De doctorante à rectrice, un chemin ardu

Les universités discriminent-elles les femmes malgré leurs intentions positives? L’Ethical Forum s’interroge tandis que le Pr Bernard Fusulier esquisse les résultats du projet Garcia mené par l’UCL.
Ce 8 décembre, l’Ethical Forum organisé par la Fondation universitaire s’interroge: ‘L’université est-elle un lieu pour les femmes?’… et esquisse une réponse: ‘Le rude chemin de doctorant à recteur’.

Alors que les étudiantes sont très nombreuses à l’université, le nombre de femmes diminue drastiquement au fil des échelons de la hiérarchie universitaire tant en Europe qu’en Amérique du Nord. Les universités tentent d’inverser le processus. À l’UCL, par exemple, la moitié des professeurs engagés cette année sont des femmes mais le processus pour inverser la tendance sera long.

L’objectif de l’Ethical Forum est d’analyser la situation dans une perspective comparative et d’évaluer les solutions proposées. Y a-t-il discrimination dans le chef des universités en dépit de leurs bonnes intentions? Le milieu académique attire-t-il moins les femmes que les hommes? Le temps viendra-t-il au secours des femmes? Autant de questions qui seront débattues le 8 décembre, de 14h à 18h, à la Fondation universitaire.

Il y a quelques semaines, à Bruxelles, avec ses collègues, Bernard Fusulier, professeur à l’UCL et directeur de recherches FNRS, présentait les résultats du projet Garcia porté par un consortium d’universités dans le cadre d’un programme de recherche européen. L’objectif de ce projet est d’avoir un diagnostic global et d’implémenter des actions dans les universités et centres de recherche afin de combattre les asymétries de carrière liées au genre. Le projet Garcia s’est interrogé sur les causes du ‘tuyau percé’, autrement dit, sur les causes qui expliquent le fait que les femmes sont de moins en présentes au fur et à mesure de l’avancée dans la carrière académique. L’équipe de l’UCL a notamment mis en évidence combien ce phénomène combine à la fois plusieurs phénomènes (la persistance de certains stéréotypes, un habitus masculin, le différentiel d’accès aux réseaux soutenants, un conflit travail/parentalité…) et plusieurs niveaux d’analyse (dynamiques des centres/départements, culture et organisation propres à chaque université, caractéristiques spécifiques des sociétés dans lesquelles elles sont encastrées). Les chercheurs confirment que c’est bien à partir du doctorat que les femmes perdent du terrain et que la période postdoctorale est particulièrement sensible. Dans certains cas, les universités posent à ces jeunes chercheur.e.s des exigences parfois contradictoires: être au top à l’international, tout en étant très impliqué.e.s dans leur centre et institution. Loin d’être neutre au plan du genre, cette double exigence suppose que les chercheur.e.s puissent se montrer omniprésents et hyper-actifs, et ajuster en conséquence leur vie privée ce qui est plus délicat pour les femmes du fait de la division sexuelle du travail productif et reproductif qui prévaut encore aujourd’hui. D’autres universités se conforment totalement aux standards internationaux et s’efforcent de coacher des ‘championnes’ pour qu’elles portent un ‘habit d’homme’. Se trouve alors questionnés les critères mobilisés au nom de l’excellence scientifique.

Lors de la présentation des résultats de ce projet, la vice-rectrice à la politique du personnel de l’UCL, la Pre Evelyne Leonard, indiquait que les efforts pour atteindre l’égalité de genre dans toutes les catégories de personnel devaient tenir compte d’une série de facteurs tels que la mobilité internationale obligatoire ou la course à la recherche de moyens financiers toujours plus importants.

http://www.ethicalforum.be/
http://garciaproject.eu/

Publié le 01 décembre 2016