Vient de paraître ! Assessing Content and Language Integrated Learning (CLIL) in French-speaking Belgium: linguistic, cognitive, and educational perspectives

Les Cahiers de Recherche du Girsef n° 109.
Auteurs : Philippe Hiligsmann, Luk Van Mensel, Benoît Galand, Laurence Mettewie, Fanny Meunier, Arnaud Szmalec, Kristel Van Goethem, Amélie Bulon, Audrey De Smet, Isa Hendrikx, Morgane Simonis

Résumé : 

"Évaluer l’enseignement en immersion en Belgique francophone : approches linguistique, cognitive et éducative"

En ces temps de mondialisation, les politiques favorisent de plus en plus le multilinguisme en tant que fort atout social et économique. L’enseignement d’une matière par l’intégration d’une langue étrangère (EMILE), couramment appelée enseignement en immersion, est vu comme un moyen de promouvoir le multilinguisme dans l'enseignement. Il s’agit une méthode didactique dans laquelle les matières scolaires sont enseignées dans une langue cible différente de celle de la langue de l'enseignement général. En Communauté française de Belgique, les écoles ont été autorisées à dispenser l'EMILE en néerlandais, en anglais ou en allemand depuis 1998. A ce jour, nous ne disposons cependant que d'une vision fragmentaire et incomplète de l’impact de l'EMILE sur l'acquisition d'une langue seconde/étrangère. Le but de cette contribution est triple : a) esquisser les particularités de l'EMILE en Belgique francophone ; b) donner un aperçu des recherches menées sur l'EMILE en Belgique francophone ; et c) présenter les objectifs d'une étude longitudinale et interdisciplinaire menée par l'Université catholique de Louvain et l'Université de Namur.

La recherche sur l’immersion en Communauté française de Belgique en donne une image plutôt positive, même si certains résultats sont incohérents ou demandent à être nuancés. (1) Les études ne montrent pas d'effets négatifs sur l'acquisition du français, (2) les compétences des élèves EMILE dans la langue cible semblent plus élevées que celles des élèves de l’enseignement traditionnel – sans toutefois atteindre le niveau des natifs, en particulier pour ce qui concerne les compétences productives – et (3) l’EMILE semble être associé positivement à l'ouverture des élèves envers l'autre langue et sa communauté. Cependant, ces études souffrent d’un certain nombre de lacunes. Tout d’abord, celles-ci concernent un (très) petit groupe de participants, provenant souvent uniquement d'une même école. Pour pouvoir dégager des implications sur l’EMILE en général, un échantillon plus vaste comportant des élèves de différentes écoles est requis, et ce, afin de prendre en compte les différents facteurs contextuels et pédagogiques impliqués dans l’enseignement en immersion. Ensuite, bon nombre des études omettent d’adopter une approche intégrée (fortement défendue par les promoteurs de l’EMILE) et se concentrent uniquement sur un aspect spécifique - souvent linguistique - de l'EMILE. De plus, de nombreuses caractéristiques des élèves et des enseignants (comme le statut socio-économique, le QI, la formation académique,...) ne sont généralement pas prise en compte dans les études disponibles. De ce fait, la comparabilité des échantillons en EMILE et non-EMILE reste très incertaine. Par conséquent, on ne peut pas exclure l'hypothèse selon laquelle les différences observées sont dues à des différences initiales non-mesurées entre les élèves qui fréquentent les classes EMILE et non-EMILE. La limitation la plus importante de nombreuses études réalisées jusqu'à présent est cependant l'utilisation d'une approche transversale pour comparer les élèves EMILE et non-EMILE. Alors qu'une telle approche nous fournit des informations précieuses sur les différences potentielles entre les deux groupes au moment du test, elle ne permet pas de vérifier si ces différences peuvent être attribuées à l'expérience EMILE ou à d'autres facteurs possibles. Afin de se prononcer sur cette question, un plan de recherche longitudinale serait plus approprié.

L’étude interdisciplinaire actuellement en cours à l’Université catholique de Louvain et l’Université de Namur vise précisément à dépasser certaines de ces limites et à apporter une contribution empirique et théorique au débat en cours sur le multilinguisme en général et l’enseignement en immersion en particulier.

Publié le 31 août 2017