Une université de la deuxième chance

LOUVAINS

Reprendre des études, entamer un master alors qu’on ne dispose pas des titres requis ? C’est possible, grâce à la valorisation des acquis de l’expérience (VAE), que ceux-ci soient professionnels ou personnels. L’UCLouvain a mis en place un important dispositif d’accompagnement tant au cours de la procédure d’introduction de la demande que pendant les études. Intéressé·e ? Renseignez-vous dès à présent. Il faut en effet s’y prendre à temps car la procédure, personnalisée, peut prendre plusieurs mois.

Apparue dans le décret Bologne (2007) et précisée dans le décret paysage (2013), la VAE s’applique à tous les cycles d’études mais principalement au niveau des masters à l’université. L’accompagnement des candidat·es VAE est pris en charge par le personnel de l’UCLouvain (facultés, Centre d'information et d'orientation - CIO - Institut de formation continue - IUFC...) mais notre université bénéficie également d’un renfort financé par le FSE (Fonds social européen).

Un enjeu de démocratisation

VAE. Valorisation des acquis de l’expérience. « C’est une procédure d’admission, explique Anne Grzyb, conseillère et chargée de mission VAE à l’Institut de formation continue de l’UCLouvain (IUFC), mais c’est surtout un enjeu de démocratisation de l’accès à l’enseignement supérieur. » Concrètement, « la VAE donne la possibilité à des personnes qui n’ont pas eu un parcours scolaire classique et qui ont acquis des compétences, professionnelles ou personnelles, de les valoriser. » « C’est bien une université de la 2e chance », se réjouit la chargée de mission qui ajoute que « la démocratisation passe aussi par la possibilité de suivre les cours en horaire décalé et adapté sur différents sites. » *

Prouver l'expérience acquise

Anne Grzyb insiste : « La VAE ne se limite pas à une autorisation d’inscription, c’est une procédure personnalisée qui peut prendre plusieurs mois. » L’épreuve d’évaluation des acquis comprend un dossier d’admission avec les preuves de l’expérience acquise en lien avec la formation envisagée – des contrats, des productions propres, les traces d’une activité bénévole… – mais peut aussi être complétée par un examen écrit et/ou oral. « Pour le demandeur, c’est une façon de relire son expérience », souligne la conseillère. Pour l’université, c’est un vrai défi. Il faut notamment accompagner les candidat·es dès la procédure et pendant les études. « Tous les adultes ne viennent pas avec une idée précise », explique Anne Grzyb. L’UCLouvain organise notamment des ateliers ‘Lego’ avec le Centre d’information et d’orientation (CIO) pour aider les personnes à construire leur projet, très en amont de l’admission. Au total, près de 50 personnes apportent leur concours à la VAE à l’UCLouvain.

Le diplôme, un levier

Une enquête menée en 2018 indique que les intéressé·es choisissent l’UCLouvain pour la qualité de l’accompagnement avant et pendant les études, la qualité de l’accueil, l’offre de formation (16 masters en horaire décalé ou adapté, sur trois sites, et 8 masters de spécialisation). Il faut dire que, dès les années 1970, l’université a acquis une expertise dans la formation des adultes, avec la FOPES (Faculté ouverte de politique économique et sociale) et la FOPA (master en sciences de l’éducation). Aujourd’hui, un peu moins de 10 % des étudiants VAE sont demandeurs d’emploi. « On tente d’élargir ce groupe en collaboration avec Actiris car on sait qu’un diplôme est un levier d’évolution personnelle, professionnelle et de remise à l’emploi », conclut Anne Grzyb.

Dominique Hoebeke
Cheffe info UCLoucain

* L’UCLouvain est implantée à Louvain-la-Neuve, Bruxelles (Woluwe-Saint-Lambert et Saint- Gilles), Mons, Tournai, Charleroi et Namur.

> uclouvain.be/fr/etudier/vae

Informer les demandeuses et les demandeurs d'emploi

Conseillères psychologues au Service Guidance Recherche Active d’Emploi d’Actiris (GRAE), Marcia Astudillo et Sonia Pierre collaborent avec l’UCLouvain et l’UMons pour promouvoir la VAE auprès des demandeurs d’emploi. « C’est très important, car en facilitant l’accès des chercheurs d’emploi aux études supérieures universitaires et non universitaires, ce dispositif augmente leurs chances de réinsertion professionnelle », explique Marcia. « Chaque année, deux séances d’information sont destinées, l’une à l’intention des chercheurs d’emploi, l’autre pour les professionnels de l’insertion socio-professionnelle. » Actiris présente les spécificités et les démarches nécessaires pour les personnes au chômage tandis que l’UCLouvain présente le dispositif VAE et son contenu. « La procédure VAE est complexe et diffère selon les régions », poursuit Sonia. « Elle est applicable à tout type d’enseignement supérieur, mais elle est plus ou moins bien intégrée selon les établissements ou les filières. » Outre la possibilité de donner des informations précises et des témoignages grâce à la présence des universités, ces séances permettent parfois de débloquer des situations individuelles.

Une certitude ? Le meilleur moyen d’atteindre les personnes visées est de toucher tous les services par lesquels passent les demandeurs d’emploi. La plupart n’avaient jamais entendu parler du dispositif VAE. « Beaucoup sont âgés d’une quarantaine d’années, ont déjà un bagage et se trouvent à un moment de bilan. Ce sont parfois des personnes qui ont appris sur le tas, ont progressé mais qui ne peuvent évoluer ou être reconnues, faute de diplôme. D’autres doivent se réorienter pour des raisons médicales, par exemple une infirmière qui fait un master en santé publique. Il s’agit de gens curieux, volontaires, qui veulent avancer dans leur profession », soulignent les deux conseillères.

Il ne suffit toutefois pas d’avoir envie de reprendre des études, il faut aussi évaluer l’investissement que cela représente pour la vie de famille et sur le plan financier. « Étudier quand on est adulte peut être lourd et représenter des années de sacrifice. Mais celles et ceux qui y arrivent éprouvent un sentiment de fierté et de réalisation de soi intense », insiste Marcia Astudillo. D.H.

Les prochaines séances d’informations se dérouleront le 2 avril 2020.

> www.actiris.be

Une légitimité tant recherchée

Après une première année d’université inachevée et un bachelier d’architecture d’intérieur obtenu à l’Institut Saint-Luc, Pascale Vankiel a 25 ans lorsqu’elle se lance comme indépendante. À l’aube de ses 30 ans, la jeune femme fait pourtant le choix d’un changement professionnel radical et obtient un poste de secrétaire de direction dans une première école secondaire avant d’en rejoindre une autre à Schaerbeek dix ans plus tard. Bien intégrée, elle ne se considère pourtant pas comme une professionnelle de l’enseignement. Il y a un an et demi, sa curiosité la conduit à une séance d’information concernant un master en sciences de l'éducation à l’issue de laquelle elle se dit : « et pourquoi pas moi ? ». Après un examen d’entrée et un entretien oral réussis, l’étudiante de 57 ans se lance et se donne jusqu’à Noël pour voir si elle en est vraiment capable. Sans attente, la réussite lui sourit et l’intérêt prend très vite le pas sur la curiosité des débuts.

L'âge n'est pas un frein

L’accès à ce master, Pascale le reconnaît, elle le doit pleinement à la valorisation de ses années d’expérience professionnelle. Une véritable opportunité d’évolution professionnelle mais aussi et surtout, la chance d’obtenir la légitimité tant recherchée dans son travail. « L’âge ne doit pas être un frein ou un handicap », insiste Pascale, la plus âgée de l’auditoire, « l’enrichissement personnel justifie amplement une reprise de formation ». Bien qu’elle ait dû modifier son temps de travail, revoir son budget et apprendre à concilier une vie familiale avec des études, elle le sait, elle a désormais le bagage nécessaire pour voir plus loin et pourquoi pas s’investir bénévolement après sa carrière dans des organismes socio-éducatifs.

Natalia Paschenko
Communication web

QUEL PROFIL ?

Quel est le profil des étudiant·es VAE ? 57,7 % sont des femmes, 42,3 % des hommes.
14,4 % ont moins de 30 ans, 38 % ont entre 31 et 40 ans, 35,1 % ont entre 41 et 50 ans, 12,5 % ont plus de 50 ans.
23 % travaillent dans le secteur de la santé, 20,9 % dans l’administration publique, 14 % dans l’éducation et la formation, 6,8 % dans les banques et les assurances.
23 % suivent un master en santé publique, 22 % en politique économique et sociale, 10 % en sciences de gestion, 10 % en sciences de l’éducation, 8 % en sciences du travail, 5 % en communication et 22 % suivent d’autres masters.

Équipé pour affronter l'avenir

Nicolas Hanquet termine un bachelier en éducation spécialisée en 2009. Après 6 ans en tant qu’éducateur et quelques formations dans le social, il entame des cours du soir en langue des signes de Belgique francophone (LFSB) alors qu’aucune formation pour devenir interprète LFSB n’est encore disponible dans le pays. Il travaille ensuite comme interprète en milieu scolaire. Très vite, il entend parler de la création d’un bachelier en interprétation et traduction à Marie Haps (Saint-Louis). Hésitant, il envisage un étalement de son cursus mais craint la durée d’une telle reprise d’études et c’est soulagé qu’il découvre, en 2017, le programme de valorisation des acquis d’expérience et comprend qu’il peut enfin accéder au master tant convoité. Enthousiaste, il remplit son dossier dès le mois de février et après un entretien oral convaincant, ses 5 années d’expérience sont validées et les portes du master en interprétation bidirectionnelle français/LSFB s’ouvrent enfin à lui.

Interprète de liaison

Motivé, le jeune homme y voit l’opportunité d’entamer un nouveau projet de vie professionnelle en devenant interprète de liaison (interprétation en milieu médical, social, juridique, etc.), un domaine auquel il avait renoncé faute de l’outillage et des compétences nécessaires.

Bien qu’épuisé par un travail mi-temps couplé à un programme d’étude complet et la remise en question permanente de ses pratiques passées, Nicolas se sent enfin équipé pour affronter l’avenir et les défis qui relèvent de l’interprétation. Le jeune homme de 34 ans espère que les pratiques, nées de parcours de vie différents, tendront enfin à s’harmoniser et que des projets communs pourront naître du brassage d’expériences et de générations. N.P.

Dans le cadre de ses missions d'aide à la réussite et d'aide sociale, l'UCLouvain FUCaM Mons organise, dès janvier (phase test), un service de garde d'enfants le samedi matin afin de soutenir les étudiant·es qui ont cours au même moment.

« Plus jamais à l'école ? »

Des études secondaires réussies, une première année d’université ‘test’ avant un bachelier en arts plastiques à Saint-Luc : Aline Rolis débute comme professeure de dessin dans l’enseignement spécialisé en obtenant un certificat d’aptitudes pédagogiques dans la foulée, « comme toute bonne bachelière en art qui ne souhaite pas être au chômage », rigole-t-elle. Là, c’est la douche froide, elle ne se reconnaît absolument pas dans la rigidité de l’enseignement. Elle participe ensuite, en tant qu’illustratrice, au magazine Axelle (Vie Féminine), son premier contact officiel avec le monde féministe. La jeune femme s’instruit de manière sporadique au travers, entres autres, de la littérature féministe, et se jure une seule chose : « plus jamais à l’école ».

Rapports de domination

C’était sans compter sur le master en études de genre qui démarre en Belgique francophone. Aline accède alors au programme de la VAE qui lui permet d’entamer ce master motivée, au-delà du questionnement homme-femme, par l’intérêt qu’elle porte aux rapports de domination valides et invalides qu’elle avait déjà pu repérer sur le terrain, forte de ses 10 années d’expérience en tant qu’éducatrice spécialisée… La voilà qui prend goût aux bancs de l’école alors que la naissance d’un nouvel enfant lui apporte nombre de défis supplémentaires, même si elle peut compter sur la présence bienveillante de sa famille. Maman et étudiante, elle se heurte également à l’une de ses plus grandes angoisses : la prise de parole en public, un exercice auquel elle finit par s’habituer. « Ce travail est celui qui m’a le plus apporté car j’étais une grande angoissée», précise-t-elle. Au-delà de dépasser ses propres limites à tout point de vue, ce master en genre lui a offert de nouvelles perspectives professionnelles comme l’écriture et une redirection vers l’éducation permanente. Une envie plus qu’affirmée d’interroger la norme et de porter un regard critique sur la société tout en proposant des solutions un peu marginales. N.P.

Article paru dans le Louvain[s] de décembre 2019 - janvier-février 2020