Les visages de la transition à l'UCLouvain

LOUVAINS

 

La recherche qui fait avancer les connaissances, l’enseignement qui les transmet et les campus durables qui appliquent ces savoirs porteurs pour l’avenir : c’est la vision, en trois dimensions, de l’ambitieux plan transition que l’UCLouvain a lancé quelques jours avant la COP26. Découvrez les visages de celles et ceux, parmi beaucoup d’autres, qui portent la transition au sein de l’université. Ils sont professeures et professeurs, chercheuses et chercheurs, étudiantes et étudiants, membres du personnel administratif. Un maitre-mot émerge : la transdisciplinarité.

Les textes qui suivent sont extraits des vidéos ‘Agissons ensemble pour la transition’ réalisées par Benoit Van Oost, coordinateur artistique des évènements UCLouvain (chaine Youtube UCLouvain). 

« Une responsabilté majeure »

Cheville ouvrière du plan transition de l’UCLouvain, Marthe Nyssens a mis toute son énergie dans ce projet. Le plan s’articule sur une vision autour de trois dimensions : la recherche qui fait avancer les connaissances, l’enseignement qui les transmet et les campus durables qui appliquent ces nouveaux savoirs porteurs pour l’avenir.

« C’est le projet de la communauté universitaire dans son ensemble. Il a été co-construit avec des étudiant·es, des chercheur·es, des professeur·es et des membres du personnel administratif. Les défis climatiques sont urgents », estime la Prorectrice Transition et Société, qui poursuit : « Il est de notre responsabilité d’aider la société à ouvrir les yeux, sur base des évidences scientifiques, et de collaborer à tracer les chemins de la transition. »

Pour Marthe Nyssens, « l’UCLouvain se doit d’être à l’avant-garde de la pensée de la société dans laquelle elle évolue. L’ambition est de faire de notre université un véritable ‘laboratoire ouvert de la transition’. L’enseignement, la recherche et les investissements pour rendre nos campus plus durables doivent s’articuler afin d’engager résolument notre université face aux défis de l’avenir. Notre responsabilité sociétale et éthique est majeure ».

Après la COP26 et au lendemain de l’‘alerte rouge’ lancée par le GIEC et l’ONU, le plan transition va permettre d’activer des leviers d’actions complémentaires et de souligner l’urgence d’aller plus loin.

Anne Mauclet
Communication recherche

> uclouvain.be/transition

* Marthe Nyssens est prorectrice Transition et Société de l’UCLouvain.

Chercher ensemble

Tom Dedeurwaerdere est un fervent défenseur des recherches interdisciplinaires et transdisciplinaires dans le domaine du développement durable et de la transition. Il a récemment organisé une conférence pour la communauté scientifique sur ce type d’approche transversale. Objectif ? Informer les chercheuses et les chercheurs sur les enjeux théoriques, méthodologiques et sociétaux d’une telle démarche, les inciter à s’y impliquer et les outiller au mieux.

Pour le philosophe, travailler ensemble avec les acteurs de terrain et des expert·es scientifiques dans différentes disciplines est primordial. « Les sujets liés à la transition sont complexes. Je suis convaincu que la qualité des recherches sera meilleure si les projets sont co-élaborés avec les acteurs impliqués dans les processus de changement. On ne souhaite pas que l’université impose dès le départ les thématiques aux acteurs de terrain. Ce sont souvent eux qui détiennent l’expertise sur les trajectoires possibles de transition. »

Tom Dedeurwaerdere estime que « les universitaires des différents secteurs doivent être à l’écoute des acteurs de terrain et apporter leur savoir scientifique pour envisager les changements autrement. L’idée est de chercher ensemble pour répondre aux nombreux défis. Pour favoriser la transition, on peut parler de transfert des technologies mais aussi de transfert des connaissances ». A.M.

> lptransition.uclouvain.be

* Tom Dedeurwaerdere est professeur à la Faculté de philosophie, arts et lettres, chercheur à l’Institut pour la recherche interdisciplinaire en sciences juridiques.

Des scientifiques engagés

Coralie Helleputte est membre du groupe de travail transition du corps scientifique de l’université. « Les enjeux de transition écologique sont au centre de nos préoccupations depuis longtemps », explique la chercheuse. « Les scientifiques ont été très impliqués dans la conception du plan de transition qu’ils ont mis au point avec de nombreux représentant·es des autres corps de l’UCLouvain. » Ce travail collaboratif a été réalisé, notamment, à l’aide d’outils d’intelligence collective proposés par le Louvain Learning Lab (LLL). Une approche basée sur les richesses et les diversités de chacun pour élaborer un projet commun.

« Nous souhaitons aussi mener des actions très concrètes. » Par exemple ? Aménager un compost, organiser une marche pour le climat ou encore créer une ‘forêt comestible’ dans le patio d’un bâtiment. « Nous avons également mis en place une plateforme qui recense toutes les initiatives qui existent sur les campus pour que les gens puissent s’en inspirer, rentrer en contact les uns avec les autres, échanger pour avancer. » Faire progresser la transition à l’UCLouvain nécessite une volonté institutionnelle et un engagement sur le terrain, au niveau local. « L’élan que nous connaissons aujourd’hui est partagé entre un enthousiasme et une énergie incroyables. En même temps, les défis sont vraiment immenses. On se dit parfois : va-t-on y arriver ? En tout cas, le mouvement est lancé ! » A.M.

> uclouvain.be/initiatives-transition

* Coralie Helleputte est assistante de recherche au Centre Interdisciplinaire de Recherche Travail, État et Société (CIRTES).

L'impact de l'alimentation

Avec des collègues en sciences et technologies et en sciences humaines, Nathalie Delzenne met sur pied le cours en ligne ‘Enjeux du développement durable et de la transition’ disponible pour les étudiants·es UCLouvain*. « Quand on parle d’alimentation et de développement durable, l’enjeu est d’emblée interdisciplinaire », explique la présidente du Louvain Drug Research Institute. L’experte en nutrition s’intéresse à l’impact de l’alimentation et de ses composantes biologiques, environnementales et sociétales sur l’état de santé. « Il est essentiel de se rendre compte que la manière dont on mange va influencer le maintien ou la restauration de notre état de santé. Le cours aborde notamment le problème de l’obésité et les critères de l’alimentation optimale pour notre organisme dans une optique de développement durable. »

Côté scientifique, Nathalie Delzenne pointe l’importance de traduire l’ensemble des recherches menées au sein de l’université à un niveau local. « Dans les projets, nous travaillons par exemple en partenariat avec les restaurants universitaires et collaborons avec des personnes d’horizons divers impliquées dans la recherche en nutrition. En termes de transition et d’environnement, chacun doit faire un effort, au niveau sociétal mais aussi individuel. Pour faire les choix adéquats, il faut prendre le temps de la formation et de la réflexion », insiste la chercheuse. A.M.

* voir aussi ‘Un Small Private Online Course’

* Nathalie Delzenne est professeure à la Faculté de pharmacie et des sciences biomédicales, présidente du Louvain Drug Research Institute (LDRI).

« Encore du boulot ! » 

Depuis quatre ans, Valeryane Duchene prend chacune de ses décisions après en avoir analysé les impacts écologique et durable. Végane, elle a ainsi décidé de ne consommer que des fruits et légumes locaux, de saison et biologiques. Employée du magasin bio coopératif Färm, membre du Kap Vert (un kot-à-projet de l’UCLouvain dédié à la transition), cette étudiante en socio-anthropologie estime pouvoir aller encore plus loin dans ses démarches écoresponsables. Elle envisage par exemple de diminuer prochainement sa consommation de données numériques.

La jeune femme de 21 ans est ravie du plan transition ambitieux dévoilé récemment par l’UCLouvain. Mais elle précise espérer que « ces belles promesses donneront des résultats concrets ». Parmi les nombreuses mesures présentées par l’université, Valeryane Duchene retient surtout l’introduction, dans tous les programmes, d’une formation aux thématiques durables. « Il faudra aussi faire de gros efforts en termes de transport. Quand on entend qu’à Louvain-la-Neuve, 50 % des étudiants se déplacent en voiture alors qu’on est dans une petite ville piétonne disposant d’une gare, on comprend qu’il reste encore beaucoup de boulot pour faire changer les mentalités ! », soupire celle qui se déplace majoritairement à vélo ou à pied et n’a pas de permis de conduire. « Je n’en veux d’ailleurs pas », s’empresse-t-elle de préciser.

Pierre-Alain Belpaire
Attaché de presse UCLouvain

* Valeryane Duchene est étudiante en 3e bac en socio-anthropologie.

Une vision du monde 

Expert en microélectronique, Jean-Pierre Raskin mène des recherches pour développer des matériaux plus durables, moins toxiques. Son laboratoire travaille aussi sur l’éco-design, soit la création de nouveaux objets qui ont une durée de vie plus importante. « L’électronique est née dans une société techno-libérale qui prône une économie linéaire : on produit, on consomme et puis on jette. Il faut absolument passer à un système économique circulaire. Au-delà des solutions techniques, c’est vraiment une vision du monde qu’on doit partager. La transdisciplinarité va nous permettre de sortir par le haut. La technologie seule ne résoudra malheureusement rien. » A.M.

* Jean-Pierre Raskin est professeur à l’Ecole polytechnique de Louvain (EPL), chercheur à l’Institut for Information and Communication Technologies, Electronics and Applied Mathematics (ICTEAM).

 

Des finances responsables

Mikael Petitjean est un économiste spécialiste du fonctionnement des marchés financiers. « L’université a mis en place un programme de transition de son portefeuille d’investissements vers des fonds d’investissement socialement responsables, qui respectent des critères environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance (ESG). Parmi ces fonds, nous avons sélectionné ceux qui performent le mieux sur le plan du rendement en tenant évidemment compte de leur niveau de risque. L’université a besoin de moyens aujourd’hui pour assurer un développement équilibré qui offre des perspectives aux générations actuelles mais aussi à venir. La transition de son portefeuille d’investissements s’inscrit dans cette démarche qui nous motive au quotidien. » A.M.

* Mikael Petitjean est professeur à la Louvain School of Management, chercheur au Louvain Institute of Data Analysis and Modeling in economics and statistics (centre de recherche Louvain Finance).

 

Un magasin collaboratif

Qui dit architecture, dit dessins, maquettes et nombreux déchets. Comment éviter ce gaspillage ? Pascale van de Kerchove, Marie-Christine Raucent et des étudiant·es ont créé, il y a deux ans, avec l’aide de la Fédération des récupérathèques et de l’ARES, une récupérathèque de matériaux baptisée ‘Le Rucher’, construite par les étudiant·es. On y trouve tout ce qui est nécessaire aux études : fardes, équerres, pinceaux, papier, carton, bois… « Notre objectif est de favoriser la solidarité entre étudiant·es, de diminuer les coûts d’achat et de réduire le gaspillage. C’est le principe d’un magasin collaboratif basé sur l’échange à l’aide d’une monnaie alternative, le Loci. » Le Rucher a aussi une vocation de cohésion sociale puisque, dans un avenir proche, la récupérathèque sera ouverte aux habitants du quartier. A.M.

* Marie-Christine Raucent est professeure à la Faculté d’architecture, d’ingénierie architecturale, d’urbanisme (LOCI Bruxelles).

 

La diversité des expertises

Thibault Pirson a encadré le mémoire de Théo Gladsteen, diplômé ingénieur civil, sur l’impact carbone des outils numériques à l’UCLouvain. En 2019, le digital représentait entre 7 et 11 % du bilan global des émissions carbones de l’université, après les déplacements et l’énergie. « Notre travail a également proposé des pistes concrètes pour diminuer les conséquences néfastes du numérique sur l’environnement. Nos recherches nous ont confrontés à d’autres disciplines et corps de métiers. Pouvoir côtoyer de nombreuses personnes qui ont des manières différentes de penser est une force de notre université. La diversité des expertises est une richesse qui mérite d’être davantage valorisée. » A.M.

* Thibault Pirson est doctorant à l’Institute of Information and commmunication Technologies, Electronics and Applied Mathematics (ICTEAM).

 

L'ultra-impliqué

Inspiré par le film ‘Demain’ et par les manifestations étudiantes organisées aux quatre coins du globe, Timothée Lefebvre, 19 ans, a véritablement décidé de s’engager lors du premier confinement. En plus d’intégrer l’Alterékot, un kot-à-projet de Louvainla- Neuve, et l’association The Shifters (qui réfléchit aux questions énergétiques et climatiques), ce chef scout a, par exemple, choisi de devenir végétarien. « Et j’opte, dans la mesure du possible, pour des aliments biologiques ou locaux », explique-til. Membre de la coop’ néolouvaniste Poll’n Coop, cet étudiant de 3e bac en bioingénierie s’inquiète des conséquences des changements climatiques sur le climat, sur la biodiversité mais aussi sur la société elle-même. P.-A. B.

* Timothée Lefebvre est étudiant en 3e bac en bio-ingénierie.

 

Un small private online course

« Plusieurs cours forment déjà les étudiant·es de différentes facultés aux enjeux DD. L’offre sera développée d’ici 2023 », explique Audrey Beghon, attachée au Louvain Learning Lab (LLL). Exemple ? Les étudiant·es pourront suivre un cours en ligne interdisciplinaire d’introduction aux enjeux du développement durable et de la transition : plus de 50 expert·es de diverses disciplines interviennent sur des questions comme le changement climatique, la pauvreté ou l’alimentation. Ce SPOC (Small Private Online Course) sera ensuite accessible à un large public au format MOOC (Massive Open Online Course). Le LLL offre aussi des formations aux enseignant·es qui veulent intégrer une dimension DD dans leur cours. A.M.
> uclouvain.be/lll
* Audrey Beghon est chargée de mission enseignement et transition au Louvain Learning Lab (LLL).

 

« On travaille avec des méthodes de gestion de projet qui permettent d’avoir un meilleur regard sur l’environnement dès le début.C’est une chance : le plan transition vient appuyer et renforcer des efforts qui sont déjà en cours. »
Tatiana de Radzitzky, Service de gestion technique du patrimoine de Woluwe

 

« Le plan transition nous aide à faire bouger les lignes, il nous aide à oser aller un cran plus loin, à réfléchir, à ouvrir des portes et, parfois, à en trouver une autre. »
Nicolas Cordier, directeur du développement urbain et régional de l’UCLouvain (INESU)

 

« On sort de nos zones de confort, de nos boites académiques pour trouver d’autres manières d’envisager le monde, de le transformer. »
Ralph Dekoninck, conseiller du recteur pour la culture

 

« On était déjà un lieu d’action. Maintenant, on est un lieu d’action, avec une vision. Je pense que c’est un peu ça, la définition de la transition. C’est agir, avec une vision. »
Philippe Baret, professeur à la Faculté des bioingénieurs

 

« Il y a déjà des gens qui sont en action à plein d’endroits dans cette université  et l’idéal est de soutenir cette action-là et de l’amplifier. On jugera le plan transition plutôt sur ‘qu’est-ce qu’il va conduire à faire ?’  plutôt que sur ce qui y est écrit. »
Benoit Galand, professeur à la Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation

 

« Si on s’intéresse à une question de recherche et qu’on la regarde sous ses différents angles, sous ses différentes facettes, on va beaucoup plus loin dans son exploration et dans les conclusions qu’on peut obtenir.»
Sandy Tubeuf, professeure à la Faculté de santé publique

 

Article paru dans le Louvain[s] de décembre 2021 - janvier - février 2022