Séminaire de recherche en méthodologie

Séminaire sur la découverte des méthodes de recherche empirique en droit - 17 et 18 mai 2022 (Ferme de Risbart)

Animé par Dan Kaminski (co-président du CRID&P), le séminaire consacré à la « recherche empirique en droit » s’adressait à tout.es chercheur.es, doctorant.es, professeur.es de la faculté de droit et de criminologie ainsi qu'à des étudiant.es en cours de réalisation de leur mémoire.

Méthodologie

 

Objectifs

  • Susciter l’intérêt pour une recherche en droit qui puisse être informée par des techniques de récolte et d’analyse de données empiriques ;
  • Fournir des bases utiles à la problématisation et à la récolte et l’analyse de données qualitatives ;
  • Discuter avec les participant.es des questions qu’ils se posent dans le cadre de leurs propres recherches.

Contenu

  • Aspects théorico-méthodologiques de la recherche empirique
  • La problématisation, le tracé de la recherche, l’échantillonnage, les techniques de récolte de données…
  • L’analyse et la production théorique

Quelques retours

Témoignage de Marie Jadoul 

C’est avec le projet en tête de rendre ma recherche doctorale « la plus vivante » ou « en relief » possible que je me suis rendue au séminaire relatif à la recherche empirique en droit organisé par Dan Kaminski et Thierry Moreau les 17 et 18 mai 2022. C’est aussi avec un certain nombre de questions et de doutes, un brin d’impatience et une envie d’apprendre, de découvrir et d’échanger avec d’autres chercheurs et chercheuses que j’ai déposé mes affaires sur les tables qui nous attendaient le matin du 17 mai.

Je n’ai pas été déçue. Loin de là. Toutes mes attentes ont été comblées, et toutes celles que je n’avais pas également ! Le tout au sein d’un endroit magnifique, la Ferme de Sart-Risbart, lieu propice au calme, aux balades et à la réflexion, et avec une prise de parole/ un accompagnement de Dan Kaminski et Thierry Moreau invitant au partage et à la bienveillance entre chercheuses, chercheurs, étudiant.e.s, professeur.e.s, assistant.e.s d’ici ou d’ailleurs.

La première journée de séminaire nous a permis de mieux comprendre à quoi correspondait (ou ne correspondait pas) la méthode de recherche empirique en droit. Nous avons mis « le droit à sa place » : comment, en effet, se pencher sur un problème « vivant » en pensant que seul le droit peut y répondre ? Au contraire, le droit est un outil parmi d’autres et la recherche empirique en droit nous emmène sur le chemin de l’explication de l’écart entre le law in books et le law in action mais ne tente pas de les rapprocher. Elle nous invite à développer une pensée conjonctive (et) plutôt que disjonctive (ou), partant du principe que la « vie réelle » est multiple. Au cœur de la recherche empirique en droit, il y a en effet le souci d’expliquer la place/ les causes/ le rôle/ la fonction/ le sens/ la transformation du réel,… avant le souci d’absolument résoudre celui-ci.

« Mais est-ce réellement du droit » ? Oui. Cette méthode s’intéresse au droit « pour contribuer au droit » (et non à la sociologie, comme le fait la sociologie du droit). En réalité, on importe en droit, des méthodes de recherche issues des sciences sociales et cela permet de donner au droit une teneur et un relief particuliers. Cette méthode de recherche nous invite à mieux comprendre la nature et la logique des acteurs et actrices du droit.

La seconde journée de séminaire a davantage été consacrée à la méthodologie au sens strict. Elle nous a permis de répondre à plusieurs questions qui ont émergé peu à peu au sein de notre collectif : Comment mener un entretien et selon quelle(s) stratégie(s) ? Comment procéder à son échantillonnage pour parvenir à une diversification et à une saturation de ses données ? Doit-on respecter les règles de confidentialité et d’anonymat des personnes interviewées ? Etc.

Elle a également été consacrée à l’analyse des données sur la base de la théorisation ancrée (grounded theory). En effet, lorsque l’on mène des entretiens, que l’on met en place des focus-groups ou de l’observation participante dans le cadre d’une recherche, cela nous permet de recueillir une série de données. Mais comment analyser celles-ci, en assurant que notre démarche soit « valide » et « légitime » pour nos pairs, « car analyser c’est décider » … ?

C’est à ces questions, et à bien d’autres encore, que nos échanges lors de ce séminaire ont permis de répondre. Une grande place a été laissée aux participant.e.s et à leurs questions. Dan et Thierry, que je remercie encore vivement, nous ont permis d’aller de l’avant, d’oser franchir la porte de la recherche empirique en droit, dans le respect, la curiosité et les échanges collectifs. A quand le prochain séminaire pour prolonger nos échanges ? Je m’y inscris les yeux fermés.

Témoignage de Léa Teper

Un grand écrin de liberté, de l’espace intellectuel, et du rire aussi. Voici les premiers mots que m’ont inspiré le séminaire réalisé sous la direction de Dan Kaminski et Thierry Moreau en mai 2022.

Sur la forme, tout y était : un orateur judicieux et à l’écoute, des chercheurs de tous horizons autour de la table (étudiants, assistants et professeurs, de Belgique et d’ailleurs), un cadre de verdure pour des promenades-rencontres-débats, et même un très grand arbre à l’ombre duquel les dernières discussions ont pu avoir lieu. Sur le fond, le séminaire a marqué et convaincu, si l’on en croit les nombreuses questions qui ont émergées tout au long des deux journées passées ensemble et les multiples partages d’expériences.

En guise de préambule, Dan Kaminski a tenu à nous montrer ce qu’une recherche empirique en droit n’était pas. On en tirera trois grands enseignements : la recherche empirique en droit n’est pas obligatoire, ce n’est pas de la sociologie du droit, ce n’est pas spécifiquement une recherche sur la pratique du droit. Nous avons ensuite longuement parlé de la pertinence du droit mort face à des enjeux de vie. Au détour de ces questionnements, nous nous sommes très vite rendus compte que nos projets s’articulaient tous autour des notions d’exceptionnalité, d’urgence et d’aveuglement, signes par excellence d’un besoin de sens et de vivant. La première journée de séminaire nous a donné envie de travailler autrement sur l’explication des écarts entre la norme et son application, le droit n’étant qu’une variable dans la détermination des pratiques, un outil d’orientation.

Les explications qui ont suivi portaient davantage sur la méthodologie au sens strict. Il nous est apparu clairement pourquoi le passage entre l’objet et le projet demande de trouver une question et d’y répondre ; et comment la méthodologie se transforme au fil de l’étude. On s’est surpris à s’imaginer tantôt chercheur-scholar (la science pour la science), tantôt chercheur-bureaucrate (qui cherche à des fins pratiques), tantôt chercheur-militant (qui souhaite faire avancer une cause), tantôt un mixte des trois catégories. On s’est interrogés sur ce qui motivait nos recherches, et sur la manière de le présenter aux autres. Dan nous a convaincus sur la pertinence de la recherche qualitative : plus l’échelle est petite sans être dommageable pour la pertinence de la recherche, mieux c’est. Dan nous a alors transmis une partie de son savoir sur l’entretien, directif semi-directif et non directif, et sur l’analyse. Les dernières heures de la deuxième journée de séminaire ont terminé sur des discussions sur les manières d’analyser et précisément sur la grounded theory, qui a généré beaucoup de questions chez les participants.

Au-delà de ces apports théoriques, ces deux journées de séminaires étaient riches en rencontres et en découvertes en tout genre. En réfléchissant autour de la question de la recherche empirique en droit, nous avons échangé sur les projets originaux et intéressants de toutes les personnes autour de la table. Sans nous en rendre compte, nous avons exploité les savoirs de tout un chacun, et avons laissé libre court à notre imagination à des fins intellectuelles. Si l’on ajoute à cela la beauté des lieux, le séminaire ne pouvait qu’apaiser, et vivifier. Et n’était-ce pas là, finalement, le vrai objectif : rendre le droit vivant ?