Sortir de l'entre-soi masculin (décembre 2016)

LOUVAINS

Les femmes s'évaporent dans les hautes sphères académiques. Des avancées et des efforts considérables ont été entrepris pour inverser la vapeur, en particulier à l'UCL. Mais les femmes, d'abord elles, s'autocensurent. Plutôt que de partir à l'étranger poursuivre leur carrière académique, elles fondent très souvent une famille au moment où elles terminent de leur doctorat et sortent d'un circuit qu'elles ne pourront jamais rejoindre. Elles ne se reconnaissent pas dans cette conception d'une excellence scientifique incarnée par un ‘héros solitaire’ éloigné des réalités quotidiennes. Les hommes, parce qu'ils sont très majoritaires, ne projettent pas leurs collègues femmes dans une carrière professorale. Le cercle est vicieux. Pour tous. Ce qui défavorise les femmes touche aussi bien des hommes. Les mécanismes qui empêchent les femmes d'accéder aux postes les plus prestigieux désavantagent autant les hommes qui visent désormais de plus en plus l'excellence professionnelle tout en respectant leur vie personnelle et familiale. Courir le monde et décrocher un maximum de publications, à tout prix, avoir un ‘CV bodybuildé’, selon l'expression de Bernard Fusulier (FNRS-UCL) pour décrocher un poste de professeur, c'est obliger hommes comme femmes à adopter une conduite agressive et hyper concurrentielle. Intégrer les femmes, de manière égalitaire, c'est ouvrir la route à de multiples talents qui ne rentrent pas dans les codes habituels, c'est permettre l'innovation. C'est sortir de l'entre-soi. Briser le plafond de verre pour les femmes, c'est décoincer les hommes de leurs parcours obligés. Les universités sont des phares qui éclairent la société. Déguiser l'égalité de genre en distribuant des postes de doctorat sans permettre l'accès équitable aux carrières de professeurs, ne suffira pas à tomber le masque d'un masculinisme inconscient du monde académique.

 

 

 

 

 

Catherine Ernens
Journaliste politique à ‘L’Avenir’