Les aides à l'embauche n’améliorent pas les perspectives d’emploi des jeunes faiblement scolarisés en Wallonie

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Malgré près de 195 millions € octroyés à l’aide à l’embauche des moins de 25 ans, le taux d’emploi des moins de 25 ans faiblement scolarisé ne s’est pas amélioré, note l’IRES dans Regards économiques.

Le dernier numéro de Regards économiques présente les principaux résultats d’une évaluation des aides à l’embauche «Impulsion moins de 25 ans» introduites en Wallonie en juillet 2017. Cette évaluation a été réalisée conjointement par l’Institut de recherches économiques et sociales (IRES/LIDAM) de l’UCLouvain et l’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et des statistiques (IWEPS).

L’aide à l’embauche Impulsion − 25 ans s’adresse aux demandeur·ses d’emploi de moins de 25 ans qui n’ont pas de diplôme d’études supérieures. Pour les moins scolarisé·es d’entre eux·elles, aucune condition de durée de chômage n’est exigée. Les diplômé·es de l’enseignement secondaire supérieur doivent être inoccupé·es depuis au moins 6 mois pour être éligibles. L’aide à l’embauche est temporaire et dégressive, d’une durée maximale de 3 ans. Si on la compare au revenu mensuel minimum garanti, elle représente une réduction salariale de 25% à l’embauche. Entre juillet 2017 et décembre 2021, notre période d’étude, le montant total des aides octroyées par ce dispositif s’est élevé à près de 195 millions EUR.

En réduisant le coût du travail, l’objectif de l'aide est d’inciter les employeurs à créer de nouvelles opportunités d’embauche pour les jeunes chômeur·ses faiblement scolarisé·es. L’ évaluation vise à vérifier si cet objectif a été atteint : les perspectives d’emploi du public ciblé sont-elles plus importantes de ce qu’elles auraient été si les aides à l’embauche n’avaient pas été mises en place ?

L’analyse des données montre que le dispositif Impulsion − 25 ans n’a pas permis de relever le taux de retour à l’emploi ni la durée passée en emploi des chômeurs faiblement scolarisés de moins de 25 ans. Les subsides n’ont donc pas incité les employeurs à recruter davantage ces travailleurs et génèrent des effets d’aubaine.

Cibler et former

En comparant leurs résultats avec la littérature scientifique sur le sujet, les scientifiques concluent qu’une des raisons principales de l’absence d’effet de l’aide à l’embauche tient au fait qu’elle ait été introduite dans une période où la situation économique était favorable au recrutement et le chômage en baisse. En effet, lorsque le marché du travail est tendu, stimuler la demande de travail des entreprises en abaissant le coût du travail peut s’avérer inopérant puisque les opportunités d’emploi existent déjà.

Les autrices et auteur de l’étude recommandent donc de cibler les aides Impulsion − 25 ans à certains moments du cycle économique, par exemple lors d’une sortie de récession bien avant que des tensions apparaissent sur le marché du travail. Un ciblage ponctuel en fonction de la situation économique permettrait également d’envisager des montants d’aide plus généreux, renforçant l’effet incitatif pour les employeurs. Au-delà de la situation conjoncturelle, les scientifiques soulignent que les programmes qui mettent l’accent sur un retour rapide au travail – comme les aides à l’embauche – ne sont pas nécessairement efficaces pour les jeunes demandeurs d’emploi avec un trop faible niveau de compétences. Le défi pour ce groupe ne réside pas tant dans la demande des entreprises mais plutôt dans ce que les jeunes peuvent leur offrir en retour. Pour qu’un subside à l’embauche s’avère efficace, il doit s’appuyer sur un socle de compétences suffisant que l'on peut notamment acquérir par le biais de formations ciblées.

Une réforme inefficace ?

Depuis le 1er juillet 2023, une réforme du dispositif Impulsion est entrée en vigueur, restreignant l'octroi des aides aux contrats d'une durée minimale de deux mois. Les entreprises de travail intérimaire seront de facto exclues du dispositif Impulsion, du fait de la courte durée des contrats qu’elles proposent. S’il n’est pas possible d’anticiper avec certitude les effets du subside selon les nouvelles modalités, l’économie sera sans doute importante sur le plan budgétaire, étant donné la part importante des agences d’intérim dans les entreprises utilisatrices du subside, notent les autrices et l’auteur du rapport.

Cependant, rien ne permet d’affirmer que les effets d’aubaine disparaitront. En particulier, si l’aide à l’embauche telle qu’elle est aujourd’hui n’a pas incité les employeurs à créer de nouvelles opportunités d’embauche, il est difficile d’imaginer que l’effet incitatif soit augmenté par l’ajout d’une contrainte supplémentaire sur la durée du contrat.

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Publié le 19 octobre 2023