L'Université en dialogues

LOUVAINS

16 invités, 45 experts UCLouvain – académiques, parfois étudiants –, 13 rendez-vous et autant de sujets qui s’invitent sur les réseaux sociaux ou dans des enceintes plus feutrées : l’UCLouvain a partagé le fruit de ses recherches sur, notamment, l’école, l’Europe, l’entrepreneuriat, le développement durable, le genre, les migrations avec de grands acteurs qui n’ont pas manqué de l’interpeller. Découvrez des extraits de 'L'Université en dialogues' qui vient de paraître aux Presses universitaires de Louvain. Car l’une des missions de l’université est de fournir, grâce à son expertise, les cadres et outils destinés à construire des solutions, en dialogue avec les acteurs concernés.

L’Université en dialogues’. À l'initiative de Vincent Blondel. Presses universitaires de Louvain. 110 p. > pul.uclouvain.be

A knowledge transition

Appointed EEA Executive Director in 2013, Dr. Bruyninckx implemented certain visible and tangible sustainability changes with the aim of making the agency embody what it stands for and advocates: its car park has been scrapped and emphasis placed on a well thought-out mobility plan; it revamped its energy policy; the food on offer at the cafeteria is completely in line with the Agency’s food policy, thus seasonal food, low in the food chain, local, hardly any processed food and a good vegetarian selection; disposable goblets have been banned. Some employees initially resisted, but, fi ve years down the road, everybody is now convinced of the EEA’s own sustainability options.

“A university should reflect its own sustainability options and embody the knowledge learned and taught, for instance in its food policy choices, energy sources and transport policies” – just like the EEA did concerning its own sustainability options. Pointing to the University of Copenhagen and universities elsewhere as examples, Dr. Bruyninckx reiterated that such a “knowledge transition” also has fi nancial and governance ramifications.

> Extract of ‘Practise what you teach’. With Hans Bruyninckx, Executive Director of the European Environment Agency (EEA), Vincent Blondel, rector, Charles-Hubert Born (Faculty of Law and Criminology), Élise Dupont (Louvain School of Engineering), Julien Hendrix (Student at Louvain School of Engineering), Marthe Nyssens (Faculty of Economic, Social and Political Sciences and Communication), Jean-Pascal van Ypersele (Faculty of Science).

Décoder le monde

Dans certaines écoles, on a appris à évoluer avec le monde, à débattre de la norme, à être critique, à poser des questions. Dans d’autres, pas du tout. La ministre note qu’avec les jeunes qui arrivent dans le qualifi ant avec des parcours cabossés, et pas par choix, les professeurs parent au plus pressé alors qu’ils aimeraient développer l’esprit critique. Mais quand le stage est dans deux semaines, ce n’est pas possible. Dans ce contexte, est-ce que l’école se donne un rôle d’éducation citoyenne ? Cela passe aussi par la maîtrise d’un certain nombre de savoirs, qui doivent permettre de décoder le monde dans lequel on vit. Pour la ministre, « La réponse est dans le Pacte. On déterminera, enfi n, ce qu’on doit apprendre au 21e siècle. On essaie de donner un cadre qui va donner un peu d’air. Les ados, à 14 ans, ont besoin que ce qu’ils apprennent fasse sens », dit-elle. Bernard De Vos estime qu’il est possible aussi qu’une série de choses en maths ou en sciences ne soient plus aussi indispensables qu’avant. « Mais c’est très compliqué parce que dès qu’on veut retirer quelque chose, il y a des cris. »

> Extrait de ‘Face à la complexité, l’école se fragmente’. Avec Marie-Martine Schyns, ministre de l’éducation et des bâtiments scolaires, Bernard De Vos, délégué général aux droits de l’enfant, Vincent Blondel, recteur, Vincent Dupriez et Éric Mangez (Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation), Marie Verhoeven (Faculté des sciences économiques, sociales, politiques et de communication).

Anywhere versus somewhere

Selon Enrico Letta, l’université joue un rôle-clé pour que l’éducation soit un lieu qui unisse les ‘anywhere’ et les ‘somewhere’. Pour comprendre cette fracture au sein de la population, on peut prendre en exemple le Brexit qui aura été le vote entre les ‘anywhere’ – ceux qui pourraient vivre partout parce qu’ils ont la connaissance des langues et de multiples compétences – et les ‘somewhere’ qui sont issus d’un lieu, d’une communauté dont ils ne sortiront pas parce qu’ils n’ont pas les compétences pour le faire. Ce clivage existe partout aujourd’hui en Europe. « Vous avez une partie de la population qui est globalisée et l’autre qui est enracinée. Ces deux parties ne se parlent pas, ne se connaissent pas. Faire communiquer ces deux groupes peut permettre de retrouver le fil dans l’intérêt même des universités. D’autant plus qu’il y a aujourd’hui un affaiblissement du personnel politique et cela vient du fait qu’une partie de ce public globalisé se détache des enjeux politiques. Le pari est de taille puisqu’on constate une diminution du nombre d’étudiants Erasmus et une certaine dualisation du monde universitaire. Tout l’enjeu est d’aller chercher les ‘somewhere’, et cela demande un effort considérable. »

> Extrait de ‘Études universitaires, une boussole dans le 21e siècle’. Avec Enrico Letta, doyen de l’École des affaires internationales de Sciences Po Paris et ancien sous-secrétaire d’État à la présidence du Conseil des ministres italien, Vincent Blondel, recteur, Nathalie Schiffino-Leclercq (Faculté des sciences économiques, sociales, politiques et de communication), Antoine Tanzilli (chef de cabinet d’Alda Greoli), Edoardo Traversa (Faculté de droit et de criminologie).

Un moment d'essoufflement

Sur le plan européen, le Premier ministre pointe une évolution, notamment avec l'arrivée d’Emmanuel Macron, qui conduit parfois à des discussions franches sur ‘l’immobilisme n’est plus une option’. « Vous ne voulez pas bouger, nous respectons votre souveraineté mais nous pensons qu’il faut bouger et nous allons bouger. » Il reconnaît qu’il ne s’agit peut-être que d’un frémissement. Par contre, il constate lui aussi l’absence d’un pôle médiatique européen. Charles Michel souligne que depuis l'élection d'Emmanuel Macron, les débats européens sont un peu plus repris dans les presses nationales mais il s’interroge : « Je n’ai pas de réponse encore à ce stade mais je sens bien que le modèle démocratique est de nouveau, ce n’est pas la première fois, dans un moment d’essoufflement. Une des raisons, c’est que les nouveaux modes de communication sont en train de balayer les médias traditionnels, c’est-à-dire l’éditorial, l’intellectuel, l’écrivain. En un temps record, en regard de l’histoire, il y a un basculement de ce modèle. »

> Extrait de ‘L’Europe : une page à écrire’. Avec Charles Michel, Premier ministre, Vincent Blondel, recteur, Vincent Dujardin (Faculté de philosophie, arts et lettres), Tom Delreux et Valérie Rosoux (Faculté des sciences économiques, sociales, politiques et de communication), Hugues Dumont, (Faculté de droit de l’Université Saint-Louis - Bruxelles).

Une question de mentalité

Une enquête réalisée en avril 2017 par IVox pour le compte de la FEB sur les jeunes ‘travailleurs de demain’ auprès d’un échantillon représentatif de 500 jeunes Belges (17-27 ans) a révélé que l’esprit d’entreprise a le vent en poupe : près de la moitié (49 %) des jeunes aimeraient devenir leur propre patron. Par ailleurs, ils ont une vision beaucoup plus flexible de la carrière professionnelle. Toutefois, l’effet d’entonnoir est tout aussi important chez les jeunes que chez les adultes : le taux d’activité entrepreneuriale effective des moins de 25 ans est aujourd’hui de 5,9 %. Alors qu’est-ce qui cloche ?

Les réponses sont multiples mais le nerf de la guerre reste sans nul doute une question de mentalité très wallonne. Globalement, massivement, le secteur public continue à attirer énormément. Les systèmes d’aide sont méconnus par 95 % des gens, avance Jean-Michel Javaux. « Or un ingénieur qui a une idée a besoin de quelqu’un qui lui fasse un business plan, du marketing et qui l’aide à grandir. Chez nous, on ne grandit pas. En Flandre, une entreprise passe facilement en cinq ans à 40 personnes », explique-t-il.

> Extrait de ‘Une nouvelle génération d’entrepreneurs’. Avec Jean-Michel Javaux, président de Meusinvest, Vincent Blondel, recteur, Amélie Jacquemin (Louvain School of Management), Jean-François Rees, (Faculté des sciences), Gauthier Waterlot (étudiant à l’École polytechnique de Louvain).

Une vision utilitariste de la mobilité humaine

Pour François Crépeau, ceci confirme l’expérience américaine. Tant que les Mexicains pouvaient entrer facilement aux États-Unis, ils repartaient au Mexique dès qu’ils perdaient leur emploi. « Quand un cousin proposait à l’un un emploi à Chicago ou ailleurs, il revenait aux États-Unis parce qu’il savait qu’il pouvait facilement faire ces allers-retours. » Mais dès qu’on a mis en oeuvre un blocage aux frontières, les Mexicains sont restés aux États- Unis, même sans emploi, parce qu’ils savaient qu’il serait difficile ou coûteux d’y revenir. Conséquence ? On a compté jusqu’à 12 millions de clandestins aux USA. « Quand on a ouvert les frontières de l’Europe aux Bulgares et aux Roumains, ils n’ont pas tout d’un coup envahi le reste de l’Europe, ils sont environ 3 % à avoir migré, allant, revenant. C’est cette autonomie du sujet qu’il faut reconnaître, encourager et faciliter. Il ne faut pas traiter les personnes comme des marchandises, vouloir les faire passer dans des tuyaux prédéterminés trop étroits, avoir une vision seulement mécanique ou utilitariste de la mobilité humaine. »

> Extrait de ‘Migrations, au-delà des clichés’. Avec François Crépeau, professeur en droit international à la McGill University, ancien rapporteur spécial des Nations Unies pour les droits de l’homme des migrants, Vincent Blondel, recteur, Amine Ait-Chaalal et Frédéric Docquier (Faculté des sciences économiques, sociales, politiques et de communication), Amina Koullo (étudiante à la FOPES), Sylvie Sarolea (Faculté de droit et de criminologie).

La recherche, une affaire de long terme

« Vous expliquez tous ici que vous faites de la recherche fondamentale », répond Jean-Pierre Bourguignon, « et donc l’horizon qu’on se donne ce n’est pas demain matin, c’est plutôt l’horizon de la compréhension. » Malheureusement, dans les discussions avec les politiques, compte tenu de la nécessité pour eux d’être réélus, ils veulent un impact qui livre des résultats à la fin ou tout de suite. Réduire la recherche à cela est dramatique. « Dans ma fonction, je dois résister aux pressions de ceux qui voudraient imposer des critères de court terme non scientifiques. Je ne dis pas que de grands programmes n’ont pas leur place mais ils ne doivent pas devenir hégémoniques et que l’on se dise que, finalement, on peut se passer de l’ERC. Malheureusement, c’est ce qui est en train de se passer dans plusieurs pays et même aux États-Unis. Nous devons collectivement défendre le point de vue que la recherche doit être conçue comme un système complexe qui poursuit des objectifs différents et complémentaires dont certains doivent nécessairement être de long terme. »

> Extrait de ‘L’Europe au défi de l’innovation technologique et sociétale’. Avec Jean-Pierre Bourguignon, président du Conseil européen de la recherche (ERC), Vincent Blondel, recteur, Tom Dedeurwaerdere (Faculté de philosophie, arts et lettres), Marthe Nyssens et Viriginie Van Ingelgom (Faculté des sciences économiques, sociales, politiques et de communication), Sophie Opfergelt (Faculté des bioingénieurs), Jean-Pierre Raskin (École polytechnique de Louvain).

Liberté et indépendance

« Une approche critique implique une distance critique. Liberté, autonomie et indépendance sont indispensables au travail des universitaires. Je ne suis pas contre l’engagement dans la société mais les règles du jeu doivent alors être claires. Il faut toujours garder une autonomie de décision et être exemplaire. Cela fait partie de la position de l’intellectuel. » Paola Viganò

> Extrait de ‘Villes et universités, un partenariat en question’. Avec Vincent Blondel, recteur, Nathanaëlle Baes et Bernard Declève (Faculté d’architecture, d’ingénierie architecturale, d’urbanisme), Mathieu Berger (Faculté des sciences économiques, sociales, politiques et de communication, coordonnateur du Metrolab), Nicolas Bernard (Faculté de droit de l’Université Saint-Louis - Bruxelles).

 

Modular and democratic

“With modularity, education becomes more democratic. It’s not so different from the so-called ‘black box’ systems, but the box is opened, broken apart, and one chooses from among the chunks, and can ‘mix n’ match’ with online choices. But the advising function is crucial, because these are tough choices to make as an adolescent.” Anant Agarwal

> Extract of ‘Wake up call for online learning’. With Yves Deville (Louvain School of Engineering), Françoise Docq (Louvain Learning Lab), Valérie Swaen (Louvain School of Management).

 

 

Les collaborations doivent grandir

« La Wallonie a la taille d’une ville moyenne chinoise et le problème, c’est que nous avons un tas de comités de quartiers. Quand on fait une réforme comme celle-ci, il est évident que les collaborations doivent grandir. Et dans l’intérêt de la qualité des soins de santé, l’expertise des hôpitaux universitaires doit être considérée en tant que telle. » Alda Greoli

> Extrait de ‘Rôle et futur des hôpitaux universitaires’. Avec Vincent Blondel, recteur, Christophe Beauloye (service de cardiologie des Cliniques universitaires Saint-Luc), Maximilien Gourdin (CHU UCLouvain Namur), Jean Cyr Yombi (Conseil médical des Cliniques universitaires Saint-Luc).

 

 

Une créativité au-delà du mainstream

« On ne peut pas laisser notre société être gouvernée par des patrons d’entreprises. Je réfute donc le fait qu’il y aurait des disciplines qui ne serviraient à rien. Dans beaucoup d’entreprises innovantes, on va chercher des archéologues ou des philosophes par exemple, parce qu’ils ont une créativité qui va au-delà du mainstream. » Jean-Claude Marcourt

> Extrait de ‘Dialogue autour de l’excellence dans les universités’. Avec Didier Viviers, secrétaire perpétuel de l’Académie royale de Belgique, Vincent Blondel, recteur, Isabelle Durant (Faculté de droit et de criminologie, prorectrice à l’enseignement), Françoise Smets (Faculté de médecine et de médecine dentaire).

Un organisme dédié à la discrimination de genre

« La société a déjà parcouru un long chemin vers une plus grande égalité de genre mais, comme en témoigne le travail quotidien de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes, ce n’est pas terminé. Avoir un organisme dédié à la discrimination de genre est essentiel pour assurer suffisamment de visibilité et d’attention politique à la thématique. » Michel Pasteel

> Extrait de 'Genre et diversité'. Avec Michel Pasteel, directeur de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes, Claire Godding, Diversity & Inclusion Manager chez BNP Paribas Fortis, Vincent Blondel, recteur, Laura Merla et Sarah Sepulchre (Faculté des sciences économiques, sociales, politiques et de communication), Johanne Montay, rédactrice en chef à la RTBF, Vincent Yzerbyt (Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation).

Harvard, an artistically rich place

“There are almost too many performances going on. We have so many orchestras on campus. Music and artists bring a sensibility to the community and Harvard is very aware of that, so it promotes the program and the prestige of great musicians, which makes the campus an artistically rich place and a place that can perform outreach.” Alex Beyer

> Extract of ‘Artistic academics and academic artists’. With Vincent Blondel, rector, Ralph Dekoninck and Laurent Verslype (Faculty of Philosophy, Arts and Letters), Pauline Dupret (Louvain-la- Neuve Student Symphony Orchestra).

 

 

Crédits photos : Alexis Haulot, Thierry Monasse

Article paru dans le Louvain[s] de septembre-octobre-novembre 2018