FED-tWIN "Through the lens of gender: stories and history within the museum's archival and art collections"
Audrey Lasserre
Le projet de recherche « Gender » est conçu pour répondre à l'une des principales préoccupations et enjeux actuels de la société, y compris du monde académique et muséal : la réflexion sur les questions et représentations de genre. En articulant la question des histoires et de l'histoire du Musée, dans une perspective de genre, la recherche souhaite apporter un éclairage nouveau sur le rôle que les musées peuvent jouer au sein d'une société et d'une politique qui privilégie l'égalité des sexes.
Le projet de recherche « Gender » allie histoire de l'art, genre, et analyse des récits : il s'inscrit pleinement dans le cadre de l'analyse de la modalité en termes de langage, de sources et de récits qui construisent le Musée et l'histoire de l'art. La modalité fait référence à la manière de dire, aux formes et attitudes particulières à travers lesquelles quelque chose est présenté. Pour poursuivre cet objectif, le projet s'appuie sur l'analyse littéraire pour étudier les récits (dont l'histoire) et les éléments qui les façonnent et leur donnent corps : les sources, les manières de raconter (récit), sans oublier la question de la focalisation ou du point de vue. Une telle relecture implique nécessairement des (re)découvertes à la fois des sources dans les archives et des œuvres dans les collections.
Les objectifs scientifiques peuvent être résumés en trois axes principaux :
- La place des femmes artistes et ce qu'on en dit, la revalorisation de leurs œuvres aboutissant à une réflexion globale sur la "valeur de l'art" et donc sur ce qu'on appelle l'art, en considérant un corpus jusqu'alors négligé.
- La prise en compte de la catégorie de genre pour l'analyse des représentations afin de montrer que le genre est une construction sociale et historique, mais aussi pour interroger le rapport entre œuvres et genre, et entre esthétique et enjeux de genre.
- Travailler sur des récits non « hétérocentrés », c'est-à-dire des récits et des représentations de sexualités différentes de la sexualité hétérosexuelle normative. En ce sens « queer », qui renvoie à une approche non binaire du genre et de la sexualité, est un autre « outil » de redécouverte des collections et des archives.
Audrey Lasserre est historienne, spécialiste des rapports entre littérature, arts, genre et féminisme aux XXe et XXIe siècles. Primée en France par le GIS Institut du genre pour ses recherches doctorales sur le féminisme, elle a été chercheuse postdoctorale « Move In » à l'UCLouvain de 2017 à 2020. Après avoir enseigné pendant 15 ans en universités françaises et américaines, elle dispense aujourd'hui ses enseignements au sein du Master Genre des six universités francophones de Belgique.
Dioramas, Aquariums et Anthropocène. La réactualisation des dispositifs spectaculaires du XIXe siècle dans la création artistique contemporaine
Valentina Perazzini
"Artistes femmes en Belgique (1945-1970): des réseaux artistiques à l'institution muséale, écriture de nouveaux récits. Les cas de Jane Graverol, Suzanne Van Damme, Anne Bonnet, Berthe Dubail"
Lyse Vancampenhoudt
Les œuvres d’artistes femmes sont minoritaires dans l’accrochage des expositions permanentes et temporaires des Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, écartées du canon traditionnel et des récits qui lui sont rattachés. Cette réalité est souvent justifiée par leurs places considérées comme secondaires dans ces récits ainsi que par le manque de productions scientifiques les concernant. Ce projet s’inscrit dans ces constatations, éprouvées au plus près au travers de notre travail de guide-conférencière exercé durant plusieurs années. La recherche s’articule autour de quatre peintres belges ; Anne Bonnet, Berthe Dubail, Jane Graverol et Suzanne Van Damme, actives entre 1945 et 1970 dont les œuvres s’inscrivent au sein des mouvances surréalistes et abstraites. Il ne s’agit pas de répondre à un modèle monographique, mais plutôt d’inscrire ces artistes et leurs parcours dans leur contexte économico-social. Pour ce faire, la recherche porte sur leurs réseaux et les acteur·trice·s du monde de l’art, leurs stratégies en tant qu’artistes et femmes, mais également le processus de muséalisation à l’œuvre sur base d’une analyse critique des collections artistique, archivistique et bibliographique des Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Les notions de genre et d’intersectionnalité permettent de remettre en question une histoire de l’art androcentrée et inégalitaire, ainsi que de mettre en avant la double invisibilisation de ces quatre artistes situées à la croisée du genre et de la nationalité belge. La période qui suit la Deuxième Guerre mondiale correspond à une lacune historiographique concernant l’histoire des artistes femmes en Belgique, entre des recherches dix-neuviémistes nombreuses et l’institutionnalisation des féminismes dans les années septante. In fine, il s’agit de participer à l’écriture de nouveaux récits ainsi qu’à une meilleure compréhension des mécanismes d’inclusion et d’exclusion des minorités aujourd’hui toujours à l’œuvre, et ce afin de tendre vers des politiques d’acquisitions, de conservations et d’expositions davantage inclusives.
Lyse Vancampenhoudt est diplômée en histoire de l’art (ULB) et en études de genre (Master interuniversitaire francophone). Après une expérience de guide conférencière au sein de diverses institutions bruxelloises (MrBAB, Centrale for Contemporary Art, Architecture qui dégenre, etc.), elle entame une recherche doctorale à l'UCL en janvier 2022.
Anciens projets :
Felix Culpa. Étude de l’erreur photographique en vue d’une réévaluation de la place du médium photographique dans l’art contemporain et la culture visuelle de 1960 à nos jours
François Maheu
Le projet étudie l’erreur photographique dans l’art et la culture visuelle de notre époque. L’objectif principal est de proposer un éclairage nouveau sur les relations entre le médium photographique et l’art contemporain à travers une histoire de l’erreur photographique et une étude des discours sur la photographie. Au début de la démarche, la recherche d’une phénoménologie de l’erreur photographique grâce à laquelle il sera possible de délimiter le territoire de notre objet d’étude sera menée. Si l’erreur photographique peut apparaître comme relativement stable, le jugement qu’on porte sur elle fluctue au gré de critères divers. C’est ce qui sera étudié dans une seconde partie consacrée à l’histoire de la photographie ratée. Cette seconde partie s’ouvrira sur la pierre d’angle de ces recherches qui est l’étude de la photographie ratée dans le champ de la production artistique et culturelle contemporaine. L’objet d’étude est divisé en trois périodes dictées par l’évolution de l’histoire de l’art des cinq dernières décennies ainsi que par l’évolution technologique de la photographie. L’erreur photographique sera d’abord étudiée dans les dernières manifestations du modernisme. Elle sera ensuite suivie et analysée dans son parcours postmoderniste. Finalement, l’impact de l’entrée dans l’ère du numérique sur l’objet d’étude sera observé. L’hypothèse sera de dire que chacune de ces étapes (historique, théorique et technologique) a développé une perception particulière de l’erreur qui a contribué à transformer la nature de celle-ci. Dans la mesure où l’erreur n’est définie que par rapport à une série de conventions et que l’on peut envisager la photographie comme une pratique sociale, les études de la fonction et de la perception de l’erreur se feront grâce à des outils méthodologiques issus respectivement de la sociologie et de la psychanalyse. Le but est finalement d’observer quel impact ces recherches ont sur une théorie des images.
Radical design, design postmoderniste et nouveau design (1965-1990): Une trahison culturelle
Pierre Bouchat
L’Italie va connaître dès le milieu des années 1960 l’émergence d’une série d’ateliers d’architectes qui entendent alors mettre en crise le projet moderniste d’une architecture et d’un design ambitieux d’apporter des solutions univoques et optimales à l’ensemble des problématiques humaines. C’est qu’en fait, selon ces dissidents du « Good design », cette prétendue utopie ne représente plus qu’un argument publicitaire d’une production inféodée au consumérisme et engendrant plus de besoins que de solutions. Cette mouvance, qui tente de ré-envisager les fondements même de l’architecture/design, va très vite être dénommée « Radical design » et se réunir dès 1972 sous la bannière de « Global Tools ». Par radical, il faut entendre la tendance à chercher les racines oubliées de l’architecture afin de mettre à jour les besoins humains enfuis sous les gravats culturels. Pour le courant radical, aucune solution ne peut révolutionner l’architecture-design sans une libération vis-à-vis de la culture, qui n’aurait d’autre effet que celui d’inhiber et de réfréner la production individuelle par le biais d’un carcan esthético-moral. On n’aspire donc, non plus à un meilleur modèle sociétal, mais à une amplification de la réalité individuelle. Cette libération culturelle serait l’étape suivante de la lutte des classes qui visait la libération des masses face à l’aliénation du travail. Elle constituerait la possibilité d’une production intellectuelle individuée au sein de la masse.
Photofilmic images in contemporary art and visual culture
Jana J. Haeckel
The project aimed to study the impact of photofilmic structures in the production, the function and the perception of images within contemporary art and visual culture. With Photofilmic images are meant images that are generated on the basis of both photographic and filmic processes. Consequently, they mingle different temporal, spatial and perceptional realities. In this sense, they are transitional images fluctuating between categories which were once attributed separately to photography or film, such as stasis and movement, past and presence, composition and narration. With the advent of digital technology, photofilmic images are getting increasingly widespread in recent years. Imovie, photosynth, AutoStitch and PhantaMorph for example are computer software which allow to create animated images on the basis of photographs. As such techniques are getting more and more important in different domains of image production in popular culture and the visual arts, the impact of photo-filmic images on our visual culture will have wide reaching consequences for our use, our perception and our understanding of images and thus for our view on the world given the fact that our access to that what we call reality is to a large extent mediated through images. For this reason, the project suggests a study of photofilmic images, which goes beyond well-established frontiers between the various disciplines and sectors where such images occur and where they are discussed, in order to understand how exactly images operate within our contemporary media society. This interdisciplinary approach considers different domains such as visual art, cinema, and popular culture and diverse academic disciplines such as film studies, photography theory, art history, visual culture studies, and media theory. Therefore, the following questions are fundamental: What technologies are used in which contexts and for what purpose? What for exactly have they been invented and how are they diffused and used in different contexts?
How they are perceived according to these different contexts and uses?
Statut et fonction des médiums photographique et filmique dans les œuvres de John Baldessari, Bruce Nauman, Dan Graham et Gordon Mata-Clark. Processus et intermédialité entre modernisme et post-modernisme
Raphaël Pirenne
Le modernisme américain s’est défini comme une théorie de la spécificité. Même si une lecture attentive des textes de ces deux auteurs révèlent la complexité de cette problématique, l’œuvre d’art moderniste, telle qu’elle fut pensée par Clement Greenberg et Michael Fried, se doit de respecter les limites spécifiques à son médium qu’elle ne partagera pas avec une autre forme d’art. De manière corollaire à ce critère de la spécificité, l’œuvre doit se donner au·à la spectateur·rice immédiatement ; cette immédiateté neutralisant de la sorte tant les données relatives au processus (pôle de la production de l’œuvre) que celles relatives à son expérience perceptive (pôle de la réception de l’œuvre). Il apparaît pourtant que dès la fin des années 1960, différentes pratiques artistiques, relevant plus spécialement du post-minimalisme et de l’art conceptuel, mettent en crise le critère de spécificité du médium et l’impératif d’immédiateté que le modernisme avait soutenus. Les travaux de John Baldessari (1931), Bruce Nauman (1941), Dan Graham (1942) et Gordon Matta-Clark (1943-1978) participent de ce changement capital quant au statut du médium. Leurs pratiques, plus précisément de la seconde moitié des années 1960 au début des années 1970, relèvent en effet directement d’une forme d’intermédialité, en articulant photographie, film et vidéo. Cette recherche vise, d’une part, à analyser selon quelles modalités ceux-ci utilisent ces médiums réflexifs non pas seulement pour enregistrer le processus de « production » de l’œuvre mais également pour engager différentes modalités de « réception » de celle-ci. Elle vise, d’autre part, à repenser l’articulation, plus que la césure, entre modernisme et post-modernisme en analysant le contexte théorique de ces artistes pouvant expliquer la reconfiguration de la notion de médium en termes de "structure", de "message" et de "langage", et ce, via la contribution décisive à cette période du structuralisme, de la cybernétique et de la linguistique.
Publications
- R. PIRENNE, A. STREITBERGER (ed.), Heterogeneous objects. Intermedia and Photography after Modernism, (Lieven Gevaert Series), Leuven University Press: Leuven, 2013. n/a p.
- R. PIRENNE, Everything is Purged from this Painting but Art. John Baldessari : Metapicture and Intermedia, 1966-1968. In: Carla Taban (ed.), Meta- and Inter-Images in Contemporary Art, Leuven University Press: Leuven, 2013 (Accepté/sous presse).
- R. PIRENNE, Loop-De-Loop). Dan Graham et Radical Software, entre utopie et dystopie cybernétique.. In: ###, no. 2 (2012) (Accepté/sous presse).
- R. PIRENNE, « It’s your fault John, you called them artists. » (Lawrence Weiner) John Baldessari et « Post Studio Art » à CalArts au début des années 1970. In: Christophe Kihm - Valérie Mavridorakis (dir.), Figures et méthodes de la transmission artistique, Les Presses du Réel - Mamco: Dijon - Genève, 2012 (Accepté/sous presse).
Réception de la French Theory dans les arts visuels aux États-Unis. Le cas de l’art conceptuel (ca. 1966-1980)
Anaël Lejeune
Le projet « Réception de la French Theory dans les arts visuels aux États-Unis. Le cas de l’art conceptuel (ca. 1966-1980) » a pour objectif principal l’étude de l’impact de la pensée structuraliste et poststructuraliste française des années 1960 et 1970 sur les arts visuels américains, et sur l’art conceptuel en particulier. Il est en effet avéré qu’un grand nombre d’artistes ont informé leur pratique de certains concepts ou modes de pensée empruntés à ce corpus. Un premier enjeu consistera donc à établir les canaux par lesquels la « théorie française » a pu transiter vers les États-Unis pour essaimer ensuite dans le monde artistique, afin d’établir la chronologie précise de son introduction au sein de ce dernier et de s’assurer des textes, outils et concepts dont les artistes pouvaient effectivement disposer. Un deuxième enjeu visera surtout l’étude des modalités d’interprétation et d’usage de ces outils et concepts. À cet égard, un courant sera retenu comme cas d’étude : l’art conceptuel américain (1966-ca. 1980). Non seulement ce courant entretint un rapport privilégié avec la théorie en général, et en particulier avec le structuralisme et le poststructuralisme, mais il fut qui plus est exemplaire d’un mode « inventif » de réception de ces courants de pensée, affranchi du cadre scientifique et des débats dans lesquels ces travaux virent le jour. Tout en contribuant donc à la réévaluation des sources théoriques de l’art conceptuel et des diverses tendances internes qu’elles façonnèrent, ce projet ambitionne en définitive, à partir de l’examen de ce premier cas, de jeter les jalons historiques et méthodologiques d’une vaste enquête sur la manière dont cette « pensée française » a pu fournir aux artistes des outils ou un cadre théorique leur permettant d’aborder de façon systématique un certain nombre de problématiques ayant émergé dans leur pratique.
Publications :
- A. LEJEUNE, O. MIGNON and R. PIRENNE (eds), French Theory: Reception in the visual arts in the United States of America (à paraître)
- A. LEJEUNE, The Subject-Object Problem in ‘Aligned with Nazca’: Remarks on the Phenomenology of Robert Morris. In: J.-M. GLEIZES and K. SCHNELLER (eds), Investigations : “The Expanded Field of Writing” in the works of Robert Morris (Lyon-Chicago: ENS Editions - University of Chicago Press, 2012) (à paraître)
- A. LEJEUNE, Robert Smithson : Ceci n’est pas un site. In: Interfaces. Image, Texte, Langage, Vol. 32 (2011): 141-151
- A. LEJEUNE, Mel Bochner et Robert Smithson: perspective et théorie de l’art dans les années 1960. In: O. MIGNON (ed.), L’artiste comme théoricien. Réciprocité entre théorie et pratique artistique de 1965 à 1985 (Brussels: (SIC) Édition, 2010), p. 23-36
Envisioning a New Europe: On Spectatorship and Collectivity in Contemporary Art
Brianne Cohen
This project studies a particular current of contemporary art that is devoted to exploring positive models for an intercultural imaginary in Europe. In recent times, there has been much contestation over a European identity following decolonization, mass immigration, globalization, and the breaking down of political boundaries on the continent. Numerous artists are scrutinizing a symbolic-visual realm increasingly shaped by stereotypes, misinformation, and distortions concerning “foreigners” and immigrants. This study examines the work of three artists and art groups – the filmmaker and video installation artist Harun Farocki, the public installation artist Thomas Hirschhorn, and the transnational art collective, “Henry VIII’s Wives.” Through these three cases, the project charts a generationally changing narrative of “Europeanness” from hopes for a federation after the racial genocide of World War II through critiques of nationalism after decolonization, the “failure” of multiculturalism since the 1990s, and intensified Roma discrimination, Islamophobia, and right-wing extremism in the twenty-first century. At stake is a broader question of how strangers may relate to one another in an increasingly proximate world. Since the 1990’s, there has emerged a robust line of inquiry directed at socially-oriented art practices, variously studied as “community” art, “relational” art, “dialogical” art, and so on. While this scholarship has opened up a rich discourse about different aspects of socially-engaged practices, there has not been a study of artists who focus on the specific dilemmas of constructing a present-day “European community.” The European Union itself, for example, which touts a slogan of being “United in Diversity,” is an exemplary model to rethink questions of cross-cultural exchange and hopes for inter-relating a mass body of strangers. This project investigates contemporary artists in Europe who are staking aesthetic questions of collective engagement in vivid socio– and geopolitical terms.
Publications :
- “Harun Farocki: Raising the Stakes of the Game,” in Art&Education, ed. Danna Vajda (Jan 2012).
- “Interview with Henry VIII’s Wives,” in Contemporaneity: Historical Presence in Visual Culture, Vol. 2 (May 2012).
- “Farocki’s In-Formation: Silent Statistics and Stereotypes,” in Athanor XXIX, ed. Allys Palladino-Craig (Tallahassee, FL: Florida State University, 2011).
- “Thomas Hirschhorn's Utopia, Utopia = One World, One War, One Army, One Dress: Imagining Alternative Forms of Political Affiliation," in Crossing the Boundaries XVI: Trading Spaces, ed. Jen Kennedy (Binghamton, NY: Binghamton University, 2008).