14 février 2023
12h45 - 14h00
Mardi intime de la Chaire Hoover par Christophe Point
Docteur en philosophie de l'éducation, Professeur à l'Université de Sherbrooke
Qu’est-ce qui nous prouve que la démocratie est un modèle d’organisation politique plus légitime que les autres ? A cette question, certaines réponses peuvent appartenir au champ de l’éthique (délibérer ensemble est plus juste, chacun a le droit de participer à des lois, etc.) et d’autres appartiennent au domaine de l’épistémologie (la prise de décision est-elle plus efficace ? Les choix sont-ils meilleurs ? Les citoyens sont-ils aptes à se prononcer ? etc.). Ainsi les théories épistémiques en faveur de la démocratie tentent de justifier cette dernière en élaborant des arguments prouvant sa supériorité « intellectuelle » sur les autres modèles d’organisation (tyrannie, oligarchie, populisme, technocratie, etc.). Or, pour cette démarche, la tradition philosophique occidentale n’est pas vraiment une alliée.
En effet, depuis Platon jusqu’à Tocqueville en passant par Locke ou Kant, les philosophes ont plutôt eu tendance à se méfier de la démocratie comme règne des ignorants, de la foule imbécile, du béhémot populaire et à lui préférer la figure du roi-philosophe, du conseil des sages ou encore la république « éclairée » des intellectuels.
Cependant l’autre côté de l’Atlantique, John Dewey travailla, à la fois sur le terrain de la politique et de l’éducation, à questionner cette « évidence » de la tradition philosophique. Le pragmatisme peut ainsi être considéré dès le début du XXème siècle, comme un courant philosophique américain promouvant avec ferveur la nécessité mutuelle et complémentaire de l’éducation et de la démocratie. Dans cette perspective on peut considérer la communauté de recherche philosophique (CRP) comme un outil pédagogique « inventé » par Matthew Lipman pour continuer le travail philosophique de John Dewey. D’où notre question : En quoi les CRP prouvent-elles, par leur pratique, la supériorité épistémique de la démocratie ?