Maheshe Musole Trésor |
Quelle est votre occupation professionnelle actuelle ?
Depuis juin 2018, je suis Professeur associé à l’Université Catholique de Bukavu (ci-après UCBukavu) ou j’enseigne le droit international aux premier, deuxième et troisième cycles. Je suis également avocat inscrit au tableau du barreau du Sud Kivu.
Quel était le sujet de la thèse ?
J’ai réalisé une thèse consacrée à la problématique des droits politiques des réfugiés. Mes recherches ont porté sur les limitations des droits politiques des réfugiés en droit international. Ces limitations ont pour effet de réduire le réfugié à la situation de « sans-état » et de « sans-droit », selon la pensée d’Hannah Arendt.
Dans quel contexte avez-vous réalisé votre thèse ?
J’ai réalisé mes recherches grâce à l’appui financier de l’Administration des relations internationales (ci-après ADRI) de l’UCLouvain en raison de 36 mensualités en Belgique. Avec ce financement, j’ai suivi un programme de master complémentaire en droit international (10 mois) et j’ai réalisé mes recherches doctorales en alternant mes séjours entre la RDC et la Belgique pendant 27 mois. Mes séjours en RDC (9 mois au total) m’avaient permis d’exécuter ma charge horaire à la faculté de droit de l’UCBukavu en qualité d’assistant. Pendant mes recherches doctorales en Belgique, j’ai également participé aux travaux de l’EDEM/CEDIE.
Quelles compétences spécifiques la thèse vous a-t-elle permis d’acquérir ?
La réalisation de ma thèse m’a permis d’acquérir plusieurs compétences spécifiques. Dans le domaine de l’enseignement, j’ai profité de ma formation doctorale pour suivre plusieurs séminaires dans le domaine de la pédagogie universitaire. Cela m’a permis de renforcer mes capacités dans l’enseignement universitaire. Sur le plan humain, la thèse m’a permis d’acquérir un esprit de synthèse aussi bien dans la rédaction que dans la présentation des résultats de recherche.
En général, quelle a été la plus-value de votre thèse pour votre parcours professionnel ?
La thèse m’a permis d’entamer une carrière académique en RDC. Elle a également renforcé mes capacités dans le domaine de la rédaction des projets de recherche et de formation. À ces jours, je fais partie de plusieurs projets de recherche.
Quelle est votre meilleure anecdote de thèse (s’il y en a !) ?
La meilleure anecdote de ma thèse est intervenue lors de la soutenance publique. Un membre du jury me pose plusieurs questions et je suis embarrassé par l’une d’entre elles autour de droits politiques de Monsieur Carles Puigdemont et sa situation en Belgique. N’ayant pas de réponse à cette question, je lui dis : « je donne ma langue au chat ».
Damien Gérard |
Quelle est votre occupation professionnelle actuelle ?
Aujourd’hui, j’exerce à titre principal la fonction d’administrateur à la Direction générale de la concurrence de la Commission européenne (DG COMP). J’y gère des dossiers de contrôle des concentrations, ce qui revient à assurer la compatibilité des fusions et acquisitions notifiées à la Commission avec une concurrence effective au sein du marché unique européen. A titre accessoire, j’enseigne le droit de la concurrence à l’UCLouvain et au Collège d’Europe.
Quel était le sujet de la thèse ?
J’ai réalisé une thèse consacrée à l’évolution de la façon dont l’intégration européen s’est traduite en termes réglementaires à la suite de la finalisation du marché unique européen et en vue de l’élargissement de 2004. Au départ d’une étude empirique croisée de la transformation de l’application du droit de la concurrence, d’une part, et du développement de la coopération en matière pénale, d’autre part, j’ai identifié l’émergence d’un modèle réglementaire – une “méthode de l’Union” – empruntant à la fois aux techniques de droit international privé et de la gouvernance en réseau, destiné à susciter la convergence des cadres juridiques nationaux et fondé sur la notion constitutionnalisante de confiance mutuelle entre les Etats membres.
Dans quel contexte avez-vous réalisé votre thèse ?
Pour réaliser ma thèse, entreprise après une première expérience professionnelle en cabinet d’avocats, j’ai bénéficié d’un financement de la part des Fonds spéciaux de recherche (FSR) de l’UCLouvain octroyé au Professeur Stéphanie Francq dans le cadre de la Chaire de droit européen. Après trois années à temps plein pendant lesquelles j’ai effectué des séjours de recherche aux Etats-Unis (HLS) et en Allemagne (Institut Max Planck de Hambourg), j’ai repris une activité d’avocat et ai terminé ma thèse en parallèle, avant d’effectuer un programme post-doctoral à l’Institut universitaire européen (programme Max Weber).
Quelles compétences spécifiques la thèse vous a-t-elle permis d’acquérir ?
Avec le recul, la thèse m’a amené à déconstruire ce que je pensais connaître du droit européen et du droit de la concurrence après des études pourtant assez approfondie, et de reconstruire ma compréhension du “système juridique" de l’Union à partir de mes propres recherches. Rétrospectivement, je pense donc avoir développé une capacité de (re-)penser l’application du droit de l’Union au sein du système de gouvernance auquel il appartient, et donc à la fois une capacité de mettre les problèmes juridiques en relation et en context, une faculté accélérée de jugement de situations individuelles, ainsi qu’une forme de créativité qui me permet d'apporter des solutions innovantes à des questions juridiques auxquelles je fais face en pratique.
En général, quelle a été la plus-value de votre thèse pour votre parcours professionnel ?
De façon générale, la valeur ajoutée d’une thèse est réelle mais relativement diffuse. La thèse m’a certainement permis de développer et de légitimer une expertise, d’approfondir des relations professionnelles, d’assurer la poursuite d’une activité académique à temps partiel, mais elle a constitué davantage une étape importante dans un processus de développement personnel plutôt qu’une expérience transformative. Paradoxalement, la finalisation d’une thèse de doctorat tout en travaillant dans un cabinet d’affaires international a également brouillé mon identité professionnelle. Néanmoins, j’ai pris part à un concours spécialisé de recrutement à la Commission européenne quelques temps après avoir défendu ma thèse et, soudainement, je cochais toutes les cases et mon profil correspondait exactement aux exigences de la fonction. J’ai donc été recruté et depuis lors j’ai l’impression de pouvoir apporter une vraie value ajoutée dans mon travail quotidien en puisant à la fois dans mes expériences académiques et d'avocat.
Quelle est votre meilleure anecdote de thèse (s’il y en a !) ?
Il y a beaucoup de moments compliqués à gérer dans la thèse (et l’après-thèse…); il faut être résilient, avoir confiance dans la vie et accepter que l’expérience ne vous amènera pas nécessairement là où vous envisagiez d’atterrir. Mais il y a aussi des moments inoubliables, intellectuellement et humainement, qui vous façonnent pour longtemps. Les séjours de recherche à l’étranger en font partie, et m’ont permis de nouer des amitiés pour la vie. Si je devais épingler une seule anecdote, elle remonte à un séminaire organisé par un de mes grands amis maintenant professeur à University College London où j'étais amené à commenter une contribution. A la pause qui suivi, le grand Professeur et penseur du droit européen Christian Joerges que j’admirais beaucoup s’avance vers moi et me lâche: “You, I don’t know who you are but you are not a real lawyer!” Ce à quoi j’ai répondu: “Coming from you, I assume this is a compliment!” Et nous avons ensuite passé tout le trajet en train entre Londres et Cambridge dans la soirée à discuter de ma thèse…