C’était l’une de mes découvertes un peu surprenantes
Ecouter le récit dans son intégralité ↓
C’est une photo prise dans la vallée de la Nubra au Ladakh, frontière avec le Tibet chinois et le Kazakhstan. Ce sont simplement des habitants du village qui sont en train de vaquer à leurs occupations. J’ai atterri dans cet endroit parce que j’ai commencé des recherches d’un point de vue comparatif, ou tout le moins analogique, entre des modes de chamanisme islamisé en Asie centrale et des modes de chamanisme bouddhicisé au Ladakh au nord de l’Inde. Les premiers sont issus des chamanismes sibériens qui ont été recouverts par les pratiques de l’islam soufi, ce qui est extrêmement important à signaler. Alors qu’au Ladakh, il s’agit de pratiques d’un chamanisme local recouvert par du bouddhisme tibétain. Dans le cas du Ladakh, et contrairement à ce que nos imaginaires pourraient projeter, le bouddhisme tibétain est en fait beaucoup moins respectueux des vieilles pratiques que ne l’est le soufisme du chamanisme centre asiatique. C’était l’une de mes découvertes un peu surprenantes. Que finalement du côté de l'islam il y avait beaucoup plus de tolérance que du côté du chamanisme tibétain que l’on imagine toujours dans nos contrées comme étant des pratiques extrêmement « zen » et respectueuses.
Anne-Marie Vuillemenot, Anthropologue, Professeure d'Anthropologie UCLouvain. Recherche en Asie centrale, au Kazakhstan, auprès de nomades ; puis recherches comparatives au Ladakh sur des pratiques chamaniques et liens avec les Invisibles. Recherches récentes en Bosnie-Herzégovine et en Moldavie sur des transmissions et complexes nostalgiques contemporains.