Michel

C'est avec une grande tristesse que nous avons appris le décès du professeur Michel Loriaux, ce 12 février 2024.

Licencié en sciences sociales (1962) et en sciences économiques (1965) de l’Université de Liège, Michel Loriaux rejoint l’équipe de démographie de l’UCLouvain en 1969, où il réalisera son doctorat. Il sera nommé chargé de cours en 1994 et promu professeur en 2002, après une carrière déjà bien remplie dans notre Université. Dès les années 1970, il contribua au développement de plusieurs projets d’envergure, dont l’enquête démographique dans l’Ouest Zaïre (EDOZA) de 1975 à 1979, la recherche sur la situation démographique de la Wallonie (POLIWA) entre 1976 et 1979, ou le Centre International de Formation et de Recherche en Population et Développement (CIDEP) de 1987 à 1995. Il mènera aussi au cours de sa carrière des recherches novatrices et visionnaires sur le vieillissement démographique et les relations intergénérationnelles, et sera un pionnier de l’utilisation de l’informatique dans les sciences sociales dans notre Université.

Michel Loriaux était un intellectuel aux facettes multiples. Fin méthodologue, fervent défenseur des approches systémiques en sciences sociales, homme de terrain, homme de convictions et de débats, il était aussi un professeur captivant, capable d’emmener ses étudiants sur des terrains techniques, théoriques et politiques. Écrivain hors pair, Michel Loriaux nous laisse de nombreux articles scientifiques, chroniques, et autres écrits toujours stimulants. En 2005, après les témoignages de reconnaissance lors de sa fête d’éméritat, Michel Loriaux nous écrivait « le malaise d’être louangé est parfois plus difficile à surmonter que le déplaisir d’être critiqué ou disputé ». Sa formule était à son image, mélange de sagesse, de piquant et d’humour.

Michel Loriaux avait aussi un grand sens du service. Encore très actif après avoir quitté l’Université, il sera resté, fidèle à ses engagements pour les causes qui lui tenaient à cœur.

Saluons sa mémoire.

 

Les personnes qui souhaitent partager un souvenir ou une réflexion sur une page en hommage à Michel Loriaux peuvent l'envoyer à Isabelle Theys au Centre de recherche en démographie (isabelle.theys@uclouvain.be).

 

Quelques hommages...

 

Etienne Verhaegen, 13 février 2024

Chercheur atypique, engagé, de convictions (et n'ayant d'ailleurs pas peur de la polémique), il aura longtemps marqué la démo louvaniste, belge et francophone. La démo au sens large car c'était avant tout un sociologue. Une page se tourne ...

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Florence Degavre, Professeure UCLouvain, 14 février 2024

je suis très émue d’apprendre le décès de Michel Loriaux. Il fut mon professeur, promoteur de mémoire et de thèse dont je garderai à jamais le souvenir d’une personnalité vibrante, engagée, exigeante tant sur le fond que sur la forme des relations qu’il entretenait avec ses étudiant.es. Rigoureux, cultivé, jamais arrogant, il ne manquait jamais de glisser quelque impertinence pour secouer nos opinions. Merci à lui d’avoir porté des sujets essentiels dans la recherche, d’avoir encouragé le travail interdisciplinaire et la rencontre des méthodes et perspectives qui ont fait du Master en études du Développement un lieu d’épanouissement intellectuel pour des générations d’étudiant.es et de jeunes chercheur.es. J’adresse mes très sincères condoléances à sa fille, à sa compagne et à ses proches.

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Jean Wakam, un ami fidèle, 15 février 2024

Cher Michel,

Tu t’en es allé nous laissant orphelins. Mais tu as rempli pleinement ta mission en tant qu’homme et en tant qu’intellectuel. Oui, tu as été un intellectuel et un chercheur brillant et prolifique, mais humble et honnête. Tu as été un humaniste radical et totalement engagé aux côtés des pauvres, des opprimés, des laissés-pour-compte. Tu as été une source d’énergie spirituelle des plus positives et des plus stimulantes pour ceux qui rêvent et se battent pour un monde plus humain et plus fraternel.

Merci pour tout. Merci, Michel, pour ton témoignage qui m’a totalement comblé et m’a permis de continuer à rêver à un monde plus humain et plus fraternel. Merci, Michel, pour ton amitié et pour toute l’énergie positive que tu m’as insufflée, consciemment ou inconsciemment

Merci au Dieu d’Amour qui t’a inspiré, qui t’a mis sur mon chemin et qui m’a donné de te connaître et de bénéficier de ton amitié et de ton témoignage. Puisse ce Dieu d’Amour, qui détient les clés de la mort et du séjour des morts, t’accueillir auprès de lui et consoler ceux qui t’ont connu et aimé.

Cher Professeur Michel Loriaux, tu as été et tu resteras pour moi une référence, un modèle de probité et d’humanisme, une source d’énergie positive et très stimulante pour ceux qui rêvent et se battent pour un monde plus humain et plus fraternel. Je ne t’oublierai jamais. Va en paix et que le Dieu d’Amour auquel je crois, t’accueille dans son paradis.

Jean, qui malgré les distances t’est resté fidèle et ne t’oubliera jamais

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Felice Dassetto, Professeur émérite UCLouvain, 16 février 2024

Merci de m'avoir transmis le beau message en mémoire de Michel. Votre message restitue bien les traits que j'avais retenu de lui.

Je n’ai jamais eu l'occasion  de travailler directement avec Michel,mais j'ai toujours apprécié les qualités humaines de nos quelques échanges ainsi que son côté positif. Mais je voudrais me rappeler aussi  l'image et le profil scientifique qui me frappaient  chez lui qui alliait rigueur théorique et méthodologique et liberté d'esprit se connectant  sur  une connaissance qui n'est pas doctrine, ou scolastique méthodologique mais savoir en train de se faire. Ce sont ce regard et des attitudes  que, selon moi, auraient avantage à guider la production de connaissances, dans les sciences humaines, en particulier universitaire et dans une tradition humaniste critique et non seulement technicienne.

En écrivant ce mot  suite à votre message, je suis allé reprendre dans ma bibliothèque l’impressionnant  volume "Sociologie de la population" qui avait été coordonné par le regretté Hubert Gérard avec  Victor Piché. Je me souvenais que Michel avait écrit un long article traitant de:  "Les approchés méthodologiques en sociologie de la population: bilan et perspectives". Un article qui  est tout en questionnement, qui s'interroge sur la discipline démographique et de ses rapports avec les sciences des sociétés dont la sociologie, et qui lance  un appel à la nécessaire complexité de l'analyse.  Dans tout son article, il multiplie les schémas pour tenter de restituer et visualiser cette complexité. Il est le penseur d'un savoir en recherche.

Je suis d'autant plus ému en relisant le début de son article d'il y a presque vingt ans, que son "playdoyer pour une nouvelle démographie"  fait appel à un éloge de la "complexité" et les faits d populations "comme faits sociaux totaux" autant  de termes et de questions qui me traversent aujourd'hui en voulant traiter des questions contemporaines des migrations.  Ce qui me rend ce moment immédiatement proche du souvenir intellectuel de  Michel Loriaux.

Mes souvenirs et mes amitiés à vous, à ses proches et à sa famille.

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Jacques Veron, INED, 18 février 2024

C'est avec beaucoup de tristesse que j'ai appris la mort de Michel qui semblait incarner la vie même. Sa joie de vivre était particulièrement communicative. L'image la plus forte que je conserve de lui est dans son univers de travail, décoré de manière toute personnelle, assis à son bureau, pratiquement invisible derrière des piles de livres et bouillonnant d'idées.
Il aimait les idées nouvelles et l'échange. Michel avait le sens de l'accueil et la gastronomie y trouvait sa part.

Je partageais avec Michel le goût de la systémique et l'intérêt pour les questions de développement.

Nous avions toujours grand plaisir à nous retrouver pour des discussions stimulantes. Pour Michel la démographie était  une science profondément "sociale" et "humaine".

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Ester Rizzi, Professeure à l'UCLouvain, 19 février 2024

J'ai fait la connaissance de Michel Loriaux dans les années 1990, lors de mon cours de démographie à l'Université catholique de Milan. Il n'était pas physiquement présent à ce cours, mais Giuseppe Micheli avait l'habitude de présenter la table de mortalité en faisant référence à un démographe belge qui disait "vous ne verrez jamais personne pleurer devant une table de mortalité". Ce démographe belge était bien sûr Michel Loriaux : cette phrase ne pouvait venir que de lui et de sa grande humanité. Les calculs et les méthodes ne pouvaient effacer en lui l'idée qu'on avait à faire à d'êtres humains. Cette phrase m'a convaincu que le Centre DEMO était la meilleure destination pour mon Erasmus et puis pour mon DES en démographie. J’ai pu alors connaître sa profondeur et passion lorsqu'il enseignait. Plus récemment, j'ai fait l'expérience de son immense générosité lorsqu'il m'a aidé et soutenu dans mes premiers pas en tant qu'académique. Avec toute mon affection, MERCI, Michel.

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Viviane Burgunder, 7 mars 2024

Merci de me permettre de rendre hommage à Michel Loriaux, mon professeur quand j’étais étudiante en démographie à l’UCL. L’image de sa tête pleine de savoirs, cachée derrière des tas de livres dans son bureau, est très présente en moi. Je le garde en mémoire pour sa capacité à enseigner et à transmettre ses réflexions (colloques, publications,..). Il était toujours à l’écoute et disponible. Il a su susciter mon intérêt et ma curiosité pour un des sujets qui le passionnait, le vieillissement de la population. 

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Zoubida Belarbi, 21 mars 2024

Je viens d'entendre le décès du Professeur Loriaux. Je suis profondément triste et je garde de trés bons souvenirs de notre cher Professeur. Mes profondes condoléances.

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Texte d'hommage écrit par Hubert Gérard pour l'éméritat de Michel Loriaux en 2006...

 

Tel Alexandre, César ou Napoléon,
Sans parler de Karl Marx ou du grand Simenon,
Michel Loriaux fit naître mille légendes
Que n’eut pas dédaignées le poète Dante.

Tel le grand Architecte qu’un penseur posa
Au départ de ce monde, il y a longtemps déjà,
Il serait reconnu le plus grand Bricoleur
De l’univers à nous, bien plus petit ma foi.
Il a tout fait chez lui et même chez ses sœurs,
De la cave au grenier et cela jusqu’au toit.
Raconter ses travaux prendrait beaucoup de temps
Car bien nombreux sont ceux qui furent ses clients.
Qu’on pense à la DEMO, au CIDEP et au SPED,
À d’autres entités par exemple l’AIDEP.
Il fit ses bureaux, de rouge peignit
Et puis les encombra de documents à lui.
Il établit les plans d’une salle de cours,
Puis il la construisit avec tous ses pourtours.
Avec la vidéo, la sono et l’écran
Pour PC de l’époque et autres transparents.
Avec Dominique, de nuit il raccorda
Tous ces fils s’encourant en tous sens à la fois.
Il construisit aussi salle d’informatique,
Câbla tout un réseau qui en devint mythique
Et subsiste hardiment à celui imposé
Pour nombre de millions par nos Autorités.
À ses enfants aussi, ses soins il accordait.
D’abord, il construisit abris pour animaux,
Répara les débris que ceux-là en faisaient,
Ensemble mélangés, du cochon au crapaud.
Les enfants grandissaient et leur nid recherchant,
On le vit maçonnant, plafonnant et peignant.
Bricoleur, il est donc et la légende dit
Qu’il aurait tricoté le landau du petit
Qu’il promène souvent près de la Dérivation
Cet art du grand-père, bricoleur à option.

Une autre légende court aussi sur Michel,
Sans qu’on sache vraiment que pouvoir penser d’elle.
Il serait l’Acheteur, des firmes redouté,
Qui aime marchander, acheter, dépenser.
Après dépouillement des mille informations
Venant de Test-Achat et diverses maisons,
Il connaît tous les prix et belles performances
Des fers à repasser et des vins de France,
Des chaussette chinoises et du riz thaïlandais,
Des pull-over en laine et des petits bonnets,
Des outils à offrir, même des balancelles,
Sans parler des PC, peut-être des dentelles.
Il rouspète où il faut et échange souvent
Sur base de sourires et de bons arguments.
Il acheta de tout pour beaucoup d’entre nous.
Pour étudiants partants et passant à la douane,
Il dut argumenter et, sans feindre la panne,
Faire admettre voiture et frigo comme un tout.
Sans parler du FN caché en fond de malle
Et d’autres objets dont l’étudiant régale.
Acheteur de haut vol souvent désargenté,
Achetant beaucoup, pas toujours remboursé,
Il garde le moral et prône la sentence :
« Honni soit qui Macro ne pense et n’y dépense ».

Une légende aussi nous dit bien autre chose
Qu’on ne peut écarter sans entendre la glose.
Cuisinier célébré par les plus hautes toques,
Il aurait régalé fins palais pour mastoque.
Il aime manier casseroles et poêlons,
Présenter le potage au fond de potirons,
Mélanger goûts et senteurs au fond de l’assiette,
Moduler l’appétit sur un fond d’anisette,
Arroser les poires de sauce chocolat,
Servir le cognac avec le café-moka.
Cuisinant comme chef, il mange avec plaisir,
Goûtant tous les replis des mets qu’il s’est choisis
Lorgnant de son voisin, l’assiette avec désir
Et asséchant les os de tous morceaux recuits,
Cholestérol aidant, diabète l’obligeant,
Il se met à manger beaucoup plus sobrement
Quand il doit consulter, des sciences médicales,
Quelque représentant ne pensant pas trop mal.
Avec goût aiguisé et santé bien en main,
Il aide maintenant son fils, le cuisinier,
Qui nous a préparé de ses plats les plus fins
Pour plaire à son père, client très avisé.

Grand Photographe aussi, la légende le clame,
Toujours appareillé dans la plus haute gamme,
Il parcourt hardiment les diverses travées
Des Chaires Quetelet et colloques nombreux,
Missions à l’étranger, événements heureux,
Fêtes et moments où, en dépit des marées,
De DEMO s’est joué le projet du futur
Auquel il a buté parfois comme sur mur.
De son côté, Michel amasse sans compter
Mille et mille photos en prise instantanée,
Pas toutes imprimées ne développées,
Des films nombreux aussi, pas toujours visionnés
Figeant notre vie depuis de longues années,
Passé heureux souvent parfois plus triste aussi
Où s’en viennent et s’en vont, comme mer sans plis,
Sans trop mots dire pourtant ni dénigrer l’appât,
Têtes jeunes et d’espoirs trop souvent déçus
Par le sort incertain que DEMO leur a dû
Vu son incertitude, depuis longtemps déjà.

Professeur de haut vol, volubile à souhait,
Brassant disciplines, figures et données,
Fascinant étudiants de tout sexe et tout poil,
Il aimerait enseigner même sous un voile.

Chercheur très érudit et toujours combattant,
Sur des terrains minés, affrontant les plus grands,
Il jouerait au David face au vieux Chaunu ou démographes plus patentés
Ou économistes de modèles perclus.
Et comme Albert Einstein, il aurait inventé
E égale durée de vie en bonne santé. (*)

Écrivain de style, depuis qu’il est petit,
Il n’aurait jamais pu donner délai précis.
Reconnu par son maître, à l’école primaire,
Il aurait obtenu délais excédentaires.

N’ayant jamais contré cette vieille habitude,
Il l’aurait combinée à d’autres certitudes
Celles d’écrire en français et très longuement,
Telles les cent cinquante pages pour un ban.
(rappeler que Muraille lut tous ses écrits ! ! Quel boulot pour ce pro-recteur plus honnête)

Il piquerait colère à l’instar de l’Etna,
Rougissant et sacrant en veux-tu en voilà,
Claquant porte et fenêtres et quittant salle sur-le-champ
Se retirant tel Achille d’antan sous sa tente.

Stoppons cette liste qui pourrait s’allonger
De mille légendes à ne point dénigrer,
Qui sont toutes vraies, n’en doutons surtout pas,
Et restons-en aux faits, qui plus vrais ne sont pas !

Au terme de ce discours, j’ai surtout à te dire
Que j’ai toujours eu pour toi grande admiration
Souvent nous fûmes partenaires
Complices ou compères
Ou même franchement dans des camps opposés
Jamais nous ne fûmes ennemis mais toujours des amis
Gardant distance propre et idées peu communes
Partageant quelque part quelque idéal commun.

 

Quelques photos...