We have a close partnership with the Centre for Human Rights and International Humanitarian Law at the Catholic University of Bukavu. We share here their monthly papers.
CERDHO is a research centre specialising in human rights and international humanitarian law. It operates as a research unit within the Faculty of Law of the Catholic University of Bukavu. In its research activities, CERDHO drafts its Papers with a view to presenting some of the judgments of a national or international court in its fields of research, i.e. international humanitarian law or human rights law.
1. Tribunal militaire de garnison de Bukavu, R.P.1213/017, jugement du 24 juillet 2018, Auditeur militaire de garnison de Bukavu Ministère public et Parties civiles MUNGANGA NAKULIRE et MAWAZO MUNA c. Prévenu BAHATI PILIPILI Nelly
Vers une reconnaissance des droits collectifs aux peuples autochtones et pygmées en République démocratique en Congo.
À défaut d’établir le meurtre, le Tribunal militaire de garnison (ci-après TMG) condamne un garde-parc pour l’infraction de coups et blessures par son jugement rendu en date du 24 juillet 2018. Le raisonnement du juge innove en deux points. Primo, la motivation du juge remet partiellement en cause le principe de la liberté de la preuve en matière pénale. Pour le tribunal, les éléments recueillis par la juridiction au cours de l’instruction en audience publique prévalent sur ceux recueillis au cours de l’instruction préjuridictionnelle. Secundo, le juge consacre des droits collectifs aux pygmées dans un obliter dictum. Selon le tribunal, le Parc national de Kahuzi-Biega est le milieu traditionnel des peuples autochtones pygmées qui y ont vécu plusieurs années avant d’en être chassés par l’État, et reste le milieu dans lequel se trouvent les produits vivriers et médicinaux pour ces peuples.
Tribunal militaire de garnison de Bukavu — matière pénale — administration de la preuve — droits des peuples autochtones — article 74 du Code de procédure pénale congolais
2. Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, requête n° 007/2013, arrêt du 4 juillet 2019, Mohamed ABUBAKARI C. République unie de Tanzanie. La portée des réparations accordées par la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples en cas de violation des droits de l’homme.
La réparation des préjudices est l’une des trois obligations qui incombent à un État responsable d’une violation des droits de l’homme. La portée de cette obligation a été dégagée par la jurisprudence internationale qui, partant du principe de la réparation intégrale des préjudices, fixe les modalités d’exécution de cette obligation à savoir la priorité de la restitution sur l’indemnisation, la détermination précise des titulaires du droit à la réparation, la détermination des préjudices indemnisables, l’indication des mesures de protection interne de l’indemnisation internationale ainsi que le réexamen ou la réouverture des poursuites. À travers l’analyse de l’arrêt le plus récent sur les réparations rendu par la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples le 4 juillet 2019 dans l’affaire Mohamed Abubakari c. Tanzanie ainsi que ses arrêts antérieurs, il apparaît que cette juridiction régionale africaine des droits de l’homme a déjà intégré dans sa jurisprudence la plupart de toutes ces modalités. Il ne reste que le remboursement des frais et dépens dans la mesure où jusqu’à présent chaque partie doit supporter ses frais de procédure, certaines mesures de protection internes de l’indemnisation internationale à savoir l’immunité fiscale et l’insaisissabilité des sommes allouées au titre des réparations.
Pour respecter le principe de la réparation intégrale des préjudices admis de longue date dans la jurisprudence internationale et qui figure parmi les principes généraux de la réparation que la Cour africaine des droits de l’homme a déjà fixés dans sa jurisprudence, nous invitons cette juridiction à intégrer dans ses arrêts ces modalités qui restent.
Cour africaine des droits de l’homme — réparation des préjudices – dommage - articles 34.5 et 63 du Règlement d’ordre intérieur de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples
3. CIRDI, affaire n° ARB/99/7, sentence arbitrale rendue le 9 février 2004, M. PATRICK MITCHELL (Demandeur) contre RD Congo (Défenderesse). La contribution au développement économique de l’État hôte comme critère autonome de la définition de l’investissement étranger direct.
Par sa décision du 1er novembre 2006, le comité ad hoc annule la sentence arbitrale rendue le 9 février 2004 dans l’affaire n° ARB/99/7opposant M. Patric Mitchell « Demandeur » à la République démocratique du Congo (RDC), « la défenderesse » et condamnant celle-ci pour expropriation à l’égard de l’investisseur. Pour le Comité, « M. Mitchell, citoyen des États-Unis, ne jouissait pas de la qualité d’investisseur, ce qui privait le tribunal de sa compétence au titre de l’article 25 de la Convention CIRDI ». Il reproche à la sentence arbitrale d’une part l’« excès de pouvoir manifeste » et, d’autre part, le « défaut de motifs ». Pour la première fois, le comité ad hoc détermine le critère autonome de qualification d’un investissement étranger permettant de déterminer sa compétence. Ce commentaire analyse la pertinence d’un tel critère pour justifier la décision du Comité.
CIRDI —arbitrage État-investisseur — procédure en annulation — excès de pouvoir — défaut de motifs — critère autonome de qualification d’un investissement — articles 25 et 52 (1) (b) et (e) de la Convention de Washington de 1965
1. HCM, arrêt RPA n° 140/18, 26 juillet 2018, Auditeur général des Forces armées de la République Démocratique du Congo, ministère public, et parties civiles contre le prévenu colonel BEKER DHENYO Jules. Quand les circonstances atténuantes constituent un moyen de soustraire l’accusé de sa responsabilité pénale pour crimes contre l’humanité
Par son arrêt RPA n° 140/18 en appel, la Haute Cour militaire disqualifie la condamnation du prévenu BEKER pour crime de guerre en crime contre l’humanité. Dans son raisonnement, la Haute Cour retient les circonstances atténuantes. Le présent commentaire s’interroge sur la conformité de ses motifs au Statut de Rome, d’une part, et au droit pénal congolais, d’autre part.
HCM – Matière répressive — circonstances atténuantes — art. 18 et 19 du Code pénal — art. 17 du statut de Rome
2. Cour Constitutionnelle, arrêt n° R.C.E. 0004/PR, 3 septembre 2018, BADIBANGA NTITA Samy contre Commission électorale nationale indépendante. La nationalité d’acquisition, une sous nationalité en droit congolais ?
La Cour constitutionnelle se prononce sur la décision d’irrecevabilité de la candidature de Samy BADIBANGA à l’élection du « Président de la République » pour défaut de nationalité congolaise d’origine. La Cour ordonne à la CENI de l’inclure sur la liste définitive des candidats. La Cour adopte un raisonnement donnant à penser que la nationalité d’acquisition est une forme de sous nationalité en droit congolais. Le présent commentaire se prononce sur la conformité d’un tel raisonnement par rapport aux engagements internationaux de la RDC.
Cour constitutionnelle — matière électorale — nationalité d’origine — nationalité d’acquisition – art. 103 de la loi n° 06/0006 du 9 mars 2006 – arts 1er et 44 de la loi n° 04/024 du 12 novembre 2004
3. HCM, arrêt n° 140/18, 26 juillet 2018, Auditeur général des FARDC (MP) et Parties civiles F1 à F103 contre le colonel BEKER DHENYO. Jules Protection des victimes et présomption d’innocence : un dilemme en cas des crimes graves
Le droit à un procès équitable, dans son volet « présomption d’innocence », revêt en RDC une valeur constitutionnelle. Il exige aussi bien le respect du droit de la défense que la protection des victimes et témoins. Cette conciliation n’est pas toujours aisée. L’affaire Beker en est une illustration récente. Après s’être longuement attardée sur ces mesures, la Haute cour militaire (ci-après H.C.M.) ne rencontre pas en appel le moyen du prévenu portant sur la violation de la présomption d’innocence. En outre, son raisonnement soulève plusieurs interrogations quant au sort dudit principe en appel. Le présent commentaire se propose de les étudier.
HCM —matière répressive — procès équitable — protections des victimes — crime contre l’humanité — responsabilité du chef militaire — arts 7 et 28 du statut de Rome
1. Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, communication n° 302/05 – Maître Mamboleo M. Itundamilamba c. République Démocratique du Congo. Le principe de l’égalité des armes fait partie intégrante du procès équitable
Par sa décision adoptée lors de la 53e session ordinaire (9 au 23 avril 2013), la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (ci-après la commission) condamne l’État congolais pour violation des articles 7 (1) (a) et 7 (1) (c) de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (ci-après la Charte). La commission reproche à la RD Congo d’avoir violé le principe de l’égalité des armes en privant au requérant l’opportunité de produire son dossier devant la section administrative de la Cour suprême de justice. Par ce raisonnement, la Commission adopte à une interprétation évolutive de la Charte et recours à un nivellement vers le haut du contenu de l’article 7.
Commission africaine — procès équitable — égalité des armes — art. 7 (1) (a) et 7 (1) (c) de la Charte africaine
2. Tribunal de commerce, jugement n° RPO 45, 2 novembre 2016, Mamboleo contre Société Pharmakina. Les hésitations du tribunal de commerce de Bukavu sur la valeur juridique des décisions de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples
Muni de la Communication 32/05, décision rendue par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples dans l’affaire qui l’opposait à la RD Congo, Monsieur Mamboleo Mughuba Itundamilamba initie devant le tribunal de commerce de Bukavu (TRICOM) un contentieux de recouvrement d’honoraires dus par la société Pharmakina. Les observations qui suivent ont pour but de vérifier la « valeur d’usage » que les juges du TRICOM accordent à une décision de la Commission africaine. S’il faut le dire tout de suite, le TRICOM tâtonne en la considérant tantôt comme un simple titre de créance valant à des fins probatoires tantôt comme un titre exécutoire à part entière lui ouvrant automatiquement les voies d’exécution idoines sur le patrimoine de la société Pharmakina. Ces hésitations peuvent surprendre au premier abord. Néanmoins, ils ne font qu’illustrer le risque d’altération du droit à un procès équitable dans le paysage judiciaire congolais marqué par une banalisation des questions des droits de l’homme.
Tribunal de commerce — matière commerciale — exécution — injonction de payer — Art. 33 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et voies d’exécution.
3. Tribunal pour enfants, Décision n° RECL 920/017, 30 mars 2017, X contre Y. Intérêt supérieur de l’enfant et motivation des décisions
En RDC, les comportements criminels des mineurs font l’objet de tout un système de justice spécialisée. Par sa décision du 30 mars 2017, le Tribunal pour enfants de Bukavu interprète les circonstances défavorables entourant la commission de manquement par l’enfant comme cristallisant son intention criminelle. Pourtant, l’oeuvre du juge se caractérise par l’absence de toute autre justification. Le présent commentaire interroge la pertinence d’une telle démarche au regard de l’intérêt supérieur de l’enfant et de l’obligation de motivation des décisions.
Tribunal pour enfants — matière pénale — intérêt supérieur — obligation de motivation – individualisation du cas — art. 6, al. 3 de la loi portant protection de l’enfant — art. 21, al. 1, de la Constitution
1. CPI, Chambre d’appel, arrêt n° ICC-01/05-01/08, 8 juin 2018, Situation en République centrafricaine, Procureur c. Jean-Pierre Bemba Gombo, L’éloignement géographique, est-il un élément factuel ou un critère juridique pour appréhender la responsabilité du supérieur hiérarchique ?
Par sa décision du 8 juin 2018, la chambre d’appel de la Cour pénale internationale (CPI) acquitte Jean-Pierre Bemba des charges des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité pour lesquelles il avait été condamné à 18 ans de prison par la chambre de première instance en 2016, en tant que supérieur hiérarchique. Dans son raisonnement, la Chambre d’Appel se fonde sur l’éloignement géographique de Bemba par rapport au lieu de commission des crimes par ses troupes afin de justifier l’incapacité du supérieur hiérarchique à prendre toutes les mesures nécessaires et raisonnables aux termes de l’article 28, a), ii), du statut de Rome. Tout en soutenant les arguments évoqués par la Chambre d’appel sur la distinction entre chef militaire éloigné et chef militaire non éloigné, ce commentaire démontre que cette distinction est factuelle plutôt que juridique.
CPI – Crimes de guerre — crimes contre l’humanité – éloignement géographique — art. 28, a), ii), du Statut de Rome
2. C. A., arrêt n° 4081, 24 novembre 2009, Jean de Dieu Mulikuza contre la Société Nationale d’Électricité (SNEL) et RDC Quand le juge refuse de protéger contre la discrimination
En RDC, la facturation du courant électrique varie d’une région à une autre du pays sans raison objective et raisonnable. Par son arrêt du 24 novembre 2009, la Cour d’appel de Bukavu considère que le requérant n’est pas fondé à revendiquer une surfacturation comparativement aux autres abonnés de l’ouest du pays. La Cour se base sur l’existence d’un contrat d’adhésion pour le débouter. En adoptant un tel raisonnement, la Cour d’appel consacre un traitement différencié entre les abonnés de l’Est et de l’ouest du pays. Le présent commentaire s’interroge sur le caractère objectif ou non d’une telle justification.
Cour d’Appel – matière civile – discrimination – surfacturation – contrat d’adhésion – SNEL – arts 12 et 13 de la Constitution
3. C.A., arrêt n° RCDC 015, 09 août 2018, X contre Commission électorale nationale indépendante
La mise en oeuvre du droit à l’information par le juge électoral congolais Par sa décision du 09 août 2018, la Cour d’appel de Bukavu juge que l’obligation d’informer le candidat des irrégularités lors du dépôt de la candidature n’est pas opposable à la Commission électorale nationale indépendante. Pourtant, la loi électorale prévoit cette obligation à son article 21 al.3. Ce commentaire s’interroge sur le bien-fondé d’un tel raisonnement par rapport au droit à l’information garanti par les textes des droits de l’homme.
Cour d’appel — matière électorale — droit à l’information - alignement multiple - art. 21 de la loi électorale — art. 19 du PIDCP