SIDA : adapter le traitement aux mutations du virus

LOUVAINS

L’UCLouvain a acquis un équipement de pointe capable de mieux détecter les mutations du virus de l’immunodéfi cience humaine ou VIH. Une première en Belgique !

Fort heureusement, le SIDA est aujourd’hui une maladie chronique pour laquelle il existe des traitements effi caces. Même si – il ne faut pas l’oublier – on n’en guérit toujours pas : il n’est actuellement pas possible d’éradiquer complètement le VIH de l’organisme des patients contaminés. La trilogie de données à prendre en compte pour traiter la maladie ? Médicament, patient, virus. Chacune ayant son rôle et son importance. Les médicaments actuels (trithérapie) associent au moins deux molécules antivirales de classes différentes. Cependant, même s’ils sont opérants, leurs effets secondaires peuvent être sévères, certaines interactions avec d’autres médicaments sont à éviter et des précautions particulières sont à prendre pour la femme enceinte ou qui souhaite l’être. Le traitement doit donc être adapté en fonction de ces paramètres. Quant aux virus, ils ne restent pas inactifs : certains mutent et deviennent résistants à ces médicaments.

Qualifier les mutations de résistance

« C’est dans ce contexte d’étude de la résistance du virus qu’intervient la plateforme de séquençage de nouvelle génération », explique le Professeur Benoît Kabamba-Mukadi, responsable du laboratoire de référence SIDA de l’UCLouvain. Cette plateforme, première du genre en routine clinique en Belgique, permet de réaliser des séquençages à haut débit du génome viral. C’est-à-dire de déterminer l’ordre d’enchaînement des nucléotides de l’ARN du virus. Cet ordre permet de savoir si le virus a muté et pourrait résister aux médicaments. « La plateforme utilise une technologie plus performante qui offre de nombreux avantages par rapport à celle utilisée jusqu’ici », précise Géraldine Dessilly, docteure en sciences biomédicales et responsable des analyses au sein du laboratoire. « Auparavant, nous pouvions seulement repérer la présence ou l’absence d’une mutation importante. Aujourd’hui, nous pouvons qualifi er et quantifi er les mutations de résistance, préciser même les plus minoritaires. Cela nous permet d’envoyer un rapport de résistance à but d’adapter au mieux la thérapie. »

30 échantillons par mois

Le laboratoire louvaniste reçoit environ 15 échantillons de sang toutes les deux semaines pour cette analyse. Des tests sont effectués systématiquement auprès des patient·es nouvellement infecté·es et chez ceux·elles en échec de traitement (chez qui on constate une croissance de la charge virale). La nouvelle plateforme a permis de déceler une mutation (sur les régions du génome viral impliquées dans la résistance) dans environ 15 à 20 % des nouveaux cas. Et chez près de la moitié des patient·es en échec. Le nouvel outil à la disposition des chercheur·es et clinicien·nes va sans aucun doute permettre d’encore affi ner le choix d’un traitement adapté contre le SIDA.

Henri Depuis
Journaliste freelance

> uclouvain.be/laboratoire-reference-sida

Article paru dans le Louvain[s] de juin-juillet-août 2019