Polyarthrite rhumatoïde : l’examen clinique d’abord

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Pourquoi certains patients et surtout patientes – la maladie se déclare majoritairement chez des femmes jeunes – réagissent-ils peu aux traitements contre la polyarthrite rhumatoïde ? Des scientifiques de l’Institut de Duve et des Cliniques Saint-Luc ont une première réponse : il faut investiguer au-delà des caractéristiques du tissus synovial*.

La polyarthrite rhumatoïde touche un peu moins de 1% de la population, surtout des femmes, jeunes adultes, mais certaines formes touchent les enfants et d’autres les personnes âgées. Dans cette maladie auto-immune, le système immunitaire attaque les articulations, en particulier des mains et des pieds.

« À l’examen du tissus synovial, on voit d’une part les cellules normales, d’autre part, des cellules immunitaires envahissent l’articulation et  produisent l’inflammation », explique la Pre Nisha Limaye (Institut de Duve) et Clément Triaille (Cliniques universitaires Saint-Luc),  auteurs, avec le Pr Patrick Durez (Service de rhumatologie des Cliniques universitaires Saint-Luc, Institut de recherche expérimentale et clinique, IREC), d’une étude parue dans la revue Annals of the Rheumatic Diseases.. Les traitements, nombreux, visent à réduire cette inflammation en ciblant différentes cellules immunitaires.

Des traitements pas toujours efficaces

Or les rhumatologues se sont rendu compte qu’ils ne pouvaient améliorer les symptômes de leurs patient·es que jusqu’à un certain point, certains d’entre eux ne répondant pas bien au traitement, ou pas de la façon espérée.

L’équipe de scientifiques a eu l’idée de vérifier, tout au début de la maladie - avant de délivrer un médicament - s’il était possible de distinguer précocement différents, types de cellules ou caractéristiques de l’articulation et de décider quelle thérapie convient mieux à quel patient.

Pour répondre à cette question, les chercheur·es ont travaillé sur les données relatives à 74 patient·es, une cohorte disponible aux Cliniques Saint-Luc qui est en outre la 2e plus grande cohorte de biopsies synoviales (la première est britannique) mais également la première à être centrée sur les patient·es d’un même hôpital.

Élargir l’approche

Toutefois, les scientifiques ne sont pas parvenus à prédire une réponse, favorable ou non, en fonction du résultat de la biopsie synoviale. « On a constaté que plus le tissu synovial est enflammé, plus le nombre d’articulation touchées est important et plus le risque de séquelles radiologiques est élevé, explique Clément Triaille. C’est surtout cette activité-là qui détermine la réponse au traitement et non pas, comme supposé au début de l’étude, parce que certains sous groupes de patients répondraient mieux que d’autres au traitement. »

Ce résultat, qui concerne le traitement de première ligne, ouvre néanmoins la voie à d’autres questions. « Si la réponse ne se trouve pas uniquement dans l’articulation, on doit élargir l’approche retenue ces dix dernières années. Ce qui ouvre plus de portes que cela n’en ferme. »

Précieux examen clinique

Autre conclusion : l’examen clinique et l’attention au patient et à ses particularités restent primordiaux. Les scientifiques constatent en effet que les résultats de la biopsie synoviale coïncident bien avec les résultats de l’examen clinique. À l’heure où il est beaucoup question de l’IA (intelligence artificielle) et de ses applications en médecine, on constate, dans le cas présent, que le clinicien et le patient restent plus performant que des algorithmes.

* le tissus synovial produit le liquide qui lubrifie les articulations. C’est le tissu siège de l’inflammation dans la polyarthrite rhumatoïde.

Publié le 21 septembre 2023