Sarah Smit - Se (re)construire et trouver sa place dans le pays de destination. Reprise d’études de femmes migrantes ‘dépendantes’ et qualifiées en Belgique

Louvain-La-Neuve, Mons

20 décembre 2022

18h30

Louvain-la-Neuve

Salle du Conseil (LECL93)

Le Recteur de l'Université catholique de Louvain fait savoir que

Sarah Smit

soutiendra publiquement sa dissertation pour l'obtention du titre de Docteur en sciences politiques et sociales

“Se (re)construire et trouver sa place dans le pays de destination. Reprise d’études de femmes migrantes ‘dépendantes’ et qualifiées en Belgique”

Résumé

Le durcissement actuel des politiques migratoires belges à l’égard des personnes migrantes ressortissantes de pays tiers crée de nombreux obstacles juridiques et institutionnels à leur établissement sur le territoire. De plus, bien qu’officiellement neutres, ces politiques restent basées sur des présupposés liés au genre et engendrent des effets différents pour les femmes et les hommes en situation de mobilité. Les femmes qui migrent dans le cadre du regroupement familial, afin de rejoindre leur conjoint en Belgique, sont particulièrement touchées par ces difficultés. Bien qu’elles disposent de compétences et de qualifications, leur migration entraine généralement un important déclassement professionnel et social. Elles sont alors nombreuses à reprendre des études dans le pays de destination.

C’est dans ce contexte que mon projet de recherche questionne les connaissances empiriques et théoriques quant au phénomène de reprise d’études supérieures, en tant que période de transition, dans les parcours de vie de femmes migrantes qualifiées en provenance de pays tiers à l’Union européenne et arrivées en Belgique dans le cadre d’un regroupement familial. Plus particulièrement, il se fixe pour objectif de répondre aux questions que les dynamiques, mises au jour dans les récits de ces femmes, posent en termes de rapports sociaux, de projets individuels et de possibilités d’émancipation. Il cherche à comprendre les stratégies, les négociations, les opportunités et les diverses ressources qui permettent à ses femmes de s e(re)construire et de (re)trouver une place au sein de la société, mais aussi de comprendre ce que cela signifie pour elles et leur entourage.

Pour répondre à ces questions, mon projet s’appuie sur des outils sociologiques qualitatifs qui placent l’individu au cœur du processus de recherche. Il mobilise la méthode biographique des récits de vie qui représente le cœur de mon travail de recherche, le Life History Calendar qui permet de saisir les étapes et les périodes de transition au cœur des parcours de vie des participantes, un générateur de noms afin de saisir les relations et les systèmes sociaux dans lesquelles elles s’inscrivent et, enfin, la technique des cercles concentriques qui permet une meilleure visualisation de leurs réseaux personnels. Ces outils permettent aussi d’éviter une vision victimisante des femmes migrantes, en leur accordant une place centrale d’actrices de leur récit et de leur trajectoire.

L’analyse des récits récoltés s’appuie sur l’approche intersectionnelle des carrières migratoires, démarche analytique originale, sensible aux réalités fluides et spécifiques à chaque sujet. Elle montre que la migration des femmes ne rime pas toujours avec émancipation mais s’accompagne au contraire de dépendances, de ruptures, de projets, de négociations, de redéfinitions et d’adaptations. Ces effets n’émergent pas seulement dans l’intimité du couple ou au sein de la société d’origine mais aussi dans les politiques et les lois migratoires et du travail, qui renvoient les personnes migrantes aux cadres normatifs conjugaux et familiaux traditionnels. Les résultats montrent également que, pour faire face aux difficultés rencontrées dans le pays de destination, les femmes ‘regroupées’ soit résistent, soit s’adaptent en remodelant leurs projets. Les projets de reprise d’études sont alors centraux et envisagés non seulement comme un moyen de réintégrer le marché du travail qualifié mais surtout aussi comme un moyen de se(re)construire et de se faire une place dans la société. Les résultats montrent finalement qu’il est important de dépasser la considération selon laquelle la migration des femmes est, a priori, émancipatrice ou opprimante.

Membres du jury 

Prof. Laura Merla (UCLouvain), promotrice et secrétaire du jury
Prof. Eric Mangez (UCLouvain), comité d’accompagnement et président du jury
Prof. Andrea Rea (ULB), comité d’accompagnement
Prof. Asuncion Fresnoza-Flot (ULB), membre du jury
Prof. Claudio Bolzman (UNIGE, Genève), membre du jury

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