Une marée noire pourrait couper le robinet du gaz et exacerber la crise énergétique mondiale

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Communiqué de presse - Recherche UCLouvain

En bref :

  • Des scientifiques UCLouvain ont mis en évidence la vulnérabilité du Qatar aux marées noires, qui mettraient en péril l’approvisionnement en gaz naturel liquéfié
  • Cette vulnérabilité pourrait exacerber la crise énergétique globale et mettre en péril l’approvisionnement du Qatar en eau potable
  • 15% des eaux territoriales qatariennes, identifiées par les scientifiques UCLouvain, doivent faire l’objet d’une surveillance prioritaire
  • En 2021, 21% du gaz exporté par le Qatar a été importé en Europe.

Lien vers l’article : https://doi.org/10.1038/s41893-022-01037-w ou https://rdcu.be/c3i4u

Contact(s) presse : Emmanuel Hanert, professeur de modélisation environnementale à l’UCLouvain : gsm sur demande

L’invasion de l’Ukraine par la Russie a profondément déstabilisé les chaines d’approvisionnement énergétique. L’Europe, qui importait près de 40% de son gaz de Russie, a dû trouver, dans l’urgence, d’autres sources d’approvisionnement. Le gaz naturel liquéfié (GNL) produit par le Qatar pourrait remplacer une partie du gaz russe. Les exportations de GNL qatarien pourraient augmenter de 63% d’ici à 2027 pour répondre à cette demande.

Dans une étude publiée dans la revue Nature Sustainability, une équipe de scientifiques de l’UCLouvain et du Qatar Environment & Energy Research Institute (QEERI), emmenée par Emmanuel Hanert, a cependant montré que les exportations de gaz du Qatar sont très vulnérables aux nappes de pétrole dans le Golfe Persique. Ces dernières pourraient complètement mettre à l’arrêt les exportations de GNL du premier producteur mondial.

L’équipe UCLouvain a simulé la dynamique d’un ensemble de nappes de pétrole durant une période de 5 ans. Cela lui a permis d’identifier une zone, couvrant environ 15% des eaux territoriales qatariennes, particulièrement sensible.  Au sein de cette zone, une nappe de pétrole a de fortes probabilités d’atteindre soit le principal terminal gazier du Qatar, d’où part l’intégralité des exportations de GNL, soit une des trois stations de désalinisation du Qatar.

La vulnérabilité du Qatar aux marées noires est exacerbée par sa dépendance à la désalinisation de l’eau de mer pour assurer sa production d’eau potable, dont les réserves équivalent à un peu plus de deux jours de consommation. En cas de marée noire, les autorités mettront tout en œuvre pour éviter que le pétrole n’atteigne les stations de désalinisation, dont une produisant 30% de l’eau de consommation du pays se trouve juste à côté du principal terminal gazier. Les mesures de lutte contre une marée noire, comme les barrages flottants, pourraient perturber les exportations de GNL depuis ce terminal.

Pour éviter de mettre en péril l’approvisionnement européen en gaz, les scientifiques UCLouvain et QEERI recommandent une surveillance étroite de cette zone afin de détecter aussi tôt que possible toute nappe de pétrole et mettre en œuvre rapidement des mesures de lutte contre la pollution.

Quelques chiffres :

  • 106,8 milliards de m³ : la production annuelle de GNL exportée par le Qatar en 2021. Cette capacité devrait passer à 174 milliards de m³ en 2027.
  • 21% du gaz exporté par le Qatar en 2021 a été importé en Europe.
  • La Belgique importe la majorité de son GNL auprès du Qatar : 3,2 milliards de m³ sur un total d’importations belges de 5,5 milliards de m³ (chiffres 2021).
  • Chaque jour d’arrêt des exportations du Qatar correspondrait à 6 jours de consommation en Belgique. Tout le gaz consommé en Belgique sur un an (qui n’est pas que du GNL) correspond à environ 1/6 du gaz exporté par le Qatar.

Publié le 19 janvier 2023