Recommandations pour les tests diagnostic de Clostridioides difficile

MBLG

Le diagnostic des infections à C. difficile (ICD) est généralement établi par l’examen des selles et repose sur la mise en évidence de C. difficile toxinogène. Un diagnostic rapide et fiable des ICD constitue une pierre angulaire pour le management optimal. En effet, ce diagnostic rapide permet non seulement l'initiation rapide d'une thérapeutique adéquate, mais aussi l’implémentation de mesures d'hygiène et de prévention de l'infection au sein de l’institution de soins afin de limiter la transmission nosocomiale. Ces mesures incluent notamment l'isolement du patient et une désinfection accrue quotidienne de la chambre. Toutes les stratégies devraient donc tendre vers un diagnostic le jour même en cas de suspicion d’ICD et la qualité de la réponse du laboratoire est d'une importance cruciale. En effet, des résultats faussement positifs peuvent induire un traitement inadéquat et inutile du patient et provoquer un coût important lié aux procédures d'isolement. Par contre des résultats faussement négatifs peuvent mener à des épidémies ou à des traitements retardés.

Il existe depuis l’émergence d’épidémies d’ICD et le développement de nouvelles technologies, un large choix de méthodes. Malheureusement à ce jour, aucune méthode de diagnostic n’est à la fois rapide et fiable pour un coût raisonnable : l’effet cytopathogène (ECP) et la culture toxigenique considéré comme le gold standard sont trop longs, la détection de la GDH n’est pas assez spécifique, les tests immunoenzymatiques (EIA) détectant les toxines A ou A+B ne sont pas suffisamment sensibles et les tests de biologie moléculaire (NAAT) détectant également les toxines sont trop chers. Pour pallier à cette insuffisance, des algorithmes ont été proposés afin d’optimiser au mieux la balance entre coût, sensibilité et spécificité.

Un algorithme en deux, voire trois étapes, est actuellement préconisé par les recommandations américaines et européennes pour un diagnostic optimal en termes de sensibilité, spécificité, rapidité et coût (Figure 1; European Society of Clinical Microbiology and Infectious Diseases: update on the treatment guidance document for Clostridioides difficile infection; Clin Microbiol Infect. 2016 and 2021).

La première étape est d’utiliser un test avec une très bonne sensibilité et une valeur prédictive négative excellente telle que la détection de la GDH ou des tests moléculaires qui permet d’exclure rapidement le diagnostic d’ICD. Cette étape de dépistage par la GDH réduit considérablement le nombre d’échantillons qui requièrent une évaluation avec des méthodes plus spécifiques. Les résultats positifs, du fait de la faible valeur prédictive positive du premier test, doivent être confirmés par une seconde méthode permettant la mise en évidence du caractère toxinogène mais il n’y a, à ce jour, pas de consensus sur le choix du deuxième test (test EIA, méthodes moléculaires ou culture toxigénique). La recherche par EIA des toxines A et B est la première option: en cas de résultat positif pour à la fois la GDH et les toxines, un diagnostic d’ICD est confirmé. Cependant, la sensibilité de cette méthode est basse (40-99% selon les études) et, ainsi, la majorité des résultats de ces tests de deuxième intention seront négatifs, ce qui mènera à un troisième test (Figure 1A). En combinant GDH et toxine A et B en un seul test comme proposé dans de nombreux tests commercialisés, les deux résultats sont obtenus simultanément avec la même charge de travail et le même délai. En raison de la faible sensibilité de la détection des toxines par EIA; ils ne doivent pas être utilisés comme seule méthode de diagnostic et un test reflexe par méthode moléculaire est nécessaire en cas de résultat positif pour la GDH mais négatif pour les toxines. Un tel résultat peut correspondre soit à la présence d’une souche non toxinogène ou à la présence de souche toxinogène avec une production de toxines en dessous du seuil de détection des EIA (Figure 1B). Si les techniques moléculaires (NAAT) sont utilisées en première ligne, les recommandations suggèrent une confirmation de la présence de toxines libres par EIA (Figure 1C). En effet ces techniques ne détectent que la présence du gène de la toxine et non la toxine libre. Pour un résultat positif, il est difficile de différencier réellement un patient infecté d’un porteur asymptomatique (2-3%) et dont la diarrhée serait liée à une autre cause. Dans ces cas, l’évaluation clinique du patient est d'une importance majeure.  D’après les dernières recommandations européennes, un faible seuil de cycle (<24-25 Ct) pourrait prédire la présence de toxines libres mais cela dépend de la technique NAAT utilisée. A noter également que l’apparition de nouveaux clones ou de mutations au niveau des cibles tcdA et tcdB peut donner lieu à des résultats faussement négatifs. Ces tests doivent donc s’adapter continuellement aux nouveaux clones circulants et hypervirulents.

Pour rappel, il n’est pas recommandé de réaliser des tests de contrôle après traitement (Cohen SH et al ; Infect Control Hosp Epidemiol 2010). En effet, 40% des patients qui ont répondu cliniquement, après un traitement bien conduit, présenteront encore des résultats positifs. La guérison est donc affirmée sur bases de critères cliniques uniquement.

Bien que C. difficile soit connu pour être difficile à isoler et à cultiver, la culture reste essentielle pour le typage moléculaire des bactéries afin d'améliorer la compréhension de l'épidémiologie des ICD et de détecter rapidement l'émergence de nouvelles souches hypervirulentes.