WORKVID-19 : quand le travail s’invite dans la sphère privée

En mars 2020, la pandémie de COVID-19 figeait nos sociétés, amenant ceux dont la fonction pouvait s’y prêter au télétravail imposé. Près de 62 % de la population active belge s’est retrouvée en télétravail, contre environ 20 % avant la crise sanitaire. Mais comment cela a-t-il marqué les organisations, leur management et les personnes ? 

La crise sanitaire et les mesures de confinement qui ont été mises en oeuvre ont brutalement imposé le télétravail comme la règle à tous les salariés qui étaient en mesure de pouvoir exercer leur métier à distance. C’est ainsi que les salariés se sont retrouvés isolés professionnellement à leur domicile pour pouvoir poursuivre leur activité professionnelle. 

L’objectif du projet WORKVID, initié par Laurent Taskin, professeur à la Louvain School of Management et expert en management humain et nouvelles formes d’organisation, est de questionner et de comprendre les effets de cette pratique du télétravail sur le rapport au travail, en investiguant trois dimensions particulières : la territorialité, la relation managériale et l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Prenant place dans le contexte de confinement, puis de déconfinement, avec les incertitudes prévalant tout au long de la période investiguée, la recherche identifie les éléments qui influencent le rapport au travail et sa reconfiguration, à distance, au cours du temps. Cette recherche, menée durant deux années, s’est d’abord concentrée sur le recueil du vécu des travailleurs par rapport à ces trois dimensions et via un recueil de données innovant (tous les quinze jours environ, par carnets de bord auto-administrés et entretiens) et ensuite sur l’analyse de ces différents témoignages. 

Les résultats obtenus 

Le Pr Taskin et son équipe de recherche, Stéphanie Coster, Michel Ajzen et Laurianne Terlinden, ont mis en évidence une configuration spatiale commune pour les personnes interrogées : l’installation du poste de travail dans la salle à manger. Le choix d’investir ce lieu repose sur des raisons logistiques, des raisons de confort et de bien-être ou encore le manque de place au sein de l’habitation. Au niveau du management et de la gestion des équipes, les résultats ont pointé un recours massif à la communication synchrone, renforçant ainsi le sentiment d’hyperdisponibilité, mais aussi un besoin de coordination des équipes plus fort, un surinvestissement de la part du manager pour garder le contact avec les équipes et la mise en place de formes alternatives de contrôle à distance. Enfin, concernant l’équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle, l’analyse a mis en évidence un chevauchement constant des différents temps de vie. À côté de cela, il ressort une grande flexibilité horaire et la mise en place de nouveaux rythmes de travail, mais aussi une intensification du temps et de la charge de travail. Ces différentes données ont montré que le contexte de la crise et les bouleversements que cela avait provoqué ont soulevé de nombreux questionnements sur le sens et la place du travail. 

Cette recherche a pu être menée grâce aux fonds récoltés dans le cadre de la campagne COVID-19. 

Publié le 15 décembre 2022