Sorores. Les religieuses non cloîtrées en Europe du Sud, XIIe-XVIIIe siècles.

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Sorores. Les religieuses non cloîtrées en Europe du Sud, XIIe-XVIIIe siècles.

Les béguines sont à la mode : on ne compte plus les sites internet ou les livres romancés qui leurs sont dédiés. Mais qui sont-elles ? En faire des féministes avant l’heure ne correspond pas à une approche historique du sujet. Cet engouement révèle néanmoins que le schéma binaire longtemps admis sur la condition féminine du passé, le cloître ou le foyer, aut virum aut murum, n’est pas autre chose qu’un idéal normatif. Les béguines ne sont que la pointe d’un « iceberg », celui de la vie féminine religieuse non cloîtrée. Alors que le monde contemporain revendique à la fois l’abandon des « statuts » et « états » de vie des femmes, la fluidité des conditions sociales ainsi que la liberté de la pratique religieuse, les expériences variées, complexes et surtout nombreuses des religieuses non cloîtrées permettent de jeter un regard sur le long terme, entre Moyen Âge et Époque Moderne, sur les modes de vie et de religiosité au féminin et leurs adaptations aux différents contextes. Sorores entend revisiter l’histoire religieuse au féminin afin de montrer la richesse et la diversité des voies alternatives – ni cloître, ni mariage – créées et adoptées par les femmes tout au long de l’histoire du Christianisme.

Trois objectifs fondamentaux sont au cœur du projet Sorores. (1) La définition d’une nouvelle approche historiographique du sujet. Il est désormais certain que les religieuses non cloîtrées n’appartenaient pas à des groupes marginaux, n’étaient pas foncièrement liées aux hérétiques, et ne regroupaient pas simplement des femmes « surnuméraires ». Ces clichés anciens sont pour l’essentiel liés au crédit accordé aux documents cléricaux qui ont souvent critiqué vertement ces groupes difficilement contrôlables. Le poids d’une historiographie érudite essentiellement faite par les religieux appartenant à des ordres précis a aussi pesé sur l’histoire des mulieres religiosae : en donnant un relief prépondérant aux structures institutionnelles des ordres religieux, elle a fait, par contraste, des béguines, bizzoche et autres beatas des marginales et/ou des groupes essentiellement destinés à être « régularisés » par une intégration dans un ordre religieux. Il est donc impératif d’inscrire ces religieuses dans une longue durée, de façon distincte de l’histoire des ordres religieux. (2) La mise en valeur de nouvelles sources pour l’histoire des religieuses non cloîtrées. Cette volonté de renouvellement historiographique doit donc passer par l’étude et la publication de nouveaux corpus de sources qui viendront contrebalancer les sources institutionnelles habituellement mises en valeur. (3) La création d’un groupe de recherche international à même de fédérer des recherches pour l’instant réalisées indépendamment les unes des autres. Il est aujourd’hui indispensable d’adopter un regard d’ensemble sur ce phénomène, ce qui n’a encore jamais été fait.

Sorores entend rejoindre ces objectifs à travers trois axes de travail développés de manière contemporaines. (1) Mener un ample chantier collaboratif de recherche, sur des ensembles documentaires ciblés pour leur exceptionnalité et le peu de travaux qui les ont mis en valeur. (2) Offrir une série de communications et de publications adressées à la communauté scientifique. Ces recherches permettront de formuler de nouvelles propositions et hypothèses, qui seront diffusés à la communauté scientifique à travers trois colloques internationaux en 2024 à Madrid (Casa de Velázquez), puis en 2025 à Montréal (UQAM) et en 2026 à Rome (École française de Rome). (3) Créer des outils permettant l’enseignement et la diffusion des résultats de recherche aux étudiants universitaires et au grand public. Pour accompagner la production historiographique, une série d’initiatives de formation sont prévues : l’édition de sources représentatives de l’histoire des femmes religieuses non cloîtrées complétera les publications; une école d’été sur le thème de l’édition numérique sera organisée à l’été 2023, et un programme de séminaires de recherche insérée dans le cursus des masterants et doctorants des universités et instituts membres permettra l’approfondissement des travaux en cours de Sorores.

Sorores est financé par l’École française de Rome et la Casa de Velazquez, et est supporté par douze universités membres. Pour en savoir plus sur le projet, les partenaires et la programmation

Publié le 27 octobre 2022