Un grand cru de MOCA

Ici, des échantillons d’eau de rivières de l’Equateur, là des sols de l’Alaska : pas de doute, la plateforme d’analyses chimiques MOCA est aujourd’hui pleinement opérationnelle.

Il fut un temps, dans les universités, où chaque académique, ou presque, disposait de son laboratoire et de ses équipements. Un temps où des techniciens étaient exclusivement dédiés à ceux-ci. Un temps qui n’est plus. « Aujourd’hui, explique le Professeur Patrick Gerin, président du comité de gestion de la plateforme MOCA (Mineral & Organic Chemical Analysis), les équipements coûtent de plus en plus cher ; ils sont de plus en plus sophistiqués, exigeant du personnel de plus en plus qualifié. Il est donc devenu difficile pour un laboratoire, une unité de recherche, de se payer son propre équipement et le personnel qui l’utilise. Il faut mutualiser les ressources. » Une mutualisation qui, dans le cas qui nous occupe, a débouché sur la création de la plateforme MOCA, dédiée aux analyses chimiques tant organiques qu’inorganiques. Cette plateforme est avant tout une équipe de 8 personnes sous la houlette d’Hélène Dailly qui en est la responsable scientifique et en assure la gestion quotidienne. « Nos équipements proviennent de différents départements de l’ELI (Earth and Life Institute), précise cette dernière. Notre plateforme est donc interne à cet institut mais nous réalisons bien sûr des analyses pour d’autres équipes de l’université, ainsi que pour d’autres universités voire des entreprises, même si, pour l’instant, ce n’est pas notre priorité. »

Métaux lourds et nectar de fleurs

Torches à plasma, chromatographes en phase gazeuse ou liquide, diffraction de rayons X…. des machines complexes, bourdonnantes, encombrent les nouveaux locaux que MOCA occupe depuis cet été. « Ce qui nous distingue d’autres plateformes d’analyses chimiques, explique Patrick Gerin, c’est notre capacité à analyser des matrices complexes. Nous sommes capables de doser un élément ou une molécule dans un échantillon chargé d’interférences, d’analyser des substances en très faible concentration dans des matières de composition complexe. » Une spécificité qui éloigne MOCA des analyses de routine où il s’agit par exemple de quantifier une substance connue dans une solution simple. « Cela, renchérit Hélène Dailly, nous oblige à rencontrer les chercheurs qui nous sollicitent, à discuter avec eux, à mettre peut-être une méthode nouvelle au point. Il y a un lien sur notre site internet pour formuler la demande, mais si c’est la première fois qu’on s’adresse à nous, il vaut mieux prendre contact par mail ou téléphoner pour voir dans quelle mesure nous pouvons apporter notre aide »

L’équipe du MOCA accompagne ainsi des chercheurs dans des domaines très divers. Parmi les analyses réalisées, on peut citer l’identification d’une molécule particulière, bactéricide, dans un milieu de culture. Ou encore la caractérisation d’éléments comme le sodium, fer, potassium, etc. dans des échantillons d’eau et de sols en provenance du permafrost prélevé en Alaska. Ou le suivi de métaux lourds dans des plantes au cours de leur croissance ou les variations des teneurs en sucre dans le nectar de fleurs. Sans oublier la présence de PCB (polychlorobiphényles) et d’HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques) dans des résidus accumulés dans les balayures de rues bruxelloises ou des échantillons de sédiments la Senne pour aider à dresser une carte de la présence de ces polluants dans la capitale. On ne s’ennuie pas sur la plateforme MOCA !

Henri Dupuis

 

 

Coup d’œil sur la bio de Hélène Dailly  

 

Diplômée Bioingénieure en 1999 de ce qui était alors encore la Faculté agronomique de Gembloux, Hélène Dailly est d’abord chercheuse en chimie générale et organique au sein de ladite Faculté. Elle occupe ensuite différents postes dans l’industrie pharmaceutique avant de rejoindre en 2004 l’asbl Cari (Centre Apicole de Recherches et d’informations), présente dans les locaux de l’UCLouvain. Elle y était responsable du laboratoire qu’elle a fait accréditer ISO 17025. En 2011, elle commence à travailler au laboratoire de génie biologique de l’UCLouvain avec Patrick Gerin et Spiros Agathos sur la dépollution de contaminants organiques (bioremédiation). En 2019, elle devient responsable scientifique et gestionnaire de la plateforme d’analyses MOCA..

Coup d’œil sur la bio de Patrick Gerin  

 

Ingénieur chimiste des industries agricoles (1989) de l’UCLouvain, Patrick Gerin poursuit un doctorat en sciences agronomiques (1995) au cours duquel il étudie la surface de micro-organismes et la maîtrise des interactions physico-chimiques intervenant dans leur agrégation et leur adhésion à des supports. Il accomplit ensuite différents séjours de post-doctorat, à l’Ecole d'Application des Hauts Polymères à Strasbourg tout d’abord (Synthèse de latex acryliques pour la production de films adhésifs), puis à la School of Chemical Engineering de Birmingham où il participe à l'amélioration de la production de rétrovirus par des cellules animales pour des applications en thérapie génique. En 1998, il revient à l’UCLouvain avec un mandat FNRS (Influence des phénomènes interfaciaux sur le fonctionnement du sol: interactions micro-organismes - substrats organiques – minéraux).

Depuis 1999, il est Professeur dans le groupe de Génie biologique, avec des activités de recherche et d'enseignement en physico-chimie et biotechnologie environnementales et industrielles.

Publié le 18 octobre 2019