Axes de recherche et méthodologie

Un thème de prédilection : la figura

La notion de figura (la « figure » dans un sens à la fois théologique, rhétorique et plastique) est au cœur des préoccupations du GEMCA, dans la mesure où  les représentations symboliques, emblématiques et allégoriques occupent une place de choix dans l’ensemble des productions tant textuelles que visuelles de l’époque étudiée. Ces représentations obéissent à un principe d’expression figurée et sont, de ce fait, autant de déclinaisons concrètes de la notion de figure. L’exploration de ce mode spécifique de représentation permet de contribuer à une épistémologie de la représentation ainsi qu’à une anthropologie de l’imaginaire de la période early-modern.

Une approche profondément interdisciplinaire  

Depuis quelques années, se dessine une reconfiguration disciplinaire dans l’étude des arts et des lettres ainsi qu’une diversification des approches portant sur la période moderne. À côté de la littérature et de l’histoire de l’art, d’autres approches ont vu le jour telles que l’analyse culturelle, l’anthropologie de l’image,  l’histoire des cultures visuelles (visual studies) et des théories sémiotiques. Ceci a permis de rassembler, de rapprocher un certain nombre de faits et de productions, appartenant traditionnellement à des champs disciplinaires différents. Ce renouvellement s’est fait d’une part à l’intérieur des disciplines dans le sens d’un accroissement d’études majeures publiées et d’une revivification de l’intérêt pour des secteurs négligés de la période (études rhétoriques et sémiotiques, de l’emblématique et symbolique humaniste, de la littérature baroque, questionnement sur les modernités, etc.), et d’autre part dans une perspective interdisciplinaire et européenne, dans le sens d’une ouverture sur les échanges interartistiques (relation entre textes, images et musique par exemple) et sur une contextualisation large du fait littéraire et artistique, prenant en compte les acteurs sociaux et politiques de la vie culturelle propre à la période. La littérature s’est ainsi ouverte à l’histoire de l’art et à l’histoire des sciences, de même que l'histoire de l'art porte une attention renouvelée au rapport entre texte et image. Partant, cette mise en perspective n’a pas été seulement disciplinaire et historique, mais également géographique en prêtant attention aux réseaux de circulation européens, à travers certains types d’organisation qui se surimposent aux délimitations nationales.
Mais plus fondamentalement encore, ces deux disciplines sont marquées par un intérêt accru pour l’histoire culturelle et l’anthropologie historique. Des objets tels que « l’image » en ont particulièrement bénéficié, se trouvant au croisement des disciplines évoquées ci-dessus et dont la complexité ne peut être approchée que d’un point de vue interdisciplinaire.

 L’ouverture historique s’est faite également d’un point de vue historiographique dans des études s’attachant à la réception et à l’image du premier âge moderne, façonnées et véhiculées par les historiens, historiens de la littérature et de l'art du XIXe et du XXe siècle.  
Les activités du GEMCA s’inscrivent dans cette ligne, prenant pour angle d’attaque l’étude des représentations, et en particulier l’étude des modalités (ou régimes) selon lesquelles s’établissent des relations signifiantes entre des textes et des images, ou selon lesquelles images et textes entretiennent des liens de nécessité (cognitive, anthropologique, théologique, herméneutique, rhétorique, etc.).

 

Une méthode : l'analyse culturelle 

En tant que lieu privilégié d’étude des représentations, l’analyse culturelle – analyse historique et pluridisciplinaire des représentations, différente des études culturelles qui traitent de l’époque contemporaine et des représentations des minorités – semble particulièrement adaptée à la compréhension des XVIe et XVIIe siècles, qui sont précisément l’époque où naît la conscience de la représentation, de son efficacité et des multiples jeux et enjeux qu’elle comporte. Cette approche, qui met en relation une réflexion théorique et critique sur les objets d’études, avec des analyses précisément contextualisées sur les usages et les pratiques auxquels donnent lieu ces objets, permet ainsi de saisir l’environnement épistémologique et les conditions de création artistique d’une époque, les rapports qu’entretiennent les arts, la société et l’ensemble des canaux de diffusion, tant dans leur matérialité technique que dans leur portée intellectuelle. Cette approche permet donc des travaux au croisement de la littérature, de l’histoire de l’art, de la philosophie et de l’histoire culturelle, d’une part, et d’autre part l’intégration dans les objets d’études d’un ensemble de manifestations et d’expressions qui échappent aux catégorisations canoniques des disciplines (tels que les genres mixtes, les genres littéraires et artistiques mineurs, etc.). Est ainsi éclairé l’ensemble des agents qui ont contribué à l’épistémè d’une époque.