Gauthier Limpens, doctorant à l’Ecole polytechnique de Louvain (EPL), veut proposer aux décideurs une meilleure méthode d’intégration du stockage énergétique dans le futur.
« On parle beaucoup de stocker l’énergie, avance Gauthier Limpens. Pourtant, il existe très peu d’études sur le sujet. » Cet ingénieur mécanicien diplômé de l’UCLouvain en 2015, passé par l’aéronautique avant d’entamer son doctorat il y a trois ans, s’est passionné pour ce sujet innovant. « Je voulais avoir une meilleure vision de l’intégration du stockage de l’énergie pour le futur. Car jusqu’à aujourd’hui, les études sur le sujet se concentrent seulement sur les technologies de stockage, comme les batteries électriques par exemple et non sur l’ensemble du système énergétique de notre société. »
Le système énergétique : c’est l’objet d’étude de Gauthier Limpens. Il englobe tout ce qui permet d’avoir chauffage, électricité et mobilité pour les ménages comme pour les industries. Avec l’intégration massive du renouvelable, les besoins de stockage seront énormes : « Si l’on regarde le réseau électrique de manière isolée par exemple, il nécessitera à lui seul une capacité de stockage très importante, explique le chercheur. Mais si l’on élargit le scope et que l’on s’intéresse à tout le système en même temps, il est évident que l’on peut fournir un service équivalent via d’autres technologies, moins chères et intégrant plus facilement du renouvelable dans le système. Au final, la transition énergétique pourrait connaître une augmentation des dépenses dans des infrastructures locales. Mais en contrepartie, des économies dans l’achat des combustibles qui viennent de l’étranger. » Comment intégrer le plus de renouvelable possible et questionner le rôle du stockage dans le futur : deux facettes de la recherche menée par Gauthier Limpens.
Un investissement à long terme
Seul bémol : en intégrant du renouvelable à l’ensemble du système énergétique, la question de la disponibilité immédiate de la ressource se pose. « On veut tous pouvoir allumer ou éteindre la lumière quand bon nous semble… Le renouvelable est trop fluctuant pour cela. Mais regarder les autres besoins en énergie comme la chaleur ou les transports permet de voir où compenser. »
Pour le chercheur, électrifier les besoins en chaleurs permet de gagner en efficacité énergétique : le cas des pompes à chaleur, qui sont beaucoup plus efficaces que des bruleurs au gaz, entre dans cette catégorie. « Mais le problème est d’ordre économique : c’est un coût d’investissement plus important et un coût d’opération plus bas. C’est donc rentable à long terme, mais, à court terme, cela demande d’investir plus d’argent. »
C’est cette réflexion qui a conduit Gauthier Limpens à s’intéresser à des technologies très flexibles au niveau de la consommation et de poser la question du rôle des technologies de stockage dans des systèmes énergétiques à haut taux de renouvelable. L’exemple-phare : le stockage thermique, bien moins coûteux que le stockage électrique. C’est une réponse à la production d’électricité renouvelable qui produit de manière intermittente. Par des pompes à chaleurs, par exemple, le chercheur pense répondre à cette irrégularité de la production d’électricité renouvelable. Encadré par un professeur responsable très investi dans cette recherche, Hervé Jeanmart, professeur à l'Ecole Polytechnique de Louvain (EPL) et membre du Louvain4Energy de l’UCLouvain, l’objectif est clair : « Aiguiller le politique !, lance le chercheur. Nous travaillons à savoir comment répondre à des questions très pratiques pour les décideurs : comment réduire le CO2, intégrer davantage de renouvelable, apporter de la flexibilité au réseau électrique ou électrifier la chaleur, par exemple. »
Encore deux ans pour aboutir
Il reste deux ans au chercheur pour aboutir. Une évidence, déjà, quant à ce à quoi ressemblera le système énergétique dans les sociétés à haut taux de renouvelable : pour intégrer davantage de renouvelable dans le système, il faut électrifier les autres secteurs. Objectif de la manœuvre : intégrer des technologies efficaces telles que la cogénération qui permet de produire électricité et chaleur simultanément. Autre point d’importance : « On sous-estime totalement le rôle du stockage thermique, poursuit le chercheur. Ce dernier peut apporter énormément de flexibilité si on lui offre le cadre législatif approprié. C’est évident : nous aurons besoin d’un mix de stockage dans le futur. »
Mobiliser le politiqueUn des objectifs de vos recherches est de mobiliser et délivrer des avis clairs aux décideurs politiques. Et les entreprises? |
LEXIQUESystème énergétique : à l’échelle d’un pays, il englobe tout ce qui permet d’avoir chaleur, électricité et mobilité pour les ménages comme pour les industries. |
Marie Dumas
Coup d’œil sur la bio de Gauthier Limpens
Gauthier LIMPENS est un chercheur à l’Université Catholique de Louvain (UCLouvain) où il s’est spécialisé en énergie et aéronautique depuis son master en 2015. Après un séjour comme ingénieur calcul dans le groupe SAFRAN (aéronautique), il se reconvertit dans le secteur de l’énergie, convaincu des défis à relever au XXIème siècle dans le secteur. En 2016, Il commence un poste d’assistant en énergie et une thèse sur le stockage d’énergie. Son travail le dirige à s’intéresser au système énergétique dans sa globalité, jeune sujet à l’UCLouvain, raison pour laquelle il effectue un stage de recherche à l’EPFL, école à la pointe dans le domaine. Ses recherches se poursuivront ces deux prochaines années, toujours en collaboration avec l’EPFL, au sein du groupe « Institute of Mechanics, Materials and Civil Engineering » (iMMC-TFL). Parmi ses dernières publications : “Electricity storage needs for the energy transition: An EROI based analysis illustrated by the case of Belgium “ (2018) ou “Quantification of electricity storage needs for Belgium energy transition: a sensitivity analysis based on EROI” lors de l’ "International Conference on Efficiency, Costs, Optimization, Simulation" (ECOS2018). |