Des leçons que les Européens vont progressivement tirer du Brexit, celle de l’université tient une place toute singulière. Quel sera l’effet du Brexit sur la capacité des universités britanniques à attirer étudiants et chercheurs du continent, quelle sera son incidence sur la diversité, la richesse des campus ? Et partant, dans quelle mesure pourrait-il affecter la vocation globale de ces cathédrales intellectuelles en perpétuelle construction ?
Les questions restent ouvertes en l’absence d’un accord sur les modalités de la séparation et d’un autre sur un contrat de bon voisinage entre l’Union européenne et le Royaume-Uni. Mais elles soulignent déjà une contradiction entre la tentation nationaliste qui s’est emparée de ce pays et la vocation universelle des fleurons de la connaissance.
À l’aube programmée du grand saut, les principales universités britanniques sont en effet au cœur d’un cercle vertueux : leur succès attire des talents, qui augmentent la qualité et la quantité de recherche, qui renforcent la réputation des institutions, qui à son tour attire enseignants, chercheurs et étudiants. Parmi les ingrédients de cette dynamique, des programmes européens que les universités britanniques sont si brillamment parvenues à mettre à profit. Erasmus Plus offre aux étudiants une mobilité dont la valeur est inestimable et les fonds européens de recherche et d'innovation alimentent une mise en réseau unique des efforts de recherche.
En attendant de mesurer pleinement les effets de l’expérience, le laboratoire du Brexit souligne par jeu de miroirs l’importance pour le continent de déployer tout le potentiel de ces outils que l’effacement des barrières européennes ont fait éclore. Et qui doivent encore être renforcés par l’émergence progressive des ‘Universités européennes’. S’y engouffrer, plus que jamais et si possible avec les Britanniques, explorer toutes les ressources de l’effacement des frontières européennes, n’est-ce pas une condition de l’excellence ?
Frédéric Rohart
Journaliste à l’Écho
Article paru dans le Louvain[s] de septembre-octobre-novembre 2019 |