Exosquelettes de rééductaion, robots de microchirurgie, prothèses intelligentes…la robotique et le secteur médical n’ont jamais fait aussi bon ménage. En 2014, l’UCL a créé le Louvain Bionics, un centre d’expertise unique en Belgique et en Europe. L’objectif ? Booster la recherche autour de la robotique médicale et des technologies d'assistance au mouvement et, surtout, faire bénéficier au patient de ces progrès. Un enjeu d’avenir, et déjà, de nombreux projets, collaborations et succès.
Le Louvain Bionics de l’UCL, ce sont 18 professeurs et 64 chercheurs rassemblés autour des questions du mouvement et de l’assistance robotisée au geste. Des membres aux multiples expertises ! Ils sont ingénieurs, kinésithérapeutes, neuropsychologues, médecins et chirurgiens, éthiciens, tous rassemblés autour d’une ambition : permettre aux patients de bénéficier au mieux des progrès de la recherche dans les sciences et techniques de la bionique. Pourquoi miser sur l’interdisciplinarité ? Une collaboration facilitée entre ingénieurs, neuroscientifiques et médecins permet d’abord d’aboutir à une recherche plus rapide et concrète. La mise en relation de ces experts avec un éthicien est elle aussi essentielle. En effet, les avancées technologiques en matière de robotique médicale sont importantes mais l’une des missions de l’université est d’évaluer l’impact sociétal de ces nouvelles technologies et d’étudier les questions qui y sont liées ; à quel moment l’humain devient-il une machine ? Un robot chirurgical peut-il être programmé de sorte à prendre les décisions lors d’une intervention ? Si l’opération se déroule mal, qui doit endosser les responsabilités ?
Ingénieurs et médecins main dans la main
L’autre avantage d’un centre d’expertise en robotique médicale situé dans une université complète comme l’UCL est de pouvoir expérimenter et valider les dispositifs médicaux « from bench to bedside », c’est-à-dire du laboratoire jusqu’au lit du patient. Comment ? Grâce à un laboratoire d’initiation et de formation imaginé tant pour les concepteurs (ingénieurs) que les utilisateurs (médecins et scientifiques) de ces technologies bioniques, en vue de développer des savoir-faire innovants dans la pratique médicale, et de gagner du temps ! Benoit Herman, coordonnateur de Louvain Bionics, nous explique : « Lorsqu’un ingénieur conçoit un prototype, s’il le fait seul, il obtiendra une machine performante mais pas nécessairement adaptée aux besoins du clinicien ou du patient. S’il la conçoit en interaction avec l’équipe médicale, il pourra davantage cerner leurs besoins et d’emblée optimaliser son dispositif. » Un moyen de gagner un temps précieux et d’accéder plus rapidement aux essais cliniques. Et donc à la mise en œuvre de la nouvelle solution en routine clinique !
Les collaborations d’aujourd’hui….
Concrètement, les membres du Louvain Bionics ont déjà mis au point ou participé à la création de plusieurs prototypes et spin-offs grâce à des collaborations établies avec des partenaires spécialisés et l’obtention de financements :
- Spin-off Axinesis : les robots REAplan et REA2plan développés par la spin-off Axinesis (UCL), permettent aux patients cérébro-lésés (par exemple ayant subi un accident vasculaire cérébral ou soufrant d'infirmité motrice cérébrale) de réapprendre à bouger le bras parétique en misant sur l'intensivité de la rééducation. Axinesis est également impliquée avec plusieurs membres du Louvain Bionics dans le projet ROBiGAME, qui vise à développer et intégrer des jeux sérieux intelligents au sein des robots interactifs de rééducation. Ce projet bénéficie d’un financement WBHealth de la Région wallonne. L’objectif est d’adapter en continu la difficulté du jeu aux performances du patient, pour l’aider à réapprendre graduellement et entretenir sa motivation et son implication dans la thérapie.
©Axinesis
- Société 3D-Side : cette autre spin-off de l'UCL produit des guides de coupe et des implants sur-mesure pour chaque patient grâce aux technologies d'impression 3D. Cela permet aux chirurgiens de réaliser de manière plus sûre et précise des gestes complexes et critiques.
©3D-Side -Coll.Dr.Chotel,Centre pédiatrique de Lyon (FR)
- UMRI ImagX-R : il s’agit d’une unité mixte de recherche et d’innovation dédiée à la protonthérapie guidée par l’image pour lutter contre le cancer, et financée par l’ancienne spin-off de l’UCL IBA suite au partenariat public-privé initial.
- Projet AVATAR² : L'objectif de ce projet bénéfiçiant d’un financement du pôle de compétitivité santé BioWin de la Région wallonne est de concevoir un dispositif robotisé de remplacement de la valve aortique par voie mini-invasive sur coeur battant.
…et les projets de demain, entre innovation et accessibilité à tous
Plusieurs nouveaux projets ambitieux sont en chantier au sein du Louvain Bionics comme par exemple:
- des exosquelettes et prothèses actives à faible consommation énergétique, dotés d’interfaces bidirectionnelles échangeant des informations sensorielles avec le patient ;
©Florine Thiebaud
- Des robots d'assistance à la microchirurgie reconstructrice ou à la neurochirurgie, permettant de réaliser des gestes et sutures complexes à une échelle inférieure aux capacités humaines ou d'accéder de manière très peu invasive à des tumeurs profondes du cerveau.
- La création d’un laboratoire de réalité virtuelle et augmentée pour prototyper et étudier les nombreuses possibilités offertes par cette nouvelle révolution dans des domaines tels que le guidage des gestes du chirurgien en superposant au patient la simulation préopératoire, ou l’immersion du patient dans un environnement virtuel lors d’une séance de rééducation robotisée.
L'innovation passe également par des projets visant à développer des systèmes low-cost pour les rendre plus accessibles aux patients et cliniciens dont:
- un système de mesure des mouvements des lèvres pour quantifier les troubles de l'élocution. Celui-ci utilise des caméscopes grand-public pour tendre vers un coût 100 fois plus faible que les localisateurs 3D professionnels (utilisés en capture du mouvement du corps entier) tout en égalant leurs performances. Cela permet aux logopèdes, souvent indépendants, de pouvoir faire l’acquisition d’un système fiable et d’une technologie de pointe, pour un coût abordable.
- des prothèses mécaniques ou myoélectriques utilisant les nouvelles technologies de prototypage rapide et d'impression 3D ainsi que des microcontrôleurs opensource (dont les plans sont téléchargeables gratuitement), en étroite collaboration avec l'ASBL belge Humanitarian Prosthetists & Orthotists (HP&O) qui effectue régulièrement des missions dans les pays en voie de développement et vise à rendre des prothèses de qualité accessibles aux plus pauvres - les enfants africains en particulier.
Le Louvain Bionics de l’UCL a pu voir le jour grâce à un legs de 1,086 millions d’euros de Pierre De Merre, via la Fondation Louvain.