FIAL
Place Cardinal Mercier 31/L3.03.11
1348 Louvain-la-Neuve
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Aude Musin
Chargée de cours invitée
Parcours
professionnel1er
octobre 2013 : assistante de recherche
postdoctorale. Coordination du PAI 7/22 « Justice and populations, the
Belgian experience in international perspective, 1795-2015 »
(http://www.bejust.be).1er
septembre 2011 : Chargée de cours invitée à l'UCL, Faculté de philosophie, art
et lettres.1er
septembre 2011-31 août 2013 : Chargée de cours invitée à l'UNamur, Faculté de
philosophie, art et lettres.1er
octobre 2009-30 septembre 2013 : Chargée de recherches du F.R.S.-FNRS (Fonds
National de la Recherche Scientifique)1er
novembre 2008 – 30 septembre 2009 : Allocation
post-doctorale du Conseil régional des Pays de la Loire. Post-doctorante au CERHIO-Université
d’Angers (Centre de Recherches Historiques de l’Ouest, UMR CNRS 6258, anciennement HIRES,
Histoire des régulations et des politiques sociales).1er
octobre 2004-30 septembre 2008 : Aspirante du F.R.S.-FNRS, doctorante UCL.Logistique
scientifique2011 : Vice-directrice de la collection
"Histoire, justice, sociétés" (PUL).- Diplômes
Année Label Institution 2003 Licenciée en histoire Université catholique de Louvain 2006 Diplômée d'études approfondies en philosophie et lettres Université catholique de Louvain 2008 Doctorat en histoire, art et archéologie Université catholique de Louvain
Année académique 2012-2013
LHIST2382C Gouvernance et sociétés : questions approfondies II (temps modernes)
LFLTR1420C Fondements historiques de la civilisation occidentale II (temps modernes)
LHISB315 Paléographie spéciale de la période moderne (UNamur)
Année académique 2011-2012
LHIST 2381C Gouvernance et sociétés : questions approfondies I (temps modernes)
LHISB221 Structures politiques et institutions de l'espace belge à l'époque moderne (UNamur)
Mémoires et thèses
Jury de mémoires de licence/maîtrise en histoire (2006 )
Copromotrice de mémoires de maîtrise en histoire (2011 )
Membre de comités d'accompagnement de thèses en histoire (2013 )
- Les cours
Nom ID Heuristique spéciale et exercices sur des questions d'histoire : temps modernes LHIST1243
« Pour ce que c’estoit chose non
permectable en ville de police. La régulation de la violence urbaine
(Pays-Bas, XIVe-XVIIe siècles) » (2009-).Mes recherches actuelles portent sur
l’évolution de la gestion de la violence interpersonnelle et le processus de sa
criminalisation dans les villes des Pays-Bas entre le XIVe et
le XVIIe siècle, en lien avec le phénomène de construction de
l'Etat moderne. Par « violence », est entendu « l’exercice de
contraintes sur le corps ou l’honneur d’un individu », c’est-à-dire la
violence physique (homicide et coups et blessures), et la violence verbale
(injures). Elle représente une part importante des comportements enregistrés
dans les archives judiciaires médiévales et modernes, traduisant la
préoccupation des autorités en la matière dès la fin du Moyen Âge. Les
communautés urbaines, dont la survie dépend de leur faculté à maintenir la paix
entre leurs membres, ont développé des institutions et des modes de régulation
originaux pour contrôler l’agressivité. Ces mécanismes de régulation de la violence
permettent de la canaliser sans pour autant la criminaliser. Dans un deuxième
temps (schématiquement, à partir de la fin XVe-XVIe siècles),
les autorités centrales, dans le cadre d’un État en plein développement,
relayées par des instances provinciales, viennent apporter leurs propres moyens
d’encadrement, induisant un mouvement de criminalisation des comportements
violents. Derrière l’évolution de la gestion de la violence se profile donc
celle de la construction de l’État moderne et de ses rapports avec les
communautés locales. Deux aspects constituent plus spécifiquement le champ
d’analyse de ma recherche actuellement.1.
La grâce princière, instrument de
criminalisation de l’homicideLes rapports entre villes et prince
en termes de régulation et de criminalisation de la violence sont approchés par
l’étude du pouvoir de grâce, utilisé comme un instrument de gouvernement. Dans
nos régions, le prince s’est octroyé progressivement le monopole du droit de
pardonner les homicides, au détriment d’autres formes de grâce octroyées au
niveau local. Cette monopolisation participe à la définition progressive de
l’homicide comme un crime : alors qu’au Moyen Âge, les auteurs d’homicide
disposaient de plusieurs possibilités pour échapper, dans la plupart des cas, à
la peine de mort (par une composition, un mandement de fait, une grâce demandée
au prince, à l’un de ses officiers ou au seigneur haut-justicier), le début des
Temps Modernes consacre, en théorie du moins, le souverain comme unique
détenteur du pouvoir de pardonner. Mes recherches permettent d’affiner la
compréhension de ce processus de monopolisation comme moyen d’affirmer son
autorité sur les populations, la chronologie et les modalités de ce processus,
par une étude systématique des rapports de complémentarité/concurrence
entretenus par la grâce princière avec les anciennes procédures locales.2.
Le déclin de la vengeance, facteur
explicatif de la baisse de la violence dans le temps longL’évolution de la perception, tant
par les différents niveaux de pouvoir que par la population, de la violence
comme un mode légitime ou non de résolution des conflits constitue le deuxième
volet de mes recherches. Sont envisagées les évolutions des mécanismes
engendrant la violence et les formes d’expression de celle-ci, en abordant plus
particulièrement l’évolution de la perception de la vengeance comme un
mécanisme produisant une violence légitime. La disqualification progressive de
la vengeance privée au profit du recours aux institutions judiciaires est
considérée, à juste titre, comme l’un des facteurs explicatifs principaux du
déclin quantitatif de l’homicide dans le temps long. Mon analyse détermine le
rôle joué par les villes dans cette disqualification où dès le Moyen Âge, des
mécanismes sont mis en place pour éviter l’enchaînement de la violence et
faciliter le recours aux institutions. Un autre axe de réflexion concerne plus
spécifiquement la gestion de la violence non mortelle, quelque peu délaissée
par l’historiographie relative à la vengeance : celle-ci a en effet trop
tendance à considérer que la violence dans sa forme la plus extrême – le
meurtre – est l’unique forme de vengeance jugée adéquate par les hommes du
Moyen Âge. Mes recherches montrent bien, dans la lignée des travaux de G.
Schwerhoff, que toutes les formes de violence, en ce compris les simples coups
et les injures, nécessitent une réponse de la victime et peuvent dès lors être
génératrices de violence en retour. Cependant, cette violence ne doit pas
nécessairement être ultime pour être efficace et pour être considérée
satisfaisante et suffisante par le vengeur et la communauté.« Vengeance privée, violence pour l’honneur ? Histoire comparée
de la violence dans deux ensembles territoriaux : Anjou-Maine et Pays-Bas
bourguignons (XVe-XVIIIe siècles) » (2008-2009).A l’époque
médiévale, la violence apparaît comme un mode de communication parmi d’autres.
Elle prend place dans les relations quotidiennes entre des personnes qui
entretiennent des liens de sociabilité : relations professionnelles, entre
créancier et débiteur, rivalité pour l’amour d’une jeune fille, rencontres à la
taverne,… constituent autant de circonstances et de rapports dans lesquels un
désaccord peut s’exprimer de manière violente. La violence médiévale est une
violence d’interconnaissance, de « face à face ». Dans cette société
de proximité, l’honneur est une valeur essentielle qu’il faut défendre contre
les attaques d’autres membres de la communauté. Dans cet esprit, l’injure
proférée publiquement contre la conduite sexuelle ou l’honnêteté d’un individu
doit être démentie par lui, sous peine d’être considérée comme vraie. La
violence, tant verbale que physique, peut – voire doit – entraîner une réponse,
en présence de la communauté. De cette situation peut découler une violence en
chaîne, allant de la parole aux gestes, parfois mortels. Mais l’honneur est aussi collectif. L’honneur
du groupe de parenté et d’amis doit être défendu par ses membres. Des propos
injurieux ou des coups infligés à un parent sont un élément déclencheur
essentiel de la violence. La vengeance de l’homicide d’un membre de ce groupe
se traduit par une mort, un contre-meurtre, dans le groupe opposé. L’importance
de l’honneur et de la défense de celui-ci pose des jalons à l’intérieur
desquels une violence vindicatoire licite peut trouver à s’exercer, jusqu’à sa
forme extrême : la guerre privée. La violence n’est donc pas
purement une réaction impulsive, elle est aussi, en partie du moins, construite
et objectivée. Aux XIVe
et XVe siècles, la violence vindicatoire n’est pas toujours
condamnée par les autorités judiciaires, pour autant qu’elle respecte les
formes. C’est seulement si ces formes ne sont pas respectées que la violence
devient un « vilain cas », illicite. Au tournant des XVe-XVIe
siècles, le règlement privé de la violence par la violence cesserait d’être
considéré comme légitime.A partir du corpus des lettres de
rémission de l’Anjou et du Maine, une étude de la perte de légitimité de la
violence vindicatoire sur la longue durée a pu être menée pour le Royaume de
France. L’évolution des motivations déclarées d’un homicide et des
justifications avancées par les criminels pour obtenir le pardon du souverain
dessine les contours de la violence mortelle considérée par les autorités
centrales comme pardonnable, donc tolérable. Plus qu’un recul de l’agressivité
dans le chef de la population, ou pour le dire autrement, une internalisation
de la contrainte et un meilleur contrôle des affects selon la théorie
éliasienne, les lettres de rémission permettent surtout de saisir un changement
de perception de la violence par les autorités centrales. Les motivations
affichées par les suppliants pour obtenir la rémission du roi reflètent donc davantage
la conception de la violence tolérée par le pouvoir que par les populations.
L’évolution des justifications de l’homicide sur le temps long illustre ce
passage d’une violence vindicatoire licite à une intolérance vis-à-vis des
actes de vengeance. La vengeance disparaît comme justification d’un homicide
dans les lettres de rémission sous le règne de François Ier, mais
cette transformation ne signifie nullement un effacement d’un recours à la
violence par les justiciables pour régler une atteinte à l’honneur individuel
et/ou familial. En fait, la vengeance demeure évoquée dans les lettres des XVIe-XVIIIe
siècles, mais elle est attribuée exclusivement à la victime, laquelle a agressé
le suppliant pour se venger de lui sous un prétexte fallacieux, obligeant ce
dernier à se battre et à tuer pour défendre sa vie. Elle n’est donc désormais
plus une motivation permettant l’octroi du pardon royal. Dans les faits, la
légitime défense s’est déjà imposée comme principale justification de la
violence homicide pardonnée dès le XVe siècle. Mais la nature
de la légitime défense a également évolué entre les XVe-XVIIIe siècles.
Dans les lettres de la fin du XVIe siècle, les suppliants affichent
une meilleure maîtrise de leurs émotions. Plusieurs agressions successives sont
généralement nécessaires avant que ceux-ci ne recourent à une réponse violente,
ayant pour seul but de défendre leur vie. La colère a pratiquement disparu des
motivations avancées. La défense de l’honneur est certes toujours un élément
déterminant, mais les lettres de rémission de cette époque donnent l’impression
que cette défense ne passe plus par une réponse violente, mais plutôt par le
recours à la voie judiciaire. L’ivresse, rare comme excuse aux XVe-XVIe
siècles, devient fréquemment évoquée au XVIIIe comme justification
de la violence, induisant un relâchement temporaire du contrôle des affects
sous l’effet de l’alcool. Ces différents éléments ont pu être interprétés dans
l’historiographie comme un affaiblissement de la loi de la vengeance, par lequel
les populations accepteraient que leurs différends se règlent en justice et
plus de manière privée. Cependant, les sources issues de la pratique de pardon
donnent une image partielle et partiale de la réalité de la violence. Si
l’abandon des règles de la vengeance est présenté dans les lettres de
rémission, il s’agit essentiellement d’une stratégie communicationnelle de la
part des suppliants afin de maximiser les chances d’obtenir le pardon royal.Les lettres de rémission ont aussi
été utilisées par les chercheurs pour approcher les homicides de l’époque
préstatistique en France ou dans les anciens Pays-Bas. Des courbes du nombre de
rémissions ont pu être établies à partir de cette source, et envisagées par
certains comme représentatives de la violence réelle, interprétant une hausse
du nombre de rémissions comme une hausse de la violence. Une recherche comparée
sur les lettres françaises et des Pays-Bas a démontré que les variations d’une
telle courbe sont tributaires de multiples facteurs, parmi lesquels la
proximité de l’administration et du souverain, ne permettant pas de considérer
les rémissions pour homicides comme représentatives de la violence réelle. Une
approche comparée entre le royaume de France et les Pays-Bas a permis de
dégager de nombreux rapprochements, mais aussi des facteurs propres à l’un ou l’autre
espace, en particulier le problème de la monopolisation du droit de grâce
auquel les souverains des Pays-Bas sont confrontés dans leurs possessions.« Sociabilité
urbaine et criminalisation étatique : la justice namuroise face à la
violence de 1363 à 1555 » (2004-2008).Mes recherches doctorales, menées entre 2004 et
2008 sous un mandat d’aspirant du F.R.S.-FNRS, ont montré qu’au
tournant du Moyen Age et des Temps Modernes, une transformation dans la gestion
des comportements considérés comme déviants semble se mettre en place : la
justice médiévale rend largement possible la réintégration des auteurs de
nombre de délits après une peine pécuniaire modulée et le recours à des
procédures de résolution spécifiques des conflits (paix à parties notamment).
Au cours des XVe-XVIe siècles, se développe cependant une
volonté du prince, donc de l’élément étatique, de s’assurer le monopole du
contrôle de ses sujets sous plusieurs aspects. Cette volonté se traduirait par
un durcissement des sanctions envers les délinquants et le développement de la
rémission princière, mais aussi par la définition de comportements autrefois
tolérés ou du ressort de la justice ecclésiastique comme des crimes. L’étude de
la violence sous ses différentes formes dans une ville des anciens Pays-Bas –
Namur – offre un éclairage renouvelé sur la problématique du passage de la
sociabilité urbaine à la criminalisation étatique. L’activité des échevins
namurois a produit des sources particulièrement riches pour approcher la
perception de la violence par les institutions judiciaires à cette époque. Les
comportements violents représentent une écrasante majorité dans ces archives (85
% des infractions régulées par la Haute Cour de Namur au XIVe siècle,
68 % au XVe siècle,
et encore 36 % au siècle suivant). L’analyse de l’encadrement judiciaire des
différentes formes de violences interpersonnelles dans la ville de Namur – homicide,
coups et blessures, injures principalement – entre la seconde moitié du XIVe
siècle et la première moitié du XVIe siècle permet d’envisager ces
transformations de perception et de traitement de la délinquance dans le champ
des autorités, et donc le passage de la « sociabilité urbaine » à la
« criminalisation étatique ». En effet, la violence homicide est
largement tolérée par les échevins namurois au début de la période, pour autant
qu’elle respecte les règles de la défense de l’honneur et de la vengeance.
Cette perception de la violence se modifie peu à peu dans la seconde moitié du
XVe et au XVIe siècle, par l’action du prince, qui prend
appui sur les institutions provinciales et sur les procédures existantes pour
concurrencer le système médiéval de gestion de la violence. Par cette action,
l’homicide devient progressivement criminalisé. La violence de manière générale
se définit de plus en plus comme une atteinte au prince et non plus d’abord
comme une offense à une personne particulière. La violence dans la ville et son
encadrement constituent donc un terreau privilégié pour appréhender la
construction de l’Etat moderne, dont la justice est l’un des points d’appui les
plus importants.