Antoine Laugrand - Showa tan Kashowa.’ Le double et la moitié. Cycles d’échanges et asymétries entre les vivants et les morts chez les Ibaloy de Upper Loacan (Benguet, Philippines)

ESPO Louvain-La-Neuve, Mons

13 octobre 2023

14h

Louvain-la-Neuve

LECL93 - Salle du Conseil

Le Recteur de l'Université catholique de Louvain fait savoir que

Antoine Laugrand

soutiendra publiquement sa dissertation pour l'obtention du grade de Doctorat en sciences politiques et sociales

‘Showa tan Kashowa.’ Le double et la moitié. Cycles d’échanges et asymétries entre les vivants et les morts chez les Ibaloy de Upper Loacan (Benguet, Philippines)

‘Showa tan Kashowa.’ The Double and the Half. Cycles of Exchanges and Asymmetries between the Living and the Dead among the Ibaloy of Upper Loacan (Benguet, Philippines)

Abstract

The Ibaloy are a group of indigenous people living in the province of Benguet in the Philippine Cordillera. Former headhunters, they excavate gold in small-scale mines and cultivate swidden and terraced gardens on mountainsides. They live in baley, or houses, around which they structure their entire dwelling. This space is divided equally between children and is passed down from generation to generation within the same lineage. Their society is organized around the exchange of debts, creating status inequalities and distinguishing wealthy possessors, creditors to the poorest. These socioeconomic differences enable a continuous flow of goods and services, creating a dense social fabric between members of the same network. The Ibaloy live in a world where the dead are omnipresent. The deceased eat and drink with humans daily and in rituals where the latter offer them food, alcohol, tobacco, pigs, clothing, and money. To inherit a lot, descendants must pay for their parents’ funeral expenses and take care of their remains, ensuring, in offering and exhumation rituals spanning over several generations, that they are given everything they need to become ancestors. Inheritance helps to overcome social inequalities by letting every married couple access a plot of land. To occupy the land, the living must maintain asymmetrical relationships with the dead. The latter can oblige the former, who must either comply or suffer their wrath, hoping to obtain their luck, protection, and a good life. Masters of life and death, the ancestors own the land humans occupy and cultivate in their name. If humans owe their existence to their deceased parents, who brought them into the world and passed on an inheritance, they spend their lives repaying a “life debt” they owe them. Ultimately, death is a phase of a life cycle that repeats, connects, and doubles the human world.

Résumé

Les Ibaloy sont un groupe d’autochtones habitant la province de Benguet, dans la Cordillère des Philippines. Anciens chasseurs de tête, ils exploitent l’or dans des mines artisanales et cultivent des jardins sur abattis-brûlis et en terrasse à flanc de montagne. Ils vivent dans des baley, des maisons, autour desquels ils structurent l’ensemble de leur habitat. Cet espace est divisé de manière équitable entre les enfants, et est transmis de génération en génération au sein d’un même lignage. Leur société est organisée autour de l’échange de dettes, donnant lieu à des inégalités de statut, distinguant de riches propriétaires créditeurs des plus pauvres. Ces différences socioéconomiques permettent une circulation continue de biens et de services, et composent un dense tissu social entre les membres d’un même réseau. Les Ibaloy vivent dans un monde dans lequel les morts sont omniprésents. Les défunts mangent et boivent avec les humains au quotidien et dans les rituels dans lesquels ces derniers leur offrent nourriture, alcool, tabac, cochons, vêtements, et monnaies. Pour hériter d’un lot, les descendants doivent payer pour les dépenses des funérailles de leurs parents, et prendre soin de leurs restes humains enterrés, assurant, au cours de rituels d’offrandes et d’exhumation s’étendant sur plusieurs générations, de leur donner tout ce dont ils ont besoin pour qu’ils se transforment en ancêtres. L’héritage permet de pallier les inégalités sociales en permettant à chaque couple marié d’avoir accès à un lot. Pour occuper la terre, les vivants doivent maintenir des relations asymétriques avec les morts. Les seconds peuvent exiger des premiers qui doivent obtempérer ou subir leur courroux, espérant obtenir leur chance, leur protection, et une bonne vie. Maîtres de la vie et de la mort, les ancêtres possèdent la terre que les humains occupent et cultivent en leur nom. Si les humains doivent leur existence à leurs parents défunts qui les ont mis au monde et leur ont transmis un héritage, ils passent leur vie à rembourser une « dette de vie » qu’ils leur doivent. La mort constitue en définitive une étape d’un cycle de vie qui se répète, connecte, et double le monde des humains.

Membres du jury

Prof. Anne-Marie Vuillemenot (UCLouvain), promotrice
Prof. Pierre-Joseph Laurent (UCLouvain), président du jury
Dr. Lionel Simon (UCLouvain), secrétaire du jury
Prof. Scott Simon (UOttawa, Canada), évaluateur externe
Prof. Oona Paredes (UCLA, USA), évaluatrice externe
Prof. Karl Gaspar CSsR (Ateneo de Davao, Philippines), évaluateur externe
Prof. Pi-chen Liu (Academia Sinica, Taiwan), évaluatrice externe

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