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Muriel Pic, qui est à la fois chercheuse (à l’Université de Berne) et écrivaine, est une autrice qui écrit à partir de documents et qui, plus spécifiquement, compose des élégies documentaires. Cette formule qu’elle a forgée renvoie au titre d’un de ses livres (paru en 2016), dans lequel il est question de stimuler et faire palpiter « l’oeil vivant du passé » à travers une « expérience lyrique, atmosphérique, élémentaire des documents » où les signes « se multiplient, les traces deviennent présages ». Il s’agira ainsi de creuser cette oeuvre inspirée et basée sur de multiples archives, autant intimes qu’historicoculturelles, qui sont vécues comme des entités erratiques, fluides, multiples. L’on s’arrêtera notamment sur son étonnant et hétéroclite essai En regardant le sang des bêtes (2017) qui active un fil de mémoire sémantique à partir du court-métrage de Georges Franju (Le sang des bêtes), appréhendé comme un artefact ouvert à qui Pic offre un nouveau régime de visibilité. On évoquera aussi Affranchissements (2020), ce « livreerrance » structuré en six parties qui déploie un récit délinéaire, truffé de matériaux visuels (une cinquantaine), et où tout part « du grimoire magique d’un album de timbres » (p. 71) et d’une « dette à rembourser ». Ces deux ouvrages rendent compte de la poétique du montage mise sur pied par Pic qui lui permet de construire une investigation multidimensionnelle innovante, aux très nombreux interstices.