Discours du président du Conseil d'Administration, Jean Hilgers

EVENTS

Rentrée académique 2022-2023

jean hilgers

Monsieur le Cardinal, Messeigneurs,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Excellence, Mesdames et Messieurs les Bourgmestres,
Mesdames les rectrices, Messieurs les recteurs, ou leurs représentants
Mesdames et Messieurs,
Chères étudiantes, chers étudiantes, chères et chers amis

À mon tour de vous souhaiter la bienvenue, à l’occasion de cette rentrée académique qui, après deux années d’incertitudes et de repli liées à la pandémie, nous place à l’aube de nombreux défis.
Avant de passer en revue ceux d’entre eux qui concernent le plus directement notre université, j’aimerais revenir brièvement sur certains éléments importants qui ont marqué l’année écoulée et qui devraient assez largement influencer ce début d’année.

À peine le déconfinement acté, l’Europe et le monde ont été secoués par la guerre en Ukraine. Au-delà des horreurs qui y sont inhérentes, ce conflit a amené un flux – certes raisonnable- de réfugiés dans notre pays ; à son échelle, la communauté universitaire a contribué activement à cet accueil, au travers de son programme Access2University et aussi la disponibilité de ses membres, pour offrir aux réfugiés des pistes de reconstruction personnelle au travers l’accueil, l’accompagnement, la formation et la recherche. Bref, ce que nous faisons de mieux.Cette guerre a aussi exacerbé, à une échelle plus large cette fois, des pressions inflationnistes que nous n’avons plus connu depuis plus de 40 ans et qui impactent notre environnement économique et financier.  Nous devrons y rester attentifs dans la mesure où elles pourraient également influencer nos moyens d’action à l’avenir.

Cette année académique sera également celle de l’aboutissement de la réforme du décret paysage , initiée par notre Ministre de l’enseignement supérieur et largement débattue durant l’année écoulée. Même si elle nécessitera des moyens pour sa mise en œuvre, elle était largement attendue et me parais correspondre très largement aux besoins des universités, en ce qu’elle clarifiera et simplifiera le parcours d’étudiants et qu’elle stimulera une gestion adéquate par chaque étudiant ou étudiante de son année d’étude.

Dans un tout autre contexte et dans des proportions évidemment sans comparaison, notre université a été, ces derniers mois, assez bien secouée par des accusations visant des faits de harcèlement insuffisamment traités. Ces types d’agissements, attentatoires à la dignité et au bien-être des personnes, ne sont malheureusement pas inconnus d’organisations comme la nôtre. 
Néanmoins, l’UClouvain vit un moment particulier de libération de la parole par rapport à des faits – même anciens, qui n’ont pas droit de cité en son sein. Ceci prouve- et c’est positif, que des souffrances peuvent s’exprimer et espérer, ainsi, reconnaissance voire réparation.

L’inévitable médiatisation de ces drames humains a aussi malheureusement quelques fois engendré aussi son lot de généralisations abusives voire outrancières ou malveillantes. On doit le regretter.
Néanmoins, notre université doit aussi se regarder dans le miroir.  Nous avons le devoir juridique et moral de traiter les plaintes avec le plus grand sérieux et de le faire dans le respect des droits fondamentaux des personnes. Et, elle doit donc trouver, sans doute plus vite que prévu, une réponse globale à ces questions axées sur des actions de temporalités différentes.

Ainsi, à court terme et dans le respect des prérogatives des partenaires sociaux (je songe notamment au CPPT), l’UCLouvain a déjà objectivé certaines faiblesses dans son fonctionnement et a entrepris de nombreuses mesures correctrices. Pour vous en citer deux exemples:

  • La cellule Together, déjà existante, a été renforcée, pour donner plus de place à l’accompagnement des victimes, essentiel quand vient une plainte, fondée ou pas, en lien avec des faits d’agression ou de harcèlement.
  • Des formations et sensibilisations spécifiques sont maintenant accessibles à tous les étudiantes. Elles le seront dès cette année pour les membres du personnel, en commençant par les personnes détentrices d’une autorité.

A côté de cela, une commission indépendante a été mise sur pied, sous la direction de la professeure Françoise Tulkens, ancienne VP de la cour européenne des droits de l’homme, pour formuler des propositions concrètes visant à ancrer plus profondément la prévention et le traitement des faits de harcèlement dans le fonctionnement et la gouvernance de notre Université. Ce rapport est annoncé pour le printemps prochain, même si certaines mesures d’application plus immédiates ont déjà été proposées par la commission. De son côté le conseil d’administration a déjà réservé certains moyens financiers pour assurer la mise en œuvre des recommandations à venir. Je peux vous dire qu’on y veillera. 

L'année qui débute s’annonce également riche en enjeux importants pour le monde universitaire en général et pour l’UCLouvain, en particulier.

En matière d’enseignement, le constat ne semble plus faire de doute : la crise du Covid a révélé, comme jamais auparavant, les enjeux pédagogiques que doit relever l’enseignement supérieur. Et ces enjeux se sont encore considérablement amplifiés au vu de l’urgence climatique et de la dégradation du contexte socio-économique. Au moins quatre défis doivent être relevés en priorité.

L’Université doit tout d’abord former des citoyennes et des citoyens amenés à vivre dans un monde en transition climatique et pour relever ce défi de la transformation radicale de notre société, il est indispensable que nos étudiantes et étudiants comprennent les causes et les implications de la transformation, développent des compétences et prennent conscience de leur capacité d’action, dans une approche interdisciplinaire. C’est ce qui amène nos autorités académiques à fixer dans les programmes de cours un socle minimum de connaissances et de compétences en la matière, quelle que soit la filière d’étude. On observe que les responsables de programme et les enseignants s’emparent progressivement de ce travail d’intégration d’acquis liés au développement durable dans différents cursus. L’institution les aide déjà dans cette tâche, mais elle doit amplifier sa mission d’accompagnement, tant les changements requièrent de la volonté, du temps et de la coordination.

Un autre défi qui nous attend est de veiller à ce que les différents sites de l’université se développent comme des lieux offrant des expériences d’apprentissage multiples et complémentaires. Les étudiants, en nombre toujours croissant, sont en demande d’espaces de rencontre et de partage. Nous devons concevoir des lieux d’apprentissage diversifiés, adaptés à leur demande et à toutes les formes d’enseignement. Les travaux d’aménagement d’un nouveau learning center ont débuté cet été, qui complètera le réseau existant. C’est une excellente nouvelle. Mais il faut poursuivre la réflexion sur les espaces d’apprentissage en vue d’une utilisation optimale de nos locaux et d’un programme de rénovation d’espaces qui soit cohérent par rapport à cela. L’Université, dans toutes ses composantes, doit s’emparer de cette problématique sans retard, reprendre le travail qui avait été initié avant la crise sanitaire, en tirer les leçons et être créative dans la gestion des espaces.

Au défi de la diversité des lieux d’apprentissage, s’ajoute désormais le défi de repenser le rythme de l’année académique au niveau de la Fédération Wallonie Bruxelles. Depuis quelque temps, des voix s’élevaient pour dénoncer un calendrier académique ne donnant plus entière satisfaction du point de vue de sa pertinence pédagogique. La réforme des rythmes scolaires dans l’enseignement obligatoire, qui va impacter dès cette année, la vie de nombreuses familles, a créé un momentum propice à la réflexion quant à une nouvelle organisation temporelle de l’année académique. Ici aussi, il s’agit d’une problématique qui a déjà été entamée et qui concerne l’université dans toutes ses composantes et dans sa relation avec de multiples acteurs.

Ce qui m’amène à épingler un quatrième défi, qui doit nous animer. C’est précisément le défi d’une université en interaction croissante avec de nombreux partenaires : avec des acteurs culturels ou économiques pour l’organisation de stages professionnels par exemple, en lien étroit avec des universités européennes, notamment celles de l’alliance Circle U, avec les autres universités de la Fédération Wallonie Bruxelles, et plus particulièrement avec l’Université Saint-Louis, en interaction aussi, de plus en plus soutenue, avec les Hautes Écoles. La mise en œuvre de la Réforme de la formation initiale des enseignants en septembre 2023 est à cet égard une occasion unique de resserrer encore plus les liens avec des partenaires de longue date.

Ce dernier défi explique en bonne partie la détermination de notre université de développer ses partenariats et d’approfondir son ancrage régional et international.

Au niveau de notre communauté, nous le faisons notamment au travers de notre projet de fusion avec l’USLB, qui arrime encore plus la présence de l’UCLouvain en Région Bruxelloise, dans le domaine des sciences humaines.

Les équipes administratives des deux universités préparent très concrètement cette fusion de manière à être prêtes en septembre de l’année prochaine. On espère bien qu’il le feu vert décrétale sera donné à temps.

À côté de sa présence à Bruxelles, l’UCLouvain entend aussi se développer en Région wallonne, par ses campus, son parc scientifique et ses hôpitaux universitaires. Notre ambition est notamment d’intensifier notre développement dans le Hainaut et plus particulièrement à Charleroi, dans le cadre du projet de réaménagement du GHDC, qui se reconstruit en périphérie de la ville.
Charleroi, capitale sociale de la Wallonie, présente aujourd’hui la particularité d’accueillir 3 fois moins de diplômés universitaires que la moyenne belge. Depuis quelques années, son offre de formation d’enseignement supérieur est en forte croissance, particulièrement dans ce quartier du haut de la ville où nous souhaitons précisément nous implanter.

Pour l’UCLouvain, cet investissement est largement « stratégique » : il permet de répondre à certains besoins critiques pour la région en agissant en complémentarité – et non en concurrence – avec les acteurs locaux et avec la volonté de s’intégrer aux écosystèmes existants, ce qui me parait assez indiqué dans l’optique d’accroître la cohérence entre notre offre d’enseignement et les spécificités de la demande locale.

À commencer par la possibilité d’étendre notre partenariat avec la HELHA, qui compte 800 étudiants sur Charleroi, avec laquelle nous envisageons une proximité d’implantation et de coopération. 
La perspective réelle pour l’UCLouvain d’obtenir des Fonds Européens pour financer notre implantation sur place au travers des programmes de soutien du Feder et du FSE renforce l’opportunité de cette ambition.

Outre son déploiement en FWB, notre université continue aussi son rayonnement à l’international avec notamment le développement de notre réseau européen Circle U. avec les universités d’Aarhus (au Danemark), de Belgrade, d’Humboldt à Berlin, du King’s college à Londres, d’Oslo, de Paris-Cité, de Pise et de Vienne.

  • Circle U. ce n’est plus un projet, c’est devenu une réalité. A peine 18 mois après le démarrage des premiers travaux, 46 chaires académiques ont été lancées (dont 6 à l’UCLouvain) , plus de 300 membres du personnel des différentes universités sont connectés à une plateforme collaborative,5 premières écoles d’été ont été lancées avec des thématiques assez actuelles qui ont attiré plus de 800 candidatures d’étudiantes, différents programmes de Co-diplomations sont en préparation et de nombreuses initiatives ont été lancées pour favoriser la mobilité des chercheurs ainsi que nombreux séminaires, des évènements d’incubation d’idées.
  • Bref, ces toutes premières initiatives créent un maillage vraiment intéressant qui annonce d’autres projets de collaboration organisationnelle plus ambitieux dans un avenir très proche, notamment dans les domaines de l’enseignement et de la recherche.

Sur le plan de la recherche, précisément, l’année écoulée a été également très riche.

Le dynamisme des chercheurs de l’UCLouvain ne s’est pas démenti ces derniers mois et s’est traduit notamment par le lancement de nombreux nouveaux projets de recherche. En octobre, ce sont 120 nouveaux mandataires FNRS, aspirants, chargés de recherche ou chercheurs qualifiés qui entameront leur projet à l’UCLouvain, un nombre record pour notre université. Au niveau européen, l’excellence de nos jeunes chercheurs est également reconnue avec l’obtention de 4 nouveaux starting grants du prestigieux European Research Council (ERC). Ce dynamisme de la recherche fondamentale a vocation à fournir un terreau dans lequel pourront se développer les innovations technologiques et sociétales susceptibles de répondre aux grands enjeux auxquels notre société est confrontée.

Depuis plusieurs années, nous n’avons cessé de souligner l’importance pour notre région de soutenir massivement cette recherche stratégique située en amont des innovations technologiques. L’institut interuniversitaire Welbio dans le domaine des sciences biomédicales a validé le modèle de soutien à des équipes de recherche sélectionnées sur l’excellence de leurs projets et résultats. La Région Wallonne a pris conscience de l’importance de ce modèle dans un domaine, celui de la pharmacie et des biotechnologies, qui est un pilier économique de notre région. Les chercheurs de l’UCLouvain y jouent un rôle de premier plan puisque 19 d’entre eux sont soutenus par Welbio. On ne peut que se réjouir du fait que la Région Wallonne a décidé d’étendre le modèle de Welbio aux Sciences Exactes avec la création de l’institut Wel-Tech où nous comptons bien y jouer le même rôle. Dans d’autres domaines clefs pour le développement économique de notre région tels que l’intelligence artificielle ou la cybersécurité, nos chercheurs assurent également le leadership dans les initiatives inter-universitaires soutenues par la Région tels que l’institut TRAIL pour l’intelligence artificielle ou le projet Cyberwal pour la cybersécurité. L’ouverture inter-universitaire et le critère de l’excellence scientifique dans la sélection des projets soutenus sont des conditions essentielles au succès et à la viabilité de ces initiatives.

L’année 2022 a également vu la concrétisation d’un plan de collaboration ambitieux avec la province de Brabant wallon, appelé BW2030 et réunissant la province, in BW, Invest.BW et l’UCLouvain, avec l’objectif de maintenir et amplifier le rôle moteur du territoire du Brabant Wallon pour l’économie de la Wallonie dans le domaine de la recherche. Concrètement, il s’agit de développer des projets ambitieux alignés sur 7 grands axes qui comprennent notamment le numérique, les sciences du vivant, l’énergie et les matériaux et l’agriculture durable. Les liens entre l’université et les entreprises qui l’entourent, en particulier celles qui sont présentes dans nos parcs scientifiques seront cultivés et amplifiés. C'est une initiative importante car elle témoigne aussi de l’attachement de la province à cette université. Ces investissements témoignent de notre mobilisation et de notre motivation à agir sur les différents sites et régions ou l’UCLouvain est implantée.  
C’est aussi le cas sur notre site de Woluwe où de grands projets sont en marche.

Il y a un an quasi jour pour jour a débuté le chantier de l’Institut de Psychiatrie intégré qui va rassembler sous un même toit les services de psychiatrie adulte de la Clinique Sanatia et de Saint-Luc, ainsi que les activités de psychiatrie infanto-juvénile de Saint-Luc. La mise en service du bâtiment est prévue fin 2023.

Autre chantier officiellement inauguré le 15 juin, l’Institut Roi Albert II qui va réunir l’ensemble des activités oncologiques et hématologiques de Saint-Luc, tant adultes que pédiatriques– ce qui est assez unique ! – dans un même bâtiment. De ce côté-là, on attend la fin du chantier pour début 2024.

Dans les coulisses, c’est un autre projet qui est en cours de préparation : celui de la construction d’une grande nouvelle tour d’hospitalisation et de la rénovation du socle dit « médicotechnique » de la tour actuelle. Il s’agit grosso modo des 4 niveaux inférieurs de l’hôpital actuel qui seront en grande partie conservés – mais transformés – dans le Saint-Luc du futur, qui sera aussi celui de la reconstruction / rénovation des cliniques. Un objectif a 10 ans où toute une série de leviers ont été définis pour atteindre les objectifs, totalement en phase avec le rôle majeur que joue notre hôpital académique dans son écosystème.

Vous l’aurez perçu au travers ces quelques exemples, les projets qui attendent l’Université au cours des 12 prochains mois sont forts, créatifs et ambitieux. 

Le fait de disposer de moyens adaptés est évidemment une condition nécessaire à leur réalisation et notre université et nos cliniques travaillent activement à les obtenir. Mais ça ne suffira pas. Leur mise en œuvre nécessitera aussi la pleine implication de notre communauté. Dans un contexte caractérisé par un manque structurel de moyens, qui reste assez endémique pour l’enseignement supérieur, en dépit des efforts de refinancement réels des dernières années, votre implication, votre intelligence, votre enthousiasme, votre sens de la collaboration, votre créativité et votre agilité, seront nécessaires. Elles ont toujours forcé l’admiration, notamment la mienne et nous font sentir que travailler dans cette université, ce n’est pas un travail ordinaire. On œuvre à préparer l’avenir et pour le bien commun. Et cela a toujours pu créer les conditions de la confiance pour mener l’UCLouvain sur le chemin de la réussite.  C’est encore de cela dont nous auront besoin cette année et que je permets dès lors de solliciter une fois encore aujourd’hui auprès de vous au l’aube de cette nouvelle année académique.