Témoignage de Justine Lalot

Justine

Lalot

ROM - Attachée à la communication pour le Service fédéral des Pensions

En 2001, je me suis inscrite en langues et littératures romanes avec deux ambitions. La première, c'était d'apprendre l'italien... pour des raisons complètement inattendues. Avant d'envisager des études universitaires, je voulais en effet devenir luthier. Sauf qu'en sortant d'humanités générales (option latin-langues), et sans école de lutherie en Belgique, il était presque certain que j'allais me faire rabrouer par l'école de lutherie de Mirecourt en France où j'avais postulé. A la fin de ma rhéto, ce fut en effet le cas... L'italien serait donc ma porte de sortie vers la lutherie, car à l'époque on m'avait dit qu'à Crémone on acceptait beaucoup plus d'étrangers. C'est donc avec cette idée en tête que je m'inscrivis en romanes.

N'oublions pas aussi que j'avais une autre ambition... qui découlait d'une passion. Depuis mes dix ans environ, j'écrivais et j'aimais jouer avec la langue française. Je rêvais déjà à l'époque de devenir écrivain et j'imaginais que les romanes seraient un bagage supplémentaire pour atteindre ce but.

Histoire de corser un peu l'affaire, au même âge, j'hésitais à faire le journalisme. Toujours pour les mêmes raisons : une grande curiosité et une envie d'écrire et de raconter. Heureusement à l'époque quelques ainés avisés m'ont déconseillé de ne faire "que" le journalisme. Le secteur était en effet bouché m'avait-on dit. Et je pourrais toujours faire le DEC (diplôme complémentaire après la licence) en journalisme pour compléter mes romanes. Définitivement donc, j'allais m'inscrire en langues et littératures romanes.

Près de 15 ans plus tard (Mon Dieu, cela ne nous rajeunit pas !), je dois dire que je ne regrette pas mon choix. Bon évidemment, je ne suis pas luthier (après cinq ans d'études, ma motivation à recommencer des études aussi contraignantes était un peu retombée), mais j'ai appris l'italien que j'ai même pu approfondir lors d'un erasmus à Palerme. Ce bilinguisme m'a été plus qu'utile quand, en tant qu'enseignante (j'ai donné cours aux petits-fils de mineurs dans la région de Binche-La Louvière) ! Ou encore lorsque la Commune pour laquelle je travaillais invitait une chorale de la ville italienne avec laquelle elle était jumelée...

Je vous confirme donc que mes études m'ont permis d'allier et de vivre pleinement de nombreuses passions : la musique (mon mémoire portait sur l'opéra italien de Bellini, La Norma ; et durant 4 ans j'ai été active au sein de l'Orchestrakot et de l'Orchestre Symphonique des Etudiants de Louvain-la-Neuve), l'écriture (j'ai participé à un atelier d'écriture, mais surtout j'ai découvert tant de sources d'inspiration qui m'ont aidée à concrétiser mon rêve de devenir écrivain) et la linguistique qui a été ma plus fabuleuse découverte universitaire (oui, je sais, certains me taxeront sans doute de sadomasochiste pour cette affirmation, mais je l'assume !).

L’épilogue ? Quand, en dernière année, il ne me restait plus qu'un stage et un cours d'agrégation, l'occasion était toute trouvée de combler cette année avec un Master 60 (entre-temps les DEC étaient morts) en journalisme. Et d'assouvir par la même occasion mes envies professionnelles de départ... Pour finalement me rendre compte sur le terrain qu'en effet le secteur était bouché !

Qu'à cela ne tienne.... J'ai commencé ma carrière professionnelle comme enseignante. Ce métier me plaisait pour de nombreux aspects : variété, contact avec les jeunes, découvertes et remises en question constantes, ... Sauf qu'après six ans de service - dont une année passée en RDC, merci à l'école belge de Kinshasa - je me suis retrouvée sans heures ou presque, avec des directives de l'inspection complètement ridicules... J'ai donc décidé à ce moment de réorienter ma carrière. Vu mon parcours extra-scolaire, je me suis naturellement dirigée vers le secteur du socio-culturel. J'ai travaillé un an et demi pour un Centre Culturel Régional, comme gestionnaire de projets et animatrice. Cela m’a permis de toucher à différentes facettes : la gestion de dossiers, l’administratif, la communication événementielle, le rédactionnel, etc.

Enfin, dernière étape professionnelle et histoire de faire taire tous les oiseaux de mauvais augure, j’ai finalement réussi à me frayer un chemin dans ce secteur qu'on disait bouché : la communication. Comment ? En tentant ma chance aux tests de sélection du Selor. Lauréate d'une sélection comme attachée à la communication, j'ai d'abord décroché un poste de Chef de bureau communication pour une commune. Ce poste m'a permis d'acquérir en peu de temps (5 mois) une solide expérience en matière de communication et dans le domaine administratif. Connaissances qui m'ont été d'un grand secours lorsque j'ai appris en juin que, dès septembre, j'étais engagée suite à mon test de sélection du Selor.

Depuis le 1er septembre 2015, je travaille donc comme attachée à la communication pour l'Office National des Pensions (bientôt rebaptisé Service fédéral des Pensions). Une romaniste dans un service bilingue à majorité néerlandophone, c'est assez atypique ! Mais ça semble plaire... ne serait-ce que pour des compétences solides en matière de rédaction et de lisibilité des textes administratifs. Merci, les romanes…

C’est tout le paradoxe : j’ai été engagée grâce à mon Master en journalisme (ma licence ne me permettait pas de postuler aux tests) et je suis reconnue par mes pairs grâce à ma licence en langues et littératures romanes !

Finalement donc, les conseils qu'on m'avait donnés étaient les bons : contrairement aux journalistes qui n'ont « « que » ces études pour formation, je peux faire valoir d'autres compétences (l'enseignement et la maîtrise de la langue notamment) me permettant de me démarquer.

Au final, même si je ne deviendrai jamais luthier, mes études m'ont permis d'atteindre plusieurs objectifs personnels...et professionnels. Merci donc pour cette formation et cette ouverture d'esprit, surtout. Je crois que, si l’on ne doit en garder qu’un, le conseil à donner à des étudiants est celui-ci : restez ouverts à toutes les occasions qui se présenteront au cours de votre vie et relevez n’importe quel défi qui vous permettra d’aller de l’avant (même si vous êtes romaniste et que vous avez deux semaines pour retrouver votre niveau de néerlandais d'il y a quinze ans !).