
28 septembre
Islamophobie et morale sexuelle: préjugés et discrimination ou conflit des valeurs? - Pr. Vassilis Saroglou (UCL)
19 octobre
Les enjeux juridiques des rapports entre religion et genre - Dr. Stéphanie Wattier (UNamur - UCL)
30 novembre
Divorce, vie conjugale et plaisir féminin en droit indonésien - Dr. Ayang Utriza Yakin (EHESS - UCL)
14 décembre
Philosophie de la religion, corps et pudeur - Dr. Joaquim Hernandez-Dispaux (HELHa - UCL)
22 février 2018
La tolérance, un exercice spirituel ? - Sophie Izoard-Allaux (UCL)
22 mars
Tension entre sexualité et religion: qu'en dit la psychologie? - Caroline Rigo (UCL)
26 avril
Infractions pénales liées à la pudeur en droit belge - Isabelle Wattier (Police de Bruxelles-Midi)
17 mai
Les jeunes scouts musulmans bruxellois face à la pudeur - Tess Malcourant (UCL)
8 juin 2017
Corps, féminité et gynécologie à Bruxelles aux XIXe et XXe siècles. Questions de pudeur, une question de pouvoir ? - Julie De Ganck
Tolérance : lexique moral et politique
Dans le cadre de cette Chaire de recherche, le concept de tolérance est conçu à la fois comme une vertu morale individuelle, mais également une valeur politique. On vise à en cerner les contours de deux façons qui seront amenées à constamment s’entrecroiser pour mieux se questionner réciproquement.
Tolérance : les discours
D’une part, nous visons à cerner et à analyser les discours des jeunes à propos de la tolérance, depuis diverses portes d’entrée, mais aussi leurs références et les fondements (antagoniques ?) de leurs interprétations afin de saisir où se situent les enjeux et tensions qui s’y donnent à voir. Dans ce cadre, il sera important de tenir compte des vécus subjectifs des jeunes, tout en sachant que ce thème de la tolérance apparaît crucial tant il se situe au coeur de la construction des rapports entre l’individu et l’État, mais aussi entre l’individu et sa religion ainsi qu’entre l’individu et le monde social en général (au sein de son groupe de référence ou d’appartenance spécifique, mais aussi au-delà). Comment parlent-ils/elles de ce thème ? Quelles connotations y accolent-ils/elles ? Pourquoi ce thème de la tolérance leur apparaît-il pertinent ou non ? Comment, c’est-à-dire selon quelles modalités, depuis quelles dimensions ? Dans quelle mesure celui-ci est-il, ou non, perçu comme limitant les libertés individuelles, voire antagonique à celles-ci ? Comment par exemple cette forme de retenue ou de réserve qu’impose l’injonction de tolérance face à des choses ou des comportements que l’on désapprouve ne vient-il pas contredire un impératif islamique tel que celui de « l’injonction au bien et au pourchas du mal » que chaque croyant est, selon certaines interprétations, censé rappeler à tout coreligionnaire afin de le maintenir dans la « voie droite ». Bref comment les jeunes, musulmans et les jeunes nonmusulmans, construisent-ils leurs rapports à ce thème de la tolérance dans un contexte où l’individualisme et le respect des droits individuels apparaissent sacralisés ? D’autre part, toutes ces investigations socio-anthropologiques seront éclairées à la lumière de recherches de nature juridique et historique qui viseront à appréhender ce concept dans ses différentes dimensions.
Aborder ce thème de la tolérance, dans ses acceptions passées et telles qu’elles se construisent à l’époque contemporaine, nous apparaît une étape décisive pour mieux cerner l’un des grands enjeux de la « rencontre complexe » (F. Dassetto) qui se joue aujourd’hui en Belgique et en Europe avec l’importante présence de musulmans dans nos cités qui sont porteurs d’histoires et de visions de l’homme et de la société qui sont différentes de celles qui se sont développées dans le contexte occidental.
Une première focalisation :
les jeunes de religions et convictions différentes
Première focalisation, le champ prioritaire choisi est celui des populations jeunes de 15 à 25 ans, issus de milieux sociaux et de religions différentes. D’une part parce qu’il y va de l’avenir de nos sociétés. Mais aussi d’autre part, parce qu’il s’y opère aujourd’hui un tournant dans les modes de pédagogie sociale. Plus concrètement, il s’agit d’y examiner d’abord les usages lexicaux religieux, le type de connaissance/ignorance/mise en oeuvre des argumentations issues de leurs ressources religieuses propres, de celles qui leur sont étrangères, et de celles de la société civile. Ensuite, il s’agit d’examiner si et comment les politiques publiques ou religieuses contribuent à orienter ces usages et selon quelles modalités.
Une seconde focialisation :
le conflits des rationalités
Une Seconde focalisation, le choix des thèmes où pourraient se jouer des conflits ouverts de rationalité théologique et séculière. Il s’agit pour le projet de revenir à des « questions sensibles » pour 1° savoir quel est le contenu exact des traditions religieuses sur la question ; 2° comprendre ce qui est exactement en jeu dans les mobilisations voire les revendications des uns et des autres ; 3° proposer les limites d’une cohabitation « raisonnable » dans laquelle les libertés de chacun sont garanties, mais la vie commune est possible.
La perspective du projet n’est pas en soi de reposer les termes d’un « dialogue interreligieux » dont la finalité serait elle-même théologique. À l’autre extrême, il ne s’agit pas non plus de prétendre que le facteur religieux soit l’unique facteur explicatif, qu’il s’agirait dès lors de cerner selon des méthodes plus invasives.
Le projet entend analyser — comme un élément certes non suffisant, mais nécessaire — les formes de dialogue des raisons avec et au sein de la société civile, et avec les raisons séculières d’un État réputé neutre, non pas comme mutation de pratiques formelles, mais à tout le moins comme une médiation d’arrière-plan apte à faciliter les dispositifs de respect, d’estime sociale et de cohésion sociale.
La réouverture des philosophies politiques contemporaines à une prise au sérieux de la raison religieuse, tant chez John Rawls que chez Jurgen Habermas ou Jean-Marc Ferry par exemple, ont été depuis les années 1990 — et sont encore — un lieu majeur pour problématiser les enjeux d’une parole reconstruite à plusieurs voix : qu’il s’agisse d’un « agir communicationnel » ou d’une « religion réflexive », il s’agit de montrer le tournant occidental d’une reconnaissance par l’effort commun dans l’interpellation des raisons, plutôt que des forces et des compromissions.
Ces prospectives ont été l’occasion d’une vaste littérature en théologie catholique, entrant en dialogue notamment avec Jürgen Habermas, comme l’avait fait le Pape Benoit XVI lui-même, alors cardinal Ratzinger. Cet exercice théologique, qui n’a pas été mené avec l’Islam selon les mêmes formes, n’a pas été non plus confronté aux données sociologiques les plus concrètes, dans l’émergence de nouvelles pratiques sociales (bottom-up), voire dans certaines expérimentations ponctuelles promues ou testées par autorités publiques, tant nationales qu’européennes, notamment dans le cadre du dialogue soutenu par l’Union européenne (art. 17 TFUE) ou par le Conseil de l’Europe (Livre blanc du Dialogue interculturel) (top-down). Comment ces modalités d’interaction entre raisons et traditions peuvent-elles être formalisées pour fonder une gestion mieux instruite de la diversité et plus apte à faire émerger des attitudes concrètes de tolérance ? Les hypothèses de base de la recherche, centrées sur la mobilisation des arrière-plans théologiques et lexicaux des différentes parties, ne resteront pas théoriques. Elles seront testées non seulement dans une approche historique de l’évolution des concepts et des pédagogies de la tolérance au cours au cours du XXe siècle, mais aussi dans une approche juridique de leurs potentialités concrètes en droit belge et européen, et ce dans des lieux institutionnels concrets.
Deux sous-thématiques : pudeur et prosélytisme
Parallèlement à ces deux focalisations susmentionnées, une attention spécifique sera accordée, lors de colloques, à deux questions « sensibles » relativement à la question générale de la tolérance : la pudeur et le p r o s é l y t i s m e . Ces deux colloques successifs permettront d’alimenter les réflexions et débats relativement aux recherches menées par les doctorants.
Entre socio-anthropologie, droit, histoire et théologie Loin de laisser le religieux dans un état de boîte noire muette et ininterrogée, il s’agit d’examiner comment les ressources théologiques et discursives peuvent être mobilisées tant dans le christianisme que dans l’islam, mais aussi chez des jeunes qui se disent plutôt humanistes ou rationalistes, pour construire les conditions d’un monde commun, tolérant et respectueux plutôt qu’arbitraire, autoritaire, ou vide de sens.
Outputs et recommandations pratiques
Dans le cadre de cette recherche où s’entrecroisent analyses socio-anthropologique, historique et juridique, le projet vise tout d’abord à mieux comprendre où se situent les tensions et les modalités selon lesquelles celles-ci se sont exprimées historiquement et aujourd’hui. Il porte notamment sur des champs concrets, comme celui du milieu hospitalier universitaire où se côtoient jeunes étudiants et jeunes adultes patients ou employés. L’approche juridique permettra d’opérationnaliser les constats sociologiques et pédagogiques dans des recommandations et par la validation de bonnes pratiques. Ces recommandations seront elles-mêmes attentives à la diversité des modèles de gestion de la diversité, en particulier à la question de la différenciation entre gestion publique et privée de la diversité religieuse. De ce point de vue, les renforcements lexicaux de la tolérance ne se concevront pas seulement du côté des individus, usagers publics ou privés, mais aussi comme un know how institutionnel et collectif à spécifier.
Colloque international Islam & pudeur - 3 et 4 décembre 2020 via zoom
Avec une quinzaine de communications ainsi que des keynote speeches des Prof. Dominique AVON (Paris), Christian LANGE (Utrecht) et Aymon KREIL (Gand)
Dans la cadre de la démarche interreligieuse de la Chaire tolérance de Mere de l’Université catholique de Louvain, diverses thématiques sont approchées comme autant de lieux sensibles dans les relations entre christianisme et islam et avec une attention particulière aux attitudes de la jeunesse. La présente conférence se centrera sur le thème de la pudeur (hayâ’) dans l’Islam, ses conceptions, ses réceptions et ses perceptions dans le monde musulman et le monde occidental. Comment comprendre les tensions majeures qui surviennent aujourd’hui sans une compréhension plus précise et mieux ancrée de la tradition islamique et de ses contextes, mais aussi dans ses lectures croisées et ses réinterprétations externes ?
Dans l’orthodoxie musulmane, la pudeur constitue une valeur religieuse fondamentale: juridique, mystique, et théologique. Elle est un élément central de la justification éthique et morale de chaque individu, hommes et femmes. Etonnament, pendant ces dernières décennies, la pudeur n’a apparemment plus visé que les femmes musulmanes. Pourquoi ? Au moment où l’Occident est ébranlé par les mouvements #metoo, comment analyser aussi le statut des hommes en Islam ?
La question de la pudeur féminine en islam s’est progressivement durcie depuis une trentaine d’années. Comment analyser de nombreuses attitudes liées à la pudeur, comme le refus de serrer la main d’une personne de l’autre sexe, la ségrégation entre hommes et femmes en certains lieux d’intimité, la réprobation des représentations sexuelles au cinéma ou dans les clips vidéo ? La pudeur des musulmans, telle qu’elle est conçue ou perçue, est-elle incompatible avec des valeurs européennes occidentales ?
Dans la multiplicité des facteurs interprétatifs de ces tensions (traditionnelles, culturelles, civilisationnelles, politiques, économiques, genrées etc), comment analyser l’incidence d’une meilleure compréhension des référents religieux et des espaces discursifs qu’ils ouvrent ?
Que signifierait ainsi que la mystique musulmane place la pudeur dans une relation d’intériorité du cœur, comme une purification existentielle? Peut-on dire, et avec quelle portée, que la pudeur devient une catégorie théologique dans la foi musulmane ? Comment l’Islam conçoit-il plus largement le corps des êtres humains et les relations entre les personnes ?
La conférence se saisira somme toute de la question suivante : Comment une meilleure connaissance des traditions et de leur sens permettrait-elle de construire un dialogue des raisons plutôt qu’une disqualification mutuelle et abrupte des styles de vie ?
Table-ronde Pudeurs & religions - 16 mai 2017